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De nouveaux défis pour le hirak

L’élection du 12 décembre 2019, même si elle en a déstabilisé certains, soulagé d’autres, n’a en rien entamé la détermination de millions d’Algériens à poursuivre la mobilisation. Rappelons que sur 24 millions d’électeurs inscrits, plus de 15 millions n’ont pas voté. Reste à savoir quels seront les mots, les slogans, les chants, des prochaines vagues de refus…

Le hirak entame bientôt son dixième mois de contestation et il est loin, très loin, de montrer des signes de fatigue. Les images du 43e vendredi ainsi que la mobilisation massive contre les élections, la semaine dernière, sont là pour en témoigner. Avec l’arrivée de Tebboune à la tête de l’Etat, le soulèvement populaire est entré dans une autre temporalité et aborde pour ainsi dire la troisième phase de son évolution.

Au cours de la première phase qui aura duré du 22 février au 2 avril, date du départ de Abdelaziz Bouteflika, la contestation ciblait principalement Boutef et son clan, et les manifs visaient en premier lieu à faire échec au 5e mandat aux cris de : «Makache el khamssa ya Bouteflika, djibou el BRI ou zidou essaîqa !» (Pas de 5e mandat, Bouteflika, même si vous deviez ramener la BRI et les forces spéciales). L’insurrection pacifique a eu raison de «Fakhamatouhou», emportant dans la foulée l’élection du 18 avril.

Lors de la deuxième phase, qui se sera étalée du 3 avril au 12 décembre, le mouvement populaire s’en est vertement pris aux nouveaux visages du «système» : le président par intérim, Abdelkader Bensalah, et le Premier ministre Noureddine Bedoui, tous deux hérités de l’ère Bouteflika. Si durant la première phase, AGS était épargné, au fil des manifs, le patron de l’armée va devenir à son tour une cible de choix pour les protestataires, spécialement après la campagne d’arrestations lancée suite à chacun de ses discours menaçants. Avec l’autoritarisme exacerbé affiché par Gaïd Salah, les mots d’ordre tournaient majoritairement autour du rejet de la dictature militaire et la revendication d’une gouvernance civile, comme l’illustre le slogan récurrent : «Dawla madania, machi askaria !» (Etat civil, pas militaire).

«Réinitialisation du système»

En même temps que le hirak bataillait pour imposer un changement radical en scandant «Système dégage !», des alternatives politiques étaient formulées pour une sortie de crise apaisée. Deux tendances se sont vite dégagées, l’une appelant à un processus constituant avec, à la clé, une Assemblée constituante souveraine et une période de transition pour faire table rase de tous les résidus du «système».

L’autre option privilégiait plutôt la tenue d’une présidentielle dans «des délais raisonnables», comme le préconisait la réunion du groupe de Aïn Benian, le 6 juillet. En outre, plusieurs propositions appelaient à la désignation d’un collège de personnalités consensuelles intègres, en dehors du régime, pour diriger le pays avant le retour aux élections. Dans la différence de leurs stratégies, ces feuilles de route s’entendaient sur un certain nombre de points, notamment ce qu’on a appelé les «préalables» et les «mesures d’apaisement» : libération des détenus d’opinion, ouverture du champ politique et médiatique, droit de manifestation et de réunion, levée des restrictions sécuritaires destinées à bloquer l’accès à la capitale…

Rejetant catégoriquement ces demandes, le pouvoir de fait a sorti l’artillerie lourde. Lors de son déplacement du 26 août à Oran, le chef d’état-major de l’ANP – on s’en souvient – avait chargé violemment les partisans de la transition en plaidant pour «l’organisation d’élections présidentielles transparentes dans les plus brefs délais, afin d’éviter toutes les phases de transition dont les conséquences sont périlleuses, clamées par certaines parties qui n’ont d’autres objectifs que l’aboutissement de leurs intérêts étroits et ceux de leurs maîtres».

La suite, on la connaît : dès le 28 août, l’université d’été de RAJ est interdite. Les partis et formations réunis au sein du Pacte de l’alternative démocratique (PAD) qui, eux aussi, militent pour une «transition démocratique à travers un processus constituant souverain», se voyaient refuser à chaque fois l’attribution d’une salle pour se réunir. Après, il y a eu la campagne d’arrestations massives qui, après les porteurs du drapeau amazigh, s’est tournée vers toutes les figures qui pouvaient peser au sein du mouvement populaire.

Un formidable contre-pouvoir

Beaucoup misaient au sein du hirak sur l’annulation pure et simple de l’élection du 12 décembre comme ce fut le cas pour celle du 4 juillet, et avant elle, celle bien sûr du 18 avril, en exigeant le départ de toute la «îssaba». Maintenant que Tebboune est là, il y a comme une volonté de la part du pouvoir d’imposer un nouveau statu quo en signifiant aux Algériens : «Tous les chantiers de réformes passeront par le nouveau Président». D’après le récit officiel, l’élection de Abdelmadjid Tebboune est synonyme de «parachèvement de la solution constitutionnelle», selon le vœu de Gaïd Salah. En restaurant formellement la fonction présidentielle, le régime opère ni plus ni moins qu’une «réinitialisation du système».

Le scénario d’une période de transition semble, dès lors, s’éloigner. En même temps, il est attendu de l’offre de dialogue qu’elle déstabilise le hirak et le divise. Une fois de plus, la question de la représentation du mouvement est remise sur le tapis. On voit déjà des «listes» circuler, avec, comme à chaque fois, leur lot d’objections véhémentes. Mais le mouvement n’est pas près de s’essouffler, loin s’en faut. A l’approche de la présidentielle, on a vu les actions de protestation se multiplier et se diversifier, et la dernière semaine a été particulièrement intense, avec des manifs massives chaque jour, y compris le jour «J».

Pour la première fois depuis 1962, un mouvement de contestation aussi massif s’est exprimé contre une élection présidentielle le jour du scrutin. Pour la première fois, une élection présidentielle a enregistré un taux de participation aussi bas. Pour la première fois, un Président est élu avec un tel score (58,15%), loin des chiffres «brejnéviens» habituels. Et pour la première fois, on n’a vu aucun des partisans du vainqueur manifester sa joie, une forme de «retenue» qui nous change de l’arrogance des victoires officielles, et qui n’aurait pas été possible sans la révolution.

Tout ceci pour dire que le hirak est là et bien là, et qu’il faudra compter avec lui pour longtemps encore. L’élection du 12/12, même si elle en a déstabilisé certains, soulagé d’autres, n’a en rien entamé la détermination de millions d’Algériens à poursuivre la mobilisation. Rappelons que sur 24 millions d’électeurs inscrits, plus de 15 millions n’ont pas voté.

Reste à savoir quels seront les mots, les slogans, les chants, des prochaines vagues de refus… Bensalah débarqué, Bedoui étant sur la sellette, Tebboune sera fatalement la cible privilégiée des manifestants pour un bon moment. Son mandat ne sera guère une sinécure, et cela aussi est une première : jamais un Président en exercice ne sera à ce point contesté, conspué, moqué, décrié, surveillé, et chacun de ses actes, chacune de ses décisions, paroles, dépenses, nominations, seront scrutés à la loupe. En faisant les comptes, on est au moins sûrs d’une chose : le hirak continuera à agir comme un formidable contre-pouvoir. En attendant le vrai changement…* MUSTAPHA BENFODIL - elwatan- 16 décembre 2019

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* La force de frappe du hirak est intacte

L’enseignant-chercheur, fondateur et ancien porte-parole du Cnes, Adel Abderrezak, était très attendu, hier, au Café littéraire d’Aokas, qui s’est imposé comme un véritable espace de débats critiques. La thématique choisie n’est pas fortuite : “Le hirak : entre bilans et perspectives”. Il a décliné cette problématique, objet, selon lui, “d’une inflation de débats”, en trois axes : quelle identité ? L’acte 2 du hirak. Avec une question subsidiaire : est-ce que l’on ne va pas vivre des moments de reflux ? D’autant qu’en face, insistera le conférencier, le pouvoir ne lésinera pas sur les moyens en vue de “normaliser” la situation. Et, enfin, les perspectives sur lesquelles l’orateur était attendu.

Après avoir insisté sur le fait que tout mouvement (dans le cas algérien, il a préféré le définir par la révolution du hirak qui tend à une rupture par le mouvement), il n’y a pas de logiciel d’application. “C’est un problème de rapport de force ; c’est la lutte. Et celle-ci nous paie en termes d’avancées.” On est dans une phase de déconstruction, a-t-il ajouté, “c’est une révolution populaire, politique, mais inachevée”.

Et pour cause : “La dictature est toujours là.” Avant d’expliquer en substance que si les manœuvres machiavéliques du pouvoir sont réelles, l’inventivité du mouvement populaire et sa radicalité laissent augurer une dynamique de crise prérévolutionnaire qui, certainement, prendra du temps, mais permettra d’entrevoir une nouvelle Algérie, celle qui tourne le dos aux diktats des prédateurs et des oligarques mafieux. Aussi, l’impératif du hirak, c’est de “maintenir la mobilisation du vendredi. Nous avons besoin de la pérenniser”.

Quant à la répression, à laquelle aura recours le pouvoir politique même s’il tend la main, par ailleurs, “ce n’est pas une fatalité, on peut l’affronter”, selon lui. Il préconise dans la foulée une auto-organisation, mais pas dans une vision historico-révolutionnaire, que pourraient craindre d’autres. Il faut, selon lui, “une mise en réseau des activistes du hirak”. Et ce, en créant notamment des collectifs à même de gérer les masses, les jeunes, écrire des slogans sur les banderoles, etc.

On doit arriver à connecter tous ces collectifs de résistance afin de mettre en place un front élargi, a plaidé Adel Abderrezak. Mais cela ne signifie pas, s’est-il empressé d’expliquer, “structuration, avec une hiérarchie, des chefs, etc.”. C’est, dans tous les cas de figure, cette convergence qui peut nous donner la boîte à outils, indiquera-t-il en substance. Et qui pourrait se révéler fatale pour les décideurs. Dans son exposé, l’ancien porte-parole du Cnes s’est interrogé sur les implications de l’élection d’Abdelmadjid Tebboune sur le hirak.

Il a répondu que l’on n’était pas “dépendant de l’agenda politique du pouvoir”. Le premier acte de normalisation, c’était l’élection. “Mais à quel prix ? Au prix d’une délégitimation au niveau national et international. On est toujours dans la délégitimation politique.” Aussi, la première décision de M. Tebboune était “d’appeler au dialogue”. Cela met-il en danger le hirak ? Le hirak répondra-t-il à cet appel au dialogue ? “C’est un processus subversif. Le vrai acteur anti-système est le hirak. Ils veulent le diviser et le fractionner. C’est pour cela qu’il faut le préserver”, préconise le conférencier. Et d’affirmer : “La force de frappe du hirak est intacte. Il faut faire contrepoids par la rage, qui est d’essence pacifique.”

 **M. OUYOUGOUTE - Liberté – dimanche 22 décembre 2019

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Vainqueur d’une présidentielle très contestée : Tebboune face au hirak

C’est une première dans l’histoire des élections présidentielles en Algérie. Sur les 24,4 millions d’inscrits sur le fichier électoral, 9,1 millions seulement ont voté, selon les chiffres officiels communiqués par l’Autorité nationale indépendante des élections lors d’une conférence de presse, animée hier par son président, Mohamed Charfi.

Un taux de participation très bas, un Président élu par une minorité et des candidats qui se mordent les doigts… La présidentielle de jeudi dernier n’a pas été «une fête démocratique» comme le voulaient ses artisans. Le scrutin organisé sur fond de tension extrême n’a fait qu’élargir le fossé séparant le mouvement populaire et les tenants du pouvoir réel.

En effet, comme attendu, le corps électoral a tourné le dos majoritairement aux urnes : plus de 60% des électeurs inscrits ont choisi de boycotter cette élection qualifiée de «mascarade électorale». C’est une première dans l’histoire des élections présidentielles en Algérie.

Sur les 24,4 millions d’inscrits sur le fichier électoral, 9,1 millions seulement ont voté, selon les chiffres officiels communiqués par l’Autorité nationale indépendante des élections (ANIE) lors d’une conférence de presse, animée hier par son président, Mohamed Charfi.

Le taux de participation, surestimé et gonflé, selon les observateurs, n’est que de 41% au niveau national et de 39,83% en incluant le vote de la communauté algérienne à l’étranger, où seulement 8% d’inscrits ont voté.

Concernant les résultats préliminaires, l’ANIE déclare l’ancien Premier ministre de Abdelaziz Bouteflika, Abdelmadjid Tebboune, vainqueur avec 58,15% des suffrages, en obtenant 4,9 millions de voix.

