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Expulsés par les banques, ils squattent leur logement

30122011
 Cela se passe en Espagne…et peut-être ailleurs aussi

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Le cocktail explosif de bulle immobilière, crise financière et chômage massif prive de logement des milliers de familles en Espagne. Mais les victimes des expulsions hypothécaires ne sont pas anonymes, elles ont des noms et des histoires à raconter.

Francisco a dû quitter Getafe (à Madrid) cette semaine ; Sheila et Medeleine, mères seules de cinq enfants, vont être expulsées de leurs logements à Barcelone ; Alex et sa famille, sont retournés comme « okupas » (squatteurs) dans le logement qu’ils avaient perdu dans la localité catalane de Terrassa.

 Ils avaient tous contracté des crédits immobiliers dans les années de prospérité supposée et de crédit facile, se sont retrouvés sans revenus et ne peuvent pas rembourser. Non seulement ils ont perdu leurs appartements, mais ils sont endettés.

 Ils sont des milliers dans la même situation. Ils sont sortis de l’anonymat grâce à un collectif de militants, composé de personnes concernées et de sympathisants, unis en une campagne de résistance non-violente pour mettre fin à la crise. Le mot d’ordre est sans ambiguïté :

 « Nous ne laisserons pas les banques nous jeter dehors. »

Ce genre de guérilla contre les expulsions est née en 2009 à Barcelone lorsqu’un groupe de victimes a créé la plate-forme des personnes affectées par les hypothèques (PAH en espagnol), pour dénoncer ces abus et la protection juridique des entités financières.

 « Ni les banques, ni les pouvoirs publics ne s’intéressent à notre tintamarre », affirment-ils sur leur blog.

« Résister aux expulsions, c’est les défier, se dresser contre eux, les considérer d’égal à égal (…). Notre maison est notre instrument de lutte, notre moyen de pression, notre plus grande alliée. »

En novembre 2010, ils ont remporté une première victoire : paralyser une première expulsion près de Barcelone et empêcher Lluís et son fils de 13 ans de se retrouver à la rue.

 Le PAH a poursuivi sa tâche jusqu’à recevoir ce printemps un renfort inattendu : l’appui des collectifs qui font partie du mouvement du 15M.

Il existe à présent des groupes analogues, parmi lesquels des assemblées de quartier, et des organismes sociaux et locaux de nombreuses villes d’Espagne qui se battent pour le droit à un logement décent. Le PAH assure avoir empêché au total 109 expulsions.

Un nombre important, mais néanmoins faible si l’on considère qu’entre 2007 et 2011, près d’un demi-million d’expulsions ont été décidées en Espagne (il y a eu 32.000 procédures au premier semestre de cette année et près de 48.000 en 2010, selon les chiffres du Conseil Général de la Justice)

La mobilisation s’appuie sur une solide composante en ligne, à partir de laquelle elle organise et met en relation les personnes affectées avec les activistes et le reste de la société.

La page web Stop aux expulsions a été créée en juin avec pour but de générer un réseau d’alertes et une carte nationale du drame. Quiconque devient victime d’une expulsion hypothécaire peut y ajouter son cas et déclencher un mécanisme de coordination pour obtenir de l’aide.

Les alertes sont aussi diffusées par les comptes Twitter de la campagne, @LA_PAH et @stopdesahucios, et les mots-clics #stopdesahucios (#stopauxexpulsions) et #stopdesnonaments (« stop aux expulsions » en catalan).

Et ça marche : les tweets sont retweetés et l’information circule, mettant en branle des groupes de sympathisants, des voisins et des militants pour paralyser les expulsions. En voici quelques exemples récents :

« Famille expulsée, maison récupérée ! »

 Avec le temps, le PAH et 15M ont ouvert un autre front. Il ne s’agit plus seulement d’arrêter les expulsions, mais aussi de reloger des familles dans des immeubles vacants suite à la spéculation immobilière : « Famille expulsée, maison récupérée ! »

 Les premiers cas ont eu lieu à Barcelone et Madrid le 15 octobre, après les manifestations de masse dans ces deux villes. Sous le slogan « de l’indignation à l’action, » ils ont occupé un bâtiment à Barcelone, qui était la propriété d’une entreprise de construction en liquidation, et l » « Hôtel Madrid » à Madrid, destiné à être vendu aux enchères.

 Les deux initiatives ont créé leur blog : Edifici 15O et Hotel Madrid. Même si la police délogea les familles installées dans l’Hôtel Madrid, le mouvement ne s’est pas arrêté.

 L’utilisateur de Twitter @Arganda15m écrit le jour même : « Ils scandent “Une éviction, une nouvelle occupation” #sanslogis. »

 Un mois plus tard, le 18 novembre, une affaire analogue s’est produite à Barcelone, lorsque des membres de l’Assemblée des Indignés du quartier Sants, aussi participants de 15M, ont occupé un ilot d’appartements neufs inoccupés depuis des années.

 Ils y ont installé cinq familles expulsées et créèrent un blog ainsi qu’un compte Twitter pour diffuser l’information sur le cas, connu sous le nom de « Habitatge18N » (« Maison18N » en catalan). Douze jours plus tard, l’alerte était générale :

 L’immeuble fut effectivement évacué ce matin-là par une opération de police controversée, qui fait l’objet, d’après le collectif, d’une enquête d’Amnesty International. Malgré cela, le projet continue et reste très actif.

Les actions contre les expulsions ont capté l’attention médiatique et certaines propositions défendues font leur chemin dans l’agenda politique. C’est le cas de « dación en pago », une loi qui éteindrait la dette avec la remise du logement, comme dans d’autres pays d’Europe.

Il en est aussi résulté le relogement d’un certain nombre de familles dans des appartements subventionnnés, et la demande de municipalités que la législation sur le crédit hypothécaire soit modifiée. (Rue89-29.12.2011.)

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