*Blatter veut-il diriger le monde?
*IL A MIS LA FIFA AU SERVICE DE PUISSANTS LOBBYS POLITIQUES ET FINANCIERS
Blatter veut-il diriger le monde? (1e partie)
Depuis le 8 juin 1998, Blatter «coache» avec vigueur la Fifa en ayant toujours à ses côtés une équipe dont le principe fondamental est d’être à sa totale dévotion.Après la réunion du Comité exécutif de la FIFA à Johannesburg, son président, Joseph S. Blatter, a tenu, lundi 7 juin 2010, une conférence de presse pour annoncer: «Je suis heureux en tant que président de la Fifa car aucune de nos 208 associations membres ne demande le moindre changement interne à la FIFA.» L’unanimité de façade et la bonhommie apparente du président de la Fifa ne peuvent occulter un certain nombre de questionnements sur le devenir de la Fifa, son fonctionnement, sa gestion et son évolution, particulièrement, depuis l’arrivée de Blatter.
Fondée le 21 mai1904 à Paris par sept pays européens, la Fédération internationale de football association (Fifa) «est une association de fédérations nationales» qui, jusqu’en 1909, ne comptera que des associations européennes. Les premiers membres non-européens seront l’Afrique du Sud en 1910, l’Argentine et le Chili en 1912, les Etats-Unis en 1914. La première Coupe du Monde ne sera organisée qu’en 1930. La Fifa, qui a pour vocation «de gérer et de développer le football dans le monde», est, aujourd’hui, une organisation gigantesque qui regroupe 208 fédérations nationales. Depuis 1932, son siège est situé en Suisse. Connu à travers le monde, le sigle Fifa est l’un des plus bel exemple de ce que la mondialisation est capable de produire en matière d’hégémonismes économique et culturel. De par ses statuts, la Fifa est supposée être une «association à but non lucratif» alors qu’en réalité, elle, s’apparente bien plus à une véritable multinationale, avec un budget officiel d’environ 200 milliards de dollars, qu’à une banale fédération internationale sportive. La Fifa n’a connu, depuis sa création, que des présidents européens à l’exception du Brésilien, Joao Havelange, de 1974 à 1998, année où le Suisse Joseph Sepp Blatter prendra la relève avec «une main de fer dans un gant de velours». Réélu en 2002 et 2007, Blatter brigue un quatrième mandat en 2011 pour «terminer le travail» formule qu’il reprend à la veille de chaque nouveau mandat. Selon plusieurs observateurs, les rênes du sport le plus populaire au monde sont tenues par les vingt-quatre membres du comité exécutif qui gèrent chaque année, sans réel contre-pouvoir et dans l’opacité, plusieurs centaines de millions de dollars. Aux salaires confortables, des membres de l’exécutif, viennent s’ajouter d’importants frais personnels non imposables. Quant au président, Joseph-Sepp Blatter, le mystère est total sur ses différents émoluments. David Yallop, auteur de «How they Stole the Game» (Comment ils ont truqué la partie), affirme que, pour faire réélire Blatter, vingt membres influents de la Fifa auraient perçu plus d’un million de dollars de pots-de-vin. Il ne sera pas le seul à dénoncer le système Blatter. La déposition signée du vice-président de la Fédération somalienne, Mohiédine Hassan Ali, deux mois après l’élection de Blatter à la tête de la Fifa, est encore dans toutes les mémoires: «Nous avons accepté de l’argent pour voter au nom de la Somalie en faveur de Blatter, lors de l’élection présidentielle de Paris.» Ou encore son autre déclaration à la presse le 27 février 2002 lorsque, revenant sur l’élection de Blatter à Paris en 1998, il déclare: «L’argent a été fourni par le milliardaire Mohamed Ben Hamman, (Qatari, président de la Confédération asiatique) qui a payé les billets d’avion et la note d’hôtel ainsi que l’argent de poche pour quatre officiels de la Fédération somalienne. Je l’ai vu de mes propres yeux. La nuit précédant l’élection, a-t-il souligné, des gens faisaient la queue à l’hôtel Méridien Montparnasse pour recevoir de l’argent». Et, d’ajouter: «Certains m’ont dit qu’ils avaient reçu 5000 dollars avant le vote et la même somme le jour suivant. Après la victoire de Blatter, j’ai fait ma propre enquête et j’ai découvert que 18 participants africains au vote avaient accepté de l’argent pour voter pour Blatter.» Pourtant, malgré l’achat de bulletins de vote, Blatter ne sera élu qu’avec une seule voix d’avance. Ce sera celle d’Haïti dont les délégués étaient absents! Qu’importe l’ami de Jack Warner, président de la Confédération de football Amérique du Nord, centrale et Caraïbes (Concaf), Neil Ferguson le fera à leur place, sans aucun mandat officiel et en contradiction totale avec le règlement de la Fifa.
