Egypte: les opposants à Moubarak lancent « le jour du départ »
4022011*Les opposants au président Moubarak ont appelé, vendredi, à la mobilisation générale afin de chasser le raïs égyptien, au pouvoir depuis près de 30 ans, dans laquelle ils souhaitent réunir un million de personnes dans le centre du Caire.
Les égyptiens se sont donnés rendez-vous pour ce vendredi baptisé « le jour du départ » après que le président Hosni Moubarak ait décidé de rester au pouvoir alors que des millions de citoyens l’appellent à se retirer. Les sites et les réseaux sociaux ont appelé les égyptiens à se mobiliser en force et de poursuivre leurs protestation jusqu’au départ du « pharaon ». Ils appellent, en outre, à ne pas faire des concessions par ce que le régime, au cas où il reste, se vengera des manifestabnts qui ont revendiqué son départ…les égyptiens sont décidés plus que jamais à chasser Moubarak du pouvoir…l’heure de la vérité est arrivée. Les violences entre manifestants favorables et hostiles au président égyptien Hosni Moubarak ont repris jeudi sur la place Tahrir, dans le centre du Caire. Ces violences ont fait au moins huit (8) morts et environ 1000 blessés selon un nouveau bilan du ministère égyptien de la Santé. L’armée égyptienne a éloigné les pros Moubarak de ceux contre lui au Caire dans la perspective de separer les deux parties qui se sont affrontées ses deux derniers jours faisant plusieurs morts et des centaines de blessés. Les milliers de manifestants qui ont passé la nuit dehors ont scandé « dieu est grand, l’armée et le peuple est une seule main ». Des chars de l’armée ont fait mouvement jeudi pour empêcher que des partisans du président Hosni Moubarak parviennent à la place Tahrir. Les chars cherchaient à empêcher que les pro-Moubarak arrivant dans le secteur depuis le pont du 6-Octobre s’approchent de la place Tahrir au centre du Caire où sont réunis par milliers des manifestants qui réclament le départ du président Moubarak. Au nord du pays environ 4000 manifestants ont marché dans la région de Suez et ont appelé au départ du président. Une actions similaire a eu lieu à Ismaïlia, où plus de 2000 personne ont scandé des slogans hostiles à Hosni Moubarak et ont appelé à son départ. Au Caire des groupes de manifestants se sont réunis aux entrées de la place Tahrir. Ils se sont tenus par les mains formant une chaine humaine. Derrière cette chaine humaine, se trouve des tas de pierres. Ali Kacem a indiqué que ces pierres seront utilisées pour se defender en cas de nécessité. (Echorouk-03.02.2011.)
***Les événements de ce vendredi:
10H10 – Afflux – Des centaines de militants continuent d’affluer sur la place Tahrir au Caire, et font la queue à un barrage militaire. L’armée les laisse pénétrer après contrôle par petits groupes. « Ils veulent qu’on se fatigue », explique Hatem, un ingénieur de 29 ans, en évoquant le pouvoir.
* URGENT…. Egypte: tir de roquette sur QG de la Sécurité de l’Etat à El-Arich | 10h56
Une roquette antichar a été tirée vendredi sur le siège de la Sécurité de l’Etat dans la ville égyptienne d’El-Arich, près de la frontière de la bande de Gaza, a-t-on appris auprès d’une source au sein des services de sécurité et de témoins. *Mobinil, filiale égyptienne de l’opérateur France Télécom (Orange), reconnaît avoir été «contrainte d’envoyer des messages à ses clients», mais l’armée y était «clairement identifiée» comme émetteur. 9h10. L’armée se déploie au centre-ville du Caire .
8h35. Des véhicules de police s’installent autour du palais présidentiel
Selon le gouvernement égyptien, 13 personnes seraient mortes lors des affrontements des deux derniers jours.
8h45. Les baltajias et les policiers en civils contrôleraient les routes menant à la place Tahrir, empêchant le ravitaillement des opposants au régime Moubarak installés sur la place.
6h20. Le plus haut gradé américain, l’amiral Mike Mullen, assure jeudi que les chefs de l’armée égyptienne lui avaient «réaffirmé» qu’ils n’ouvriraient pas le feu contre les manifestants, à quelques heures d’une nouvelle manifestation prévue en Egypte. Selon la journaliste Christiane Amanpour de la chaîne américaine ABC, le vice-président égyptien Omar Souleimane lui aurait confié que l’armée déployée en renfort n’utiliserait «jamais» la force contre la population.
*3 heures. Les Etats-Unis discutent avec des responsables égyptiens des modalités d’un départ immédiat du président Hosni Moubarak et du transfert du pouvoir à un gouvernement de transition dirigé par le vice-président Omar Souleimane, rapporte le New York Times. Dans ce scénario, Omar Souleimane, soutenu par les militaires, engagerait immédiatement un processus de réforme constitutionnelle.2h10. Le Sénat américain a adopté à l’unanimité une résolution à la portée symbolique exhortant le président égyptien à former un gouvernement intérimaire.
***Le pouvoir égyptien fait sa propagande par SMS
Les messages sont envoyés directement par les opérateurs mobiles
Les Égyptiens reçoivent sur leur téléphone des messages glorifiant l’armée et appelant au respect de la nation. L’opérateur Vodafone, qui dit être forcé d’acheminer ces SMS, juge le procédé «inacceptable».