Il devance de très loin ses concurrents, notamment l’islamiste Abdelkader Bengrina, qui est arrivé deuxième avec 17,83%, soit 1,4 million de voix exprimées. Le candidat islamiste, qui a promis à ses partisans d’être le prochain président de l’Algérie, crie déjà à la fraude. Son directeur de campagne a affirmé : «Abdelkader Bengrina est qualifié au deuxième tour de cette élection.»

Benflis : Jamais deux sans trois

La plus grand perdant de cette joute électorale reste l’ancien chef de gouvernement et président du parti Talaie El Hourriyet, Ali Benflis. Ayant œuvré à la crédibilisation de ce scrutin qu’il a d’ailleurs qualifié d’«acceptable», le candidat malheureux aux présidentielles de 2004 et 2014 récolte un troisième échec.

Jamais deux sans trois. Son score de 10% est très loin de celui réalisé en 2014 (12,3%). Il n’a finalement obtenu que 896 934 de voix. Le candidat semble groggy par ce résultat et annonce sa retraite politique.

Comme lui, le plus jeune des candidats, Abdelaziz Belaïd, récolte un deuxième échec, après celui de 2014. Le président du Front El Mostakbal, qui avait annoncé jeudi soir «avoir obtenu 31% des voix exprimées», est arrivé finalement à la dernière position avec 6,66% (566 808 voix). Ali Benflis et Abdelaziz Belaïd sont les deux candidats catalogués dans l’opposition, même s’ils ont fait toutes leurs classes dans le parti du pouvoir, le FLN.

RND-FLN : la faillite

Cette élection confirme une autre donnée. C’est la faillite des deux appareils du pouvoir, en l’occurrence le RND et le FLN. Unies derrière le secrétaire général par intérim du RND, Azzedine Mihoubi, ces deux formations n’ont pas pu égaler leurs scores enregistrés lors des dernières élections législatives et locales. Azzedine Mihoubi n’a pu réaliser qu’un piètre score de 7,26% (617 753 voix). Pourtant, il était donné «favori» durant les dernières semaines de campagne électorale.

Mais sa carte est tombée, semble-t-il, à la dernière minute, au profit de Abdelmadjid Tebboune. Comme à chaque élection, le phénomène des bulletins blancs s’est imposé cette fois-ci encore. Avec plus de 1,2 million de bulletins annulés. Le vote blanc occupe ainsi la troisième position derrière Tebboune et Bengrina. 

Abdelmadjid Tebboune en conférence de presse : «Je suis prêt à dialoguer avec le hirak»

Le président élu, Abdelmadjid Tebboune, a déclaré, dans sa première conférence de presse après l’élection, qu’il tendra la main au hirak qui se poursuit et qui a rejeté l’élection présidentielle. Abdelmadjid Tebboune a exprimé son «entière disposition» à dialoguer avec le hirak et les représentants qu’il désignera.

«Je m’engage à dialoguer avec tous les Algériens, qu’ils soient dans le hirak ou en dehors du hirak. Notre intention est bonne. Nous devons montrer aux Algériens que nous sommes dans une Algérie nouvelle.

Il n’y aura pas de continuité du 5e mandat. Nous devons nous écouter pour construire un nouvel avenir pour notre pays», a-t-il affirmé en réponse aux questions des journalistes au Centre international de conférences (CIC). M. Tebboune a assuré qu’il n’est nullement rancunier. «L’Algérie est grande. Tout le monde aura sa place. Je travaillerai pour tous les Algériens, qu’ils aient votés pour moi ou contre moi. Je travaillerai également avec ceux qui n’ont pas du tout voté», a-t-il soutenu.

Interrogé sur les wilayas de Tizi Ouzou et Béjaïa qui n’ont pas du tout voté lors de cette présidentielle, M. Tebboune a souligné qu’il avait une «estime particulière» pour cette région et qu’il était «impatient» de pouvoir lui rendre visite. Sur une question relative au sort des détenus du hirak, Abdelmadjid Tebboune a indiqué qu’il engagerait des consultations sur le sujet pour lui trouver une solution.

Il a en revanche exclu toute grâce présidentielle au profit de ceux qui étaient impliqués dans des affaires de corruption. Au sujet de la liberté de la presse, M. Tebboune s’est engagé à garantir au maximum la liberté d’expression tout en affirmant qu’il combattrait «avec férocité les travers de la liberté de la presse». Quant à son programme politique, Abdelmadjid Tebboune a assuré qu’il engagerait une réforme profonde de la Constitution.

Il a également souligné qu’il travaillerait pour redonner à l’Etat son autorité et sa crédibilité auprès du peuple. Interrogé sur comment compte-t-il récupérer l’argent détourné durant ces dernières années, Abdelmadjid Tebboune a refusé de dévoiler son plan pour des raisons stratégiques. M. A. O.

**elwatan- samedi 14 décembre 2019

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*Il a tendu la main au mouvement populaire. C’est un fait. Et après ? Rien.

Pas un seul geste à même de justifier cette “bonne intention”. Un discours et puis le silence quand bien même l’homme, le nouveau chef de l’État, ne se tairait pas. Bien au contraire. Il ne rate aucune occasion de parler, mais de ses priorités assorties de promesses qui sonnent comme un prolongement de sa campagne électorale. Si des partis politiques remettent sur le tapis les préalables des mesures d’apaisement qui ne se confirment toujours pas, le hirak maintient le cap et opte pour la constance en réclamant les têtes encore visibles du système Bouteflika. L’offre de dialogue en elle-même est, par principe, rejetée. Pourtant, pour le nouveau président, qui a hérité d’un lourd fardeau et d’un énorme plan de charge, le temps urge. Parce que la rue ne désarme pas et les potentiels interlocuteurs hésitent, quand ils ne sont pas carrément sceptiques.
Une telle situation risque d’entraver la démarche du chef de l’État et peut-être même de compromettre, avec le statu quo, tout son mandat. Et Abdelmadjid Tebboune, dans son nouveau costume, ne semble pas, du moins pour l’instant, trop préoccupé par cette donne qui peut constituer un premier pas vers la solution à l’impasse actuelle. Et si cette option fait partie d’une quelconque stratégie, il est à craindre qu’aucune de ses options ne prendra dans le contexte actuel où le mouvement populaire a montré une incroyable endurance, les pratiques répressives du pouvoir lui servant aussi de carburant contrairement à ce qu’il attendait : instaurer la peur parmi les manifestants.
L’équation s’avère plus difficile que pensée par l’équipe de Tebboune désormais appelée à compter avec les exigences du mouvement populaire mais aussi face à la classe politique plutôt hostile à sa démarche. La balle est dans le camp du président s’il veut réellement mettre fin à cette situation. Encore faut-il qu’il ait les coudées franches pour ce faire. *par Djilali BENYOUB  - liberté/ lundi 23 décembre 2019

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Le dialogue au point mort

Plus d’une semaine après avoir “tendu la main” au mouvement populaire, le chef de l’État reste au stade des intentions. Il n’a pas encore précisé les contours du dialogue dont il a voulu vendre l’idée ces derniers jours. 

Alors qu’il effectuait hier sa première sortie sur le terrain en tant que chef de l’État, Abdelmadjid Tebboune est resté muet sur son appel au dialogue. Ni dans son discours d’investiture, prononcé jeudi ni lors de l’inauguration de la foire hier, l’homme n’a soufflé mot sur des consultations pourtant annoncées comme imminentes. Il est vrai que l’homme n’a pas encore installé de gouvernement et seuls deux de ses collaborateurs ont été désignés.

Ce qui ne peut suffire pour conduire un chantier aussi sensible qu’un dialogue avec la classe politique et le mouvement populaire. Si les proches d’Abdelmadjid Tebboune ont entamé des contacts, avant même son investiture comme chef de l’État, rien n’est encore clair.

Contacté par nos soins, Soufiane Djilali, un des rares hommes politiques de l’opposition à avoir affiché publiquement sa disponibilité à admettre “le principe d’un dialogue” “avec des conditions”, affirme qu’il n’a rien reçu.

S’il reconnaît que le discours du chef de l’État ne s’est pas encore concrétisé sur le terrain, le président de Jil Jadid estime qu’il est encore “tôt” d’évoquer le sujet face aux “décisions” qui attendent le nouveau locataire d’El-Mouradia. Zoubida Assoul, présidente de l’UCP, a également confirmé qu’aucun contact n’a été établi avec le chef de l’État. “Il n’y a rien de concret”, a-t-elle indiqué. 

Des acteurs du mouvement populaire ont affirmé, la semaine dernière, que des proches du chef de l’État les avaient contactés pour des rencontres informelles.  Mourad Amiri, un activiste, avait même affirmé sur sa page Facebook qu’il avait reçu une invitation qu’il avait rejetée.

Une autre figure du mouvement populaire, Islam Benattia, avait suggéré l’élaboration d’une plateforme du hirak pour faire face au “représentant du pouvoir”. L’appel a, d’ailleurs, été mal perçu par de nombreux activistes qui ont vite accusé le militant de trahison. Si les contours du dialogue ne sont pas encore précis, la classe politique est unanime sur la nécessité de prendre des mesures d’apaisement avant d’aller vers des discussions.

“On  ne  peut  pas  évoquer  un  dialogue  sans  prendre  des  mesures d’apaisement telles que la libération des détenus, la cessation du harcèlement contre les militants, la libération des médias et autres. Or, pour l’instant, c’est le contraire qui est donné”, a indiqué Zoubida Assoul. Jusqu’à hier, les autorités n’avaient montré aucune prédisposition à apaiser la situation avant d’entamer un quelconque dialogue.

Si le dramaturge Abdelkader Djeriou a été libéré après un week-end de garde à vue, le militant Karim Tabbou, dont les avocats ont introduit une demande de mise en liberté, a été maintenu en détention. Ses camardes le sont aussi et aucune date n’a été fixée pour les procès.

Les médias proches du pouvoir continuent leur propagande et les grandes villes sont toujours interdites d’accès aux manifestants. Rien n’a donc changé, en attendant, peut-être, de nouvelles orientations au sein du pouvoir.*Par Ali BOUKHLEF -  liberté/ lundi 23 décembre 2019

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Un Président mal élu

L’année 2019 qui s’achève aura été riche en péripéties politiques dominées par un soulèvement populaire spectaculaire, inédit par sa puissance et étonnant par sa durée, et une élection présidentielle (deux fois différées) des plus décriées.

Après dix mois d’un bras de fer mêlant enthousiasme et colère des hirakistes et diatribes menaçantes et quasi injurieuses du chef de l’armée, la feuille de route de l’état-major vient d’accoucher d’un président de la République tout aussi inattendu que mal élu. La majorité des Algériens ont, en effet, déserté les bureaux de vote, laissant les habituels organisateurs de ce mauvais spectacle à leur labeur coutumier : la fraude et le gonflement artificiel des chiffres du scrutin. Abdelmadjid Tebboune, à en croire le rendu officiel, vient d’être élu par un peu plus de quatre millions d’Algériens, ce qui, ceci dit en passant, évite au pouvoir un second tour de tous les dangers.

Cette proportion de l’électorat (un vote favorable sur six et globalement un Algérien sur dix) est-elle suffisante pour lui accorder une légitimité dont il aura besoin pour gouverner et être représentatif au niveau international ? Autant dire, au vu de l’extraordinaire contestation de la rue et le boycott majeur des électeurs, que si le nouveau Président est d’une légitimité populaire très contestable, il n’en demeure pas moins qu’il jouira d’une légalité que lui garantissent les lois de ce pays.

Il aura à faire face d’entrée à une crise multidimensionnelle, dont certains observateurs se posent la question de savoir s’il est réellement l’homme de la situation, tant les problèmes sont d’une acuité pesante. Aura-t-il, par exemple, les coudées franches pour mener en urgence des réformes que commande la crise profonde que traverse le pays, lui qui a été coopté par l’armée pour, dit-on, perpétuer le système en place, c’est-à-dire reconduire les mêmes actes médiocres de gouvernance sous la supervision de ses sponsors galonnés.

Tebboune aura d’emblée deux alternatives urgentes : dialoguer avec le hirak ou le combattre, entreprendre des mesures d’apaisement ou appeler à la répression de tout mouvement populaire revendicatif, libérer les champs politique et médiatique, ou museler toute velléité d’aspiration à la démocratie ? Le hirak est aujourd’hui un mouvement puissant qui s’est radicalisé au fil de la rigidité quasi brutale de Gaïd Salah et de son aréopage, lesquels n’ont offert aucune alternative politique viable aux revendications de millions de protestataires. Le nouveau Président, même s’il est mal élu, est appelé très tôt à l’apaisement du climat social ou à suivre les conseils de ceux en uniforme kaki qui sont retournés dans l’ombre et qui lui demanderont de l’absolue fermeté à l’égard des hirakistes du mardi et du vendredi.