Feu Farah Addo, l’ancien président de la Fédération nationale de football de Somalie et vice-président de la CAF, dénoncera, aussi, une tentative de corruption de la part de l’entourage de Blatter. Cela lui vaudra une rapide et brutale réaction de la commission de discipline de la Fifa qui, le 2 août 2004, le bannira du monde du football pour une durée de 10 années. Le CIO s’empressera de lui retirer à Athènes, le 7 aout 2004, son accréditation aux Jeux olympiques d’Athènes, en qualité de président du CNO de Somalie, en invoquant «la nécessité de protéger les intérêts du Mouvement olympique». Après le décès de Farah Addo, le 19 novembre 2008, Blatter rend public un communiqué où le cynisme l’emporte sur la compassion: «Son engagement pour notre sport mais aussi au sein du mouvement olympique avait fait de lui un acteur important de nos institutions communes. Son rôle dans l’arbitrage africain et dans de nombreuses commissions de la Fifa restera dans les pages d’histoire du football.»
Le 20 mai 2009, Mohamed Ben Hamman, président de la Confédération asiatique de football depuis août 2002 et membre de l’exécutif de la Fifa depuis 1996, l’un des deux indéfectibles piliers (avec Jack Warner) sur lesquels s’appuie Blatter depuis 1998 pour se maintenir à la présidence de la Fifa, dénonce la corruption régnante dans l’institution et ses scrutins. Des méthodes peu différentes de celles qui avaient permis l’élection de Blatter en 1998 et auxquelles Ben Hammam lui-même n’était pas étranger. Réélu de justesse aux dernières élections confédérales face à son adversaire de Bahreïn, Cheik Salman Ben Ibrahim Al-Khalifa, appuyé dit-on par Blatter, Ben Hammam déclare: «Je pense que cela affecte le sport; je pense que c’est le devoir de tous d’enquêter sur ces soupçons; qu’on me blâme s’il s’avère que j’ai tort. En attendant, j’invite, que dis-je, j’adjure la Fifa d’aller de l’avant et d’enquêter…» En guise de réponse, Blatter estime, fin mars 2010, qu’un soutien arabe à sa candidature «passe par l’Arabie Saoudite, un pays puissant et influent dans tous les domaines, y compris sportif». Après l’Arabie Saoudite, Blatter se rend en Jordanie, puis en Israël, montrant par là tout son savoir-faire pour tirer ce qui l’arrange des uns et des autres. Loin d’être dupe, le prince Sultan Ben Fahd Ben Abdel Aziz, président de la Fédération saoudienne de football, a réagi avec prudence: «Il est normal que chaque candidat cherche à consulter ses amis dans le monde pour obtenir leur soutien, mais pour le Royaume (saoudien), cela est encore prématuré». Blatter s’attend à faire face à plusieurs prétendants mais qu’importe, il est si difficile de renoncer à la Fifa à 75 ans passés et après 35 ans de présence! A l’heure actuelle, seule l’Uefa peut jouer un rôle important pour le remplacement de Blatter. Les candidatures de Platini et de Beckenbauer, ont des chances de s’imposer, face à ce système fermé aux intérêts immenses et aux réseaux multiples. Michel Platini, à condition d’échapper à l’ombre envahissante de Blatter, peut mieux réussir. Durant sa carrière, il a grimpé l’ascenseur social de Nancy à Saint-Etienne, puis à la Juventus. Comparée à la Fifa de Havelange ou de Blatter, l’Uefa n’a pas à rougir de son fonctionnement et de son rapport à l’argent tant avec Johansson que Platini.
Le célèbre journaliste d’investigation, le Britannique Andrew Jennings dresse un portrait édifiant de Blatter, d’où il ressort notamment «le sens du clan, le goût du secret, du pouvoir et de l’argent, et ne reculant devant aucun obstacle». Selon ce journaliste, les commissions occultes, les élections truquées, les marchés suspects et les intérêts juteux sont la spécialité de l’actuel président de la Fifa. Pour Jennings, l’évolution de cette fédération est inséparable, ces dernières décennies, de la carrière de Blatter pour qui le football est d’abord un spectacle sportif dont il convient de développer l’audience et la pratique avec pour principal objectif de multiplier ses faramineuses recettes grâce aux droits de télévision. Selon Wladimir Andreff, éminent professeur en sciences économiques, à Paris – Sorbonne, le marché mondial de tous les biens et services sportifs est estimé à environ 600 milliards d’euros, dont 250 milliards pour le football, 150 milliards pour les articles de sport et 60 milliards pour les droits de retransmission télévisée d’événements sportifs. Dans la plupart des pays développés, l’économie du sport s’établit entre 1,5% et 2% du PIB. Comme on le devine, les intérêts sont immenses et les tentations très grandes. Blatter a coutume de dire, avec raison, que le football est, pour le sport, la première religion dans le monde. Faut-il encore convenir, pour ceux qui y voient un opium du peuple, que cette drogue reste, d’abord, un luxe des pays riches. Les valeurs éthiques et les grands principes mis en avant lors de déclarations publiques, d’opérations médiatiques ou d’assemblées, au style brejnévien, n’ont pour véritable impératif que de renforcer le pouvoir et la mainmise de Blatter et de son entourage sur le football. Un véritable théâtre d’ombres où chacun s’attache, d’abord, à garder ou à renforcer sa zone d’influence et ses privilèges personnels en confondant autonomie et immunité.