«Jeunesse d’Égypte, méfiez-vous des rumeurs et écoutez la voix de la raison. L’Égypte est au-dessus de tout, alors préservez-la.» Depuis le début des manifestations dans le pays, voilà le genre de messages que reçoivent les Égyptiens sur leurs téléphones portables. Envoyés par vagues, ces SMS les appellent à affronter les «criminels et les traitres» et à respecter les forces armées, «soucieuses de [leur] sécurité». Et ils sont signés directement des opérateurs, dont Vodafone (actionnaire de SFR) et Mobinil (filiale d’Orange en Égypte).
Dans un communiqué envoyé de Londres, Vodafone s’est élevé jeudi contre cette pratique. D’après lui, les opérateurs n’ont d’autre choix que d’envoyer ces textos. Pour obtenir une licence d’exploitation de téléphonie mobile dans le pays, ils se sont engagés à acheminer des messages d’urgence, explique le groupe britannique. Mais ils n’ont aucun contrôle sur leurs contenus, alors qu’ils sont pourtant les expéditeurs, ce qui crée une grande confusion chez leurs abonnés. Cette situation est «inacceptable», juge aujourd’hui Vodafone.
Vodafone privilégie la sécurité de ses équipes
La politique de censure des télécommunications mise en place par les autorités égyptiennes place les opérateurs locaux dans une position délicate. Priés de couper leurs connexions la semaine dernière, les fournisseurs d’accès ont tous obtempéré, tout comme les opérateurs mobiles, qui ont déconnecté des antennes-relais. Dans un autre communiqué, Vodafone a expliqué avoir privilégié la sécurité de ses équipes sur place. Selon lui, les autorités auraient pu couper Internet et le mobile de manière plus radicale, sans sa collaboration. La reprise aurait alors été plus difficile.
La coupure d’Internet pendant cinq jours par le gouvernement égyptien devrait coûter à l’Égypte 65 millions d’euros, selon une estimation de l’OCDE. L’impact sur le long terme pourrait être plus important, car cette mesure radicale pourrait décourager des sociétés d’investir dans le pays. «Ce sera beaucoup plus difficile à l’avenir d’attirer des entreprises étrangères et de leur assurer que les réseaux resteront fiables», alors que «jusqu’ici, attirer ces sociétés a été une stratégie clé du gouvernement» égyptien, estime l’OCDE. (Le Figaro)
***La coupure d’Internet a coûté 65 millions d’euros à l’Égypte
Cette coupure de cinq jours pourrait décourager les entreprises étrangères d’investir en Égypte, prévient l’OCDE.
La coupure d’Internet en Égypte coûtera au moins 65 millions d’euros au pays, selon les estimations publiées jeudi par l’OCDE. «Les services bloqués représentent environ 3% à 4% du produit intérieur brut (PIB), soit une perte de 13 millions de dollars par jour», indique l’Organisation de coopération et de développement économiques dans un bref communiqué.L’impact de cette déconnexion d’Internet en Égypte pourrait avoir aussi avoir des répercussions importantes à long terme, en décourageant les entreprises étrangères de s’implanter dans un pays où les réseaux ne seraient pas fiables. Or, «jusqu’ici, attirer ces sociétés a été une stratégie clé du gouvernement» égyptien, rappelle l’OCDE.
Une coupure d’une ampleur inédite
Après cinq jours de coupure totale, les Égyptiens ont retrouvé leurs accès à Internet mercredi. La situation est revenue à la normale non seulement pour les internautes situés dans le pays, mais aussi pour les étrangers qui souhaitent consulter des sites égyptiens. L’extinction d’Internet avait été imposée vendredi par le gouvernement afin de perturber les appels à manifester relayés sur les réseaux sociaux, dans un pays qui compte 80 millions d’habitants, dont 23 millions d’internautes.
Cette coupure, qui n’a pas empêché la contestation dans la rue, apparaît néanmoins déjà comme un cas d’école pour les experts informatiques, car elle est inédite par sa durée et son ampleur. Les précédentes ruptures d’accès, en Birmanie en 2007 ou en Iran en 2009 lors de protestations populaires, n’avaient été que temporaires ou très ciblées.
Des techniques de contournement
Selon les premières analyses, le gouvernement égyptien a dû demander aux opérateurs de stopper leurs échanges d’informations. Ces sociétés, qui dépendent de licences accordées par l’État, ont toutes obtempéré. Résultat, les données ne pouvaient plus circuler dans le pays, ni le quitter.
Avant de recourir à cette méthode radicale, le gouvernement égyptien avait tenté de museler la contestation en censurant certains sites Internet, comme Facebook et Twitter. Mais des techniques de contournement étaient apparues. De même, durant la coupure, des sociétés occidentales s’étaient portés au secours des Égyptiens, en proposant de se connecter par leurs serveurs ou de «tweeter» par téléphone. (Le Figaro)
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*VIDEOS. Les affrontements entre pro et anti-Moubarak, jeudi, au Caire.
