une nouvelle République à tout prix-1
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** L’après-Bouteflika se dessine
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*La cause principale de la décadence:
elfassad essayassy- le pouvoir corrompu
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*Algérie: La genèse d’une décadence
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*Quand la raison est absente, la force règne !
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un militaire sans formation politique,
n’est qu’un criminel en puissance
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*Si tu ne t’occupes de politique, c’est la politique qui s’occupera de toi
*La tyrannie ne perdure que par le silence complice
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*Nous aimons notre pays mieux que vous qui êtes au pouvoir
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On ne leurre pas un peuple éveillé !
Entre le peuple et le régime, il n’y a plus de réconciliation possible. Les millions d’Algériens qui ont battu le pavé, hier, pour le quatrième vendredi de colère consécutif, en ont fait le rappel, si besoin est. Le message qui est délivré par cette mobilisation, une nouvelle fois grandiose et magnifique, est sans équivoque : l’heure du départ du régime a sonné. Un départ que rien ne saurait retarder et encore moins annuler. Lucides, les Algériens ne se sont pas laissé distraire par les manœuvres et autres petites ruses, ni encore par cette opération de com confiée au trio Lamamra-Brahimi-Bedoui, et qui s’est avérée sinon lamentable, en tout cas la moins réussie de tous les régimes que le pays a connus depuis son indépendance. Envoyés au charbon, comme on dit, les deux diplomates et le pauvre Bedoui ont dû comprendre qu’on ne leurre pas un peuple éveillé et conscient, mais surtout qu’il serait vain d’essayer de nouveau, après la réponse cinglante de la rue.
Aussi, s’il y a un enseignement qu’ils doivent en tirer, c’est de renoncer à leur mission, inéluctablement vouée à l’échec. Car, le peuple a dit son dernier mot. Une fois pour toutes. Il n’entend pas changer d’avis. Ce que veut le peuple, au patriotisme légendaire et qui a surpris le monde entier par sa mobilisation maintenue pacifique durant un mois entier, malgré les provocations, c’est que l’histoire n’enregistre pas un autre coup d’État en Algérie, en l’occurrence celui qui est en train de s’opérer à travers la décision prise par Bouteflika ou par ceux qui parlent et agissent en son nom pour prolonger le mandat présidentiel au-delà de sa date d’expiration qui interviendra durant la dernière semaine d’avril. Il est déterminé à faire écrire l’histoire autrement, plus belle, avec des mots qui ne plongent pas dans le cauchemar, mais qui entretiennent le rêve. Il y tient.
Il l’a fait savoir le 22 février dernier et il le répète chaque vendredi, voire chaque jour, avec plus de force. Toute la planète l’a compris, sauf le régime auquel il s’adresse en premier, qui fait toujours mine de n’avoir pas compris ce qui lui est demandé, exposant ainsi, par un tel entêtement, le pays à tous les périls. Car, c’est au peuple de se donner les dirigeants qu’il veut, et non au pouvoir, quel qu’il soit, de s’offrir le peuple de son choix. Qui doit partir, donc ? Ce n’est certainement pas le peuple. C’est le régime.*par Sofiane Aït Iflis - Liberté- samedi 16 mars 2019
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*La grande supercherie
**Nous l’avons craint, maintenant, nous le notons avec amertume : le président Abdelaziz Bouteflika tente une nouvelle ruse avec le peuple. La décision qu’il a prise, en guise de réponse à la rue qui s’est mobilisée contre le 5e mandat qu’il briguait et, donc, contre la prolongation de son magistère à la tête de l’État algérien, n’est rien d’autre qu’une grossière manœuvre à travers laquelle, il espère se maintenir au pouvoir sans avoir à passer par l’épreuve des urnes. Car, à bien y regarder, entre la proposition qu’il a faite la veille du troisième vendredi de colère et celle annoncée ce lundi soir, il n’y a qu’une petite, mais très significative différence : l’une et l’autre lui permettent de prolonger son mandat actuel. La première était une promesse d’écourter son 5e mandat, s’il venait à être élu le 18 avril, et d’organiser une élection présidentielle anticipée dans des délais qu’il ne fixe pas précisément. La seconde n’est qu’une reformulation de la première, tant elle procède du même agenda politique et se projette par conséquent vers la même perspective. Autrement dit, dans l’histoire, il n’y a que le procédé qui change, la finalité reste la même : demeurer Président.
Or, les Algériens qui sont sortis par milliers dans les rues de toutes les villes du pays ne se sont pas mobilisés pour l’interruption du processus électoral. Le leitmotiv, le principal, qui a cimenté leur formidable mobilisation, se confine en le rejet du 5e mandat, c’est-à-dire contre la prolongation de la présidence de Bouteflika. Ce dernier fait mine de ne l’avoir pas compris ainsi, puisqu’il se contente d’annuler le scrutin présidentiel tout en se maintenant dans ses fonctions de Président. Cela pour l’aspect politique.
Au plan de la légalité, la décision de Bouteflika est une violation flagrante de la Constitution. De quel droit, en effet, reporte-t-il, tout chef de l’État qu’il est, une élection à laquelle sont inscrits d’autres candidats, qu’il ne consulte, au demeurant, pas ? On peut nous rétorquer que sa décision est une réponse à une demande populaire. Certains peuvent le concéder, quoique ce soit difficilement défendable. Mais la grande violation de la Constitution que Bouteflika commet, c’est de décider seul et de manière régalienne qu’il reste chef de l’État, après l’expiration de son mandat actuel. C’est dangereux, car cela ouvre la voie à toutes les dérives et met en péril l’État et ses institutions. Ce n’est pas irréversible, cependant.
Le peuple peut toujours exercer sa souveraineté.*par Sofiane Aït Iflis - Liberté- mardi 12 mars 2019
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Mostefa Bouchachi :
l’application de l’article 102 est «une forme d’avortement du soulèvement pacifique »
L’avocat Mostefa Bouchachi, ancien président de la Ligue algérienne de défense des droits de l’homme, a réagi à la proposition du chef d’état-major de l’armée, Ahmed Gaid Salah, portant application de l’article 102 de la Constitution relatif à la vacance du pouvoir.
Gaid Salah , également vice-ministre de la Défense, a suggéré aujourd’hui depuis Ouargla, l’application de l’article 102 de la constitution pour, selon lui, résoudre l’impasse politique que vit l’Algérie. Lequel article qui stipule : « Lorsque le Président de la République, pour cause de maladie grave et durable, se trouve dans l’impossibilité totale d’exercer ses fonctions, le Conseil constitutionnel se réunit de plein droit, et après avoir vérifié la réalité de cet empêchement par tous moyens appropriés, propose, à l’unanimité, au Parlement de déclarer l’état d’empêchement. Le Parlement siégeant en chambres réunies déclare l’état d’empêchement du Président de la République, à la majorité des deux tiers (2/3) de ses membres et charge de l’intérim du Chef de l’Etat, pour une période maximale de quarante cinq (45) jours, le Président du Conseil de la Nation, qui exerce ses prérogatives dans le respect des dispositions de l’article 104 de la Constitution ».
Me Bouchachi a affirmé ce soir, dans un live Facebook, que la mise en oeuvre de cet article constitue un « danger » pour le mouvement populaire né le 22 février dernier. L’article 102 de la Constitution prévoit que la période de la vacance du pouvoir sera gérée par le président du Conseil de la Nation (Abdelkader Bensalah) et les élections seront organisées par l’actuel premier ministre (Nourredine Bedoui) tandis que les résultats seront supervisés par le Conseil constitutionnel présidé par Taib Belaiz. « Les symboles de l’ancien régime vont superviser la période de transition, organiseront les élections et proclameront les résultats. A mon avis, ceci est inacceptable auprès des Algériennes et des Algériens qui ont dit d’une seule voix ” Nous voulons que vous ( pouvoir) dégagez, s’il vous plaît, partez !” », a déclaré Me Bouchachi.
Il a expliqué en ce sens que « le peuple ne peut pas avoir confiance en ces frères (symboles du régime) qui avaient détourné sa volonté ».
L’avocat a rappelé les revendications exprimées par les Algériens depuis le début de « la révolution pacifique » du 22 février. « Nous voulons un gouvernement d’entente nationale en concertation avec la classe politique qui jouit de la confiance du peuple. Il y a de nombreux Algériens qui ont l’expérience et les capacités pour gérer cette période de transition et former un gouvernement …».
En somme, Mostefa Bouchachi estime que la proposition de Gaid Salah « est une forme d’avortement du Hirak pacifique ».
*FAROUK DJOUADI - elwatan- mercredi 27 mars 2019
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SAÏD KHELIL ANALYSE LA SITUATION POLITIQUE QUE TRAVERSE LE PAYS
“Ce que nous vivons est un moment fondateur de notre pays”
L’ancien cadre du FFS prévient contre la transition rapide qui consiste en le passage direct à l’organisation d’une élection présidentielle, tout en soulignant l’urgence d’en finir d’abord avec la gérontocratie qui prend l’État en otage.
“Le régime est vraiment fini, il est arrivé à sa fin biologique, il n’est même pas capable de présenter un successeur à Bouteflika, et ce que nous vivons est un moment fondateur de notre pays. C’est maintenant que nous allons instaurer notre république car il n’y en avait pas une première”, a analysé le Dr Saïd Khelil, ancienne figure de la cause berbère, qui a été, hier, l’invité des débats de l’université autour de la thématique : “1989-2019, transition démocratique en Algérie : enjeux et perspectives”.
“Aujourd’hui, la transition est inéluctable, et là le constat fait consensus. Nous sommes tous interpellés, en tant que citoyens, en tant que peuple et en tant qu’intellectuels car si nous ne sommes pas acteurs de notre avenir nous risquons, encore une fois, de le subir”, a-t-il préconisé non sans inviter à tirer les leçons des drames et des échecs vécus depuis la Révolution. “Nous avons vécu le drame de la liquidation des chefs de la Révolution, des coups d’État et de la dictature. Nous avons aussi vécu le résultat de la transition de 1988 lorsque l’on a laissé le régime piloter les réformes. Nous avons vu comment le pays a basculé dans la violence et comment il s’est mis sur la voie de la régression et comment les acquis de 88 ont été résorbés avant de finir par basculer dans une dictature molle avec l’arrivée de Bouteflika”, a rappelé le Dr Saïd Khelil avant d’esquisser ce qui peut constituer une solution pour le pays.
