L’île de Mayotte en proie à un conflit social
29 10 2011*Déjà plus d’un mois de tension
Mamoudzou est calme en cette fin de semaine. Place de la République, les responsables syndicaux font le point avec les manifestants. «Ils décideront de ce qu’ils comptent faire ensuite», explique Saïd Boinali, figure du mouvement, avant que tout le monde ne finisse par se disperser. Les rassemblements massifs ont cessé au lendemain de la mort d’Ali El Anziz dans la préfecture du 101e département français, dans laquelle les dégâts ont été estimés entre 30 et 50.000 euros selon les sources officielles. Mais la population reste mobilisée, et dans le Nord, le centre et le Sud de Mayotte, les manifestations contre la vie chère se poursuivent alors que les touristes ont déserté l’île.
Aux cortèges et aux rassemblements ont succédé les techniques de type guérilla, face au déploiement des forces de l’ordre locales et de leurs renforts. Des barrages «plus ou moins tenus, plus ou moins filtrants», selon le préfet, sont toujours en place. En certains endroits, des témoins rapportent qu’on leur a demandé de l’argent pour passer, en d’autres, c’est la présence de mineurs qui fait polémique. «Nous avons fait une tournée sur le terrain, j’ai rencontré des jeunes pleins d’espoir et disposés à continuer», affirmait cependant vendredi Saïd Boinali, de la CFDT Mayotte, précisant que ces derniers avaient «entre 25 et 30 ans». Un âge à replacer dans le contexte de l’île, où plus de la moitié de la population a moins de 25 ans.
«Imaginez si ça s’était passé en métropole»
Caillassage d’ambulance, évacuation du personnel et des clients d’un hôtel sous les jets de pierre, attaques sur Petite terre, la semaine a été émaillée d’incidents plus ou moins violents. «Les Mahorais sont un peuple paisible. Les manifestants ont été gazés tous les jours dans les premiers temps du conflit. L’un des nôtres y a même perdu la vie, mais ça n’a pas explosé», tempère Soulaïmana Noussoura, responsable CFE-CGC à Mayotte. «Ca fait maintenant plus d’un mois et personne n’a sorti la machette, imaginez si ça s’était passé en métropole», poursuit le membre de l’intersyndicale qui a par ailleurs condamné les violences.
La circulation sur l’île s’est améliorée en fin de semaine avec la levée de certains barrages sur le principal axe routier et la reprise du service maritime entre Petite terre et Grande terre. A Mamoudzou, la supérette Sodicash n’a rouvert que ce samedi. Plus bas, sa grande sœur de chez Sodifram (distributeur pris en grippe depuis le début du mouvement) affiche un panneau «fermé» mais se refait une beauté à grands coups de peinture et de ménage dans les rayons.
En périphérie, certaines grandes surfaces ont rouvert depuis une semaine et sont désormais accessibles. Il est donc possible d’acheter de la nourriture, même si l’approvisionnement des magasins reste perturbé. Dans d’autres zones, «c’est beaucoup plus difficile de trouver à manger», raconte un habitant du Sud. Certains Mahorais auraient même été faire leurs courses sur les îles voisines. Devant les stations-services, les files d’attente s’étendent pour obtenir du carburant ou du pétrole qui souvent remplace le gaz manquant aux réchauds.
Unis sur le fond, divisés sur la forme
L’économie, comme les banques et l’administration (régulièrement fermées) ou certaines écoles, tourne au ralenti. Près de 2.350 salariés seraient au chômage technique dans l’île, selon la direction des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (Dieccte). «Il faut arrêter maintenant, moi je ne peux pas faire grève, j’ai besoin de travailler», râle Abdou, livreur de pizzas. «Oui la vie est trop chère, mais je dois travailler sinon je ne gagne pas d’argent», se lamente en écho un chauffeur de taxi.
Si, sur la forme, le mouvement divise la population, la majorité des Mahorais est solidaire sur le fond. Des revenus moindres et des prix plus élevés qu’en métropole, des aides sociales inférieures ou inexistantes dans des familles où celui qui a un emploi doit subvenir aux besoins de ses parents, frères ou sœurs, «c’est tout le système qui doit être revu, la situation n’est plus tenable», tranche Soulaïmana Noussoura.
«Nous y avons déjà trop souvent cru avant d’être déçus»
L’île attend désormais l’arrivée mercredi de Denis Robin, ancien préfet de Mayotte dont les syndicats reconnaissent les qualités de négociateur, et qui doit coordonner les discussions sur les prix des produits de première nécessité. Dans le même temps aura lieu la contre-expertise sur la mort du manifestant Ali El Anziz, frappé par un tir de flashball selon des témoins, ce que la première autopsie a démenti, évoquant notamment un malaise cardiaque et des mauvaises manoeuvres de réanimation.