*cliquer ici:http: http://www.dailymotion.com/video/xgvpmr_no-let-up-in-deadly-cairo-uprising_news#from=embed
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*Washington et des responsables égyptiens discutent d’un départ « immédiat » de Moubarak
Les Etats-Unis discutent avec des responsables égyptiens des modalités d’un départ immédiat du président Hosni Moubarak et du transfert du pouvoir à un gouvernement de transition dirigé par le vice-président Omar Souleimane, rapportait jeudi le New York Times. Bien que M. Moubarak ait refusé de démissionner du poste qu’il occupe depuis près de trente ans, des responsables américains et égyptiens réfléchissent à un scénario dans lequel M. Souleimane, soutenu par les militaires, engagerait immédiatement un processus de réforme constitutionnelle, ajoute le New York Times. Le quotidien américain cite des responsables de l’administration Obama et des diplomates arabes. Le projet est destiné à recueillir le soutien de l’armée égyptienne.« NÉGOCIATIONS OUVERTES »Contacté par l’AFP, le porte-parole de la Maison Blanche, Tommy Vietor, n’a pas confirmé ces informations mais a déclaré : « Le président a dit que c’est maintenant l’heure d’entamer une transition pacifique, dans l’ordre et significative, avec des négociations crédibles et ouvertes. » « Nous avons discuté avec les Egyptiens de plusieurs modalités pour faire avancer ce processus, mais toutes ces décisions doivent être prises par le peuple égyptien », a-t-il ajouté.Pour sa part, un haut responsable américain a déclaré de son côté : « Il est tout simplement erroné d’affirmer qu’il n’existe qu’un seul plan américain en cours de négociations avec les Egyptiens. » Selon le journal, l’idée serait de former un gouvernement de transition auquel seraient invités à participer des groupes d’opposition, les Frères musulmans compris, afin d’enclencher un processus qui mènerait à des élections libres et équitables en septembre.Le New York Times souligne que l’issue des discussions dépend d’un certain nombre de facteurs, dont la tournure que prennent les manifestations et la dynamique au sein du gouvernement au Caire. Cette information a été publiée peu après que la secrétaire d’Etat Hillary Clinton eut appelé le pouvoir égyptien à entamer « immédiatement » un dialogue avec l’opposition. (Le Monde-04.02.2011.)
************************** *situation en Egypte…d’autres articles….cliquer ici: * Egypte: mobilisation d’une ampleur sans précédent * Egypte:affrontements meurtriers dans plusieurs villes du pays *******************
*les blindés prennent position devant le palais présidentiel
Le palais présidentiel d’Hosni Moubarak , dans le quartier Héliopolis au Caire, est placé sous haute surveillance dans la perspective d’une manifestation prévue vendredi, ont constaté cet après-midi des ressortissants français au Caire. «Des blindés de l’armée coupent toutes les routes menant au palais présidentiel et à la résidence privée de Moubarak, expliquent ces Français. Les soldats ont également érigés des murs de fer barbelé et installé des cubes en béton en travers de la route. La rumeur dit que demain, vendredi, les manifestants ont l’intention de se rendre, pour la première fois, dans le quartier du palais».Le quartier Héliopolis, proche de l’aéroport du Caire, a été jusqu’à présent épargné par les manifestations de révolte. «Hier, des pro-Moubarak ont investi les rues, mais sans violence, indiquent les expatriés. Maintenant, tout le monde redoute que le quartier soit à son tour la cible d’affrontements. La porte principale de notre immeuble a été barricadée avec une barre de fer».(LeParisien.fr -03.02.2011.)
***Hosni Moubarak aimerait partir, mais ….
Hosni Moubarak a déclaré, jeudi 3 février, à la chaîne de télévision américaine ABC qu’il aimerait quitter le pouvoir, mais qu’il ne peut le faire par crainte du « chaos » qui s’installerait alors dans son pays. Selon la journaliste Christiane Amanpour, qui dit avoir passé « environ trente minutes » avec le président, M. Moubarak a dit qu’il était « fatigué d’être président et qu’il aimerait quitter ses fonctions maintenant », mais qu’il ne le peut pas « par peur du chaos qui s’emparerait du pays ».« Il m’a dit : ‘Je suis très malheureux à propos d’hier. Je ne veux pas voir les Egyptiens se battre entre eux’ », écrit Mme Amanpour, qui poursuit : « Quand je lui ai demandé ce qu’il pensait des manifestants qui lui crient des insultes et demandent son départ, il a dit : ‘Peu m’importe ce que les gens disent sur moi. Ce qui m’importe maintenant, c’est mon pays, c’est l’Egypte.’ » Selon la journaliste, M. Moubarak s’est dit « soulagé » après avoir annoncé, mardi, qu’il ne se représenterait pas à l’élection présidentielle de septembre.
Le raïs a par ailleurs assuré que son gouvernement n’était pas responsable des violences sur la place Tahrir, au Caire, qu’il a imputées aux Frères musulmans. En réponse aux appels du président Barack Obama à engager sans tarder le processus de transition, Hosni Moubarak a déclaré : « Vous ne comprenez pas la culture égyptienne et ce qui se passerait si je démissionnais. » (Le Monde-03.02.2011.)