L’on ne peut saisir correctement l’évolution, le fonctionnement et la gestion de la Fifa, ces dernières années, sans se pencher sur la personnalité de M.Blatter, son évolution au sein de la Fifa et sans chercher à comprendre comment il agit et avec qui? Autant de clés qui aident à expliquer sa toute-puissance.
1-Du hockey sur glace à la présidence de la Fifa
Joseph «Sepp» Blatter, né le 10 mars 1936 à Viège (Suisse) est, depuis 1998, le huitième président de la Fifa. Diplômé de commerce et d’économie politique à HEC Lausanne, il commence sa carrière de responsable sportif, en 1956, en tant que secrétaire général de la Ligue suisse de hockey sur glace. Faire carrière dans le football alors que sa passion est le hockey sera son premier tour de force. Chargé des relations publiques pour les montres Oméga et ensuite salarié du groupe Adidas, il se voit attribuer en 1975, par l’ancien président de la Fifa Joao Havelange, le poste de directeur des programmes de développement où il se signale par la mise en place de projets tels que: les Championnats du Monde de football féminin, les Championnats du Monde juniors et le Football en salle. C’est durant les années 1980 que Joseph Blatter commence une ascension qui le mène jusqu’à la plus haute marche de la Fifa. Secrétaire général en 1981, il sera nommé en 1990 directeur exécutif avec la haute main sur plusieurs Coupes du Monde. Il se fera rapidement remarquer par sa faculté à multiplier les recettes de la Fifa et sera à l’origine du premier contrat avec Coca-Cola. Sous l’aile de João Havelange, il s’informe beaucoup et apprend très vite au point d’organiser en 1994 une fronde contre lui. Pour nombre d’observateurs, Havelange s’est gardé de réagir contre Blatter et a décidé de passer la main par crainte de voir ce dernier révéler tout ce qu’il sait sur «La grande famille du football». Lennart Johansson, président de l’Uefa, fort du soutien de sa confédération et de la quasi-totalité des pays africains, faisait figure de favori pour lui succéder. Le Suédois estime que «la Fifa a besoin d’être publiquement responsable de ses actes, d’être ouverte envers ses membres, les joueurs et la presse. (…) Nous avons besoin de choix plus transparents et pertinents vis-à-vis de nos partenaires. Le comité exécutif doit être consulté afin d’éviter les situations très douloureuses qui mettent aujourd’hui la Fifa en danger». Une profession de foi loin d’être au gout de «la famille» qui pousse Havelange à faire volte-face et à soutenir Blatter jusqu’à sa victoire en juin 1998. Il en sera de même pour les voix africaines qui feront fi de leur engagement avec Lennart Johansson, pour rejoindre massivement Blatter. Depuis le 8 juin 1998, Blatter dirige avec vigueur la Fifa en ayant toujours à ses côtés une équipe dont le principe fondamental est d’être à sa totale dévotion.
Relatant les débuts de sa carrière et les circonstances de son arrivée à la Fifa le quotidien français Libération écrit dans son édition du 06-07-2006: «Des débuts de Maître Blatter, on retiendra surtout le voile pudique que revêtent aujourd’hui les circonstances de son arrivée à la Fifa en 1975. Officiellement, le jeune diplômé en commerce a occupé, avant de rejoindre la multinationale du ballon rond, Un poste de relations publiques dans le secteur privé»… En fait de secteur privé, Blatter était salarié chez Adidas. Difficile de rappeler cette période et de soutenir l’impartialité d’un homme qui a conclu, en 2005, un partenariat qui lie la Fifa et Adidas jusqu’en 2014 pour 350 millions de dollars. Libération continue: «Blatter président, c’est un vrai roman. On passe sur les ´´jongles´´ qui le feraient habiter Appenzell, paradis fiscal suisse, pour diminuer un impôt… payé par la Fifa. On passe aussi sur les dribbles chaloupés entre ses collaborateurs, qu’il élimine un à un pour former un cabinet à peine shadow. On passe encore sur les une-deux avec les membres de la Fifa, auxquels il consentirait des avantages pécuniaires propres à faire taire toute rébellion. Reste le passement de jambe autour du système de corruption organisé à la Fifa depuis 1975, au coeur duquel la société ISL, fondée par Horst Dassler, patron d’Adidas, aurait joué un rôle central». Un mélange des genres dont Andrew Jennings retrace la genèse en une phrase dans son ouvrage Carton Rouge, lorsqu’il cite Horst Dassler, patron d’Adidas: «On va installer ce type (Blatter) dans la place, il est bien, il est des nôtres.»