L’ancien cadre du FFS a d’emblée prévenu contre la transition rapide qui consiste en le passage direct à l’organisation d’une élection présidentielle. “Dans ce cas de figure, le président élu sera contraint de s’appuyer sur le personnel politique déjà en place et là le système risque de se régénérer rapidement”, a-t-il prévenu tout en soulignant l’urgence d’en finir d’abord avec la gérontocratie qui prend l’État en otage. “Ce qu’il faut c’est un compromis historique entre l’armée et le peuple pour que tout le monde soit rassuré et que soit garanti que la situation ne dérape pas vers des règlements de comptes et qu’il s’agira plutôt d’un changement profond à apporter”, a estimé Saïd Khelil avant d’aborder les options possibles pour une transition sans heurt. À ce sujet, si Saïd Khelil estime que l’idée d’aller vers un présidium est “une idée à creuser” tant elle n’est pas mauvaise surtout, a-t-il rappelé, que l’Algérie a déjà connu cela avec le fameux Haut-Comité d’État du début des années 90, c’est surtout l’idée d’un gouvernement de transition qui se chargera de gérer les affaires courantes et préparer la Constituante avant d’aller vers des élections générales qu’il a le plus défendue. “Je ne parle pas bien sûr d’un gouvernement de transition comme celui qui vient d’être installé et avec lequel le pouvoir n’a pas répondu à la revendication du peuple. La nomination de Bedoui comme Premier ministre est la pire des insultes au peuple et ce n’est, sans doute, pas quelqu’un comme Lakhdar Brahimi qui peut écouter les jeunes. Ce dont je parle est un gouvernement de transition composé de compétences nationales qui va opérer les premiers toilettages d’urgence dans les institutions et poser les garde-fous et les mécanismes nécessaires pour que la Constituante ne dérape pas”, a-t-il développé.
Interrogé quant aux positions de la communauté internationale sur la question algérienne, Saïd Khelil a répondu n’être guère étonné car, d’un côté, a-t-il analysé, “les puissances étrangères s’accommodent, voire composent avec les régimes en place, mais elles ont toujours un plan B en fonction de la direction du vent” et, d’un autre côté, a-t-il ajouté, “un régime démocratique en Algérie va déranger beaucoup d’intérêts à commencer par ceux des monarchies du Golfe”. “Mais une démocratie portée par tout un peuple peut être protégée par ce même peuple”, a-t-il ajouté optimiste.
*Par Samir Leslous - Liberté- 21 mars 2019
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*une mobilisation extraordinaire à Oran
Ce 4e vendredi de mobilisation et de protestation aura été plus qu’une réponse adressée au Premier ministre Nourredine Bedoui et à tous ceux qui représentent le régime, et qui s’inscrivent dans sa continuité ou sa survie.
*La population s’est mobilisée de manière extraordinaire à Oran, en se retrouvant au centre-ville plus nombreuse que les vendredis précédents et surtout plus déterminée que jamais à s’opposer “à la feuille de route du pouvoir”. Hier les slogans étaient adaptés à l’évolution de la situation, et comme autant de réponses au Premier ministre et à son vice-ministre.
De manière tranchée, hommes, femmes, jeunes et moins jeunes, en famille ou entre amis, toutes catégories sociales confondues, les Oranais ont choisi de crier haut et fort ce qu’ils veulent et ce dont ils ne veulent plus.
La manifestation a débuté à la place du 1er-Novembre, avant même la fin de la prière, avec des chants révolutionnaires fusant de la foule et la réappropriation des symboles historiques tels que “l’Algérie des chouhada toujours debout”, “Pour une Algérie libre”. Ce mot de liberté, comme retrouvée dans les rues, revenait souvent dans les slogans inscrits sur les banderoles et autres pancartes brandies par les manifestants. Pour bien signifier qu’ils n’abdiqueront pas et resteront toujours mobilisés, les manifestants ont encore scandé : “Nous marcherons sans nous arrêter !”
Hier, vendredi, les Oranais se sont montrés plus politisés, plus revendicatifs, comme si à leur tour, ils avaient leur propre feuille de route et leur plateforme de revendications, face à celle des tenants du pouvoir. D’ailleurs, la marche est organisée par carrés, des milliers d’hommes et de femmes, toujours plus nombreux, se regroupent par quartiers, par secteurs, par groupes d’amis, de familles, de collègues, ou encore de profession, des syndicats, etc.
Chacun venant avec sa banderole, ses drapeaux et ses pancartes.
Alors que des centaines de protestataires étaient déjà arrivés devant le siège de la wilaya, d’autres étaient encore au point de départ du cortège, à savoir la place du 1er-Novembre, la rue Larbi-Ben M’hidi ou le Front de mer. Encore une fois, la capitale de l’Ouest a montré qu’elle était plus déterminée que jamais. *Par LOUKIL D - Liberté- samedi 16 mars 2019
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“Partez tous”, dit la rue ; le pays s’en sortira à moindres frais.
***Le règne de Bouteflika est agonisant même si son clan semble résister au coup de semonce de Gaïd Salah qui a, pour une fois, reconnaissons-le, le mérite d’étaler sur la place publique la fracture dans le système. D’un côté, les opposants à cette invention politique qu’est la continuité hors tout cadre légal, et qui devrait d’ailleurs boucler la liste de ses réalisations, et de l’autre, l’état-major de l’ANP accompagné par des partis de l’alliance qui agissent dans un réflexe de survie après avoir accompagné et applaudi le Président pendant 20 ans.
Faut-il cependant remarquer qu’aucun des deux camps en conflit ouvert ne songe réellement au pays, et encore moins ne donne un sincère écho à l’appel du peuple. Pour preuve, ils ont laissé la situation se corser pour réagir, mais trop tard pour prétendre apporter la solution. La volonté du chef d’état-major de l’armée de mettre fin à l’ère Bouteflika en invoquant l’article 102 de la Constitution bute déjà sur son inapplicabilité.
Parce que les options qu’il offre risquent d’être inappropriées dans le contexte actuel. Ni l’empêchement ni la démission ne régleront la problématique ou ne calmeront la rue tant ils remettent le pouvoir entre les mains de ces mêmes hommes contre lesquels le peuple s’est soulevé. L’option que semble favoriser le clan présidentiel est que le Président continue de régner sans mandat ou qu’il aille jusqu’au bout de l’actuel.
Autrement dit, créer une situation exceptionnelle ; mettre le pays dans l’impasse après l’avoir mis à genoux. Ne reste alors pour sortir de cette inextricable étape que l’option préconisée par les partis de l’opposition, les personnalités et la rue, qui devront, toutefois, transcender leurs clivages idéologiques et leurs petits calculs pour aboutir à un minimum consensuel pour amorcer véritablement la transition démocratique.
En attendant, c’est le bras de fer entre les deux clans au pouvoir qui risque de se durcir et de durer avec des conséquences sur la stabilité du pays. “Partez tous”, dit la rue ; le pays s’en sortira à moindres frais.
*par Djilali Benyoub - Liberté – jeudi 28 mars 2018
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“L’application de l’article 102 conduira vers l’impasse”
“Il faut absolument sortir du cadre constitutionnel. Le cadre constitutionnel, qui définit les institutions politiques, ne répond pas aux besoins et aux exigences de la société”, a estimé le président de Jil Jadid.
Invité, hier, par le Forum hebdomadaire de l’université Mouloud-Mammeri de Tizi Ouzou, le président de Jil Jadid, Soufiane Djilali, n’a pas raté l’occasion pour livrer son analyse des derniers développements politiques, notamment l’appel du chef d’état-major de l’ANP à l’application de l’article 102 de la Constitution pour mettre fin au règne de Bouteflika. Si pour le président de Jil Jadid, la première partie de l’article 102 de la Constitution, qui consiste à mettre fin au règne de Bouteflika, répond à une partie de la revendication populaire, sa seconde partie pose de sérieux problèmes qui requièrent encore une forte mobilisation et de la vigilance. Tout en considérant la déclaration de Gaïd Salah comme “un nouvel acquis” puisque dans quelques jours ou quelques semaines, Bouteflika ne sera plus Président, Soufiane Djilali a estimé, toutefois, que “dans sa première partie, l’article 102 répond à l’aspiration du peuple qui dit au système de Bouteflika qu’il faut dégager, mais pour la suite, il ne faut pas lâcher car, essayer de traduire la volonté politique à travers cet article conduira vers l’impasse”.
Poursuivant son analyse, le conférencier a considéré qu’il faut, ainsi, récupérer ces annonces successives comme “une victoire pour le peuple”, tout en maintenant le cap de la mobilisation jusqu’à ce que, “une phase de transition négociée et dont le contenu sera clair et accepté de tous soit obtenue”. “En un mois de mobilisation, le peuple a fait tomber le 5e mandat, il a fait tomber la tentative d’un 4e mandat prolongé, il a fait tomber le gouvernement d’Ouyahia, il a fait tomber le FLN qui commence à dire : Je suis avec, le peuple, il a pu faire sortir le RND de sa position, puisqu’il est en train de critiquer maintenant le pouvoir. C’est le dénuement total au sein du pouvoir. C’est une mise à nu totale de leur malfaisance. Il faut récupérer tout cela comme une victoire pour le peuple. Récupérons les gains, puisque le peuple est en train de gagner pas à pas, mais le match n’est pas terminé”, a-t-il détaillé, avant d’esquisser les enjeux qui découlent de l’application de l’article 102 de la Constitution. “Bien que le verdict soit tombé, le pouvoir utilisera tous les subterfuges possibles pour essayer de sauver sa peau”, a, d’emblée, souligné Soufiane Djilali.
Pour lui, appliquer ainsi l’article 102, “c’est essayer de construire l’avenir à partir d’une Constitution que nous avons refusée, et elle est le résultat d’un régime que nous ne voulons plus”. Ainsi, tout en considérant qu’on ne peut faire du neuf avec du vieux, soit avec les mêmes moyens et les mêmes méthodes, l’orateur estime que “M. Bensalah ne peut absolument pas représenter une période de transition”. “On le refusera”, a-t-il appuyé avant d’appeler à sortir du cadre constitutionnel. “Il faut absolument sortir du cadre constitutionnel. Le cadre constitutionnel, qui définit les institutions politiques, ne répond pas aux besoins et aux exigences de la société. Il faut en sortir”, a-t-il plaidé, tout en réaffirmant que l’article 102 ne signifie pas plus que Bensalah va prendre le pouvoir pendant 3 mois ou 4 mois et demi, puisque s’il y a démission du Président, nous irons immédiatement vers l’installation du président par intérim et la convocation du corps électoral, et qu’au bout de 3 mois, il devra y avoir une élection. “Et là, ce n’est pas possible puisque la société n’a pas fait ses choix, il n’y a aucun débat et elle n’a pas fait émerger les solutions qu’elle désire”, a fait remarquer Soufiane Djilali, qui appelle le peuple à maintenir la mobilisation et à être prêt à sortir dans la rue dès qu’il y a tentative de déviation de ses aspirations.
“Vendredi, il faudra encore sortir dans la rue de telle sorte que la transition soit gérée par des hommes acceptables pour tous et qui, à l’issue de cette transition, vont rentrer chez eux”, a-t-il appelé. *Par Samir Leslous - Liberté – jeudi 28 mars 2018
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Mohcine Belabbas expose la feuille de route pour «une transition de rupture» :
«Gaïd Salah a commis un grave dérapage»
Le président du Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD), Mohcine Belabbas, charge violemment le chef d’état-major de l’ANP, Ahmed Gaïd Salah. L’appel lancé par ce dernier à l’application de l’article 102 de la Constitution comme solution à la crise actuelle est considéré par le leader du RCD d’«intrusion dans la sphère politique».