Tebboune hérite d’une situation explosive qu’aucun autre Président n’a connue. L’état délabré de l’économie du pays, aggravé par une désaffection des Algériens envers tout ce qui émane d’en haut a engendré un fossé de confiance difficile à combler. Il n’aura pas de délai de grâce, comme l’ont eu ses prédécesseurs, lui qui, relégué par le clan Bouteflika, a été remis en selle par le hirak et qui a promis dans son programme électoral à ce même hirak de céder à ses revendications légitimes.

Lourde tâche pour un homme qui n’est pas connu pour jouir d’une personnalité imperméable aux influences extérieures et d’un caractère bien trempé à même de lui permettre de prendre des décisions majeures, c’est-à-dire de réformer l’Etat et ses institutions en profondeur. Si on devait caricaturer sa position peu enviable, on dirait qu’il aura en face le hirak, derrière les militaires, à sa droite la crise économique et à sa gauche les réseaux rentiers incrustés dans le système et qui feront tout pour maintenir leurs privilèges.

Une réalité dramatiquement amère qui augure des jours difficiles…

*OMAR KHAROUM -  elwatan- samedi 14 décembre 2019

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* l’élection présidentielle a, peut-être, résolu le problème des tenants du pouvoir mais pas celui du pays

Le politologue Mohamed Hennad estime que l’élection présidentielle qui a vu l’intronisation d’Abdelmadjid Tebboune à la tête du pays “a, peut-être, résolu le problème des tenants du pouvoir mais pas celui du pays”. Mais devant le défaut de légitimité qu’il doit traîner comme un boulet, la question se pose quant à sa manière d’agir face au mouvement populaire. Quelle position adoptera-t-il ? Aura-t-il les coudées franches pour mener à terme le dialogue qu’il a promis avec le hirak ? Quel sera le rôle de l’armée, avec le retour de la vitrine civile du pouvoir ? Sur quelle base sociale et politique s’appuiera le nouveau président pour gouverner ? C’est là autant de questions auxquelles a tenté de répondre, dans cet entretien, Mohamed Hennad.

Liberté : Quelle marge de manœuvre pour Abdelmadjid Tebboune, devant le défaut de légitimité auquel il doit faire face, après son élection, à l’occasion d’un scrutin massivement rejeté par la population ?
Mohamed Hennad : Force est de constater que le dernier scrutin a été organisé d’une manière autoritaire et précipitée pour, soi-disant, mettre fin au vide constitutionnel ! C’est pour cette raison que l’on est en droit de considérer que l’élection présidentielle a, peut-être, résolu le problème des tenants du pouvoir mais pas celui du pays. Après de longs mois de hirak, l’Algérie avait le droit d’espérer beaucoup mieux : une élection consensuelle avec des figures nouvelles comme candidats pour nous faire oublier la îssaba. 

Ainsi, et quelles que soient sa bonne volonté et sa détermination, le nouveau président sera, au moins pour un certain temps, considéré par beaucoup d’Algériens comme celui que le haut commandement des forces armées a imposé au peuple. Sa marge de manœuvre sera, de ce fait, très réduite d’autant plus qu’il sera appelé à prendre des décisions qui pourront être très difficiles.
 
Comment agira le nouveau président face à la mobilisation de la rue ?
Évidemment, un pouvoir qui manque de légitimité est obligé d’utiliser des moyens “non conventionnels”, y compris le recours à la force le cas échéant. Pour le moment, le nouveau président – qui n’est pas encore investi – se présente comme un homme du hirak, mais il n’a, pour le moment, rien promis pour ce qui est dans l’immédiat comme gage de bonne volonté et de mesures destinées à établir la confiance entre le peuple et ses institutions politiques.

Pour ce qui est du plus ou moins long terme, beaucoup d’Algériens considèrent que le mandat de M. Tebboune risque d’être un “cinquième mandat”, preuve en est que le nouveau président a promis beaucoup de choses dans presque les mêmes termes que le président déchu dans son discours du 18 mars 2019, notamment une révision profonde de la Constitution et du système électoral, avec la promesse d’un dialogue sincère et inclusif. Ajouté à cela la sempiternelle question de la nécessité d’impliquer la jeunesse dans la réalisation du projet national.

Dans son premier discours, M. Tebboune a tendu “la main au hirak”. Sera-t-il capable de rompre avec la ligne de conduite dure du chef d’état-major pour engager un vrai dialogue avec le mouvement populaire qui ne le reconnaît pas et qui revendique un changement radical ? Quelles chances de réussite pour le dialogue proposé ?
Il faut se rendre à l’évidence que la question de la “main tendue” est trop souvent une simple clause de style ! Elle peut être aussi une manière de dire : “Maintenant que je suis là, vous n’avez d’autre choix que d’accepter de traiter avec moi selon mes termes !” En tout cas, cette façon d’agir est conforme à la ligne de conduite dure du chef d’état-major. Quant à la capacité du nouveau président à engager un vrai dialogue, rien n’est moins sûr parce qu’on peut aisément imaginer qu’il y ait des “lignes rouges” que le haut commandement militaire imposerait dans tout dialogue. 

Sachant que ce dialogue sera d’autant plus nécessaire qu’il s’agira d’essayer de mettre à contribution les différentes forces politiques et sociales nationales, non seulement pour faire accepter la nouvelle direction du pays, mais surtout pour maîtriser la contestation contre les mesures que le gouvernement sera bien obligé de prendre pour redresser l’économie du pays, notamment en matière d’assainissement, de transferts sociaux et d’équilibre de la balance des paiements du pays.

Les partis politiques qui étaient, jusque-là, au pouvoir, notamment le FLN et le RND, sont sur le déclin. Avec quelle majorité va gouverner le nouveau président et surtout va-t-il appliquer son programme ou sera-t-il contraint de faire des concessions ?
Vu les conditions dans lesquelles s’est déroulée l’élection présidentielle, M. Tebboune semble refuser de s’enfermer dans un cadre partisan, a fortiori celui du FLN et du RND. Tout soutien de ces deux partis le desservira et confirmera la continuité dans l’absurdité ! En tout cas, l’histoire retiendra que lesdits partis n’ont servi que de couverture à la gabegie et à la corruption et l’Algérie ne regrettera sûrement pas leur disparition ! Cela étant, le nouveau président préfère, plutôt, avoir le soutien du plus grand nombre possible de ses concitoyens. Comment procédera-t-il ? Difficile à deviner !

Pour ce qui est de l’assise politique du pouvoir, en fait, le hirak a mis à nu, non seulement le système, mais aussi les partis politiques de l’opposition. Force est de constater que ceux-ci n’ont pas pu peser sur le cours des choses alors que le pays était en pleine perdition. Leur incapacité était due, d’abord à leurs faiblesses internes, ensuite au fait qu’ils n’aient pas été en mesure de s’entendre sur l’essentiel, c’est-à-dire sur une plateforme commune qui transcenderait leurs clivages – si clivage il y a réellement – pour asseoir les règles d’une pratique politique saine et efficiente.  

L’option de la transition semble s’éloigner. Quels scénarios possibles alors pour le pays ?
Bien au contraire, nous serons toujours en période de transition tant que le déficit politique persistera. L’expérience montre bien que la politique du fait accompli n’a jamais fait avancer les choses pour la simple raison que cette politique, au lieu de s’attaquer aux problèmes, s’attaque à ceux qui les posent. Il faut que les tenants actuels du pouvoir l’admettent : nous ne sommes plus dans un monde qui admet l’autoritarisme. L’autoritarisme est devenu la risée de ce monde !

Quant aux scénarios possibles pour le pays, il faut d’abord résoudre ce problème de l’abstention de toute une région du pays. Ce problème n’est pas seulement d’ordre politique, il est aussi d’ordre juridique dans la mesure où les habitants de cette région peuvent continuer à dire qu’ils ne sont nullement tenus par les décisions prises par la direction du pays pour la simple raison qu’ils n’ont pas voté !

Avec une façade désormais civile, quel rôle va jouer l’état-major de l’armée à l’avenir ?
Le haut commandement des forces armées va évidemment continuer son “accompagnement”. Il se plaît dans ce rôle. Quant au caractère civil de la façade du pouvoir en Algérie, ça a toujours été le cas depuis l’indépendance du pays même quand le chef de l’État était militaire. Depuis cette date, les chefs militaires tiennent toujours à garder le pouvoir réel pour eux et laisser la responsabilité aux civils qu’ils adoubent ou du moins ne contestent pas.

Pour que les choses changent vraiment, il faudra se rendre à l’évidence que cet état de fait n’arrange ni les militaires ni les civils. Il est temps d’y mettre fin ! Comment ? D’abord, il faut un renouvellement consensuel de la direction politique à travers un processus politique adéquat et un renouvellement de la direction militaire pour se mettre à l’ère de l’organisation moderne de l’outil de défense nationale. À terme, il faudra que l’État algérien ait droit à un ministre de la Défense nationale qui soit civil. Ensuite, la légitimité politique devra cesser de puiser sa source dans l’idée “novembriste” pour se mettre au diapason avec les normes universelles en matière de gouvernance.
 ***Entretien réalisé par : Nissa Hammadi – liberté/ jeudi 19 décembre 2019

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*Mort de Gaïd Salah à l’hôpital de Aïn Naâdja, terrassé par une crise cardiaque

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*Le chef d’Etat-major de l’ANP, Ahmed Gaïd Salah, est décédé à l’hôpital de Aïn Naâdja durant la nuit de dimanche à lundi 23 décembre 2019, terrassé par une crise cardiaque, à l’âge de 79 ans, a annoncé l’agence de presse APS. La disparition du patron de l’armée intervient quatre jours après l’investiture de Abdelmadjid Tebboune, comme nouveau président de la République. Selon un communiqué de la présidence, Ahmed Gaïd Salah a fait une crise cardiaque à 6 heures du matin à son domicile avant d’être transporté à l’hôpital militaire de Ain Naadja, sur les hauteurs d’Alger. Gaid Salah, qui est aussi Vice-ministre de la Défense, est né le 13 janvier 1940 à Aïn Yagout dans la wilaya de Batna. Le général-major Saïd Chengriha, commandant des forces terrestres, a été nommé chef d’état-major par intérim de l’Armée nationale populaire (ANP) en remplacement du général de corps d’armée Ahmed Gaïd Salah, annonce la télévision d’État. Chef de la 3ème région militaire depuis août 2004, le général-major Saïd Chengriha a été promu commandant des forces terrestres en août 2018 dans le cadre d’une vaste opération de réorganisation du commandement militaire décidée par Ahmed Gaïd Salah.*médias- lundi 23 décembre 2019

********Le décès soudain du général Gaïd Salah ne manquera pas de générer des interrogations et des théories de toutes sortes d’autant plus qu’il intervient dans un climat tendu avec la désignation contestée d’Abdelmadjid Tebboune au poste de Président de la république, désignation qui, en plus d’avoir provoqué la colère de la rue, semble avoir divisé la hiérarchie militaire.

Le  décès du général intervient, en effet, au lendemain d’un nouveau scandale avec le démantèlement au ministère de la Défense Nationale, d’un réseau qui aurait agi dans l’ombre en faveur du candidat Azzedine Mihoubi, ce qui avait provoqué la serie de mise aux arrêts. Sommes-nous devant la scénario qui voudrait qu’un groupe de généraux était gagné par le désir fou d’avoir chacun son président à manipuler ou, plus concrètement, devant de scénario de l’omniprésence du général Gaid qui entravait le travail du chef de l’Etat et qui faisait planer un gros nuage d’instabilité au dessus du pays ?

Le successeur du général-major Gaïd Salah, le général-major Said Chengriha, même s’il n’est pas accusé publiquement d’avoir comploté contre AGS, ne fait pas moins partie de la liste de généraux qui firent l’objet d’une purge en août dernier, liste transmise aux services de la Présidence de la République.

Le nom du général Chengriha avait été alors évoqué en même temps que ceux du général-major Abderrazak Cherif, chef de la 4e région militaire, qui a été admis à la retraite remplacé alors par le le général Nourredine Hambli,  l’ancien commandant-adjoint de la 5e Région et commandant des forces parachutistes.

Par ailleurs, le commandant de la stratégique 3ème Région militaire (Béchar, Sud-Ouest), le général-major Said Chengriha a été également relevé de ses fonctions depuis lundi. Il a été remplacé, a-t-on appris suite à nos investigations, par le général  Mustapha Smaïli, âgé de 72 ans, qui exerçait les fonctions de commandant-adjoint de la 2e région militaire aux côtés du général-major Saïd Bey, mis à la retraite lui aussi vendredi passé. Mais depuis, la donne a changé, il vient d’être promu au poste de chef d’état-major en lieu et place du défunt Ahmed Gaïd Salah.