En 1982, Horst Dassler, patron d’Adidas, qui équipe 80% des athlètes de haut niveau, propose à la Fifa et au CIO de transformer leurs compétitions en support publicitaire, via les maillots, les stades, etc. Une idée judicieuse qui se révèle extrêmement juteuse. Pour exploiter ce filon, Dassler fonde, à côté d’Adidas, une nouvelle société: ISL (International Sport and Leisure) qui sert d’intermédiaire entre le monde du sport et celui des entreprises. En juillet 1996, ISL est déclarée par la Fifa lauréate des droits TV des Coupes du Monde 2002 et 2006 et en 1997 des contrats de marketing pour les mêmes épreuves. ISL s’était engagée à verser 9 milliards de francs suisses à la Fifa d’ici à 2006 et espérait réaliser, pour elle-même, plus de 1 milliard de profits sur la revente de ces droits. Dès juillet 1998, elle parvenait à vendre pour 60 millions de dollars, une première tranche des droits TV à Globo, chaîne de télévision brésilienne proche de l’ancien président de la Fifa M.J.Havelange et de son gendre, Ricardo Teixeira, indéboulonnable président de la Fédération brésilienne de football et plusieurs fois condamné. A cette occasion, 22 millions devaient être reversés immédiatement, par ISL, à la Fifa. Elle n’en verra jamais la couleur, pas plus que des autres sommes encaissées par ISL jusqu’à sa faillite le 21 mai 2001. Une mésaventure qui n’empêchera pas le Comité exécutif de la Fifa d’attribuer encore à la chaîne TV Globo, les droits de diffusion sur le territoire brésilien des Coupes du Monde 2010 et 2014. Selon plusieurs journalistes d’investigation: «ISL aurait servi, jusqu’à sa liquidation en 2001, à détourner vers des comptes secrets des sommes considérables qui auraient dû revenir à la Fifa». La BBC diffuse, le 11 juin 2006, un reportage où apparaissent d’anciens employés d’ISL confirmant le versement entre 1982 et 2001 de pots-de-vin aux dirigeants de la Fifa. Blatter refuse de participer à ce reportage, il nie les faits et met à l’index les équipes de l’émission d’informations BBC Panorama qui répliquent, le 10 décembre 2006, par un autre reportage relatif à l’affaire ISL/Fifa et à des irrégularités dans les ventes des billets lors de la Coupe du Monde de 1998. BBC Panorama poursuit sa série sur la gestion opaque de la Fifa avec un nouveau reportage diffusé le 22 octobre 2007. En moins de trois ans ISL, dont la valeur avait été évaluée à 12 milliards de francs par la prestigieuse banque suisse UBS Warburg, sera emportée par la tempête boursière comme une éphémère entreprise. L’on ne saura jamais les raisons profondes qui ont concouru à cette disparition. L’on restera sur notre faim, d’autant qu’ISL exerçait pratiquement un monopole sur un marché qu’elle avait créé et en croissance de 75% l’an depuis une décennie… Difficile d’admettre un tel naufrage. Plusieurs articles de presse rédigés par d’éminents journalistes feront part de commissions occultes, de marchés suspects, d’élections truquées et d’intérêts juteux. Les intérêts immenses qui sont en jeu, les réseaux en place qu’ils soient économiques, financiers ou extra sportifs se drapent, chaque fois, avec l’autonomie sportive pour empêcher une réelle évaluation et un sérieux contrôle afin de perpétuer la répartition de la manne et sauvegarder les intérêts de «la grande famille du football». Comme le signale à juste raison H.Kharroubi, dans le Quotidien d’Oran du 12 juin 2010, réélire Blatter «sans qu’il soit procédé à un audit sans complaisance de sa gestion, des finances de la Fifa heurtera à coup sûr les esprits attachés au principe qu’il est indispensable que le sport roi de la planète soit débarrassé de ce chancre qu’est le mercantilisme outrancier auquel il donne lieu». 2- La famille Blatter et le sport
La famille Blatter aime les instances sportives. Depuis 1998, Joseph Blatter dirige la Fédération internationale de football (Fifa), dont le siège est à Zurich. Il est également membre du Comité international olympique (CIO). Son frère Marco, est directeur de Swiss Olympic, l’association faîtière des clubs sportifs en Suisse. Après la faillite d’ISL, la Fifa récupère la gestion directe des droits télé, 1,2 milliard d’euros, via la société Infront Sport & Media, entreprise de marketing basée en Suisse. C’est, Philippe Blatter, neveu du président de la Fifa, qui sera intronisé à la tête de cette entreprise chargée de commercialiser l’ensemble des droits media des éditions 2002, 2006 et 2010 de la Coupe du Monde de football (en utilisant pour 2010 HBS société détenue par Infront Sports & Media, spécialiste de la gestion de droits sportifs, chargée d’exploiter les captations, retransmissions et distributions d’images vidéo de grands événements sportifs). L’on retrouve également en Afrique du Sud, Sport Five dont l’ancien directeur général adjoint n’est autre que Jérôme Valcke l’actuel secrétaire général de la FIFA.