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*Jordanie : l’opposition discute avec le roi
Le Front de l’action islamique (FAI), principale force d’opposition en Jordanie, a affirmé que la rencontre jeudi avec le roi, Abdallah II, avait été « franche », axée sur les réformes dont une série d’amendements à la Constitution. « La réunion avec Sa Majesté le roi a été franche et claire et a permis d’aborder les divers problèmes nationaux, notamment la réforme politique, à partir d’une loi électorale moderne et démocratique », a indiqué le FAI dans communiqué publié tard jeudi soir sur son site Internet. La réforme « conduira à la formation d’un gouvernement parlementaire, tout en procédant aux amendements constitutionnels nécessaires pour un partenariat politique avec toutes les forces politiques », a ajouté le FAI. Après avoir réaffirmé son attachement « à l’identité jordanienne, arabe et musulmane », le FAI a mis l’accent sur l’importance des « libertés publiques », de la « lutte contre la corruption » et de « la promotion de l’unité nationale ».
Le FAI, la branche politique des Frères musulmans, a insisté sur « l’urgence de mesures sérieuses dans la voie des réformes ».
« Le roi a exprimé sa compréhension et son intention d’appliquer sa vision de réformes qui permettront une nouvelle ère », selon le communiqué du FAI, rappelant que la délégation avait remis au roi un document écrit détaillant ses revendications en matière de réformes. Selon le palais royal, Abdallah II a reconnu jeudi lors de son entretien avec le FAI que les réformes s’étaient « ralenties » dans le royaume, « ce qui a fait perdre de nombreuses opportunités à la nation pour progresser ».Le FAI n’appelle pas à un renversement du régime mais réclame des réformes politiques. Il a appelé à une nouvelle manifestation vendredi, à la suite de plusieurs autres rassemblements organisés ces derniers jours et rappelant ceux de Tunisie et d’Egypte. (Le Monde-04.02.2011.)
**Le Caire, Amman, Sanaa : La révolution en direct Le vent de la colère souffle. El Watan Week-end a donné la parole à des citoyens au Caire, à Amman et à Sanaa pour mieux cerner les enjeux et vivre de près le prometteur «printemps arabe».
On sort la grosse artillerie au sommet du pouvoir égyptien. Le président Moubarak a accordé, hier, une interview à la chaîne américaine ABC dans laquelle il affirmait qu’il aimerait quitter le pouvoir mais que son départ provoquerait le chaos dans le pays.Le raïs a aussi affirmé qu’il ne voulait pas voir les Egyptiens se battre entre eux. Cette interview fait suite à celle accordée, toujours hier par le vice-président Omar Souleimane à la télévision égyptienne. Au cours de l’entretien, M. Souleimane a soutenu que les violences observées entre les manifestants favorables et hostiles au président égyptien Hosni Moubarak sont le résultat «d’un complot» fomenté par des gens en Egypte même ou bien à l’étranger. Pour l’ancien responsable des moukhabarate, ceux qui manifestent à la place Tahrir ont des desseins spécifiques. Les opposants au président Moubarak ont appelé, pour aujourd’hui vendredi, à une nouvelle mobilisation générale qui devrait réunir un million de personnes, afin de chasser le raïs égyptien au pouvoir depuis près de 30 ans. Cette manifestation baptisée «le vendredi du départ» par les organisateurs, irrite fortement Omar Souleimane. Celui-ci considère que le départ du président Hosni Moubarak était un appel au «chaos».
Durant son interview, M. Souleimane a aussi révélé que les Frères musulmans, principale force d’opposition dans le pays et bête noire du régime, ont été invités à participer au dialogue entre le pouvoir et l’opposition mais que le mouvement semblait hésiter à accepter la main tendue par le pouvoir. Les Frères musulmans, qui participent aux manifestations anti-Moubarak, sont officiellement bannis de la sphère politique et font régulièrement l’objet d’arrestations, mais sont tolérés dans les faits et disposent d’influents réseaux d’aide sociale. Considérés comme la principale force d’opposition en Egypte, ils avaient remporté 20% des sièges aux législatives de 2005. Ils ont boycotté le second tour des dernières législatives de novembre-décembre 2010 en accusant le régime de fraudes et de violences. La confrérie islamiste qui a rejoint la coalition nationale pour le changement, qui s’est constituée autour de Mohamed El Baradei avec le mouvement Kefaya (assez), a rejeté tout dialogue avant le départ du président Hosni Moubarak.
Cette annonce est intervenue alors que des représentants des jeunes manifestants de la place Tahrir avaient participé à la première séance du dialogue hier matin. M. Souleimane a précisé que d’autres partis politiques, ainsi que des «personnalités» et des «indépendants» ont accepté de participer à ce dialogue sauf deux partis de l’opposition de gauche, Wafd (libéral) et le Tagammou (gauche). Les violences ont fait au moins huit morts, selon un nouveau bilan du ministère égyptien de la Santé, cité par l’agence officielle Mena, alors que des sources médicales ont révélé que les heurts ont fait plus de 1 000 blessés. Cette situation a provoqué la réaction de la secrétaire d’Etat américaine, Hillary Clinton, qui dans un appel téléphonique au vice-président égyptien Omar Souleimane, lui a indiqué que les violences de mercredi «étaient un développement choquant après plusieurs jours de manifestations constamment pacifiques». Elle a demandé au gouvernement égyptien de sanctionner ceux qui sont responsables d’actes violents et a également souligné le rôle important que les forces armées égyptiennes ont joué en agissant avec modération lors des manifestations pacifiques.