«C’est un dérapage grave et un appel à la mutinerie», lance-t-il, lors d’une conférence de presse animée hier à Alger. Une conférence convoquée essentiellement pour rendre publiques les propositions du parti en vue d’aller vers «une transition de rupture». Pour Mohcine Belabbas, le premier responsable de l’ANP s’est rendu «coupable d’usurpation de fonction». «Ahmed Gaïd Salah a transformé l’armée en un parti politique.
De quel droit s’est-il ingéré dans ce genre de questions ? Il n’appartient pas à un chef d’état-major de faire ce genre de déclaration», affirme-t-il. Selon lui, la déclaration de Gaïd Salah «a envenimé la situation».
«Ce général de corps n’est pas le chef suprême des armées. Il n’a pas cette qualité. Donc, il y a usurpation de fonction. Il n’a pas le droit de faire ce genre de déclaration», soutient-il, précisant que si nous étions dans un Etat démocratique, le chef d’état-major serait limogé sur-le-champ. «Dans un Etat démocratique normal, le chef de l’état-major devrait être destitué rapidement, parce que c’est un grave dérapage. Il a outrepassé ses prérogatives», fulmine-t-il.
«Appliquer l’article 7 de la Constitution»
Rappelant que le RCD était le premier à appeler à l’application de l’article 88 de la Constitution (actuel article 102) en décembre 2012, Mohcine Belabbas estime que cette disposition «est dépassée par les événements». «On aurait dû activer cet article il y a des années, car le Président était malade et n’assumait pas ses fonctions. L’appel à l’application de l’article 102 vise à sauver le système au détriment de l’Algérie», martèle-t-il.
Et d’ajouter : «Aujourd’hui, le peuple a dit son mot. C’est l’article 7 qu’il faut appliquer pour restituer le pouvoir au peuple.» Selon lui, depuis le 22 février dernier, «il n’y a plus ni opposition ni partis d’alliance». «Le vrai pouvoir c’est le peuple. Il y a ceux qui sont avec le système et contre le peuple et ceux qui sont avec le peuple et pour le départ du système», déclare-t-il, avant de procéder à la présentation de la feuille de route du RCD pour enclencher «la transition de rupture».
Cette démarche commence, dit-il, par la satisfaction de certains préalables : «Démission du chef de l’Etat qui doit, avant de partir, renvoyer son gouvernement et procéder à la dissolution des deux Chambres du Parlement et du Conseil constitutionnel.»
Après cette étape, le RCD propose «l’élection d’une Haute instance de transition qui sera constituée de trois personnes issues exclusivement de la société civile (corps de la magistrature, enseignement supérieur et syndicats autonomes)». «L’âge des candidats devra être de moins de 60 ans à la date de l’élection», explique Mohcine Belabbas.
Cette haute instance devra nommer «un gouvernement de salut national parmi les compétences nationales». «Toute personne ayant une attache partisane doit être exclue. Les partis politiques peuvent seulement être consultés», souligne-t-il.
«Zeroual a une responsabilité dans la situation actuelle»
Interrogé sur la proposition faite par certains de confier «la gestion de la transition à l’ancien président Liamine Zeroual», l’orateur estime que ce dernier a «une grande responsabilité dans la situation actuelle». «Il a violé la Constitution et organisé la fraude électorale qui a permis à Bouteflika de prendre le pouvoir. Sa démission est une forme de désertion», explique-t-il.
Précisant que la période de transition devra durer six mois, le RCD propose aussi la mise en place du comité de la nouvelle Constitution, qui devra finaliser son travail avant le début du mois de juin pour soumettre le nouveau texte ainsi que la nouvelle loi électorale à un référendum populaire. «La nouvelle Constitution devra définir avec précision les missions de l’armée et dissoudre définitivement le DRS», ajoute-t-il.
Afin de permettre une transition en douce et un retour à la souveraineté populaire avec l’élection d’un nouveau Président avant la fin du mois d’octobre 2019, le RCD suggère des mesures d’apaisement sur le plan économique et social.
*MADJID MAKEDHI - elwatan- jeudi 28 mars 2018
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*Le pouvoir a été capturé par plusieurs groupes qui s’entre-déchirent de manière parfois ouverte
*****Les manifestations qui depuis ces dernières semaines se succèdent en Algérie viennent de connaître un nouveau succès. Le général Ahmed Gaïd Salah, chef de l’armée algérienne, a appelé mardi à la destitution d’Abdelaziz Bouteflika pour inaptitude. Ce succès vient après la décision, prise il y a plusieurs jours, du Président Bouteflika de ne pas se représenter tout en en annulant l’élection présidentielle.
La décision du Président Bouteflika, vieillard fort diminué, de se représenter pour un cinquième mandat avait humilié les Algériens. Cette décision de ce que l’on nomme le «pouvoir», un assemblage fragile de cliques hétéroclites, de vouloir faire réélire celui qu’ils appellent le «mort-vivant» avait un côté odieux comme un côté ridicule.
Au-delà, se sont exprimées dans ces manifestations des aspirations à plus de liberté, à plus de démocratie. Il n’est pas absurde, même si les situations des deux pays diffèrent grandement, de comparer le grand mouvement pacifique qui touche actuellement toutes les villes d’Algérie au mouvement des Gilets jaunes en France.
**Un mouvement massif
La première caractéristique du mouvement de protestation en Algérie a été son aspect massif, mais aussi très consensuel. Aucune force politique n’a réussi à se l’approprier. Ce mouvement s’est de plus déroulé, dans l’ensemble, sans violences majeures. Les forces de l’ordre algériennes ont fait preuve d’une grande retenue et le mouvement n’a jamais tourné à l’émeute. Cela signe la maturité de la population, qui vit toujours avec le souvenir de l’atroce guerre civile d’il y a deux décennies, mais aussi la retenue du «pouvoir», qui sent bien qu’il a affaire à un soulèvement général de la population.
Ce dernier a donc été impressionné par le caractère massif des démonstrations de rue, mais aussi des grèves qui ont paralysé le pays. Il n’a pas fait, du moins pour l’instant, le choix de la violence. Il a évité le pire en cédant sur le principe: le Président Bouteflika ne se représentera pas. Pourtant, l’annulation de l’élection présidentielle et la très imparfaite définition de la «période de transition» dans laquelle devait s’installer l’Algérie étaient autant de facteurs qui continuaient d’entretenir la mobilisation. C’est sans doute ce qui a décidé l’armée de sortir de sa réserve et de prendre position pour une destitution du Président, destitution qui ouvre la voie, normalement, à de nouvelles élections. Le fait que l’armée n’ait pas elle-même pris le pouvoir, et qu’elle appelle à une destitution légale par le biais de l’article 102 de la Constitution algérienne, est aussi un signe fort. Les processus légaux ne sont donc pas interrompus.
C’est ici qu’une première comparaison peut être faite avec la France. Le mouvement des Gilets jaunes, qui dure désormais depuis près de quatre mois, a vu ses manifestations constamment réprimées, et cela très durement. Le bilan français est lourd par comparaison à ce qui s’est passé en Algérie: un mort à Marseille, cinq personnes mutilées par perte d’une main, 22 personnes éborgnées, des milliers de blessés plus légers, des milliers d’arrestations et des centaines de condamnations, parfois très lourdes et souvent très injustes. Si l’on veut pousser la comparaison plus loin, les Algériens sont confrontés à une presse bien tenue en main, directement ou indirectement, par le pouvoir; nous avons une situation à peu près équivalente en France. Mais, ils s’informent, comme en France, sur les «réseaux sociaux» ou sur des chaînes d’informations étrangères. Pourtant, cela n’a pas entraîné, du moins en Algérie, de réaction violente du pouvoir…
**La spécificité de la situation algérienne
Là où ces comparaisons s’arrêtent, c’est quand on en vient à l’histoire politique récente des deux pays et à leur situation économique. La guerre civile qui a eu lieu en Algérie, on l’a dit, continue d’imprégner les mémoires. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle ce pays n’a été touché que très superficiellement par ce que l’on a appelé, bien à tort, les «Printemps arabes». Le système politique y est aussi différent. L’Algérie, depuis son indépendance, n’a jamais su trouver un équilibre démocratique et pluraliste. Le pouvoir y a été capturé par plusieurs groupes, qui s’entre-déchirent de manière feutrée et parfois ouverte. Et l’on peut penser que c’est leur incapacité à aboutir à un accord sur le successeur de Bouteflika qui avait conduit à la situation qui a provoqué l’explosion
La France, elle, a eu un régime démocratique même si, depuis 2005, les dérives se font toujours plus sentir vers un régime non-démocratique et autoritaire. De ce point de vue, l’élection d’Emmanuel Macron a certainement marqué un moment important dans la constitution d’un bloc soudé par l’argent et le pouvoir économique, ce que l’on peut appeler une ploutocratie et dans la dérive autoritaire de ce dernier. Le vote de la fameuse loi dite «anticasseurs», qui se fit sous l’émotion, parfois feinte, des exactions des «Black Blocs» constitue un important saut en arrière en matière de droits démocratiques. Les propos et l’attitude du Président Macron confirment cette dérive autoritaire du pouvoir en France, dont témoignent la brutalité et la violence de la répression dont les Gilets jaunes ont souffert.
**Une économie en panne
Alors, c’est évidemment sur l’économie que les différences sont les plus marquantes. L’Algérie reste aujourd’hui, essentiellement, un pays dont l’économie est dépendante de la rente des matières premières, gaz et pétrole. Elle n’a pas su gérer sainement cette ressource et elle a beaucoup tardée à mettre en place ce que l’on appelle un «fonds souverain» afin de se prémunir contre les fluctuations, parfois brutales, des cours du gaz et du pétrole.
Elle n’a pas su, depuis son indépendance, faire évoluer son économie, comme l’ont fait d’autres pays. Les tentatives d’industrialisation de la fin des années soixante et des années soixante-dix, conçues sur le modèle de l’économie soviétique, se sont avérées des échecs coûteux. L’inexistence d’une distinction claire entre propriété publique et propriété privée, ce que les économistes appellent les «droits de propriété», entretient un flou constant entre les deux sphères. Ce flou qui permet tout à la fois des prédations sur la propriété publique par des «oligarques», et c’est à dessein que l’on emploie ce mot, que l’empiètement constant de la propriété privée par les acteurs de la propriété publique dans des actes qui relèvent plus aujourd’hui du racket et de l’extorsion que d’autre chose.
**Une situation explosive?
La mobilisation continue donc en Algérie. Les manifestants demandent désormais des garanties sur le processus dit de «transition» et généralement plus de liberté et de démocratie. Ils reçoivent le soutien des différentes catégories de la société, et en particulier des avocats. Jusqu’à maintenant, ces manifestations ont été globalement pacifiques. Mais combien de temps encore cela pourra-t-il durer sans que le gouvernement algérien ne fasse de concessions majeures, que ces concessions soient politiques ou économiques? C’est bien aujourd’hui la question qui se pose.