Le président Mouamar El Gueddafi a traité récemment la Fifa de mafia et a souligné que «la politique corrompue suivie par cette organisation corrompue doit être combattue et nous allons la combattre régulièrement».
Déjà en mai 2009, il n’avait pas manqué de souligner que «la Fifa ne doit pas être la propriété d’un groupe de pays déterminés, ni d’une partie quelconque, ajoutant que personne n’a le droit de monopoliser la Fifa, de l’exploiter ou de l’orienter à sa guise comme c’est le cas aujourd’hui».Selon le chef de l’Etat, «le sport est passé d’une activité individuelle et collective de l’humain pratiqué par toutes les masses à une activité lucrative monopolisée par une élite dominante et riche». Devant tous ces scandales et dénonciations, l’on est fondé à ne pas s’étonner d’apprendre que du 2 au 4 mai 2010 s’est tenu au Ritz Carlton de South Beach à Miami la 8e édition de la conférence annuelle consacrée aux paradis fiscaux et à la manière de percer leurs secrets. Un symposium sur les paradis fiscaux et la prévention de la criminalité financière qui a fait une bien mauvaise publicité à la Fifa en consacrant un atelier sur «la corruption dans le football: le monde secret de la Fifa: pots-de-vin, fraude électorale et les scandales de la billetterie révélés par le journaliste et réalisateur anglais, Andrew Jennings».
Pour expliquer ces accusations récurrentes, les spécialistes mettent en avant le statut juridique de la Fifa, qui n’a pas changé depuis sa création en 1904. De la taille d’une multinationale brassant des milliards de francs, la Fifa est pourtant une simple société privée, qui échappe au contrôle des actionnaires ou des autorités… Tôt ou tard, il se trouvera des hommes et des femmes pour demander si la Fifa, forte de son indépendance, peut s’autoriser tous les comportements et n’importe quelle dérive sans aucun véritable contrôle. Tôt ou tard elle aura à rendre des comptes de façon publique. A l’exemple des fortunes saisies sur les comptes de certains dictateurs, la lumière devrait être faite sur l’importance et la destination des sommes faramineuses évaporées des comptes de la Fifa. N’ayons pas peur des mots! L’exigence de contrôle et d’une saine organisation du football mondial se font grandement sentir du côté de la Fifa. La morale et l’éthique sportives l’exigent, le devenir et le développement du football l’imposent. La marchandisation à outrance du sport est devenue synonyme de multiples dérives. Argent, corruption, dopage, commerce des jeunes talents, surcompétitions, déréglementation… autant de phénomènes qui atteignent progressivement l’ensemble des niveaux et des pratiques, mettant gravement en danger l’éthique sportive. Comment stopper une telle dérive? Quels sont les principaux défis à relever? Doit-on se doter de nouvelles règles internationales pour préserver l’éthique sportive? Faut-il mettre en place de nouvelles régulations? Quelle gouvernance pour le sport? Quelles seront les conséquences du point de vue politique, économique, culturel et sportif de la politique actuelle de la Fifa? Quelles relations doivent guider le sport et la politique, le sport et l’argent?
3-Blatter face à ses secrétaires généraux: de Michel Zen-Ruffinen, à Jérôme Valcke.
Michel Zen-Ruffinen, directeur de la division juridique de la Fifa de 1986 à 1996 et secrétaire général de la Fifa de 1996 à 2002, porte plainte contre son compatriote Blatter, en mai 2002, pour détournement de fonds: 550 millions d’euros auraient disparu des caisses. Zen- Ruffinen a présenté un rapport détaillé et confidentiel de 21 pages aux membres du Comité exécutif de la Fifa dans lequel il signale des irrégularités systématiques, des paiements illégaux, des cas de violation de statuts et de favoritisme. De même, Zen-Ruffinen souligne les rapports entre Blatter et certains membres de l’exécutif de la Fifa à l’exemple de Jack Warner, vice-président de la Fifa et président de la Confédération de football Amérique du Nord, centrale et Caraïbes (Concaf). Il affirme que le président de la Fifa a «constamment pris des décisions dans l´intérêt économique de Warner et de sa famille, qui sont contraires à ceux de la Fifa». Sepp Blatter, initiateur de l’organisation d’une compétition mondiale de football pour les moins de 20 ans, organise la première édition dans l’île de Trinité et Tobago. La construction des stades a été réalisée par l’un des fils de Jack Warner, alors que la partie restauration est revenue à son autre fils… le tout sans aucun appel d’offres. Pour la Coupe du Monde de 2010, Jack Warner se verra octroyer gracieusement 6000 tickets, avec un bénéfice net de 1 million d’euros.