Selon différentes sources, le choix  de Chengriha aurait été établi pour son profil carrément différent de celui de AGS dont beaucoup d’observateurs soutiennent qu’il menait le pays  à l’affrontement.                   

Auteur - L.M./ lematindalgerie / lundi 23 décembre 2019

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La difficile mission de Saïd Chengriha

Il a été nommé hier au poste de Chef d'État-major de l’ANP par intérim : La difficile mission de Saïd Chengriha

**Sera-t-il ce collaborateur précieux qui pourra aider Abdelmadjid Tebboune à sortir le pays de l’ornière et apporter les mesures d’apaisement nécessaires ? Ou maintenir le pays sous la coupe d’un régime militaire qui l’étouffe depuis l’indépendance ?

La nomination, hier, du général-major Saïd Chengriha au poste de chef d’état-major par intérim de l’ANP par le président de la République, Abdelmadjid Tebboune, était prévisible et même attendue.

Saïd Chengriha en tant que chef des forces terrestres (CFT) était destiné à remplacer le général de corps d’armée Ahmed Gaïd Salah dès que celui-ci déciderait de prendre sa retraite. Les choses se sont précipitées avec le décès subit, hier matin, de Gaïd Salah d’une crise cardiaque.

Cette disparition inattendue constitue une nouvelle donne sur la scène politique nationale à l’entame du mandat présidentiel de Tebboune, où le général-major Saïd Chengriha aura à jouer un rôle majeur.

Né en 1945 à El Kantara, près de Batna, Saïd Chengriha a acquis ses galons sur le terrain après avoir fait des études militaires à l’étranger, notamment à l’Ecole de guerre de Moscou.

Il a occupé plusieurs postes de responsabilité au sein de l’ANP en tant que chef de brigade et chef de région, avant de se voir confier le commandement des forces terrestres (CFT) en 2017. Un poste-clé dans le commandement militaire qu’il a dû assumer avec beaucoup de difficultés, selon certaines indiscrétions, face à un Gaïd Salah hégémonique et déterminé dans ses positions politiques.

Malgré quelques divergences avec Gaïd Salah, Saïd Chengriha est resté l’un des collaborateurs les plus proches du défunt chef d’état-major et vice-ministre de la Défense nationale.

Le nouveau patron de l’ANP avait, dès le début, soutenu la candidature de Abdelmadjid Tebboune, contrairement à certains membres du commandement militaire qui avaient tout fait pour que Azzedine Mihoubi, ancien ministre de la Culture et secrétaire général du RND, remporte le poste de président de la République.

Selon une source proche de l’état-major, Gaïd Salah aurait été convaincu par la «carte» Mihoubi, avant de se raviser grâce à l’insistance de Saïd Chengriha. Ce dernier est décrit comme étant un homme dur et très exigeant sur le plan professionnel et de la discipline militaire.

Pourtant, même s’il ne sourit que très peu, Chengriha est crédité de beaucoup de qualités humaines et ne manque pas une occasion, dit-on, pour étaler ses connaissances culturelles et sa maîtrise quasi parfaite des langues arabe et française. On le présente également comme étant un légaliste, réfractaire à l’immixtion de l’armée dans les affaires politiques.

Comme la majorité des cadres militaires, Chengriha a été très marqué par la décennie noire durant laquelle le terrorisme islamiste sévissait.

La nomination de Saïd Chengriha va induire certainement un changement au sein du commandement militaire. L’on parle d’ores et déjà de la mise à la retraite du général de corps d’armée Ali Benali, actuellement chef de la Garde républicaine. Il est l’un des militaires les plus âgés encore en activité et le plus gradé après Gaïd Salah.

Le général Benali est le frère du chahid Colonel Lotfi. D’autres responsables de Région et de corps d’armée pourraient être remplacés. C’est selon les priorités du nouveau chef d’état-major, affirme-t-on, qui pourrait être plus pris par la situation politique du pays où l’on assiste à une immense fronde populaire, qui dure depuis plus de 10 mois, exigeant le démantèlement du système en place. 

Quoi qu’il en soit, Chengriha aura la responsabilité de soutenir la démarche du nouveau président de la République en matière de sécurité nationale, mais également dans ses choix politiques pour la résolution de la crise actuelle. Sera-t-il ce collaborateur précieux qui pourra aider Abdelmadjid Tebboune à sortir le pays de l’ornière et apporter les mesures d’apaisement nécessaires ? Ou maintenir le pays sous la coupe d’un régime militaire qui l’étouffe depuis l’indépendance ? – elwatan- mardi 24 décembre 2019

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Saïd Chengriha : un général intellectuel pour remettre de l’ordre dans l’armée

Par Abdelkader S. – C’est au premier officier bachelier postindépendance qu’échoit la mission de remettre l’Armée nationale populaire sur les rails, après la grande pagaille que Gaïd-Salah a laissée derrière lui. Un chantier immense attend l’ex-chef des forces terrestres

Saïd Chengriha est connu pour sa discrétion. Il est l’architecte de toutes les actions de modernisation de l’armée de terre, force de frappe de l’ANP, sans trop se mêler de politique. Respecté, il est resté au-dessus de la mêlée dans la guerre de position qui faisait rage sous son prédécesseur ; une guerre sans merci induite par les manœuvres de l’ancien chef d’état-major qui a fait de sa fonction un moyen de régler ses comptes avec tous ceux, militaires et civils, en activité ou à la retraite, qui étaient susceptibles de gêner ses plans machiavéliques.

Le nouveau chef de l’armée s’efforcera de rétablir la confiance rompue entre le peuple et le commandement de l’armée qu’il devra écarter de la voie belliciste que lui avait tracée Gaïd-Salah, au point de provoquer une haine sans pareil d’un grand nombre de citoyens à l’égard des généraux, vilipendés et malmenés durant les manifestations depuis que le peuple majoritaire a compris que Gaïd-Salah s’est servi du Hirak pour se débarrasser d’une partie du clan afin de sauver le système dont il était la parfaite incarnation.

Saïd Chengriha devrait s’employer à éloigner l’armée de la sphère politique afin d’épargner à l’institution une rupture totale d’avec le peuple, qui lui a toujours voué respect et reconnaissance pour les sacrifices que ses hommes consentent au service de la nation. Il devrait également œuvrer à remettre de l’ordre dans la hiérarchie, de sorte à laisser une armée ressoudée une fois qu’il quittera ses fonctions. Il aura, enfin, à rattraper les dérapages de son prédécesseur, qui a créé un profond malaise au sein de l’ANP par ses mesures brutales et irréfléchies à l’encontre de nombreux officiers emprisonnés ou évincés par pur esprit de vengeance ou par excès de gloriole.

Le nouveau chef d’état-major hérite d’une armée toujours aussi puissante, mais quelque peu déstabilisée par la longue gestion à la hussarde de Gaïd-Salah, une gestion chaotique due à son niveau d’instruction limité et aux calculs machiavéliques de l’ex-président Bouteflika, qui s’est servi de lui comme bouclier pour se prémunir de toute velléité de l’empêcher de sa présidence à vie, jusqu’à ce que sa maladie incapacitante eut faussé tous les calculs du clan, dont une partie, sous la férule de Gaïd-Salah, se retournera contre l’autre dans une sorte d’autophagie.

Souhaitons bonne chance au nouveau chef d’état-major de l’ANP.

*algeriepatriotique./  lundi 23 décembre 2019

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*Après 10 mois de manifestations, le Hirak a imposé une nouvelle réalité politique

Quel avenir pour l’Algérie après l’élection présidentielle?

L’Algérie vient de vivre une élection présidentielle dans un climat de défiance généralisée. Bien que massivement rejetée, elle s’impose toutefois de fait comme un repère nouveau pour l’ensemble des protagonistes de la crise politique que vit le pays. Si pour le pouvoir, cette élection lui donne une marge de manœuvre plus importante, elle n’est en rien un échec du hirak. En effet, pour évaluer l’effet de ce scrutin sur l’évolution de la situation, il faut cerner toutes ses conséquences.

Aujourd’hui, je souhaite partager avec l’opinion publique, avec le hirak populaire, l’analyse des faits et les positions de Jil Jadid, sur les nombreuses questions qui en découlent. Permettez-moi d’abord de rappeler que Jil Jadid est aligné, sans ambiguïtés, sur la volonté populaire, représentée par le hirak. Si personne ne peut s’approprier l’initiative de ce mouvement, il n’empêche que Jil Jadid, à travers l’ensemble de ses militants, a été partie intégrante de cette « révolution du sourire » depuis le 22 février au moins.

Plus encore, Jil Jadid, avec plusieurs autres personnalités nationales, avait pris l’initiative d’entamer les manifestations contre le pouvoir dès le mois d’août 2018, et ceci après avoir boycotté les législatives, puis les locales de 2017. Pour la clarté de ce préliminaire, les questions du Hirak, du pouvoir et enfin des positions politiques de Jil Jadid seront présentées successivement.

1) Le Hirak : Après 10 mois de manifestations, le Hirak a imposé une nouvelle réalité politique. Certes, il n’a pas pris le pouvoir, n’a pas désigné de zaïms et n’a pas formulé d’idéologie ni de programme politique. L’élection présidentielle a été organisée sans son assentiment. Et visiblement, les méthodes du système politique n’ont pas encore changé. Et pourtant, son influence sur le cours de l’histoire récente du pays aura été incommensurable. En résumé, le Hirak aura réussi à montrer au monde entier la nouvelle société algérienne. Il a permis le démantèlement d’un des régimes des plus corrompus, et des plus dangereux pour leur peuple qui puissent exister, et ce dans un pacifisme admirable. Il a réussi à former et à offrir au pays, une conscience politique nouvelle dont s’abreuveront des générations d’hommes et de femmes, maintenant engagés dans l’action citoyenne. La révolution du sourire a, au final, imprimé une dynamique de changement exceptionnelle que ni le pouvoir ni les vieux réflexes ne pourront en venir à bout. L’Histoire inscrira cet épisode national comme un nouveau mythe fondateur de l’Algérie nouvelle.

2) Le pouvoir : En apparence, il vient de remporter une manche. Formellement, il s’est donné une légalité juridique avec cette élection. En réalité, le régime politique s’est effondré. L’Algérie aura donc à en reconstruire un nouveau. Il s’agira de changer très largement le personnel politique et exécutif, d’une part et de faire évoluer significativement l’organisation de l’Etat et des règles de son fonctionnement. Le pouvoir devra donc accepter des changements fondamentaux et dans le sens de la demande populaire. Il n’a plus le choix car le chaos guette le pays. Il devra ainsi convaincre les Algériens en faisant des concessions significatives pour ressouder le pays dont l’unité a été mise en danger par ses pratiques.

A ce sujet, des signaux lourds ont été envoyés à l’opinion publique. Le score rachitique de l’association FLN-RND, intentionnel, reflète la disgrâce de ce tandem, éternels instruments de l’escroquerie politique et morale de l’ancien régime. Le choix des candidats et la répartition des scores du scrutin annoncent donc une reconfiguration générale du champ politique. Elle se fera, au détriment d’une classe politique, pour l’essentiel obsolète et inutile et pourquoi pas en faveur du Hirak, et des nouvelles générations qui s’en réclament. Pour le reste, il y a la promesse d’un dialogue et de changements constitutionnels à venir. Le pouvoir sera jugé sur pièce.

3) Les positions de Jil Jadid : Tout d’abord, je rappelle que Jil Jadid n’a pas soutenu l’élection présidentielle, ni aucun candidat d’ailleurs. Cependant, conscients de la complexité de la situation que traverse le pays, nous interagirons avec responsabilité avec le Président de la République, qui l’est ainsi de fait. Nous aurons à prendre position, en toute indépendance, sur les différents sujets. Nous jugerons, au fur et à mesure, des actes concrets que décideront les autorités en fonction des objectifs du mouvement populaire, soit la construction de l’Etat de droit, -dans les faits et non pas dans les discours-, et la démocratie.

Jil Jadid attend donc des gestes forts de la part du Président, avec une libération immédiate des détenus d’opinion, la libération des champs médiatique et politique avant l’entame d’un dialogue inclusif, sincère et sérieux pour formaliser dans un accord global la volonté populaire.

Jil Jadid a toujours défendu le principe du dialogue. Cependant, il n’acceptera pas de subterfuges ni de fausses solutions. Il s’agira d’obtenir de vraies avancées pour le pays et en aucun cas, une négociation sur un quelconque partage de responsabilités. C’est le sens profond de notre position de principe : « aider le pouvoir à s’en aller et non pas à mieux rester ».