Mais, cette question se pose aussi en France. Car, nous voyons là un pouvoir autiste qui, lui, a fait de manière délibérée le choix de la violence. **Jacques Sapir – Sputnik – mercredi 27 mars 2019
Les opinions exprimées dans ce contenu n’engagent que la responsabilité de l’auteur.
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*Marche des blouses blanches
Le Syndicat national algérien des pharmaciens d’officine a, lui aussi, refusé de prendre part aux consultations qu’organise actuellement le système.
Après les robes noires, c’est au tour des blouses blanches de battre le pavé aujourd’hui à travers toutes les régions d’Algérie en soutien au mouvement populaire qui revendique le départ de tout le système en place. Après avoir décliné l’invitation aux consultations du gouvernement, les trois corps de la santé, à savoir les médecins, les dentistes et les pharmaciens, organisent, aujourd’hui, de grandes marches et autres actions de protestation dans toutes les wilayas du pays. “La corporation médicale rassemblée, représentée par l’ordre des médecins, les organisations professionnelles et les sociétés savantes, réitère son appui et son soutien aux revendications légitimes portées par la voix du peuple algérien et associe sa voix pour dire : non à la prolongation du 4e mandat présidentiel, oui pour une rupture totale avec le mode de gestion actuel des affaires du pays, oui pour la concrétisation des aspirations du peuple algérien et de la jeunesse algérienne pour un État souverain, libre et démocratique”, est-il mentionné dans un communiqué rendu public.
Les initiateurs demandent aux manifestants de venir vêtus de leurs blouses blanches à 10h en donnant comme point de départ les CHU dans les villes universitaires ou les hôpitaux du chef-lieu des wilayas. Les organisateurs au niveau local sont libres de choisir l’itinéraire de ces marches qui devront prendre fin à 13h. L’autre consigne donnée dans l’appel concerne l’interdiction de porter des logos propres aux organisateurs ou d’utiliser de slogans revendicatifs corporatistes.
De son côté, le Syndicat national algérien des pharmaciens d’officine (Snapo) a refusé de prendre part à la consultation qu’organise actuellement le Premier ministère avec les organisations professionnelles et les composantes de la société civile. Après concertation du bureau national, le Snapo a décliné l’invitation programmée, faut-il le souligner, pour hier lundi. L’instance exécutive du Snapo a pris cette décision après avoir été mandatée par le conseil national qui s’est réuni mardi dernier en session ordinaire, afin d’examiner la situation que traverse actuellement le pays.
Le syndicat semble ne pas être convaincu par la proposition gouvernementale. En dépit de leurs multiples revendications socioprofessionnelles, les pharmaciens jugent que le moment n’est pas opportun pour poser toutes les problématiques liées au secteur du médicament. “Le Snapo estime que les conditions actuelles ne sont pas propices à un vrai débat démocratique, apte à mener vers des solutions répondant aux revendications et aux attentes du peuple”, indiquent-ils dans un communiqué. Le syndicat des pharmaciens se met du côté du peuple et adhère pleinement au mouvement populaire enclenché par les Algériens. “Les changements réclamés par le mouvement citoyen sont légitimes et tous les moyens doivent être mis en œuvre pour leur concrétisation”, affirment les pharmaciens.
Or, jusque-là, le cadre dans lequel sont menées ces consultations n’est pas approprié et il n’est pas de nature à répondre aux attentes du peuple. “Nous ne sommes pas convaincus qu’à l’issue de ces rencontres, il y aura des résultats qui apporteront des solutions à cette crise”, déclare le président du Snapo, le Dr Messaoud Belambri.
Pour lui, les propositions qui émaneront de ces discussions ne seront pas acceptées par les manifestants. Car, explique-t-il, il faut que les personnes qui mènent ces débats fassent consensus au sein de l’ensemble de la population. “La transition vers un nouveau système républicain doit se faire dans le respect des principes démocratiques et avec une large concertation. Les compétences et les organisations professionnelles doivent être consultées et associées dans le cadre de ce changement”, relève le Snapo qui, selon son président, s’engagera dans le débat national qui sera lancé, dès que les conditions seront réunies pour le vrai changement. *Par Badreddine KHRIS - Liberté- mardi 19 mars 2019
*Des centaines de médecins se sont rassemblés, mardi matin 19 mars 2019, à Alger pour revendiquer le départ du système en place
Les blouses blanches ont entamé leur marche depuis l’hôpital universitaire Mustapha Pacha, empruntant ensuite la rue Hassiba Ben-Bouali pour se rendre à la place de la Grande Poste. Les médecins ont scandé de nombreux slogans exprimant leur refus des décisions prises, dernièrement, par Bouteflika, notamment « système dégage », « Algérie libre et démocratique » ou encore « non au système mafieux ». Quelques citoyens qui étaient de passage ont également rejoint le mouvement pour se solidariser avec le corps médical, pendant qu’un important dispositif policier a été déployé alors qu’un hélicoptère survole le centre-ville.*médias + Liberté- mardi 19 mars 2019
**vidéos et autres-cliquer ici: Doctors أطباء
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Appel de Djamila Bouhired à la jeunesse algérienne en lutte :
Ne les laissez pas voler votre victoire !
Djamila Bouhired, Icône de la révolution algérienne, appelle la jeunesse algérienne à rester mobiliser et surtout à veiller est-ce qu’il ne « se laisse pas voler sa victoire». «Ne les laissez pas voler votre victoire ! », a-t-elle averti dans une lettre qu’elle leur a adressée ce mercredi.
Héroïne d’hier et d’aujourd’hui ? Djamila Bouhired descend chaque vendredi dans la rue pour prendre part aux gigantesques mobilisations populaire contre le régime politique et vigoureusement opposée à Abdelaziz Bouteflika. Portée par la jeunesse dans ces journées d’insurrection citoyenne, l’ancienne condamnée a mort en est le symbole de la révolution démocratique en cours. *Elwatan – mercredi 13 mars 2019
Voici le Texte intégrable de son appel à la jeunesse algérienne.
Mes chers enfants et petits enfants.
Je voudrais d’abord vous dire tout mon bonheur d’être parmi vous, pour reprendre ma place de citoyenne dans ce combat de la dignité, dans une communion fraternelle.
Je voudrais vous dire toute ma gratitude pour m’avoir permis de vivre la résurrection de l’Algérie combattante, que d’aucuns avaient enterrée trop vite.
Je voudrais vous dire toute ma joie, toute ma fierté de vous voir reprendre le flambeau de vos ainés. Ils ont libéré l’Algérie de la domination coloniale ; vous êtes en train de rendre aux Algériens leurs libertés et leur fierté spoliées depuis l’indépendance.
Alors que les Algériens pleuraient leurs chers disparus dans la liesse et la dignité retrouvée, les planqués de l’extérieur avaient déclaré une nouvelle guerre au peuple et à ses libérateurs pour s’installer au pouvoir.
Au nom d’une légitimité historique usurpée, une coalition hétéroclite formée autour du clan d’Oujda, avec l’armée des frontières encadrée par des officiers de l’armée française, et le soutien des “combattants” du 19 mars, a pris le pays en otage.
Au nom d’une légitimité historique usurpée, ils ont traqué les survivants du combat libérateur, et pourchassé, exilé, assassiné nos héros qui avaient défié la puissance coloniale avec des moyens dérisoires, armés de leur seul courage et de leur seule détermination.
Plus d’un demi siècle après la victoire sur la domination coloniale et l’accession du pays à l’indépendance, le système politique installé par la force en 1962 tente de survivre par la ruse, pour continuer à opprimer les Algériens, détourner nos richesses, et prolonger la tutelle néocoloniale de la France pour bénéficier encore de la protection de ses dirigeants. Ceux qui, au nom d’un patriotisme de bazar, exigeaient la “repentance” de la France, ont fini par tomber les masques. Combien de dirigeants, à la retraite ou encore en activité, combien de ministres, combien de hauts fonctionnaires, combien d’officiers supérieurs de l’armée, combien de chefs de partis, se sont repliés sur l’hexagone, leur patrie de rechange, le refuge du fruit de leurs rapines ?
Dernier signe révélateur de ces liens pervers de domination néocoloniale, le soutien du président français au coup d’Etat programmé de son homologue algérien est une agression contre le peuple algérien, contre ses aspirations à la liberté et à la dignité. Au nom de quelle conception bien singulière de la démocratie, au nom de quelles valeurs universelles peut-on voler au secours d’un régime autoritaire, pour prolonger, hors de toute base légale, le pouvoir d’un autocrate, de sa famille, de son clan et de leurs clientèles, massivement rejetés par la volonté du peuple algérien ?
Dans son long combat libérateur, le peuple algérien ne s’est jamais trompé de cible. Si notre génération a combattu le système colonial, elle a su apprécier à sa juste valeur la solidarité active du peuple français, notamment de son avant-garde progressiste.
Mes chers enfants et petits enfants.
Par ce rappel historique, je voudrais attirer votre attention, vous la jeunesse algérienne en lutte, sur les dérives qui menacent votre combat.
En renouant le fil de l’histoire interrompu en juillet 1962, vous avez repris le flambeau qui va éclairer le chemin de notre beau pays vers son émancipation, dans la dignité retrouvée et dans les libertés à reconquérir. Là où ils se trouvent, je suis convaincue que nos martyrs, qui avaient votre âge lorsqu’ils avaient offert leur vie pour que vive l’Algérie, ont, enfin, retrouvé la paix de l’âme.
Par votre engagement pacifique qui a désarmé la répression, par votre civisme qui a suscité l’admiration dans le monde, par cette communion fraternelle tapie dans nos cœurs et qui resurgit chaque fois que la patrie est en danger, vous avez ressuscité l’espoir, vous avez réinventé le rêve, vous nous avez permis de croire de nouveau à cette Algérie digne du sacrifice de ses martyrs et des aspirations étouffées de son peuple. Une Algérie libre et prospère, délivrée de l’autoritarisme et de la rapine. Une Algérie heureuse dans laquelle tous les citoyens et toutes les citoyennes auront les mêmes droits, les mêmes devoirs et les mêmes chances, et jouiront des mêmes libertés, sans discrimination aucune.
Après des semaines d’une lutte pacifique, exemplaire dans l’histoire et de par le monde, votre mouvement est à la croisée des chemins ; sans votre vigilance, il risque de sombrer dans le catalogue des révolutions manquées.
Tapis dans l’anonymat et la clandestinité, des manipulateurs déguisés en militants, des agents-provocateurs en service commandé, des serviteurs zélés du système fraichement repentis, tentent de détourner votre combat, pour le mener vers une impasse, dans le but de donner un sursis aux usurpateurs et de maintenir le statu quo. Des listes de personnalités confectionnées dans des laboratoires occultes circulent depuis quelques jours pour imposer, dans votre dos et contre votre volonté, une direction fantoche à votre mouvement.
Mes chers enfants et petits enfants.
En quelques semaines, vous avez révélé au monde, surpris, ce que le peuple algérien avait de plus beau, de plus grand, malgré des décennies d’oppression pour vous imposer le silence.