La peur de la contagion
Les derniers développements en Egypte ont poussé certains pays de la région menacés de contagion à prendre des mesures préventives. Le roi Abdallah II de Jordanie a nommé un nouveau Premier ministre, Maarouf Bakhit, et reçu hier une délégation du Front de l’action islamique (FAI), la branche politique des Frères musulmans. Le souverain a reconnu lors de l’entretien que les réformes avaient connu un ralentissement qui«ont fait perdre de nombreuses opportunités à la nation pour progresser». Autre régime menacé, le Yémen qui connaît des manifestations pour réclamer le départ du président Ali Abdallah Saleh au pouvoir depuis 1978. Ces troubles ont contraint M. Saleh à annoncer qu’il renonce à briguer un nouveau mandat et s’est déclaré contre la transmission héréditaire du pouvoir. (El Watan-04.02.2011.)
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-Hala Kamal. Professeur à l’université du Caire.
Ce qui s’est produit, c’est que le système au pouvoir continue son jeu : c’est-à-dire à constituer des bandes de voyous alliées au ministère de l’Intérieur qu’on a pris l’habitude de voir dans toutes les marches et manifestations qu’on organise, que ce soit par solidarité à l’Irak, à la Palestine ou même pour nos propres problèmes. On a vu hier, en début de journée, des manifestations pro-Moubarak guidées des artistes de deuxième ou troisième degrés et des footballeurs qui soutiennent le système ; très vite remplacés par des voyous qu’on reconnaît facilement.
Pour semer la zizanie, terroriser et frapper. L’armée et les jeunes révolutionnaires ont tenté de fermé les issus pour les empêcher de se mêler aux manifestants, ils ont réussi à se faufiler par un accès proche du musée qu’ils ont d ailleurs attaqué. Aujourd’hui, en allant à Maydan El Tahrir, l’armée et les jeunes fouillent tout le monde, pour vérifier que ce ne sont pas des voyous. Le but de la manœuvre a échoué, il faut dire qu’ils voulaient donner l’image que c’était un conflit au sein même de l’opposition. A mon avis, c’est une tentative vaine, d’un régime en fin de course qui tente désespérément de réduire à l’échec une révolution réussie et ingénieuse. Le slogan de tout le monde était au départ «Le peuple veut faire tomber le régime» et qui est inspiré de la Révolution du jasmin, qui est devenu «Le peuple veut faire tomber Moubarak» après son discours qui n’a convaincu personne. Et depuis les événements de mercredi c’est devenu «Le peuple veut juger Moubarak».
Le rôle de l’armée est très respectable, et ce, depuis le premier jour de la révolution. Il a promis de ne pas tirer sur la population, il a protégé les jeunes révolutionnaires de la place Maydan El Tahrir. Les gens ne demandent pas officiellement à l’armée d’intervenir, car cela voudrait dire un coup d’état que l’armée aurait d ailleurs très bien pu faire, mais la position de l’armée égyptienne rappelle la position du général Rachid Amar en Tunisie. L’armée égyptienne a prouvé qu’elle appartenait au peuple. Que c’est une force nationale qui sait rester neutre et qui ne se retourne pas contre sa population. Aujourd’hui, le nouveau Premier ministre est sorti demander des excuses sur ce qui s’est déroulé et déclare déclencher une enquête sur les agressions d’hier… mais le plus raisonnable, c’est que le président Moubarak parte avant le jour de la colère ultime.
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-Basil Okoor, journaliste jordanien à Ammonnews : «La nomination d’un nouveau Premier ministre est une première victoire»
-Quelle est la nature du mouvement que connaît la Jordanie?
Il s’agit d’un mouvement de protestation, parti, il y a trois semaines, de la ville de Dhiban où vivent des tribus et qui a été déclenché par la hausse constante des prix. Les manifestations ont par la suite atteint les principales villes du pays, Irbd, Kerk, Maan et Amman. Les partis de l’opposition ainsi que les syndicats se sont joints au mouvement, les revendications politiques ont alors fait leur apparition. Les manifestants ont appelé à une réforme du système politique actuel, ce qui apportera une situation économique meilleure. Ils ont également ouvertement appelé le gouvernement de Rifai à démissionner.
-C’est ce qui a été fait. Le roi Abdallah II a nommé un nouveau Premier ministre, Maarouf Al Bakhit. Comment est-il perçu par la population ?
Il a déjà occupé ce poste par le passé (2005-2007) et n’avait rien réalisé de particulier. Tout ce qu’on retient de lui ce sont les fraudes massives et flagrantes qui ont entaché les élections parlementaires et qu’il a lui-même avouées après son départ. Mais, en même temps, c’est une figure politique très importante car il représente les Jordaniens de l’Est, considérés comme des Jordaniens «pures». Ces derniers, tout comme El Bakhit, sont très attachés à leur identité et œuvrent pour qu’elle reste l’identité de l’Etat. Ils refusent notamment la naturalisation et l’attribution de la nationalité jordanienne aux réfugiés palestiniens. Il est également connu pour son opposition au système libéral et au capitalisme sauvage, ce qui le rend très populaire, surtout au sein de cette communauté. L’ancien Premier ministre Rifai était lui le symbole du libéralisme, il devait partir.