Pour avoir dénoncé les dysfonctionnements au sein de la Fifa et critiqué publiquement «le système Blatter», il sera trainé en justice et contraint, un mois plus tard, à une démission négociée. Michel Zen-Ruffinen dira que les représentants des fédérations nationales, à l’Assemblée générale de la Fifa, avaient préféré préserver leurs intérêts plutôt que ceux de leur sport. Nul ne peut enfreindre la loi du silence au sein de «la grande famille du football».
En 1984, Jérôme Valcke, l’actuel secrétaire général de la Fifa, est journaliste à Canal+. Il sera nommé, en 1988, rédacteur en chef adjoint des informations. Grace au soutien de Charles Bietry, grand journaliste sportif français, il sera affecté au service des sports comme directeur adjoint. A ce poste, il se verra confier par Canal+ l’acquisition de droits divers liés au sport, pour l’Europe et l’Afrique. Connaissant les graves difficultés d’ISL, J. Valcke veut profiter de cette occasion pour reprendre, pour Canal+ et Vivaldi, les juteux droits de télévision. Pour y parvenir, il choisit d’exercer sur Blatter des pressions à la limite de la légalité. Dans une correspondance en date du 30 avril 2001, Blatter signale que «la position de la Fifa ne variera jamais sous la pression de quelque menace ou quelque tentative de chantage que ce soit… j’espère que vous comprenez que le contenu de votre message (d’annulation de vos menaces) prendra une importance fondamentale dans la perspective de toute future coopération entre la Fifa et Vivendi».
J. Valcke quittera, pour un court intermède, Canal+ pour le groupe Sport Five, en tant que directeur général adjoint. Parlant de cette période, il se définira comme «l’esclave de Jean-Claude Darmond». A la surprise générale, il sera recruté le 17 juin 2003 par le conseil d’administration de Fifa marketing AG, en qualité de directeur de la division Business de la Fifa. En charge de la négociation de tous les contrats commerciaux avec les partenaires de la Fifa, J.Valcke ne peut éviter un procès intenté contre la Fifa par MasterCard et Visa. Le 7 décembre 2006, un tribunal de New-York rend un jugement accablant contre la Fifa. Blatter met fin au contrat de J.Valcke et choisit de payer 90 millions de dollars pour convaincre Mastercard et Visa d’abandonner leurs poursuites. Comme pour ISL, ce procès, ne livrera pas tous ses secrets. Ce feuilleton n’est pas pour autant fini. En effet, Blatter réservera un autre coup de théâtre, en nommant le même J. Valcke au poste de secrétaire général de la Fifa en remplacement de Michel Zen-Ruffinen, ancien secrétaire général de la Fifa, qui avait porté plainte, comme nous l’avons signalé, contre Joseph Blatter pour détournement de fonds: 550 millions d’euros auraient disparu des caisses. Faut-il penser que les 90 millions de J.Valcke sont moins importants que les 550 millions avancés par Michel Zen Ruffinen? Une fois de plus, la loi du silence ne sera pas transgressée.
S’agissant de la Coupe du Monde sud-africaine, le président de la Fifa, a été soupçonné d’avoir arrangé un appel d’offres au bénéfice de son neveu, Blatter Philippe P-DG de la société Infront Sport & Media. En octobre 2007, La Fifa a nommé Match Hospitality comme détenteur exclusif des droits mondiaux du Programme d’hospitalité de la Fifa qui comprend la Coupe des confédérations de la Fifa, Afrique du Sud 2009, et la Coupe du Monde de la Fifa, Afrique du Sud 2010, la Coupe du Monde féminine de la Fifa, Allemagne 2011, la Coupe des confédérations de la Fifa 2013, ainsi que la Coupe du Monde de la Fifa, Brésil 2014. Match Hospitality AG, société domiciliée en Suisse devient, ainsi, le distributeur officiel et exclusif des forfaits appelés «packages» incluant les tickets d’accès aux stades, les billets d’avion et les séjours hôteliers pour la Coupe du Monde 2010. Au capital de la société Match Hospitality AG, figure notamment Infront Sports & Media AG, titulaire des droits télé de la Fifa, domiciliée elle aussi en Suisse et dont le P-DG n’est autre que le neveu de Blatter. Après avoir bénéficié du marché des «forfaits» Match Hospitality sous-traite la commercialisation de ses packages pour l’Europe continentale à Sport Five, que dirigeait Jérôme Valcke avant son arrivée à la Fifa et augmente d’autant les marges d’intermédiaires.