Il vous appartient à vous qui luttez dans les universités pour une formation de qualité, dans les entreprises pour imposer vos droits syndicaux, dans les tribunaux pour faire reculer l’arbitraire, dans les hôpitaux pour exiger des soins de qualité pour tous ; il vous appartient à vous les journalistes, qui traquez la vérité pour démasquer le mensonge et la manipulation, et dont certains d’entre vous l’ont payé de leur vie ; il vous appartient à vous les artistes, qui mettez de la lumière dans l’obscurité de notre quotidien, il vous appartient à vous qui résistez contre la déchéance pour imposer de l’éthique ; il vous appartient à vous tous de dessiner votre avenir, et de donner corps à vos rêves.
Il vous appartient à vous, et à vous seuls qui luttez au quotidien, de désigner vos représentants par des voies démocratiques et dans une totale transparence.
Notre génération a été trahie ; elle n’a pas su préserver son combat contre le coup de force des opportunistes, des usurpateurs et des maquisards de la 25e heure qui ont pris le pays en otage depuis 1962. Malgré la colère du peuple qui l’a rejeté, leur dernier représentant s’accroche encore au pouvoir, dans l’illégalité, le déshonneur et l’indignité.
Ne laissez pas ses agents, camouflés dans des habits révolutionnaires, prendre le contrôle de votre mouvement de libération.
Ne les laissez pas pervertir la noblesse de votre combat.
Ne les laissez pas voler votre victoire…
*Djamila Bouhired
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La Réponse cinglante du peuple
4e vendredi de manifestations à Alger :
«Son Excellence le peuple vous a tous virés»
Et encore une claque ! Et quelle claque ! Les Algériens ont répondu massivement au dernier courrier du «Président-par-correspondance» et ses vaguemestres, Bedoui et consorts. Et, comme toujours, ils l’ont fait avec classe.
Le clan présidentiel tablait sur un essoufflement du «mouvement du 22 février» et une fissuration dans l’opinion après sa dernière proposition de sortie de crise. La réponse du peuple a été claire et nette, cinglante, sans appel, et toujours, toujours, avec le sourire, sur le mode «Silmiya», avec des «smiley» et des «smahli» en veux-tu, en voilà, des gestes de douceur et de bienveillance d’une rare prodigalité. De la tendresse à profusion. Sauf envers ceux qui l’ont cherché, qui ont manqué de respect à son intelligence du cœur.
Il est 11h30. Nous quittons la Maison de la presse et marchons vers la place du 1er Mai en passant par la Maison du peuple. Les portraits géants à l’effigie de Bouteflika accrochés sur la façade de l’UGTA doivent se sentir affreusement seuls comme le patient de Zéralda. A la place du 1er Mai, un important groupe de manifestants est déjà entré en action sous le regard passif de la police qui est encore plus décontractée par ce vendredi printanier. D’ailleurs, le dispositif antiémeute est sensiblement allégé.
Ce sont des citoyens qui organisent la circulation automobile entre deux blocs de manifestants. Des citoyens massés sur la place Mohand Tayeb Ferkoune donnent le ton avec des pancartes sur lesquelles on peut lire : «Ni Bedoui, ni Brahimi, ni Lamamra, ils sont tous du système», «Deuxième Bataille d’Alger : la famille de Bouteflika contre le peuple», «La lihadihi el mahzala essiyassiya» (Non à cette mascarade politique), «Bouteflika rends-nous notre patrie»… Sur le bord d’en face, un jeune brandit une large pancarte qui nous fend le cœur : «Pour la première fois, j’ai pas envie de te quitter mon Algérie», écrit-il en français.
Et il a ajouté en arabe ce message bouleversant : «A nos frères harraga dévorés par les poissons, nous sommes désolés que vous ne soyez pas avec nous. Nous vous demandons pardon, parce que nous étions en retard. Nous essayons maintenant de bâtir l’Algérie que vous désiriez.»
«Ni prolongation ni report»
Sur la rue Hassiba Ben Bouali, des cortèges de marcheurs drapés de l’emblème national, certains coiffés d’un chapeau ou un bob vert-blanc-rouge, défilent allègrement dans une ambiance festive.
Des vendeurs sur le trottoir proposent des articles aux couleurs nationales : fanions, écharpes, mais aussi des «vuvuzela», ces trompettes qui faisaient fureur dans les stades lors de la Coupe du monde 2010 en Afrique du Sud. Deux jeunes paradent au milieu de la chaussée avec une large banderole : «Barakat ! Barakat ! A bas le régime des gangs.» Nous coupons par la rue Ahmed Zabana pour gagner la rue Didouche Mourad.
Des jeunes en gilet orange et brassard font partie d’un comité de vigilance. «C’est pour éviter tout grabuge et parer à d’éventuels dérapages», explique l’un d’eux. Ils ont disposé une table sur le trottoir derrière laquelle trône un mur d’images.
On y reconnaît les doux visages de Maurice Audin, Hassiba Ben Bouali, Larbi Ben M’hidi, Didouche Mourad… Des images satiriques sont également placardées : celles de Sellal, Ouyahia, avec des bulles rigolotes. «Wesh el batata ? wesh bihoum el faqaqir ?» interroge Sellal.
Un «Wanted» donne à voir quelque-unes des personnalités les plus impopulaires du moment (Ould Abbès, Haddad, Sidi Saïd, Bouchareb, etc.). Des pancartes au ton plus solennel proclament : «Construisons le futur.
Système dégage !» Un peu plus bas, des jeunes sur le trottoir arborent cet écriteau : «On ne règle pas les problèmes avec ceux qui les ont créés». Deux jeunes femmes descendent la rue Didouche avec une banderole sur laquelle est marqué : «La tamdid, la taadjil/ Errahil, errahil !» (Ni prolongation ni report, partez, partez). Ambiance de folie aux abords de la place Audin.
Pas de cordon de police, pas de BRI. Un homme propose des dattes aux passants. Une forêt de drapeaux et de pancartes, plus inspirées, plus inventives et plus créatives, les unes que les autres, nous happe d’emblée. Les slogans rivalisent d’ingéniosité, et nous nous en voulons de ne pouvoir les restituer et les documenter tous.
«Yetnahaw Ga3 !»
Un slogan fait l’unanimité : «Yetnahaw Ga3 !» (Il faut tous les virer !). La tirade est extraite d’une vidéo devenue culte, où l’on voit un jeune f’hal, comme on les aime, répondre par ces termes à une journaliste de la chaîne Sky News Arabic qui recueillait ses sentiments le soir de l’annonce de l’annulation de l’élection.
On en trouve des déclinaisons très inspirées. Des militants l’ont même imprimée sur des t-shirts, et l’un d’eux a eu la gentillesse de nous en offrir un (merci Samir). Une jeune femme a détourné pour sa part le fameux jeu télévisé, «Questions pour un champion». «Que veulent les Algériens ?» interroge-t-elle, avant de proposer l’une de ces réponses : «A- Qu’on viole leur Constitution ; B- Un 4e mandat sans fin ; C- Marier leur Président ; D- Que le système dégage.» Autres pancartes, pêle-mêle : «On ne peut bâtir un nouveau bateau avec de vieilles planches» ; «Troho yaani troho (Vous partez, c’est que vous partez).
Demain sera plus beau qu’hier» ; «Notre revendication est que vous partiez, notre projet : construire l’Etat du peuple et des jeunes», «Son excellence le peuple a décidé de vous virer. #Yetnahaw ga3 !», « La rue ne se taira pas», «On n’est pas sur Facebook, on est dans la rue», «On a demandé des élections sans Bouteflika et non un coup d’Etat», «Dégagez, laissez-nous vivre !» «Rendez-vous, vous êtes cernés par le peuple», «Ce camembert Président pue moins que votre système», «Non à Bouteflika et ses dérivés», «Vous avez prolongé votre mandat, on prolonge notre combat», «Les prochains harraga, c’est vous», «Notre histoire on l’écrira nous-mêmes».
Une jeune manifestante résume l’un des enjeux des prochains jours en soulevant cet écriteau : «Vigilance ! Qui va nous représenter ?» «C’est à nous de nous représenter, plaide-t-elle. Il faut que les jeunes soient dans la transition.
Il faut être du côté du peuple et rester vigilant.» Une dame en haïk arbore cette pancarte : «Nidham fassed, irhalou !» (Système corrompu, partez !) Elle s’appelle Nacéra, elle est maman de huit enfants «et je suis grand-mère», sourit-elle. «Nous sommes là pour leur dire dégagez. 20 ans, c’est trop ! Il y a de jeunes cadres, de jeunes généraux, qui sont prêts à prendre la relève. Il faut un changement de A à Z. Bedoui, Lamamra, c’est du passé. Il faut laisser la place aux jeunes générations. Beaucoup ont fait des études supérieures, on ne leur a pas donné leur chance. On a préféré la donner aux imbéciles heureux. Il faut un changement radical», exige-t-elle.
Zoubir, lui, est venu manifester avec ses deux enfants, une fille et un garçon. Ils brandissent une pancarte avec un arrache-clous et ces mots : «Tah el cadre, qaadou lemssamer» (Le cadre est tombé, les clous sont restés). Zoubir explique : «On est là pour notre libération effective afin que nos enfants vivent libres et indépendants. La France est partie en 1962, mais elle a laissé ses enfants ici. Ce sont eux qui dirigent le pays.
Ce régime est corrompu, on le connaît. Depuis toujours, il ne travaille que pour ses propres intérêts. Ces gens-là n’ont jamais œuvré pour l’intérêt du peuple. C’est toujours le peuple qui paie. Eux, ils ont tous une planque là-bas (à l’étranger, ndlr), pour se mettre à l’abri, eux et leur progéniture. Notre action depuis le 22 février, c’est pour chasser ce régime afin que l’Algérie soit réellement indépendante, libre et démocratique.» Son fils lâche : «Inchallah hadi hiya ellakhra.» (On espère que ça sera la dernière).
Dans la foule compacte, nous croisons maître Badi Abdelghani, avocat et défenseur des droits humains, qui s’est battu avec acharnement, en 2014 déjà, contre le 4e mandat de Abdelaziz Bouteflika. Nous lui avons posé la question sur la suite du mouvement et la question de la «représentativité» dans la période de transition. «Il est trop tôt pour parler de représentativité. Cela risque de casser le mouvement. Il faut laisser le ‘‘hirak’’ grandir. Il faut le laisser mûrir. C’est un mouvement horizontal qui produira lui-même ses formes de représentation.
Le mouvement est en train de s’exprimer très clairement. Sa réponse est sans appel. Ses désirs sont des ordres. Ce ne sont pas des demandes qu’il est en train de formuler, mais des décisions scellées et non négociables», tranche Me Badi.
Nous avons inévitablement croisé aussi l’infatigable Abdelouahab Fersaoui, président du RAJ, qui a été de toutes les manifs depuis le début. Son regard sur l’évolution du «mouvement du 22 février» et ses perspectives fait sens. Il nous dit : «Le peuple algérien est sorti, d’une manière très forte, durant les trois premiers week-ends, et aujourd’hui, il est sorti pour la quatrième fois d’une manière tout aussi forte.