La semaine qui s’annonce peut donc être décisive. «Mais nous y avons déjà trop souvent cru avant d’être déçus», prévient une manifestante place de la République. «Médiateur, négociateur, ministre… On nous envoie tout le monde mais pas la solution», note Soulaïmana Noussoura. «S’il y a une volonté que ça aille vite, on nous donnera des éléments avant mardi», date à laquelle le médiateur rend son rapport, ajoute son camarade de la CGT Salim Nahouda. L’intersyndicale et les associations, qui gèrent le mouvement, ont donc lancé un appel au calme, mais ont demandé que se poursuivent les manifestations. (20Minutes-29.10.2011.)
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*Voyage au coeur des bidonvilles de Mayotte
Certains habitants de cette île vivent dans des conditions de grande précarité…Mayotte n’est pas un département comme les autres. Le métropolitain qui débarque à Mamoudzou, la préfecture, est frappé par les gravats et déchets dans les rues, et les logements de fortune, plus volontiers en tôle qu’en «dur». Pourtant, à quelques kilomètres de là, sur la commune de Koungou, ce sont de véritables bidonvilles qui hérissent la colline surplombant l’océan indien.Cap au Nord, direction Majicavo Koropa. Le taxi n’est pas vraiment taxi, mais la grève l’empêche de livrer ses médicaments alors il arrondit ses fins de mois en zigzagant entre les carcasses de voitures fumantes et les troncs d’arbres qui barrent la route. Sur place, les rues ressemblent à celles de Mamoudzou. Mais en gravissant la roche, ce sont des centaines de bangas, logements faits de bric, de broc, de tôle et de bois, que l’on découvre.Les clandestins côtoient les Mahorais les plus pauvresDans l’une d’elle, cachée derrière les cocotiers et une grande barrière de bâches blanches, Fatima et ses six enfants. Son mari et elle ont trois euros par jour pour nourrir leur famille. Leur foyer n’a ni l’électricité, ni, comme la majorité des habitants du quartier et un quart des logements à Mayotte, l’eau courante. Fatima vit à côté du puits qu’utilisent tous les habitants du quartier. Pour l’heure, il est à sec. A la saison des pluies, il est certes plein, mais l’eau n’est pas potable.
Les rares voisins qui ont l’eau courante la vendent deux euros les 40 litres. Autant dire une fortune, ce qui pousse souvent les familles à boire l’eau du puits, quitte à tomber malade. C’est pourquoi, un peu plus loin, Kaltadine tient son dispensaire Médecins du monde, en bénévole. Car seuls les Mahorais (habitants de Mayotte) ont droit à la sécurité sociale et à Majicavo Koropa, la majorité des gens vient d’Anjouan, l’île voisine. Et cette population, qui côtoie ici les Mahorais les plus pauvres, doit s’acquitter d’une somme forfaitaire pour les soins.
Ni mendicité, ni agressivité
Dix euros la consultation, les examens et les traitements. Une misère. Sauf quand on a trois euros pour vivre chaque jour. Le long des chemins de terre, les bangas succèdent aux bangas, qui surmontent d’autres bangas qui semblent accrochés à la roche. On y parle Shimaoré, mais les «Bonjour» fusent sur le passage du mzungu [blanc], attraction en ces lieux. Ni mendicité, ni agressivité, même si les tensions existent entre les différentes communautés.
Les bangas sont coincés entre les lotissements principalement habités par des métropolitains et les quartiers mahorais plus aisés. Mais Kaltadine, qui vit sur place, est formel: ici, pas d’incidents. «Chacun pour soi et Dieu pour tous», résume le bénévole. Ici, Dieu s’appelle Allah, comme dans 95% de l’île. «Nous sommes musulmans modérés», explique-t-il en passant au-dessus de la mosquée située sur la route en contrebas.
«Contre la vie chère, on est tous ensemble»
Dans une banga, un peu plus loin, neuf enfants vivent seuls avec leur grand-mère. Leurs parents ont été expulsés vers Anjouan. «C’était il y a plus d’un an», se souvient la vieille femme, assise sur l’un des deux lits de la pièce d’une vingtaine de mètres carrés dans laquelle elle vit avec ses petits-enfants. Les expulsés reviennent inlassablement, à condition de pouvoir rassembler les 600 euros pour payer le passeur.
«Mieux vaut être clandestin ici que vivre là-bas», assure Attouman Mohamed, qui a déjà fait la traversée six fois en douze ans. Même si à Mayotte la vie est chère, même si l’île est en grève depuis un mois. A Majicavo Koropa, on a d’ailleurs manifesté dans les premiers temps du mouvement. Mahorais, clandestins, tout le monde s’est joint aux cortèges. «Contre la vie chère, on est tous ensemble.» (20Minutes-27.10.2011.)
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