Jil Jadid ne veut pas de postes politiques en dehors de ceux que pourraient lui attribuer des électeurs dans un cadre transparent. Il ne participera donc à aucun gouvernement ni à aucune fonction politique en dehors de la volonté populaire.

La direction de Jil Jadid représente ses militants, ses sympathisants et toutes celles et ceux qui lui font confiance au sein du Hirak. Elle ne parlera qu’en leur nom et non pas au nom du Hirak. Nous refuserons par ailleurs, toute imposture présentant des individus propulsés par les appareils médiatiques comme représentants du mouvement populaire. Les tentatives qui fleurissent par-ci par-là à cet effet, seront dénoncées comme une manœuvre de récupération et d’usurpation et dévoileront les véritables intentions des différents acteurs.

Aujourd’hui, le Hirak a trois issues possibles : celui du refus catégorique et radical à tout dialogue, débouchant alors sur la désobéissance civile et la sédition ; l’abandon du terrain politique et le retour à la situation antérieure au 22 février, ou enfin à la transformation de la conscience du hirak en action politique organisée.

Désormais, le Hirak doit exister non pas seulement de vendredi en vendredi dans la rue, mais aussi et surtout entre les vendredis. Les marches hebdomadaires doivent donner naissance à un véritable travail et engagement le long de l’année. C’est « le devoir d’agir». L’action organisée doit se faire à travers des outils politiques et la structuration du Hirak se réaliser dans la pluralité et non pas dans la pensée unique. Il faut passer de l’action isolée des individus, fragiles et facilement manipulables à l’action collective, réfléchie et de longue portée. C’est ainsi que nous bâtirons l’Etat de droit et la démocratie que les Algériens réclament.

 ** Soufiane Djilali -Président de Jil Jadid Le 17 décembre 2019

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Les arrestations politiques se banalisent et se multiplient. L’organisation, par le régime, de son “élection” et l’avènement d’un président de plein exercice n’ont rien changé à cela. La promotion du “dialogue” postélectoral n’y fait rien, non plus. Que peut une proposition qui, elle-même, vient à la suite d’un passage en force, négation d’un prétendu accompagnement du mouvement national ?

La preuve symbolique de cette distance entre un discours de “conciliation” est une gestion répressive de la vie publique : l’installation du président Tebboune a coïncidé avec la proclamation de la plus lourde peine infligée à un activiste du hirak, un jeune poète qui plus est ! Le lendemain, vendredi, les routes vers Alger – et Oran, cette fois-ci –, étaient plus que jamais obstruées.

Il n’est pas certain que le régime ait pris la mesure de la détermination des Algériens engagés dans cette marche vers le renouvellement de système. Parce qu’on ne peut croire que bien qu’ayant apprécié la profondeur de l’aspiration populaire pour un renouveau politique, un pouvoir puisse continuer à s’organiser une vie parallèle, comme il le fait depuis dix mois, une vie sans rapport avec la représentation que la masse de citoyens se fait de ce que doit être la préparation d’un meilleur avenir. 

Est-ce le parti pris populaire pour la manifestation pacifique qui encourage le pouvoir à en ignorer les revendications ?
Un système qui s’est intronisé par la force pour empêcher que la volonté collective ne parvienne un jour à s’imposer aux clans n’est pas fait, en effet, pour céder la place juste parce qu’il y est convié. Sa culture de système fondée sur la force brutale l’empêche d’accéder à l’intelligibilité d’un mouvement croyant en la force de conviction. Il continue donc à user de méthodes répressives malgré l’évidence de leur inutilité politique en contexte de révolution populaire et malgré le pacifisme de ce mouvement.

Pourtant, il serait politiquement calamiteux que le mouvement populaire pacifiste s’éteigne sans résultat ou connaisse un épilogue de violence. C’est une question de sauvegarde anticipée de la mémoire des générations futures. à la veille et au lendemain de l’indépendance, les clans ont usé de la force des armes pour s’emparer de l’État algérien naissant en instaurant une pédagogie de la force brute.

En février 2019, au moment où le système s’apprêtait à commettre sa pire forfaiture politique avec un cinquième mandat de prédation, le peuple, dans son insondable génie, a créé l’occasion d’imposer, concomitamment, l’abolition de ce système et la promotion d’une pratique politique pacifique. Rien que pour ce second volet de la révolution, le mouvement populaire doit réussir. Pour l’avenir du pays.

Les nations les plus développées en matière de gestion de l’alternance sont parvenues à un stade d’éradication de la culture de la violence politique. Celle-ci y est littéralement inconcevable et quand elle se manifeste, elle ne peut être conçue que comme l’expression d’une pathologie de société. C’est ce saut civilisationnel qui  vaut une considération universelle au mouvement populaire.Cette autre rupture – avec la violence politique – ne pourra être parachevée que si l’autre rupture, celle avec le système de pouvoir, est effectivement réalisée et sans violence.*par Mustapha HAMMOUCHE - Liberté – dimanche 22  décembre 2019-

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*Devant la prison d’El-Harrach, il était difficile de se frayer un chemin au milieu de cette foule compacte venue à la rencontre des détenus libérés après avoir purgé leur peine.

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Les ex-détenus accueillis en héros

Il y avait de l’émotion, de la joie, voire de la liesse, hier, à la sortie du pénitencier d’El-Harrach. Les accolades, les embrassades et les youyous se sont mêlés aux pleurs, tout cela sous les clameurs de “Djazaïr hourra dimocratia”. Treize jeunes parmi ceux qui ont été injustement incarcérés dans le cadre de la chasse aux sorcières engagée contre les porteurs de l’emblème amazigh et de pancartes aux slogans antisystème, le simulacre de justice ayant fait le reste, ont retrouvé la liberté.

Ce fait n’est point une faveur que leur a consentie le pouvoir politique comme peuvent le penser certains observateurs crédules. Ces jeunes, des adolescents pour certains, ont tout simplement purgé la peine de six mois à laquelle ils ont été condamnés par un régime qui pensait, en agissant ainsi, dissuader les militants du mouvement populaire de continuer à manifester comme ils le font depuis 10 mois pour une nouvelle Algérie, celle des libertés et de la justice.

Et comme un pied de nez au pouvoir despotique, l’emblème amazigh a flotté devant la prison que les détenus devaient quitter. La campagne de diabolisation de la Kabylie, entreprise par les tenants du pouvoir en place dans l’objectif de diviser et de briser la révolution citoyenne, s’est, évidemment, fracassée contre le mur d’une prise de conscience populaire inédite dans la courte histoire de l’Algérie indépendante. Voilà un facteur que le système, qui a toujours régné grâce à sa politique de division du peuple, n’a, visiblement, pas pris en considération.

Ces méthodes d’un autre âge ont fini par être démasquées par les manifestants du hirak qui non seulement ont maintenu la mobilisation à travers le territoire national, mais encore se sont approprié des slogans jusque-là propres à la Kabylie. Comme un cinglant retour de boomerang à sa politique suicidaire, l’unité et la solidarité du mouvement populaire se sont renforcées et ont donné lieu, au grand dam du pouvoir, à de beaux gestes de solidarité entre citoyens de différentes régions du pays.

Un des plus beaux exemples de cette communion nous est venu vendredi d’Oran où des manifestants d’autres wilayas s’y sont déplacés pour apporter leur soutien aux hirakistes de la wilaya, réprimés quelques jours auparavant, par les forces de l’ordre. Et c’est précisément là que réside le miracle de la révolution du sourire : réconcilier les Algériens entre eux au moment où le système, qui tente de survivre, fait tout pour les diviser. * Liberté- mardi 24 décembre 2019

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Quand la répression prend le pas sur le dialogue

Pas de négociation sans les détenus d’opinion». Cette banderole déployée ce vendredi par des manifestants résume l’une des revendications fortes du hirak.

Du reste, d’aucuns parmi les manifestants, pour commenter l’offre de dialogue dont il est beaucoup question en ce moment, fulminent : «S’ils veulent dialoguer, ils n’ont qu’à s’adresser aux détenus !» Manière de signifier que la «moindre des politesses» est de commencer par libérer les prisonniers du hirak avant de parler dialogue. Notons que nombre de ces détenus jouissent d’une autorité morale indéniable et sont érigés en véritables leaders, des leaders symboliques tout au moins.

Ainsi, un large secteur du mouvement populaire attend désespérément des gestes d’apaisement de la part du nouveau locataire d’El Mouradia. Mais ces gestes se font attendre. Dans son discours d’investiture, jeudi dernier, le successeur de Abdelaziz Bouteflika a lancé avec un zeste de contrition : «Aidez-moi et encouragez-moi si je suis sur la bonne voie. Corrigez-moi en revanche si je dévie du bon chemin.» «Nous sommes obligés de tourner la page de nos différences. Nous sommes tous des Algériens et il n’y a pas quelqu’un qui est supérieur à l’autre. Mettons la main dans la main pour bâtir la nouvelle Algérie.»

Le chef de l’Etat a également insisté sur la «la nécessité de définir les priorités en vue de réaliser les aspirations du peuple, consistant en un changement radical du système». Force est de constater que la ligne dure du régime continue à imposer sa marche et que le «système» n’est pas près de montrer le moindre signe de détente. Il ne va manifestement pas changer de logiciel de sitôt.

Dernier fait en date ; l’arrestation, ce vendredi, du comédien, metteur en scène et scénariste Abdelkader Djeriou, dont la côte de popularité a explosé après sa prestation XXL dans le feuilleton a succès Ouled Lahlal diffusé durant le Ramadhan dernier sur Echourouk TV. Abdelkader  Djeriou était connu avant cela pour avoir écrit et mis en scène les JT satiriques Jornane El Gosto et Nass Stah qui battaient des records d’audience. «L’acteur Abdelkader Djeriou a été arrêté ce vendredi soir au niveau du barrage de la gendarmerie de Oued Tlélat (25 km d’Oran)», a alerté le Comité national pour la libération des détenus (CNLD) sur sa page Facebook en précisant que le célèbre comédien, qui s’est beaucoup impliqué dans le hirak «est toujours en garde à vue au niveau de la gendarmerie. Il sera présenté dimanche, 22 décembre, devant le procureur du tribunal de Tlélat». Rien n’a filtré pour l’heure sur les raisons de cette arrestation. Le CNLD a indiqué par ailleurs que «plusieurs personnes sont toujours en garde à vue au niveau de la Gendarmerie nationale de Tlélat après leur arrestation au niveau du barrage El Kerma (Oran)».

Au moment même où M.Tebboune prêtait serment au Palais des Nations jeudi dernier, le jeune poète Mohamed Tadjadit, la voix flamboyante de La Casbah, est condamné par le tribunal de Sidi M’hamed à 18 mois de prison ferme sans le moindre état d’âme. Une étudiante de Tlemcen, Nour El Houda Oggadi, a été placée le jour même sous mandat de dépôt par le juge d’instruction près le tribunal de Tlemcen pour «atteinte à l’unité nationale, d’atteinte à corps constitué et au moral des troupes», rapporte le CNLD.

Il convient de rappeler, en outre, que dès le lendemain de l’élection de M.Tebboune, la répression a frappé à Oran en plein hirak. «La journée du vendredi 13 décembre a été marquée par une répression policière violente contre des manifestants pacifiques à l’ouest de l’Algérie. A Oran, plus de 400 personnes ont été arrêtées au lendemain de la mascarade électorale», déplore le CNLD dans un communiqué, avant d’ajouter que ce même vendredi 13 décembre, «à Aïn Témouchent et Tlemcen, une centaine de personnes ont été interpellées puis présentées devant le procureur le lendemain matin».

Après Alger, Oran  ville interdite

Et ce n’est pas fini. Lors de ce 44e vendredi du hirak, les manifs ont été empêchées par la police dans plusieurs villes de l’ouest : Sidi Bel Abbès, Mascara, Tiaret, Mecheria…

Des citoyens issus d’autres wilayas qui tenaient à manifester à Oran dans un geste solidaire après la répression du 13 décembre ont été refoulés manu militari. Ainsi, après le filtrage sécuritaire de l’accès à la capitale, Oran devient à son tour une citadelle interdite.
Des cadres du RCD l’ont appris à leurs dépens. Parmi eux, le député et secrétaire national à la communication, Atmane Mazouz.

En voulant se rendre ce jeudi dans la capitale de l’Ouest, lui et ses accompagnateurs ont été appréhendés à Chlef avant d’être reconduits de force vers Alger puis Béjaïa. «Finalement, escortés de force de Chlef vers Alger, un autre ordre exige de nous escorter jusqu’aux limites de la wilaya de Béjaïa. Quelle folie d’un pouvoir aux abois !» s est emporté le député sur sa page Facebook. Commentant ces agissements des services de sécurité, le président du RCD Mohcine Belabbas a posté ce message sur sa page officielle : «Le règne de la nouvelle façade civile du système commence par l’arrestation abusive de Atmane Mazouz, député et secrétaire national à la communication du RCD, Mohand Aklit, président de l’APC d’Akfadou et leur compagnon Ameziane Oujedi».