C’est une réponse claire à ce pouvoir qui a essayé d’étouffer, de manipuler et d’affaiblir ce mouvement, avec sa proposition d’aller vers une conférence nationale, et d’enclencher des réformes, alors que le peuple algérien est sorti pour dire on ne veut pas des réformes, on ne veut pas un changement de personnes, on veut un changement du système.
Donc aujourd’hui c’est un message très clair qui est transmis au pouvoir et à ces responsables qui continuent d’insulter l’intelligence des Algériens, de mépriser ce peuple. Je pense qu’ils n’ont d’autre choix que de céder à la rue. La revendication de la rue est très claire, c’est le changement de ce système. La mobilisation de la rue doit continuer, et je pense que la démission de Bouteflika du poste de président n’est qu’une mesure d’apaisement de la rue.
Il est là jusqu’au 26 ou 27 (avril), au-delà du 26, il ne peut plus exercer ses fonctions, donc il est temps pour lui, pour son gouvernement, d’annoncer sa démission et de rendre le pouvoir au peuple. Ce peuple, j’en suis sûr et j’ai confiance en lui, va s’en occuper et va mettre les premiers jalons d’une République démocratique et sociale.»
Représentativité, transition : «L’Algérie n’est pas le premier pays qui va faire cette transition d’un régime autoritaire à une démocratie, il y a des méthodes, des procédures qui ont été éprouvées de par le monde, une période de transition gérée par des compétences nationales qui font le consensus est indispensable, mais pas par ces gens qui ont échoué durant des décennies et qui, aujourd’hui, veulent gérer la transition.
Donc la transition devra être gérée par des gens durant cette période qui sera bien déterminée. On va réunir toutes les conditions pour revenir à l’exercice politique dans le respect des standards de démocratie, des libertés et de respect des droits de l’homme. Aujourd’hui c’est tout le peuple qui est sorti, mais notamment les jeunes.
Le pouvoir n’a pas fait confiance à ce peuple, il nous a considérés comme des mineurs, mais là, le peuple algérien, particulièrement ses jeunes, ont donné une gifle à ce pouvoir, ça fait 4 semaines que ce peuple, cette jeunesse sortent dans les rues sans qu’il y ait des incidents, sans qu’il y ait de violence, donc leur argument de la peur, comme quoi ce qui se passe en Syrie, dans la région ne tient plus la route.
Ils n’ont aucun argument aujourd’hui. Le moment est venu qu’ils partent et qu’ils laissent la place à ce peuple.» A 14h, l’avenue Didouche est noire de monde jusqu’à la Grande-Poste.
La foule, compacte, a déferlé par l’avenue Pasteur, jusqu’au Tunnel des facultés, puis a pu franchir la barrière de police qui coupait le boulevard Mohammed V. Les manifestants ont scandé à tout rompre : «Ma tzidche dqiqa ya Bouteflika», un slogan décliné également sur des pancartes assortie d’un chrono.
On a répété aussi : «Rana shina, bassitou bina», «Klitou lebled ya esseraquine», «Fel assima makache el kachir», «Nehou el issaba, nwellou labass», «La casa d’El Mouradia». Dernière image : «Lamamra et Brahimi» sur une large banderole et ces mots : «Danger pour l’Algérie. Silmiya».
Plusieurs collègues sont bloqués, les clameurs montent encore, jamais Alger n’a connu une telle liesse. Historique ! S’il vous reste une once de dignité, M. Bouteflika, partez ! -MUSTAPHA BENFODIL - elwatan- samedi 16 mars 2019
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**Le pouvoir ignore les Algériens
*Face à la mobilisation populaire : Le jeu dangereux du pouvoir
La démarche de Lakhdar Brahimi est jugée pour le moins «suspecte». L’ancien diplomate affirme que jusque-là il n’a été mandaté par personne pour une quelconque mission, mais il continue de «recevoir» des personnalités et des «représentants» de la société civile, ce qui n’est pas pour rassurer les Algériens.
La décision prise par le chef de l’Etat, Abdelaziz Bouteflika, le 11 mars, de renoncer au 5e mandat et de reporter l’élection présidentielle, avec comme conséquence la prorogation du 4e mandat, a été massivement rejetée par les Algériens. Aujourd’hui, au lieu d’apporter des garanties, des signaux forts quant à sa bonne foi, le système en place a enclenché ce qui s’apparente à des manœuvres dans le but de casser la mobilisation citoyenne.
La démarche, pour le moins jugée «suspecte», de l’ancien diplomate Lakhdar Brahimi, qui, tout en affirmant que jusque-là il n’a été mandaté par qui que ce soit pour une quelconque mission, continue de «recevoir» des personnalités et des «représentants» de la société civile, n’est pas pour rassurer les Algériens. L’objectif étant de s’offrir des «interlocuteurs-maison» afin de faire passer la feuille de route du président de la République.
Pour ce, des relais ont été actionnés pour trouver des jeunes susceptibles de participer à des rencontres avec Lakhdar Brahimi. Le député du Parti des travailleurs (PT) Smain Kouadria a indiqué, hier, dans une déclaration au site TSA, que «les walis ont été chargés d’approcher des jeunes leaders du mouvement populaire, particulièrement les étudiants, pour les convaincre de rencontrer Lakhdar afin de préparer une conférence des jeunes, pour casser le mouvement de protestation». D’autres sources nous ont affirmé que les recteurs des universités ont été destinataires de la même requête. Celui de l’USTHB aurait même «désigné» cinq étudiants pour rencontrer l’ancien diplomate.
Si les manifestants refusent jusque-là toute idée de dialogue en s’accrochant à leur principale revendication, à savoir le départ du système, le pouvoir semble rechercher, coûte que coûte, des interlocuteurs qui cautionneraient sa démarche. Quitte à ce que cela irrite davantage les manifestants. En 2001, lors de la crise de Kabylie, les autorités avaient usé de la même méthode, avec ce qui était appelé les «arouchs Taiwan», de «faux» représentants du mouvement, qui ont été invités pour des négociations par le chef du gouvernement de l’époque, Ali Benflis. L’opération s’était soldée par un échec et Ahmed Ouyahia, son successeur à ce poste, avait pris langue près de trois ans après avec les «vrais» délégués des Arouchs.
Apparition «suspecte» de nouvelles associations
C’est pour cela que l’action menée avant-hier à l’hôtel Riadh de Sidi Fredj par une association nouvellement créée (en décembre apparemment), en l’occurrence l’Union du mouvement associatif et des citoyens (UMAC), a fait polémique. «Des représentants de près de 100 associations nationales ont mis en avant, samedi à Alger, l’impératif de lancer un dialogue national inclusif visant l’encadrement du mouvement populaire que connaît l’Algérie, appelant au changement du système et à l’édification d’une Algérie nouvelle», avait indiqué l’APS.
«Les participants au dialogue des acteurs de la société civile ont appelé toutes les franges de la société algérienne à ouvrir un dialogue national inclusif visant l’encadrement du mouvement populaire et à formuler, de manière efficace, les revendications des Algériens dans un cadre organisé», a ajouté l’agence, même si ceux-là «ont refusé de formuler des recommandations sanctionnant le débat ayant duré presque deux heures, estimant que la seule recommandation était de souligner l’importance du dialogue».
Apostrophée par une journaliste d’une chaîne de télévision privée sur le fait qu’elle soutenait, il n’y a pas longtemps, le 5e mandat, une des participantes à cet événement, une représentante de l’UNFA (Union nationale des femmes algériennes), n’a pas pu trouver de réponse, finissant même par lui demander de ne pas la faire passer à la télévision. L’action de l’UMAC a été perçue par beaucoup comme une tentative de récupération. Sinon, pourquoi accorder à l’événement une telle médiatisation, notamment par le biais des médias publics. Résultat : la liste des membres du secrétariat national de cette «Union», avec leurs coordonnées, a commencé à circuler sur les réseaux sociaux depuis avant-hier soir.
Certains d’entre eux ont même reçu des appels «inamicaux». Hier, l’UMAC a diffusé un «démenti» dans lequel elle a précisé que ce n’était qu’«une rencontre pour débattre entre citoyens de la société civile, comme tout débat dans la rue, au café ou à la maison». Pour ses responsables, il n’était nullement question de se placer en tant que représentants du mouvement. En tout cas, comme les autorités ont, de tout temps, habitué les gens à ce genre de manœuvre, les Algériens ont appris à être vigilants vis-à-vis de tout ce qui apparaît, ex nihilo, dans des contextes particuliers. Le pouvoir a usé et abusé à satiété de ce qui est appelé la société civile.
Recruter des informaticiens pour les besoins de la propagande
Parallèlement à cette volonté de vouloir dégager, dans les plus brefs délais, des «interlocuteurs-maison», et sachant que les réseaux sociaux jouent un grand rôle dans cette révolte, sur les plans organisationnel et même de la réflexion, certains cercles semblent avoir lancé une opération de «contre-révolution» sur Facebook. Selon des informations émanant de plusieurs sources, divers institutions, dont des ministères, auraient «fourni» des informaticiens à la direction de campagne de Abdelaziz Bouteflika, et travaillant donc sous la houlette de Sellal dans un premier temps puis de Zaâlane, même si, faut-il le signaler, certains parmi ces employés ont décliné cette offre récompensée d’une prime de 40 000 DA par mois.
Si leur mission au début était de «vendre» le 5e mandat, aujourd’hui il est question de «s’en prendre» aux pages Facebook les plus dynamiques pour ce qui est du mouvement de contestation. Il est question aussi de dénigrer toute personnalité susceptible de faire l’unanimité au sein de la population ou bien de propager des rumeurs qui puissent saper le moral des manifestants ou les inquiéter. Plusieurs nouvelles «pages», appartenant à des «anonymes», depuis lesquelles sont menées ces attaques, ont vu le jour ces derniers temps. Néanmoins, jusque-là, la démarche ne semble pas donner de fruits.
La colère des Algériens est telle que le nombre de pages «antisystème» est sans limite. Ce n’est donc sûrement pas le recrutement de quelques dizaines d’informaticiens qui va avoir de l’effet sur le cours des événements. En somme, l’«offre» de transition de Bouteflika est apparemment accompagnée de manœuvres visant à démobiliser la population. D’où tout le scepticisme qu’affichent même les personnes les plus «modérées»…*ABDELGHANI AICHOUN - elwatan- lundi 18 mars 2019
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Annulation de l’élection et prolongation de mandat :
Le putsch institutionnel de Bouteflika
Fortement acculé par la rue, le président Bouteflika n’a pas trouvé mieux que de passer outre les dispositions de la Constitution pour annuler l’élection présidentielle d’avril 2019 et s’offrir une rallonge de mandat. Un vrai coup de force contre la Loi fondamentale du pays, qu’il a juré publiquement de respecter.