-Quelle est la mission du nouveau Premier ministre Al Bakhit ?
Son premier challenge sera la constitution de son gouvernement. S’il réussit à choisir des personnes justes, compétentes et habilitées à occuper ce poste, il aura réussi le premier test. Mais s’il nomme encore une fois les mêmes noms, que nous connaissons pour être tout sauf compétents, alors on tournera dans un cercle vicieux. Le mouvement populaire pourra prendre d’autres directions et nous ne pouvons pas savoir où cela va mener. La situation est très complexe.
-Si l’on compare ce qui se passe en Jordanie à ce qui s’est passé en Tunisie ou en Égypte, un remaniement ministériel ne réussit pas à éteindre la contestation…
La comparaison n’est pas très juste. En Jordanie, le peuple proteste contre un gouvernement qui ne les représente pas, contre la corruption, la mauvaise gestion et la mauvaise distribution de l’argent public. Les revendications n’ont pas dépassé ce cercle. La monarchie n’est en aucun cas visée. Nous ne voulons pas changer de gouvernance, nous voulons la rationalisation de cette gouvernance. Nous voulons participer à la vie politique, c’est pourquoi nous demandons la révision de la Constitution et des différents textes de loi afin que le gouvernement puisse être élu par le peuple, représenter le peuple et rendre des comptes au peuple. Nous voulons un vrai pluralisme et plus de liberté. Les élections doivent être libres et transparentes et le mode de vote moderne. Contrairement à Ben Ali et Moubarak, en nommant un nouveau Premier ministre, le roi Adballah II répond à la principale revendication des manifestants car, selon eux, la réforme passe obligatoirement par cela. Reste à savoir si ce nouveau gouvernement réussira à répondre aux autres exigences du peuple.
-La nature de la protestation en Tunisie et en Jordanie n’est pas la même. Mais les Jordaniens se sont-ils inspirés des Tunisiens ?
Le message que les Tunisiens ont envoyé aux autres peuples est très fort : oui, un peuple peut reverser un régime. Même si le Jordanien n’aspire pas à cela, et je dis cela en toute objectivité, on peut dire que dans l’inconscient collectif des Jordaniens, cela a dû jouer. Il faut du courage pour que le peuple sorte dans la rue et demande la démission d’un ministre. Cela s’est rarement produit en Jordanie. Mais c’est surtout le ras-le-bol général qui a fait sortir les gens dans la rue. Nous sommes fatigués et voulons du changement. C’est pourquoi nous considérons la décision du roi de nommer un nouveau Premier ministre qu’il a officiellement chargé de répondre à toutes les revendications du peuple, comme une première victoire. Maintenant, le gouvernement doit nous montrer qu’il nous a compris.
-Beaucoup estiment que la décision du roi a été dictée de l’extérieur. Vous êtes le deuxième pays arabe ayant signé un traité de paix avec Israël après l’Égypte, où la révolte prend de l’ampleur…
Il est normal que cette décision ait été motivée par des raisons objectives et d’autres subjectives. On ne peut pas isoler la Jordanie de ce qui se passe dans la région. Beaucoup craignent que cet esprit de libération atteigne d’autres pays. Mais cette décision signifie surtout que le peuple a réussi à se faire entendre.
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-Lina Attallah. Cyber dissidente. Le Caire.
Le régime de Moubarak essaie de déclencher une sorte de terreur chez les manifestants. A la place Maydan El Tahrir, devant toute la planète, il y a eu violence contre des civils. Aujourd’hui, la revendication essentielle est que Moubarak dégage. En agissant de la sorte contre des manifestants pacifiques, il a perdu le peu de soutien qu’il lui restait après son discours de la veille. L’avenir est encore difficile à cerner, une chose est sûre, c’est qu’il faut impérativement aujourd’hui organiser un front de négociations. Il faut qu’une action politique s’établisse le plus rapidement possible pour bien gérer la situation et trouver des solutions.
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-Philippe Rizk. Blogueur. Le Caire.
Ce qui est arrivé hier à la place Maydan El Tahrir on s y est habitué en Egypte. La police utilise les voyous qu’elles paient pour qu’ils frappent. La plupart des pseudos pro-Moubarak étaient des policiers en civil. Il y a avait aussi sans doute des jeunes inquiets car le seul média qui reflétait la réalité était Al Jazeera, après la censure d’internet et la fermeture d’Al Jazeera en Egypte, les gens ont uniquement droit à la chaîne nationale qui fait tout pour dramatiser la situation en disant que l’économie est en train de subir les conséquences du soulèvement national à cause du départ des touristes. La revendication aujourd’hui dans la rue c’est que Moubarak quitte le pouvoir ; la plupart des manifestants demandent son départ sans concession. Le scénario d’après n’est pas encore prévisible, mais le premier pas c’est le départ de Moubarek. 30 ans de dictature ont affaibli toute l’opposition qui n’est pas assez mature aujourd’hui pour se distinguer. Mais le changement nous permettra de faire des erreurs et de reconstruire notre démocratie.
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-Amine. Le Caire.