M. Belabbas précise dans la foulée qu’M«une équipe extérieure à la gendarmerie conduite par un colonel veut contraindre Atmane Mazouz à se présenter séance tenante devant le procureur de la République de la wilaya de Chlef. Après le refus du député d’obtempérer, les services de sécurité ont fini par charger une équipe des forces d’élite de la gendarmerie (Saâiqa) de les escorter vers Alger et de leur interdire ainsi l«accès à Oran». Et de faire remarquer : «Il aura fallu moins de quelques heures pour que les promesses contenues dans le discours d’investiture soient contredites dans les faits».

Le RCD a diffusé par ailleurs un communiqué, ce vendredi 20 décembre, dénonçant cette fois l’interpellation d’étudiants proches du parti à Oran. «Après la répression et la série d’arrestations de la semaine passée à Oran, des étudiants de l’université d’Alger venus prendre part à l’imposante marche de protestation d’aujourd’hui (vendredi, ndlr), ont été interpellés et conduits au commissariat. En effet, Fouad Bachen, Anis Bachen, Abdeslam Djili et Ilyes Bentayche ont été interpellés, tôt le matin, au centre-ville d’Oran (…) Le RCD exige leur libération et appelle à la cessation des intimidations et des arrestations abusives. Il dénonce les atteintes au droit de manifestation et de circulation libre des Algériens», lit-on dans le communiqué.* * MUSTAPHA BENFODIL- elwatan-  dimanche 22  décembre 2019-

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LES ATTEINTES AUX LIBERTÉS D’OPINION, DE MANIFESTATION ET DE CIRCULATION SE POURSUIVENT

Cette réalité amère qui dément le discours officiel

Poursuite des arrestations et de l’emprisonnement des opposants à un rythme effréné et pour les mêmes chefs d’inculpation qu’avant l’élection présidentielle, restrictions des libertés de manifester et de circuler dans le pays, black-out médiatique sur les manifestations du hirak…, le changement promis n’est, visiblement, pas pour demain.

Jeudi, lors de la cérémonie de son investiture à la plus haute fonction dans la hiérarchie de l’État, Abdelmadjid Tebboune s’est présenté sous le profil d’un homme fédérateur et rassembleur. Il a incité le peuple à “tourner la page des différences (…) et à marcher la main dans la main pour bâtir une nouvelle Algérie”, précisant qu’aucun “citoyen n’est supérieur à un autre”. Il s’est fermement à garantir “le respect des droits de l’Homme, la liberté de manifester et de s’exprimer”, ainsi que l’indépendance des médias.
Dans l’absolu, le discours du chef de l’État définit les contours de la deuxième République pour laquelle des millions d’Algériens se battent depuis dix mois. Dans les faits, la réalité est loin de ressembler à ce tableau parfait.

Au moment où le président de la République prêtait serment sur le Coran de servir son peuple et de ne point dévier des principes fondamentaux de la démocratie, de la justice et de la bonne gouvernance, Mohamed Tadjadit, un poète à la fleur de l’âge, est condamné, par le tribunal de Sidi M’hamed, à 18 mois de prison ferme. Son crime : avoir publié sur les réseaux sociaux des posts contre le régime. Presque simultanément, une étudiante en sciences humaines et sociales, Nour El-Houda Oggadi, accusée d’atteinte à l’unité nationale, d’atteinte à corps constitués et d’atteinte au moral des troupes, est placée en mandat de dépôt par le juge d’instruction près le tribunal de Tlemcen. Vendredi matin, le trublion acteur, Abdelkader Djeriou, est arrêté à l’entrée d’Oran et placé en garde à vue. Il sera présenté, aujourd’hui, devant le procureur de la République près le tribunal de Tlélat. Il serait accusé d’incitation à attroupement non armé, selon des sources concordantes. Son véritable tort est de s’être positionné sans équivoque et publiquement en faveur du hirak.

En clair, des centaines de citoyens connus ou anonymes sont sous contrôle judiciaire. Des dizaines d’autres croupissent dans des centres pénitentiaires. Il était attendu que le chef de l’État consente un geste d’apaisement envers le mouvement citoyen, en ordonnant la libération sans condition des détenus d’opinion. Rien n’a changé, non plus, en matière de restrictions des libertés de manifester et de circuler dans le pays, pourtant consacrées par la Constitution et défendues par le pensionnaire du Palais d’El-Mouradia, le jour de son investiture. Dans au moins trois villes, Tiaret, Sidi-Bel Abbès et Chlef, selon les échos, les marches du vendredi ont été empêchées par les forces de la Sûreté nationale qui ont procédé à des interpellations parmi les manifestants.

À l’instar d’Alger, Oran a été ceinturée par un dispositif de sécurité musclé de manière à interdire ses accès aux Algériens n’habitant pas la ville, qui voulaient marcher aux côtés de leurs compatriotes réprimés violemment le week-end dernier. Les médias publics ainsi que les chaînes de télévision offshore et une majorité de titres de la presse écrite continuent à servir de relais exclusif aux discours officiels et aux activités des représentants de l’État. Les actes du hirak sont occultés et le débat contradictoire interdit de cité. Que vaut l’offre du dialogue d’Abdelmadjid Tebboune devant ces innombrables portes fermées au mouvement citoyen ?  

**Souhila Hammadi -  Liberté – dimanche 22  décembre 2019

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LE RCD DÉSAPPROUVE LES RÉSULTATS DE L’ÉLECTION PRÉSIDENTIELLE

Le taux de participation réel « ne saurait dépasser les 8% »

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Le Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD) a désapprouvé, ce samedi 14 décembre, dans un communiqué, les résultats de  l’élection présidentielle. Selon le RCD le taux de participation réel « ne saurait dépasser  dépasser les 8% ».

Le parti épingle les forces militaires qui, « en voulant, ainsi, sponsoriser la division et les peurs pour continuer à régenter le pays, le commandement de l’armée précarise davantage sa position dans la recherche d’un consensus pour sortir le pays de l’ornière où il se trouve. Son implication flagrante, à tous les niveaux, dans le montage du scénario de la fraude le disqualifie aux yeux de l’écrasante majorité du peuple ».

Concernant la situation actuelle du pays, le RCD estime que  « la revendication pacifique, portée par tout un peuple, dans la rue depuis 10 mois, pour exercer sa souveraineté dans un climat apaisé et un environnement institutionnel débarrassé des pratiques et des symboles d’un système politique qui a mené le pays à l’impasse, le clan de Gaid Salah n’a vu qu’une opportunité pour régler des comptes».

Quant à l’initiative du Pacte de l’alternative démocratique (PAD), le RCD la considère comme un « espace de la promotion d’une solution démocratique et pacifique à même d’offrir au pays une transition constituante apaisée ». Le parti de Mohcine Belabbas réitère, à ce propos, le soutien du RCD, « qui ne ménagera aucun effort pour son renforcement et l’émergence d’une véritable alternative pour le pays ».

Par ailleurs, le RCD considère l’heure à la fois « grave » et  « porteuse de tous les espoirs », tout en croyant en  « la mobilisation et la détermination du peuple algérien »  pour exercer souverainement son choix sur son avenir.

Kenza SIFI

Publié dans : RCD,Élections Présidentielles

*Liberté- samedi 14 décembre 2019

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Les manifestants rejettent “l’élection de la honte”

La mobilisation de ce nouveau vendredi 13 décembre, qui coïncide avec l’annonce de l’élection d’Abdelmadjid Tebboune, a égalé, voire dépassé les niveaux des premiers actes du hirak populaire.

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À l’image des millions d’Algériens sortis massivement hier pour le 43e vendredi consécutif, les Algérois ont manifesté hier massivement dans la rue pour crier haut et fort qu’ils n’ont nullement voté lors du scrutin de la présidentielle de jeudi. Ils ont démontré à travers les rues du centre d’Alger qu’ils restent fidèles aux engagements pris le 22 février dernier, jusqu’au départ de tous les symboles du régime politique. Les manifestants n’ont donc pas raté l’occasion de rejeter et le scrutin et les résultats annoncés par l’Autorité nationale indépendante des élections. Tout en brandissant des écriteaux hostiles à “l’élection de la honte”, ils ont scandé notamment : “On n’arrêtera jamais ce hirak, jusqu’au départ définitif de tous les pourris du système.” La mobilisation de ce nouveau vendredi, qui coïncide avec l’annonce de l’élection de Tebboune, a égalé, voire dépassé les niveaux des premiers actes du hirak. Les artères du parcours de la manifestation étaient noires de monde, notamment après la prière du vendredi. Les processions de manifestants affluaient de partout. Drapés dans l’emblème national, des  femmes, des enfants, des vieux, des jeunes étaient tous au rendez-vous. L’affluence d’hier a pulvérisé, selon toute vraisemblance, tous les records enregistrés jusque-là. Les premiers carrés de marcheurs qui ont battu le pavé de la rue Hassiba-Ben Bouali et du boulevard Amirouche étaient déjà à la place Tafourah et à la Grande-Poste, alors que d’autres groupes n’avaient pas encore démarré de la rue Mohamed-Belouizdad et de la place du 1er-Mai. Les cortèges venus de Bab El-Oued, de La Casbah et de la place des Martyrs étaient également impressionnants. C’est dire que les marcheurs devaient jouer vraiment des coudes pour se frayer un petit passage afin de rallier les lieux de rassemblement du centre, la place Maurice-Audin ou le jardin Mohamed-Khemisti. Ils ont démontré que leur résolution reste intacte et sans faille, pour faire aboutir le projet phare du peuple algérien : “Yetnahaw gaâ et l’organisation d’une période transition.” D’autres manifestants paradent avec une pancarte pour  condamner les taux de participation, en répétant en chœur : “Le vote est truqué, c’est l’armée qui l’a fait.” 
Les hirakistes ont également tenu à exprimer leur gratitude et à rendre un vibrant hommage aux habitants de Tizi Ouzou, de Béjaïa et de Bouira qui ont boycotté le scrutin imposé par le pouvoir en place. Ils ont entonné à l’unisson : “La Kabylie bravo aâlikoum, l’Algérie est fière de vous.” Le nouvel élu à la magistrature suprême depuis hier, Abdelmadjid Tebboune, en a eu également pour son “nouveau” grade.
 Hanafi H.- Liberté- samedi 14 décembre 2019

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Rassemblements dispersés et nombreuses arrestations à Oran

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“La violence était préméditée”

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“J’ai vu de la haine dans les yeux et les gestes des policiers qui m’ont embarqué”.

Cette phrase a été répétée par de nombreuses personnes, femmes et hommes, qui ont été interpellées avant-hier lors de la répression qui s’est abattue à Oran sur les manifestants.

Chaque vendredi, Brahim Benaouf, jeune militant des droits de l’Homme, se rend à la place du 1er-Novembre d’Oran vers 13h pour marcher. Mais vendredi dernier, lendemain d’un jour de vote marqué par une importante répression policière, Brahim n’a pas quitté le tramway à l’arrêt de l’ex-place d’Armes. “Déjà, j’avais remarqué qu’un ancien hirakiste, reconverti en indicateur, désignait les manifestants à des policiers. J’ai donc décidé de descendre au boulevard Émir-Abdelkader mais, là aussi, j’ai découvert un impressionnant dispositif policier et vu des manifestants se faire embarquer. Il était évident que je devais m’éloigner.”

Le jeune militant quittera le tram des centaines de mètres plus loin, près de la mosquée Ibn Badis, loin du climat de suspicion qui s’était installé au centre-ville. “Je me suis assis à la terrasse d’un café et j’ai commencé à contacter les camarades pour étudier la manière de déjouer la surveillance policière et d’organiser  la  marche.”  Au  même moment,  des manifestants  sont pourchassés et traqués à travers le centre-ville. “J’étais avec un groupe à la place du 1er-Novembre quand j’ai entendu des cris provenant du Bd Émir-Abdelkader. 

Nous sommes allés voir et j’ai vu des policiers pourchasser des jeunes qui arrivaient vers nous. Je me suis mis à interpeller les flics quand un 4×4 de la police s’est brusquement arrêté près de moi”. Khaled, hirakiste de 67 ans, est violemment embarqué et conduit à la 16e sûreté urbaine (Front de mer). “J’avais préparé une pancarte sur laquelle j’avais écrit ‘Kaddour Chouicha est avec nous’. 