Le report de l’élection et la prolongation du mandat présidentiel ne sont prévus que dans le cas de l’état de guerre, prévu dans les articles 109 et 110 de la Constitution. «Le Conseil des ministres réuni, le Haut conseil de sécurité entendu, le président du Conseil de la nation, le président de l’Assemblée nationale et le président du Conseil constitutionnel consultés, le président de la République déclare la guerre en cas d’agression effective ou imminente (…). Le Parlement se réunit de plein droit. Le Président informe la nation par message. Pendant la durée de l’état de guerre, la Constitution est suspendue.
Le président de la République assume tous les pouvoirs. Lorsque le mandat du président de la République vient à expiration, il est prorogé de plein droit jusqu’à la fin de la guerre…» L’Algérie n’est pas dans ce cas. Pourtant, le Président a décidé qu’«il n’y aura pas d’élection présidentielle» et s’arroge le droit de prolonger son mandat, sans aucun habillage légal. Autre décision inconstitutionnelle est l’institution du poste de vice-Premier ministre, confié d’ailleurs au ministre d’Etat Ramtane Lamamra, chargé également des Affaires étrangères.
En effet, la Constitution de 2016 ne prévoit dans aucun de ses articles cette fonction, abandonnée à la faveur de la réforme constitutionnelle de novembre 2016. La Loi fondamentale d’avant cette date faisait référence à ce poste, dans son article 97, qui évoquait parmi les prérogatives du Président : «le pouvoir de nommer un ou plusieurs vice-Premiers ministres afin d’assister le Premier ministre dans l’exercice de ses fonctions».
N’étant pas prévue par l’actuelle Constitution, la fonction de vice-Premier ministre se trouve donc entachée d’illégalité. Pourquoi une telle précipitation à donner une mission à un membre du gouvernement non prévue par la loi ? Une question qui reste posée. Pour bon nombres d’avocats et de juristes contactés, l’annulation de l’élection et la prolongation de mandat sont des mesures «politiques qui n’ont aucune assise juridique ou constitutionnelle».
L’ex-président de la défunte commission nationale consultative de promotion et de défense des droits de l’homme, Me Farouk Ksentini, trouve que la démarche du Président, notamment en ce qui concerne le scrutin présidentiel et la prolongation de son mandat, «n’est pas conforme à la Constitution.
Du point de vue droit, elles sont illégales, mais il faut les examiner sous l’angle politique. Elles sont nécessaires, parce que imposées par la rue…» L’avis est partagé par Me Boudiaf, qui précise que «les mesures annoncées lundi soir ne répondent nullement à la logique du droit mais à celle du politique».
Tout en reconnaissant le «caractère inconstitutionnel» de ces décisions, Me Boudiaf rappelle que «le droit a toujours été un instrument de pouvoir. Celui qui détient ce dernier dicte les règles pour le garder aussi longtemps que possible. Et c’est le cas chez nous».
Par sa feuille de route, le Président a mis la Constitution entre parenthèses, ce qui constitue un coup de force, voire un putsch institutionnel. Cela n’a pas pour autant fait réagir le Conseil constitutionnel qui, en vertu de l’article 182 de la Loi fondamentale, a pour mission de «veiller au respect de la Constitution», ni les parlementaires qui ont les prérogatives de saisir la même institution pour peu que leur action soit portée par 50 députés, ou 30 membres du Conseil de la nation. ** Par SALIMA TLEMCANI - *Elwatan – mercredi 13 mars 2019
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Après les décisions prises par Bouteflika :
La presse mondiale parle d’une grosse supercherie
Contrairement à ses habitudes, la presse internationale a consacré des pages entières à la situation en Algérie. Jamais le pays n’a été à la une des plus grands médias du monde comme c’est le cas actuellement.
Pour Le Figaro, qui a titré en première page : «L’Algérie tourne la page Bouteflika», «même si dans les rues d’Alger, l’annonce a été saluée dans la liesse, la vigilance reste de mise».
Interrogeant Pierre Vermeren, historien et spécialiste du Maghreb, ce dernier a déclaré qu’il n’y a pas de raisons pour que le système algérien s’écroule. «Rien n’a changé. C’est juste un candidat impotent qui a été démis, un petit clan qui a été écarté. Il était certes très puissant, il tenait tout, les chefs de l’administration et de l’armée, mais en même temps ce clan était vieillissant et coupé du peuple depuis des années», a-t-il répondu
Pour Le Monde, c’est simple : «Ce qui a été proposé par Bouteflika (aux Algériens, ndlr) n’est pas prévu par la Constitution», indiquant que «dans les rues algériennes règne un sentiment de joie mitigé après le renoncement du président algérien». Pour l’occasion, Le Monde a mis en place un direct sur son site internet pour permettre aux gens de poser toutes les questions qu’ils veulent sur l’Algérie à deux de ses journalistes. Une manière de mieux décrypter les enjeux de ce qui se passe en ce moment dans ce pays du Maghreb.
Les autorités algériennes veulent gagner du temps
Pour La Tribune de Genève, qui a suivi de près l’hospitalisation de Bouteflika aux Hôpitaux universitaires situés dans la même ville, les annonces du président algérien n’ont pas entamé les motivations des étudiants qui ont décidé de manifester mardi. «La mobilisation étudiante de mardi doit constituer une première indication de la réussite ou de l’échec des annonces du chef de l’Etat à calmer la contestation, d’une ampleur inégalée depuis sa première élection en 1999», a notamment écrit le quotidien.
Le New York Times a juste annoncé que le président Bouteflika ne briguera pas un 5e mandat. Cependant il s’est demandé si «cette concession allait calmer la rue algérienne ou non», avant de reprendre les témoignages de Mustapha Bouchachi dans lesquels il disait que «même si la décision de Bouteflika est une victoire partielle pour le peuple, elle n’est pas suffisante, car ce dernier exige une véritable période de transition et un gouvernement de consensus national».
Pour la BBC, les autorités algériennes cherchent à gagner du temps. Invitant Kader Abderrahim, politologue, spécialiste du Maghreb et de l’islamisme, à répondre aux questions des auditeurs, ce dernier a déclaré que «Bouteflika demande lui-même à conduire la période de transition jusqu’à la fin de l’année 2019. Ce qui signifie qu’il va au-delà de son mandat présidentiel, alors que rien, ni dans la loi ni dans la Constitution, ne prévoit une prolongation du mandat».
Pour CNN Arabic, le système FLN ne «veut pas laisser le pouvoir», ajoutant que «visiblement les jeunes ne sont pas satisfaits des décisions de Bouteflika. Ils demandent tout simplement qu’il parte». Evoquant l’économie algérienne, la télévision américaine la juge tout simplement «mauvaise».
Pour le Financial Times, ce «qui se passe en ce moment en Algérie rappelle les derniers jours avant la chute de Moubarak».
**YACINE FARAH - *Elwatan – mercredi 13 mars 2019
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Des manifestations rejettent l’offre de Bouteflika :
Le veto populaire
«Non au 4e mandat», «On veut le départ du système». La réponse de la rue à la nouvelle offre faite, avant-hier, par le président Bouteflika est sans appel. Elle constitue une nouvelle gifle aux tenants du pouvoir qui ont tenté d’absorber la colère populaire en mettant en avant le renoncement du chef de l’Etat à un 5e mandat.
L’offre n’a fait que relancer la protestation, à tous les niveaux et chez l’ensemble des corporations. Des enseignants, avocats, magistrats, étudiants, associations, partis politiques de l’opposition et même des candidats à la candidature à la présidentielle reportée étaient unanimes à rejeter, sans ménagement, cette «énième tentative de contourner la volonté populaire». La mobilisation se renforce et prend de l’ampleur. Parallèlement à la grève générale qui se poursuit dans plusieurs régions du pays, de nombreuses actions ont été organisées hier partout en Algérie.
En effet, plusieurs centaines d’étudiants ont occupé, dès les premières de la matinée d’hier, la place de la Grande-Poste à Alger pour dire au pouvoir «qu’il ne peut plus continuer à tromper le peuple». Les manifestants ont scandé plusieurs slogans hostiles à l’offre du chef de l’Etat. «Nous ne sommes pas naïfs, vous ne nous aurez pas !» et «Ni prolongation ni report !», ont été repris en chœur par les manifestants, dont les rangs n’ont pas cessé de se renforcer tout au long de la journée.
Affichant un haut niveau de maturité politique, les étudiants contestataires critiquent point par point le contenu de la lettre du président Bouteflika. Ils disent ainsi «Non au viol de la Constitution», «Non à la manipulation», «Système dégage !» «Les étudiants pour une IIe République» et des «Elites pour une assemblée constituante».
Ces revendications sont également au cœur des rassemblements des avocats, des magistrats et des huissiers de justice dans plusieurs wilayas, dont Tizi Ouzou, Béjaïa et Bouira. Ils condamnent le «viol de la Constitution» et exigent le respect de la «volonté populaire» en allant vers un changement du système.
Appel à une nouvelle marche vendredi 15 mars 2°19
L’Intersyndicale de l’éducation nationale rejette aussi l’offre «empoisonnée» et appelle, dans un communiqué rendu public hier, à la poursuite de la mobilisation. Ayant tenu hier une réunion extraordinaire, l’organisation composée de six syndicats décide d’organiser, aujourd’hui, une grève et des marches pacifiques dans toutes les wilayas pour exiger une transition qui sera conduite par des personnalités acceptées par le peuple. Cette réaction de la rue prépare déjà la marche de vendredi prochain.
Pour ce rendez-vous, de nouveaux mots d’ordre sont déjà préparés : «Non au 4e mandat+», «Non au viol de la Constitution», «Dissolution du Conseil constitutionnel», «IIe République» et «Départ du système». Des appels à une forte mobilisation sont lancés sur les réseaux sociaux pour réussir «le vendredi du départ de tout le système».
*MADJID MAKEDHI - *Elwatan – mercredi 13 mars 2019
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A qui donner les clés ?
Ils ne vont rien dire, d’ailleurs que pourraient-ils dire ? Ils vont faire passer ça pour l’exercice ordinaire de la démocratie, comme s’il était normal que chaque semaine des millions d’Algérien(ne)s sortent dans la rue pour exiger le départ de tous leurs gouvernants.
Ils vont s’enterrer dans leurs bunkers en attendant que l’orage passe, se mettre à l’abri au Club des Pins où ils vont manger avec l’argent des manifestants, remerciant chaque jour le Trésor public de les avoir mis à l’abri du besoin. Ils vont parler entre eux, à voix basse, pendant que certains prétexteront aller aux toilettes pour faire discrètement leurs valises. Pourtant, il y a des choses à faire et cette crise n’est pas insurmontable, il suffit de mettre fin à l’entêtement du régime : démission du Président le 28 avril puisque tout est de sa faute, ce qui arrive provenant de sa violation de la Constitution pour rester président à vie ; désignation avec l’accord des Algériens d’une structure de transition où il y aurait des représentants du régime et de l’opposition mais également des personnalités désignées par chaque ville et région du pays.