Mercredi, à la place Maydan El Tahrir, c’était un véritable bain de sang. Le pouvoir a démontré une fois de plus qu’il est illogique et fasciste. Les revendications des gens dans la rue étaient entre autres : le changement de la Constitution, du Parlement et la levée de l’état d’urgence. Ces revendications ont évolué, à savoir le départ de Moubarak, et surtout qu’il soit jugé pour le bain de sang qu’il a provoqué. Je pense que la prochaine étape est l’appel de la population à l’armée pour qu’elle intervienne au profit du peuple. L’armée égyptienne est parmi les rares institutions qui n’a pas été infectée par la corruption et il est encore en son pouvoir de préserver la sécurité de la patrie.
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-Salma Jlassi. Journaliste et membre de l’Union générale des travailleurs tunisiens : «Plus jamais un mouvement ne prendra le monopole»
-Quel est le climat qui règne dans le pays depuis la nomination du gouvernement de transition ? Parle-t-on d’actions de pillage et de saccage ?
Toutes les révolutions qu’a connues le monde ont été accompagnées de tentatives de certains groupes, n’adhérant pas au mouvement populaire, de défendre leur point de vue dissident. Ces derniers ont généralement recours à la violence et cherchent à répandre le chaos. Et c’est bien ce qui s’est produit, les vestiges de l’ancien régime ont eu recours à des voyous et ont profité de la situation sécuritaire dans le pays pour répandre la peur. Mais cela ne durera plus pour longtemps. Depuis mardi dernier, on note un retour progressif à la normale. De hauts responsables de la sécurité appartenant à l’ancien régime ont été limogés, l’armée est rentrée et la police a repris l’exercice de ses fonctions dans l’espoir d’une amélioration graduelle de la situation.
-Il semble que le nouveau gouvernement ait été plus accepté que le gouvernement «d’union nationale», le peuple conteste-t-il toujours la présence de figures de l’ancien régime ?
Le gouvernement actuel compte plus de technocrates et d’opposants que des membres de l’ancien régime. Le peuple conteste surtout la personne du Premier ministre,
M. El Ghannouchi. On se questionne sur la nature des tâches qu’il doit accomplir secrètement. Certains disent qu’il est là afin de faire disparaître des dossiers prouvant l’implication des membres de l’ancien régime dans différentes affaires de corruption et autres, et qui pourraient mener à leur condamnation. Cependant, une grande partie du peuple est convaincue que ce gouvernement est temporaire et chargé des affaires en cours. Le plus important maintenant ce sont les travaux des commissions de réformes politique et juridique qui mèneront à des élections libres et transparentes.
-L’UGTT a joué un rôle majeur durant la révolution et a gagné la confiance du peuple. Pourquoi refuse-t-elle maintenant de faire partie du gouvernement après y être entrée ?
L’Union générale des travailleurs tunisiens ne peut aller à l’encontre de la volonté de ses adhérents. Elle a joué un rôle très important dans l’encadrement du mouvement populaire qui s’est transformé par la suite en révolution. Ses positions ont toujours été compatibles avec le choix du peuple. La démission des membres de l’UGTT de ce gouvernement est une réponse au fait que les principaux portefeuilles soient attribués à des symboles de l’ancien régime.
-Pourtant l’UGTT a déclaré «accepter» M. El Ghannouchi au poste de Premier ministre du gouvernement de transition, pourquoi ?
Je pense que la décision de l’UGTT est raisonnable et préserve l’intérêt du pays dans ce moment crucial. L’UGTT compte un nombre important d’experts et de compétences lui permettant de prendre les bonnes décisions. Elle fait partie du peuple tunisien et aspire, au même titre que lui, à plus de liberté et de dignité et à combattre la corruption. De manière générale, des discussions sont toujours en cours au sein des structures de l’union et s’il s’avère que le gouvernement se détourne de ses objectifs, elle reprendra son action afin de protéger cette révolution. Je dis cela en toute objectivité et non au nom de l’union.
-La Révolutiondu jasmin a été à cent pour cent tunisienne et a pris de cours l’Occident et la France en particulier. Pensez-vous que «la rue tunisienne» a été sous-estimée ?
Le peuple tunisien a réalisé d’importantes avancées par le passé. Il est le premier peuple arabe à avoir adopté une constitution. Il est le premier à avoir abrogé l’esclavagisme avant même la France et l’Angleterre. Il a mené le mouvement d’émancipation des femmes dans les années vingt du siècle passé. Il est normal que ce peuple bouge et de façon civilisée, surprenant à la fois le régime et les puissances occidentales. Cette révolution s’est inscrite dans l’histoire.
-La position de la France a été très critiquée. Ses intérêts sont-ils menacés ?
Le peuple tunisien a suffisamment d’indulgence pour dépasser la position de la France qui a soutenu le dictateur dans son oppression du peuple. Mais il n’oubliera pas, tout comme il n’a pas oublié les crimes de la colonisation. Ceci dit, parler d’intérêts menacés me semble loin de la réalité, la politique est un jeu d’équilibre des pouvoirs et des intérêts mutuels.
-Qu’en est-il de la «menace islamiste» dont parlent les médias étrangers ?