Quand les policiers l’ont vue, ils m’ont roué de coups et abreuvé d’insultes : j’ai la cuisse enflée, je boite et j’ai des douleurs à la tête”, racontera-t-il plus tard en ajoutant avoir vu cinq policiers s’acharner sur un jeune homme qui venait s’enquérir de son frère.  “On m’a accusé de ne pas aimer l’Algérie, et on m’a dit que je devais arrêter de me plaindre parce que nous avions désormais un président”, déplorera-t-il en s’insurgeant contre la violence de la police sur des manifestants pacifiques, ce vendredi-là.  

Place des Victoires
Avec celle du 1er-Novembre, la place des Victoires constitue un point de ralliement des hirakistes du vendredi. C’est, donc, tout naturellement que ce carrefour a été encerclé par des dizaines de policiers. “À 14h30, nous avons été attaqués par la police qui nous a aspergés de gaz lacrymogène et frappés. Une jeune fille qui filmait la scène, a été violemment jetée à terre et rouée de coups”, rapporte Nesrine, étudiante de 23 ans, qui affirme avoir échappé de justesse à une interpellation.

Chance que Yacine, trentenaire, et son épouse n’ont pas eue puisqu’ils ont été embarqués alors qu’ils s’apprêtaient à marcher, depuis la même place des Victoires. “On nous a violemment poussés dans un fourgon où se trouvaient déjà quelques personnes. Nous avons été transférés à la 8e sûreté urbaine (Miramar) où nos portables ont été confisqués. Quelque temps après, j’ai été conduit avec ma femme au commissariat de Haï Dhaya (Petit-Lac) où nous avons eu droit à des propos insultants”, raconte Yacine qui dit avoir été traité de zouave et de traître à la patrie.

“Un des policiers a même insinué à ma femme que j’étais responsable de son arrestation, parce que je suis Kabyle et que les Kabyles cherchent le chaos.” “Ma femme est encore sous le choc de ce qu’elle a vu et entendu”, conclut Yacine. Saïd Oussad, journaliste à Liberté, qui se trouvait dans le même “panier à salade”, a été transféré de la 8e sûreté urbaine vers un commissariat de Gambetta.

“Je me trouvais avec un enseignant universitaire dont l’épouse avait été interpellée et conduite vers une autre destination… On nous a confisqué nos téléphones et demandé d’enlever les lacets et nos ceintures… Je pensais que nous allions passer la nuit dans les geôles, mais vers 18h, on nous a finalement libérés”, raconte-t-il en relevant avoir, lui aussi, essuyé les insultes lors de son interpellation et avoir été traité de zouave et de harki. “J’avais beau expliquer que j’étais journaliste, que je couvrais les événements, j’ai quand même eu droit à mon lot d’avanies.”

Hamid Aouragh, photographe de presse, a également été interpellé avec un confrère à Miramar, près de la cinémathèque. “Un 4×4 de la police s’est arrêté mais lorsqu’ils ont vu nos cartes de presse, ils ont fait mine de repartir avant de nous inviter à les suivre… Nous avons été conduits à la 16e sûreté urbaine d’où nous avons été relâchés environ une heure après”, relate le photographe en assurant ne pas avoir été brutalisé.

Le jeu du chat et de la souris
Lorsqu’il apprend que des tentatives de marches ont lieu place des Victoires, le militant des droits de l’Homme, Brahim Benaouf, se rend au centre-ville pour prêter main-forte aux manifestants. “De 15h à 19h, nous avons entamé plusieurs marches depuis le jardin de Miramar et à chaque fois, nous avons été accueillis par des bombes lacrymogènes et des matraques.” Des vidéos postées sur les réseaux sociaux montrent des policiers aspergeant les manifestants de gaz lacrymogène et les matraquant vigoureusement.
“Mais nous tenons bon.

Nous nous asseyons par terre en criant ‘silmya’ mais lorsque nous avons été molestés, nous avons réussi à prendre la fuite”, continue Brahim qui a tenu à rendre hommage aux habitants de St-Pierre, quartier situé en amont de Miramar. “Je n’en connaissais aucun qui avait déjà marché avec nous, mais ce vendredi-là, ils nous ont accueillis et protégés contre les policiers qui nous poursuivaient.” Malgré la répression féroce, Brahim et de nombreux autres manifestants ont réussi à scander des slogans hostiles au pouvoir en toute fin d’après-midi.

Hadj Bouabça, jeune dentiste et hirakiste de conviction, a, lui aussi, été embarqué et tabassé pour son entêtement à continuer à revendiquer une 2e république. Une fois relâché, il a posté un message sur les réseaux sociaux dans lequel il dit pardonner aux policiers. “Vous m’avez arrêté, vous m’avez frappé mais je vous pardonne parce que vous êtes aussi des victimes du système contre lequel nous nous battons”, a-t-il écrit.

Moins indulgents avec les services de police, de nombreux manifestants insultés, violentés et embarqués sont décidés à porter plainte auprès de la justice. “Personne n’a le droit d’user de la violence contre des citoyens pacifiques, qui ne représentent aucun danger pour leurs concitoyens. Et les responsables de cette violence doivent rendre des comptes”, ont estimé de nombreux manifestants qui s’apprêtaient à porter plainte.

Dans une bouleversante vidéo postée sur sa page Facebook, Halima Guettaï, enseignante universitaire, raconte en pleurs les avanies et humiliations qu’elle a subies pour avoir simplement voulu manifester pour son pays. Elle s’engage à porter plainte pour obtenir justice contre les éléments de la police qui l’ont ainsi agressée.

Depuis une semaine, la violence policière s’est progressivement installée à Oran : des marcheurs ont été malmenés et arrêtés en grand nombre dès lundi 9 décembre. Ce soir-là, la marche nocturne contre l’élection a été réprimée près de la mouhafadha d’Oran et cinq personnes ont été hospitalisées. Le lendemain, alors que Kaddour Chouicha était condamné à une année de prison, des centaines de manifestants étaient arrêtés à Sidi Senouci et au centre-ville pour empêcher la marche nocturne.

Jeudi, quelque 400 personnes ont été arrêtées et vendredi, les Oranais ont assisté à une répression inédite. “Cette violence qui a touché des femmes et des enfants doit immédiatement cesser et les responsables doivent rendre des comptes”, a estimé un des avocats du collectif du hirak qui se tient à la disposition des victimes pour constituer des dossiers de plainte.
 **S. Ould Ali – Liberté-  dimanche 15 décembre 2019

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Violence policière aveugle à Oran
***L’inqualifiable a eu lieu à Oran. Plus de 400 manifestants ont été brutalement arrêtés vendredi 13 décembre.

La police s’est lâchée d’une manière particulièrement violente à Oran vendredi contre les manifestants pacifique. Les manifestants ont subi humiliation, coups de matraque, gaz lacrymogène. Selon plusieurs témoignages, la police a eu un comportement qui n’honore pas ce corps de sécurité.

Une brutalité gratuite, aveugle et indigne. Pourquoi cette débauche de violente brute qui martyrise Oran depuis plusieurs semaines ? Même le président du bureau de la Laddh, Kaddour Chouicha, est jeté en prison avec une condamnation d’un an sur le dos. On veut faire taire la dissidence à Oran. 

Des enfants, des femmes, des personnes âgées, des manifestants pacifiques ont essuyé une charge de la part de policiers très brutaux et remontés. Qui a donné des ordres pour permettre à des policiers de maltraiter des enfants, des femmes et des jeunes pacifiques ? 

Ce qui s’est produit à Oran, comme à Haïzer relève d’une dérive gravissime. Rien, absolument rien ne pouvait justifier les coups de matraques, la charge violente contre les manifestants ni le gaz lacrymogène  contre les enfants. 

Balles en caoutchouc à Haïzer, 250 blessés 

Selon le comité national pour la libération des détenus d’opinion (CNLD) « les événements douloureux survenu jeudi 12 Décembre ont causé des blessés importants (par tirs de balles en caoutchouc) où ont personnes ont perdu un oeil et qui se trouve toujours au niveau de l’Hôpital de Bouira ».

Les blessés à l’oeil sont Ouchene Amar (34 ans, marié avec 02 enfants, Haizer ); Djemai Amazigh (20 ans, lycéen, Ath Laaziz); Dahmouni Lounis (20 ans, Ath Laksar – Ouled Rached). Sinacer Abdelwahab (14 ans, Haizer) s’en est sorti avec une fracture de la mâchoire.

Au total, poursuit le CNLD, il y a 250 citoyens de Haïzer blessés lors des émeutes de jeudi 12 décembre.

*lematindalgerie./ 14 décembre 2019
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VIOLENCE POLICIÈRE DE VENDREDI DERNIER À ORAN
Vers une plainte collective des victimes
La 43e marche du vendredi à Oran, a été empêchée par la police qui a recouru à la répression et procédé à des centaines d’interpellations musclées. 

Une plainte collective contre les responsables des violences policières de vendredi dernier devrait être portée prochainement devant les instances judiciaires par le collectif de défense du hirak et la Ligue algérienne de défense des droits de l’Homme. C’est ce que nous avons appris hier auprès d’un des avocats de la défense du hirak un militant de la Laddh. “Ce qui s’est passé à Oran ces derniers jours, notamment vendredi, doit faire l’objet d’une enquête. Les responsabilités doivent être déterminées et des sanctions prises contre les auteurs des violences”, ont indiqué les représentants des deux parties, en rappelant que les Oranais étaient sortis manifester de manière pacifique et ne constituaient aucune menace incitant les services de police à pareille intervention.
Samedi soir, lors de la “gaâda politique” qui a signé la récupération de la place du 1er-Novembre par le hirak oranais, les participants ont abordé la répression policière qui s’est abattue sur les manifestants et les modalités de dépôt de plainte auprès des instances concernées. Un appel a été lancé à tous ceux et à toutes celles dont les droits les plus élémentaires ont été violés (insultes, violences physiques, interpellations arbitraires…) de se rapprocher du collectif de la défense pour déposer leurs plaintes. “Nous avons commencé à constituer des dossiers et à réunir les preuves matérielles pour mettre les gens devant leurs responsabilités”, a indiqué l’un des avocats, en prévoyant une quarantaine de dossiers d’ici à la fin de la semaine.
Pour rappel, la 43e marche du vendredi a été empêchée par la police qui a eu recours à une violence inédite en procédant à des centaines d’interpellations musclées d’Algériens innocents dont certains n’étaient même pas concernés par la marche. “Il y a eu de nombreux blessés et d’importants traumatismes”, a encore déploré l’avocat, plus que jamais convaincu de la nécessité d’une action contre les auteurs de ces exactions. 
Il faut rappeler que la répression de vendredi n’est pas la première du genre, même si elle reste inédite en ampleur et en intensité. Des centaines de manifestants pacifiques ont déjà été violentés et/ou arrêtés par les services de police depuis quelques mois, mais seules deux plaintes ont été portées devant la justice. La première émane d’Abdelhadi Abbès qui, le 9 juillet, a dénoncé une arrestation illégale intervenue quelques semaines plus tôt alors qu’il était accompagné de ses deux neveux mineurs. La seconde a été transmise à la justice par Z. Fayçal, qui s’est plaint d’avoir été roué de coups par des policiers devant le siège de la sûreté de wilaya, début octobre, alors qu’il était en train de filmer un rassemblement de soutien à des manifestants interpellés à la fin d’une marche.
 ***S. Ould Ali - Liberté-  16 décembre 2019

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   “un coup de force” – “une mascarade”

On s’attendait un peu à un tel rejet des résultats de la présidentielle du 12 décembre de la part du Pacte de l’alternative démocratique (PAD), à la lumière des sorties publiques des principaux partis qui le composent (FFS, PST, PT, RCD, etc.). Pour ce conglomérat politique qui s’est résolument investi dans le hirak, le scrutin qui a porté Abdelmadjid Tebboune à la tête du pays n’est qu’“un coup de force” et “une mascarade”. “L’élection présidentielle du jeudi 12 décembre est un coup de force contre la volonté populaire. Mais c’est aussi une victoire du peuple algérien, dans le sens où le rejet de la mascarade du jeudi 12 décembre a été total, avec un taux d’abstention élevé”, a confié un des participants à la réunion du PAD, qui s’est tenue hier au siège du Front des forces socialistes (FFS), à Alger.