4- De la Coupe du Monde sud-africaine à la Coupe du Monde de la Fifa!
Organiser la Coupe du Monde en Afrique c’est rendre justice à ce continent et à l’Afrique du Sud membre de la Fifa depuis 1910. C’est bénéficier de l’auréole du monumental Nelson Mandela. C’est reconnaitre la faute de la Fifa qui avait refusé de reconnaitre la CAF à sa naissance, en 1959, en lui reprochant sa décision d’écarter le régime d’apartheid des compétitions africaines, c’est reconnaître qu’il a fallu attendre 1976 pour exclure des rangs de la Fifa, la fédération du régime d’apartheid.
L’organisation de la Coupe du Monde 2010 est d’abord l’expression de la fierté des Sud-Africains par rapport à leur pays. C’est d’abord un événement national et ensuite international, pour montrer une nation unifiée et ses capacités d’organisation. C’est l’image de l’Afrique du Sud
16 ans après 50 ans d’apartheid. Les Africains du Sud n’avaient, il y a 16 ans, aucune existence civique: pas de carte d’identité, pas de carte de vote. Le système apartheid les traitait comme des sous-hommes. Le pays était un véritable bunker. Peu de médias ont mis l’accent sur ce fait et signalé qu’à ce jour, 43% de la population vit avec moins de 2 dollars par jour. 90% des terres sont aux mains de 10% de Sud-Aricains. Il demeure toujours un contraste saisissant entre une minorité riche et la majorité écrasante des Townes Shepp (bidonvilles). Ces dix dernières années, 15% des Blancs ont quitté l’Afrique du Sud. C’est cette situation qui est, en grande partie, la cause de la criminalité et des tensions raciales sous-jacentes. Depuis l’arrivée du président Mandela, l’Afrique du Sud a accueilli nombre d’événements sportifs mondiaux: la Coupe du Monde de rugby en 1995, le Coupe du Monde de criquet en 2003, la Coupe du Monde féminine de golf (de 2005 à 2008). C’est l’image d’une Afrique qui n’est pas que misère, violence et coups d’Etat, loin s’en faut. Cette nouvelle Afrique du Sud fait partie aujourd’hui du G20, candidat sérieux pour un siège de membre permanent du Conseil de sécurité à l’ONU, l’une des grandes puissances émergentes de la planète, avec 40% de la richesse du continent africain. Aujourd’hui, le problème central pour la RSA n’est pas racial mais celui du développement. Cela n’a pas empêché la Fifa d’exiger des stades de 80.000 places et de fixer le prix des billets sans tenir compte aucunement du coût de la vie en Afrique du Sud. A titre d’exemple, pour le Mondial, 2,1 milliards de rands ont été engloutis dans la seule construction du Nelson Mandela Bay Stadium à Port Elizabeth. Un monstre qui absorbera pour son entretien 18 millions de rands par an. De même, la compagnie low-cost sud-africaine Kulula, dont les prix sont proposés à un tarif compris entre 140 et 196 dollars, contre 755 dollars pour ceux inclus dont les packages de Match Hospitality (choisie par la Fifa) s’est vu interdire, dans son pays, toute référence à la Coupe du Monde par les avocats de la Fifa qui demanderont même de pourchasser les vendeurs à la sauvette autour des stades. Il est facile de constater que les retombées économiques de la Coupe du Monde ne servent pas en priorité le pays de Mandela. Gageons que les Sud-Africains connaîtront des moments difficiles au lendemain de la Coupe du Monde ne serait-ce qu’en termes de gestion, d’utilisation et d’entretien des différentes installations. Aujourd’hui, le monopole de la Coupe du Monde s’étend même aux émissions audiovisuelles. Désormais, les pauvres n’auront plus le droit de suivre les jeux; les voir, les écouter, ou les lire est un privilège dont jouissents seulement les riches. La Coupe du Monde sud-africaine est une vitrine dont le bénéfice principal est celui qui peut être atteint en termes d’image. Un objectif trop cher payé et qui n’était pas gagné d’avance. C’est là le meilleur démenti au discours paternaliste de Blatter et à une certaine presse ne retenant que l’insécurité en Afrique du Sud. Loin d’être une décision philanthropique ou un simple acte d’amour pour l’Afrique, la Coupe du Monde 2010 est celle qui a rapporté, à ce jour, les recettes les plus importantes dans les caisses de la Fifa. Par-delà les déclarations de Blatter, la Coupe du Monde demeure l’exclusivité des pays riches et à ce titre elle n’est ni internationale, ni à la portée de tous. Les relations dans le domaine sportif renforcent, au-delà d’un discours de circonstance et de certaines apparences, la domination des pays riches. Les centaines de compétitions internationales qui sont organisées chaque année intéressent majoritairement les pays développés. Une étude de l’université de Besançon, montre que 96% des rencontres s’effectuent dans les 30 pays les plus riches, les 10 premiers organisant 63% des épreuves. Selon Jean-Marie Harribey, professeur agrégé de sciences économiques et sociales, «la mondialisation sportive s’intègre dans le processus