Dissolution de l’Assemblée et du Sénat, nouveau gouvernement, puis enfin Conférence ou Constituante avec rééquilibrage des pouvoirs au sein de l’Etat, une Constitution et un échéancier précis pour des élections législatives et présidentielle avant la fin de l’année. Quelques procès entre-temps de voleurs connus, réactivation de la Cour des comptes avec des juges honnêtes pour étudier les gros dossiers, et le tour est joué. Sans oublier bien sûr de se méfier de tous les autoproclamés représentants, qui ont insulté le peuple, n’ont pas initié les marches et se réunissent aujourd’hui avec Brahimi sans le dire, dans des hôtels de luxe. Restera à régler le cas du vendredi. En faire un jour férié ? C’est déjà fait. Mais il faut faire vite, comme l’a souligné un Algérien à la dernière marche : «Faut que vous partiez rapidement, vendredi prochain j’ai quelque chose à faire.»- CHAWKI AMMARI – elwatan- dimanche 17 mars 2019
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*La dépense publique, un canal pour la dilapidation des ressources
**de graves dérives financières, des affaires de corruption et la dilapidation des deniers publics au cours des vingt ans de règne de Abdelaziz Bouteflika
*Que de scandales durant cette période – 1999 à 2014 – qui a été des plus fastes !
Cependant, cette aisance financière n’a pas profité à la construction d’un pays indépendant de la rente. L’aisance a plutôt dévié vers la dérive, avant que la crise ne survienne et ne dévoile toute la fragilité de l’économie nationale face à l’ampleur de la corruption et au manque de clairvoyance dans la mise en œuvre des décisions, que ce soit celles liées à la lutte contre ce phénomène, ou bien celles portant sur la diversification de l’économie.
Ce qui ne pouvait se faire sans des mesures dédiées au développement du secteur privé et à la relance du public. Or, dans les deux cas, les plans d’attaque arrêtés ont manqué de suivi des dépenses, mais surtout de rigueur. L’évaluation a fortement fait défaut au cours de cette période. Une grande défaillance qui a fini par laisser place aux pratiques illégales et aux détournements. L’Association algérienne de lutte contre la corruption (AALC) a d’ailleurs chiffré entre 50 et 60 milliards de dollars les commissions empochées dans les différents marchés.
Scandales
Pratiquement, aucun secteur n’y a échappé. A commencer par les travaux publics à travers le grand scandale de l’autoroute Est-Ouest qui «a avalé» une facture exorbitante, constituant ainsi un gouffre financier pour une qualité douteuse et à haut risque pour les automobilistes. Ce grand chantier, programmé initialement à 7 milliards de dollars, a coûté au total 13 milliards de dollars, et ce n’est pas encore fini.
L’autre exemple nous vient de la Grande Mosquée d’Alger, dont le coût du projet avait été estimé en 2008 à 900 millions de dollars pour une durée de réalisation de quatre ans. Dix ans après, les dépenses ont été multipliées par deux et demi, atteignant les 2,2 milliards de dollars, et là encore, le coût final n’est pas encore connu. Pour rappel, en 2008, le coût du projet avait été estimé à environ 900 millions de dollars, avec un délai de réalisation de quatre années.
Dans le domaine du sport, ce sont les nouveaux stades de Tizi Ouzou et de Baraki qui ont englouti de l’argent. Le premier, qui devait être achevé en 2013, a consommé 50 milliards de dinars pour un montant initial de 32,5 milliards de dinars. La deuxième infrastructure sportive, inscrite en 2004 pour un budget d’environ 11 milliards de dinars, a vu pour sa part sa facture rallongée à plus de 20 milliards de dinars, soit le double.
C’est dire les surcoûts financiers engendrés par ces projets, au même titre que bien d’autres. Les montants diffèrent d’un cas à un autre, mais le phénomène de la dilapidation s’est bien incrusté dans les mœurs de l’administration et le milieu des affaires. Même au niveau local, les communes n’ont pas fait exception, avec des affaires de détournements impliquant des élus locaux et causant des retards immenses en matière de développement régional.
Par ailleurs, les grandes entreprises publiques, à l’image de Sonatrach, où l’argent a coulé à flots, ont été les premières à être frappées par les scandales de corruption. Lesquels ont éclaté en série, alors que les enquêtes lancées en grande pompe ne lèvent pas le voile sur ces dossiers noirs qui ont fortement entaché les quatre mandats de Bouteflika. A chaque fois, de grands responsables, des personnalités proches du sérail présidentiel, des hommes d’affaires ayant profité largement de la commande publique y sont impliqués. Ils ont fini par livrer des projets lourdement entachés par les malfaçons, puisqu’ils ont plutôt fait dans le bricolage et le ramassage de l’argent public.
Au nom de la préférence nationale, des opérateurs économiques, connus pour leurs accointances avec le pouvoir en place, ont arraché la réalisation de grands projets pour des montants astronomiques, au moment où d’autres projets, pourtant innovants, se sont vu privés de financement et mis sous la pression de mesures bureaucratiques face à une administration corruptible et corrompue. Tout cela est passé sous silence en faveur des «grands affairistes» et en défaveur des porteurs d’idées.
«On a fini par tuer l’esprit de l’entrepreuneuriat et développer celui de l’affairisme à grande échelle, propulsant parallèlement l’informel», nous dira d’ailleurs un économiste à ce sujet pour résumer les conséquences de la corruption, qui a touché tous les niveaux avec un impact lourd sur l’économie nationale et sur la situation financière, et ce, à travers des indicateurs alarmants et un recours de plus en plus important à la planche à billets.
«Gestion mal avisée de l’argent public»
Les chiffres rendus publics à cet effet le montrent clairement : en l’espace de 15 mois (octobre 2017- janvier 2019), le montant du financement non conventionnel a atteint 6556 milliards de dinars (30% du PIB). Il était de l’ordre de 5192 milliards de dinars à fin décembre, contre 2 185 Mds DA en 2017. En 2018, le chiffre atteignait les 3471 milliards de dinars. Un simple calcul nous donne comme résultat 1000 milliards de dinars en janvier 2019, soit un peu moins du tiers du montant tiré en 2018 en un seul mois.
C’est dire l’accélération de ce mode de financement auquel a eu recours le gouvernement pour faire face à la détresse budgétaire engendrée justement, entre autres, par les dépenses sans contrôle et les détournements sans limite. Les manifestants, qui se sont mobilisés tout au long de ces quatre semaines contre le système en place, ont bien mis l’accent sur ce phénomène dans leurs slogans. «Klitou lebled» «Vous avez mangé (sous-entendre) ruiné le pays», scandaient les jeunes pour afficher leur mécontentement de la gestion des finances publiques et dénoncer le gaspillage. Ce qui préoccupe également les experts.
«Au-delà de la gestion malavisée de l’argent public et de la panne sévère de ressources à laquelle elle a abouti, c’est une autre interrogation majeure qui est maintenant soulevée et qui se rapporte aux conséquences potentiellement graves sur l’ensemble de l’économie nationale, qu’il convient maintenant d’envisager pour les prochaines années», écrit à ce sujet l’économiste, Mouloud Heddir, dans une étude publiée en février dernier, sur le site du Cercle d’action et réflexion autour de l’entreprise (CARE).
Il ajoutera : «Depuis la chute des prix pétroliers en 2014, les autorités ont systématiquement privilégié le confortement des marges de manœuvre du budget de l’Etat, au détriment de l’appui effectif au développement des entreprises et des secteurs productifs», avertissant que l’affaissement durable des finances publiques ne manquera pas d’affecter sérieusement et durablement les performances de l’ensemble de l’économie. Et ce, d’autant que «tous les éléments d’un scénario récessif semblent aujourd’hui alignés».* SAMIRA IMADALOU - elwatan- lundi 18 mars 2019
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En Algérie, la rue s’éprend des vendredis
**Par Amaria Benamara, correspondance de Libération à Alger — 15 mars 2019
Depuis trois semaines, les Algériens manifestent par dizaine de milliers contre le système politique en place En Algérie, la rue s’éprend des vendredis
Chaque vendredi depuis trois semaines, ce sont désormais les klaxons de voitures et les bruits d’hélicoptères de la police dans le ciel d’Alger qui viennent marquer le début de journée des manifestations nationales contre le système politique algérien. Devenu rapidement une habitude, le rendez-vous est donné dans le centre-ville de la capitale, entre la place Maurice-Audin et la grande poste. Par dizaine de milliers, les Algérois se retrouvent, en famille, entre amis, entre citoyens d’un pays qu’ils tentent de se réapproprier, depuis le fameux 22 février, date devenue symbolique, où les habitants de la capitale sont sortis manifester massivement. Une première depuis l’interdiction du droit de réunion en 2001.
C’est une atmosphère détendue et de joie partagée qui se propage dans l’air, en ce quatrième vendredi de contestation nationale. Les manifestants ont afflué plus tôt encore. Mais derrière l’ambiance de liesse, le message n’a rien perdu de son sérieux. Dans la rue, deux dames âgées vêtues d’un haïk, un long voile beige, tenue traditionnelle algérienne. «On ne lâchera pas ! dit l’une des deux sœurs, la voix et le regard plein d’émotion. J’espère que vous irez jusqu’au bout, la jeunesse ! Nous, on a fait notre révolution en 1962, c’est à votre tour maintenant», ajoute-elle en regardant sa petite-fille.
Elle fait face aux nombreux jeunes qui, pleins de gouaille, entonnent des chants comme un seul homme. Les slogans régulièrement scandés par les manifestants viennent dénoncer la mainmise du clan Bouteflika sur le pays, ainsi que celle du Front de libération nationale (FLN), parti politique au pouvoir depuis des décennies. La vitalité et la fraîcheur de la foule tranchent avec l’image d’un pouvoir vieillissant qui ne sait plus quoi inventer pour se maintenir. Deux jeunes, un brassard vert au bras les identifiant comme aides-soignants bénévoles, s’activent : «Nous allons à la grande poste, c’est là qu’est notre position. On s’organise sur les réseaux sociaux pour se répartir entre les différents points de la manifestation», indique l’un d’eux, trousse de secours à la main.
Rassemblement dans les rues d’Alger, vendredi. Photo Zohra Bensemra. Reuters
Dès les premiers rassemblements, les Algériens ont surpris tout le monde par leur discipline. Leur organisation, qui se structure à mesure des semaines, et les actes de civisme, comme le nettoyage des rues après les manifestations, sont des images récurrentes, partagées sur les réseaux sociaux.
Pourtant, malgré la démarche pacifique du mouvement, vers 17 heures, les forces de l’ordre postées sur la route qui mène au palais présidentiel repoussent des agitateurs par des jets de gaz lacrymogène. Face à la réponse des policiers, les chants redoublent d’énergie et résonnent dans les rues du quartier du Telemly, théâtre de manifestations depuis le début du mouvement à Alger. Les manifestants scandant à nouveau «Silmia !» («pacifique») et multipliant les gestes d’apaisement et de solidarité.
Si l’issue du mouvement reste incertaine, chaque jour qui passe depuis le 22 février voit la multiplication d’actions collectives et citoyennes venant réaffirmer la volonté des Algériens d’écrire eux-mêmes leur destin. **Par Amaria Benamara, correspondance de Libération à Alger — 15 mars 2019
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