Convoquée pour faire le point sur la situation politique du pays “post-présidentielle”, la réunion a été sanctionnée par “une déclaration politique qui met en avant la vision politique du PAD” qui sera rendue publique aujourd’hui.
L’attitude de défiance du peuple algérien ne fait, ajoute notre interlocuteur, que “conforter les thèses du PAD qui milite pour l’alternative démocratique et qui a appelé au boycott de la présidentielle”.
En outre, les participants à la réunion d’hier ont réitéré “la nécessité d’aller vers une transition démocratique via un processus constituant, un des axes fondamentaux du PAD”. Nullement découragés par l’issue de la présidentielle, les membres du PAD ne comptent pas baisser les bras et sont plus que jamais acquis à la nécessité de continuer le combat pour une Algérie démocratique. “On a appelé les Algériens à continuer à se mobiliser de manière pacifique et unitaire, mais aussi à amplifier leurs revendications”, a confié notre interlocuteur. Comment ? Il ne l’a pas précisé. Mais qu’en est-il de leur position vis-à-vis de l’offre de dialogue faite par le nouveau président, lors de sa conférence de presse du vendredi 13 décembre ? “Nous n’avons pas encore tranché la question du dialogue”, a affirmé cette source.*Liberté-  16 décembre 2019

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Saïd Sadi dans une conférence-débat à la Bourse du travail de Paris
Plaidoyer «pour une deuxième Soummam»

Répondant à l’invitation de l’Alliance des démocrates de la diaspora algérienne (ADDA), Saïd Sadi a plaidé, samedi, pour une deuxième Soummam qui serait organisée à partir d’une large convention ou conférence représentative et crédible et dont les participants seraient élus à la base en toute transparence.

Dans une conférence-débat à la Bourse du travail de Paris, intitulée «Pour une deuxième Soummam. La Révolution du sourire face à son destin», l’intellectuel et homme politique Saïd Sadi a pointé la situation actuelle comme une «phase charnière» de l’histoire politique de l’Algérie. Soit comme «une opportunité» et la «nécessité», aujourd’hui, de «mettre l’ensemble de la problématique nationale à plat sans complaisance et sans ostracisme». «Ce qui n’a pas été fait depuis 1957.»

«Et après le 12 décembre ?» A cette question que l’on pose à l’homme politique, Saïd Sadi répond : «Nous n’avons pas à entrer dans l’agenda du pouvoir.» «La révolution populaire doit avoir son propre agenda.» Et il en rappelle les acquis avant de développer sa proposition de deuxième Soummam, son mode d’organisation. Et d’expliquer pourquoi le modèle du Congrès et de la Plateforme de la Soummam est pertinent. En apportant des éléments de réflexion pour une Algérie nouvelle. «La substance du message du mouvement national du 22 Février est clairement l’expression d’une rupture avec le système en place.»

«Ce qui s’est passé le 12 décembre c’est la volonté du système rejeté de se régénérer.» «Au-delà des acquis de ce mouvement qu’il faut savoir apprécier, il y a un élément qui n’a pas été suffisamment relevé, c’est le développement d’une conscience nationale de ce que nous sommes dans notre pluralité. Une conscience nationale qui accepte l’autre, une conscience nationale positive est en train de se forger», a affirmé Sadi. Et cette interrogation : «De quoi est faite la crise actuelle ? A partir d’où faut-il reconstruire ?»

Retour sur la plateforme de la Soummam et ses fondamentaux

«En faussant le présent, en niant l’histoire, le pouvoir cherche à se légitimer. La problématique lancée au Congrès de la Soummam en 1956 est exactement ce qui se passe aujourd’hui. En 1956, il s’agissait de faire prévaloir le politique sur le militaire. C’est ce que réclament les manifestants depuis le 22 février quand ils scandent  »Un Etat civil et pas militaire », de parachever l’indépendance du peuple algérien.» «C’est la question de la citoyenneté qui est posée» par les millions d’Algériens qui manifestent depuis le 22 février.

Les autres questions sont celles «du culte et de sa séparation de la sphère politique, et de la territorialité du paysCes questions étaient portées par le Congrès de la Soummam», a poursuivi l’orateur. «Les régions naturelles ont été définies comme espaces de la Révolution pendant la Guerre de Libération nationale.» Et «c’est parce que les cadres du FLN et de l’ALN étaient en symbiose avec la population que la Révolution a réussi». Sur le plan extérieur «la première attaque subie par la Plateforme de la Soummam est venue de Nasser, le président égyptien.

La Plateforme de la Soummam était une plaie pour la nation arabe». «Ce jour-là, le sort de Abane était scellé.» «On a dit que le Congrès de la Soummam n’était pas représentatif. Or, les participants étaient tous mandatés par leurs wilayas respectives. Des documents l’attestent. C’est une imposture que de soutenir le contraire.» «Le seul responsable de wilaya qui n’était pas arrivé, c’est Ben Boulaïd, il avait été tué avant le congrès.» Et ce témoignage rapporté au conférencier : «Au moment où la pression de l’armée française se resserrait, il avait dit à ses compagnons :  »S’il m’arrivait quelque chose, tournez-vous vers vos frères kabyles. »» Aussi «fallait-il accréditer les résolutions de militants ou celles de Nasser ? Aujourd’hui, c’est le panislamisme qui veut imposer son influence» à l’Algérie et aux Algériens.

Pour une convention nationale représentative et crédible

Saïd Sadi cite le témoignage de Ali Haroun, chargé à l’époque de la communication à la Fédération de France du FLN, qui lui avait dit qu’il a fallu attendre le Congrès de la Soummam et sa Plateforme en août 1956 pour que le FLN ait une visibilité sur la scène internationale. «Le deuxième témoin, c’est feu Bentobal qui m’avait dit que s’il n’y avait pas eu la rencontre de la Soummam, nous aurions probablement échoué. Dans ses mémoires, on lui a fait dire le contraire.» «Personne ne peut nier que les problèmes qui se sont posés en 1956 résonnent avec acuité aujourd’hui.» Et «s’il faut se construire, c’est entre nous, nous n’avons besoin ni du Caire ni d’Abou Dhabi».

L’orateur soutient qu’aujourd’hui une clarification de la scène politique s’impose. «Soit les gens s’alignent derrière l’équipe au pouvoir, soit nous nous donnons les moyens d’apporter à cette révolution une représentativité effective et crédible.» Comment faire émerger cette représentativité ? «L’idée est d’associer tous les Algériens sur la base de règles sur lesquelles personne ne pourra déroger», avance le conférencier.

Il commence par prévenir contre les erreurs qu’il faut éviter : l’autoproclamation ou la désignation par le haut. Et de revenir ensuite à la Plateforme de la Soummam de 1956 – dont le message est pertinent mais sa traduction doit être actualisée – en affirmant que la seule manière de faire est d’organiser cette représentativité à partir des Wilayas historiques. Le Sud pourrait être subdivisé au vu de l’extension de son territoire.

La diaspora a le droit et le devoir de s’associer à cette conférence ou convention nationale. Et aussi «pas de sectarisme idéologique mais des préalables acceptés par tous». «Chaque courant développera ses arguments.» «Pas de concessions sur les fondamentaux démocratiques.» «Voilà les chantiers qui nous attendent pour transformer le contenu démocratique exprimé par la rue en valeur irréversible.» Soit «transformer l’indépendance nationale en acte de libération citoyenne». S’en est suivi un long échange avec la salle. Et cette proposition d’un militant de l’ADDA de dédier le 45e vendredi à Abane Ramdane, qui coïncidera avec le jour de son assassinat.   * elwatan- 16 décembre 2019

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Algérie : la fraude, la digue et la Révolution !
Ceux qui avaient un espoir d’évolution du système depuis l’intérieur, et qui auraient voté en dépit de l’immense mobilisation nationale rejetant ces élections, sont maintenant rassurés. 
          La fraude systémique

Une nouvelle démonstration des pratiques condamnables du système a installé un ‘’nouveau président’’ avec moins de 10 % des suffrages. Ceux qui ont voté peuvent toujours croire au déluge de promesses d’ouverture et de moralisation faites après coup.

Une certitude, il n’y aura jamais de démocratisation du pays par les acteurs du système politique au pouvoir. Ce sont les fraudes de 1962 / 1963 qui sont reconduites jusqu’à ce jour… et qui seront reconduites et amplifiées aussi longtemps que ce système ne sera pas balayé.

Au bourrage habituel des urnes, les listes d’électeurs fantômes et la manipulation fantaisiste et sans limite des chiffres, le peuple algérien semble découvrir la pratique des ‘’soldats électeurs’’, des soldats mobilisés au besoin pour remplacer les citoyens boudeurs des urnes, méthode pourtant utilisée depuis très longtemps dans les villes algériennes. 

Ce qui est nouveau, c’est le transport de ces ‘’troupes’’ vers des zones de fort boycott pour parer la défaillance de la population locale et produire des chiffres et des images pour leurs chaînes de TV. Le KGB (ou son remplaçant actuel en Russie) a encore des leçons à apprendre.

Le système politique et ses prédateurs tirent un avantage certain de cette nouvelle épreuve, après avoir résisté à 10 mois de mobilisation citoyenne pour mettre fin à ce monopole du pouvoir. 

Cependant, l’usure du système et les conflits d’intérêts entre clans ont montré que l’unanimité des gouvernants n’est que de façade. Les procès-règlements de comptes actuels entre factions, qui sont du type maffieux, sont là pour le prouver.

Les prédateurs actuels en poste et ceux qui seront cooptés dans les semaines à venir vont redoubler d’ingéniosité pour brouiller les pistes de leurs méfaits : supprimer les comptes bancaires douteux, faire bénéficier, non leurs enfants et leur épouses ou époux, comme ceux qui sont à la prison d’El Harrach, mais les cousins éloignés, les copains et complices en dehors de tout soupçon…

La mobilisation populaire et pacifique reste aujourd’hui le seul rempart pour bloquer la résurgence du système et ses prédations. Après les ministres cantonnés dans leurs bureaux, interdits de déplacements dans le pays, les candidats sans campagne électorale, il y aura encore un temps pour cet ‘’indu-président’’ qui fera ses déplacements dans les régions sous la protection des chars de l’état-major. 

**La digue

Si le système n’est pas encore à terre, la mobilisation populaire a montré qu’il n’est pas invincible. L’exemplaire de la Kabylie, salué par toutes les régions d’Algérie, a montré que lorsque la population fait bloc, pacifiquement, elle met en échec toute tentative d’intimidation ou de mise au pas. La voie est tracée pour le pays. La Kabylie n’est pas ce bloc qui menacerait ‘’l’unité nationale’’, mais il constitue le noyau dur pour la construction de cette unité nationale sur des valeurs républicaines et démocratiques.

Un élément un joué un rôle déterminant dans la mobilisation : l’engagement des élus locaux aux côtés de la population pour refuser d’organiser ces élections de l’esbroufe. C’est un acquis à préserver et à amplifier car ces élus sont de véritables élus par la population (sous l’étiquette de partis démocratiques). Il crédibilise ainsi le rôle de l’élu dans notre pays. La reconstruction de la nouvelle Algérie devrait se faire à partir de la commune, dans le prolongement de l’organisation associative dans les villages, les quartiers, les cités sans nom résultats de l’exode rural. 

La consolidation des initiatives qui ont émergé dans cette mobilisation populaire au sein du Hirak depuis février 2019 constitue une étape vers la construction de la citoyenneté assumée et autonome.

La Révolution pacifique.

Si la refondation de l’État national, la protection des richesses nationales (1) et la récupération des sommes colossales détournées depuis 57 ans est toujours une priorité du mouvement populaire, le plus important est sur le terrain idéologique et culturel pour régler sereinement la question nationale.

Le système politique imposé depuis 1962, en plus d’être une organisation totalitaire et maffieuse, s’aligne sur l’idéologie arabo-islamiste négatrice de la réalité historique, culturelle et géostratégique de notre pays, en arrimant notre pays à un monde arabe mythique des années 1930 et non au sous-continent nord-africain, notre milieu naturel et historique et potentiel de développement.

Les slogans des manifestants, au-delà du fondamental ‘’système dégage’’, sont ‘’libérons l’Algérie’’ et ‘’Istiqlal’’ (indépendance nationale). Le message est on ne peut plus clair ; il s’agit d’arracher la souveraineté du pays, après l’indépendance territoriale et politique obtenue en 1962 contre la colonialisme français). C’est un constat partagé par la majorité de nos concitoyens, avec celui du maintien de la lutte pacifique.

La non reconnaissance par la majorité des citoyens de cet indu-président et l’actualité de l’exigence ‘’système-dégage’’, ouvrent la voie à toutes les options de la lutte pacifique. Pour cela, les prochaines semaines seront déterminantes. Les déclarations à chaud des manifestants dans la rue ne laissent aucun doute sur la poursuite et l’amplification du mouvement.

A.U.L.

Notes et liens internet :

(1)  Même le gouvernement Colombien vient d’arrêter cette semaine l’exploitation du gaz de schiste démarré depuis 2018  par une société américaine (Drummond) en Colombie.

 **Auteur- Aumer U Lamara, physicien, écrivain

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