d’achèvement de la marchandisation de toutes les activités humaines dans le monde, processus conduit par le capital financier». Fondé prioritairement sur le spectacle sportif, le système Blatter expose le football à de sérieuses dérives, affaiblit l’Esprit sportif et amplifie ses distorsions. D’une manière générale, sans parler de violences qui commencent à prendre de l’ampleur et parfois de conflits diplomatiques, le sport est devenu une industrie et dans ce contexte ne saurait échapper à la crise internationale à cause de ses imbrications avec les multinationales et ses nombreux liens avec le marché financier. Le modèle de recettes sportives est devenu de plus en plus lié au monde des affaires. Pour relancer l’intérêt sportif, limiter les dérives financières, à l’instar de la réaction contre la suprématie de la finance sur l’économie réelle, le football professionnel a besoin de nouvelles règles et de régulations qui arbitrent de manière plus équilibrée entre la recherche du profit et les aléas des compétitions: en un mot, d’une profonde moralisation. Un sursaut est nécessaire pour sauver le football du naufrage et de la déconsidération dans lesquels le mènent les pratiques actuelles de la Fifa. La bonne gouvernance et l’éthique sportive, le souci de savoir comment redonner une place aux laissés-pour-compte, sont autant de points dont on ne se rappelle que lors des rapports de force électoraux qui poussent les dirigeants de la Fifa à proclamer leur amour pour tel pays ou continent, à flatter et à «arroser» certains responsables. La manipulation des pays africains et asiatiques, l’achat de leurs votes, la tentation du strapontin, la «récupération» de certains dirigeants, révèlent et expliquent quelques-unes des raisons qui maintiennent nos pays dans une position marginale et de faiblesse.
Pour être crédibles, les décisions qu’exige la Fifa au niveau national, doivent être sous-tendues et renforcées par une organisation internationale qui ne peut avoir de véritable autorité morale, de réelle crédibilité que si elle commence, elle-même, à se rénover de l’intérieur et à s’imposer les mêmes exigences. La Fifa est la plus grande institution sportive de la planète avec le Comité international olympique. A ce titre, elle a le devoir d’exemplarité dans tous ses actes. Faute de quoi les politiques finiront par s’inviter, légitimement, d’une manière ou d’une autre autour de la table. Les réactions fermes et justifiées des institutions européennes face à certaines décisions unilatérales de la Fifa doivent être pour tous une source d’inspiration et un sujet d’étonnement face au silence des différentes institutions africaines et arabes. Quand marqueront-elles de leur sceau, à l’image de l’Europe, des thèmes aussi importants que la dimension économique du sport, sa fonction sociale et culturelle, le financement du sport, les couts des grandes manifestations sportives qui font quelles sont impossibles à réaliser dans nos pays et sont de plus en plus réservées à un nombre très restreint de pays. La nécessité de nouvelles régulations et l’exigence d’un véritable code de bonne conduite s’imposent. Quand s’intéresseront-elles à l’action des élus africains au sein de la Fifa dont la géopolitique reste pour Nicholas Kssis «absorbée par la bipolarisation originelle, Europe/ Amérique du Sud, et ne s’embarrasse pas trop de considérations universelles». (Revue Regard sur le monde-juin 2006). Vaste débat, très vaste débat dont nous sommes absents par la faute de qui?
Comme pour les dérives récentes dans la finance internationale, tôt ou tard, il se trouvera des hommes et des femmes pour demander si la Fifa, forte de son indépendance, peut s’autoriser tous les comportements, voire des provocations contre certains Etats, sans aucun contrôle. Gageons qu’ils se trouveront dans l’obligation d’intervenir pour réconcilier le football avec ses valeurs originelles et éradiquer toutes les dérives incompatibles avec la morale et le sport. Le prochain mandat auquel veut postuler le président Blatter risque d’être pour lui et pour le football le mandat de trop.
Les valeurs du sport ne peuvent être confisquées par une personne ou un groupe de personnes. Elles ne peuvent l’être par telle ou telle idéologie. Pour se renforcer, ces valeurs doivent tendre à l’universalité. Elles ont besoin de responsabilités collectives pour préserver, à la fois, un système d’aides publiques au monde sportif et le réformer afin d’anticiper et de limiter les multiples dérives auxquelles il est de plus en plus exposé. C’est à ce prix que nous serons fidèles aux valeurs fondatrices du sport et de l’humanisme sportif. (L’Expression-04.07.2010.)
Par:
Hamid OUSSEDIK est expert international
Ancien Responsable de l’éducation préventive et du sport à l’Unesco
Titulaire de la Distinction mondiale de l’humanisme sportif.
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