Le peuple tunisien compte beaucoup de croyants et de pratiquants laïcs qui n’embrassent pas l’idéologie islamiste. La décennie noire qu’a connue votre pays nous a montré comment s’en protéger. Aussi, pendant la révolution, les islamistes créaient des coalitions avec l’ancien régime alors que le peuple faisait face à une répression sanglante. De toute façon, la démocratie montrera l’ampleur réelle de ce dont la France craignait. Nous mettrons fin à cette alarme donnée par la France démocratique insultant le peuple tunisien et le traitant de terroriste. Et l’espace politique est suffisamment grand pour abriter toutes les mouvances, une chose est sûre, nous ne permettrons plus jamais à un mouvement de monopoliser la scène politique.
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-Mohamed B. Bouebdelli. Président de la Fondation universitaire Bouebdelli. Le Caire.
Cette révolution est un rêve qui devient réalité. Personne ne s’attendait à ce que Ben Ali s’enfuie après moins d’un mois de révolte. C’est comme si on rêvait la nuit de liberté, et au matin, cette liberté est là. On disait qu’on était incapable d’une telle chose, qu’on ne pouvait que prier pour que les choses changent, mais on l’a fait, et tout dictateur potentiel est maintenant averti. La vie reprend, nos écoles sont ouvertes et les mesures prises par le gouvernement ont réussi à apaiser les choses. C’est une période de transition, il reste beaucoup de challenges : rétablir l’ordre, tenir des élections libres et se débarrasser des restes de la dictature.
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-Mona Prince. Ecrivaine et universitaire. Le Caire
Je suis fière d’être égyptienne, et pour le restant de mes jours, je serai fière de ceux qui ont sacrifié leur sang pour que nous ayons une vie nouvelle. Nous les honorerons par de larges funérailles nationales après que nous nous eûmes débarrassés de ce régime. Et pour tous ceux qui ont peur que l’Egypte soit aux mains des Frères musulmans, ceci n’arrivera jamais. Si vous étiez à la place Tahrir ou dans les quartiers et les rues qui l’entourent, vous auriez vu comment les Égyptiens de différentes mouvances et de tout âge, hommes et femmes, étaient ensemble main dans la main. Quelques heures seulement nous séparent de vendredi. Le vendredi où le grand peuple d’Egypte célèbrera sa liberté et sa dignité.
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*Massoud Daher. Historien et chercheur libanais
L’Occident a appuyé tous les dictateurs des pays arabes
L’historien libanais Massoud Daher enseigne à l’université de Beyrouth. Président de la Ligue sino-libanaise, titulaire du prix Abdel Hamid Shuman des jeunes scientifiques et de la Médaille de l’historien arabe, ce spécialiste des questions asiatiques a participé à une conférence internationale sur les relations entre les pays arabes et l’Asie, organisée au Koweït par la revue Al Arabi.
De l’envoyé d’El Watan
à Koweït City-Quels sont les obstacles au développement des relations entre les pays arabes et le monde asiatique ?Une grande partie du pétrole consommé dans les pays asiatiques provient du Moyen-Orient. Des pays qui veulent vendre aussi leurs marchandises. Il y a donc un besoin d’échanges économiques. Les Asiatiques entendent aussi avoir des relations culturelles. Il s’agit de peuples héritant d’anciennes civilisations tels que les Chinois, les Japonais ou les Indiens. Les Arabes, qui ont aussi une ancienne civilisation, avaient des relations culturelles qui remontent loin dans le temps avec le monde asiatique. Ils ont beaucoup pris de ces civilisations, de celles des Perses et des Grecs et l’ont transmis à l’Occident. Malheureusement, l’échange culturel entre Arabes et Asiatiques a cessé. On se concentre uniquement sur les relations économiques. Ce qui est déjà négatif car nous vendons du brut et nous achetons des produits manufacturés. On ne se demande même pas comment ces marchandises ont été produites, ni de quelle manière les pays asiatiques ont accédé au monde entier à travers leurs produits. Tous les experts disent que ce siècle sera asiatique.Le Japon et la Chine, qui ont réussi à allier tradition et modernité, concurrencent les économies occidentales. Si elle n’est pas liée à un système de valeurs, la modernité n’aura aucun sens. Cela s’est déjà vérifié en Occident. Des penseurs estiment déjà que la civilisation occidentale est d’abord matérialiste. Les valeurs de la Révolution française, telles que l’égalité, la fraternité et la liberté, ont été happées par la globalisation américaine. Fukuyama évoque «la fin de l’histoire», Huntington a mis en avant l’idée du «choc des civilisations» et Bush a insisté sur «la guerre contre le terrorisme». Tout cela est dirigé contre les musulmans et les Arabes. Historiquement, ces derniers sont plus proches des civilisations asiatiques. Entre nous et les pays asiatiques, il n’existe pas de conflits historiques. Nous avons tout pour avoir des relations naturelles avec l’Asie, plus qu’avec l’Occident. L’Occident nous regarde d’en haut avec irrespect. Récemment, les Etats-Unis ont détruit un accord entre la Syrie et l’Arabie Saoudite pour régler la crise politique au Liban. Cela ne viendra jamais des pays asiatiques. Nous devrions apprendre des Occidentaux comment traiter avec les Asiatiques. Il existe des centaines de spécialistes de l’Asie en Occident.-Pourquoi existe-t-il peu d’experts arabes en charge de l’Asie ?La question est de savoir si les Arabes ont un projet culturel. Sans cela, la relation entre les pays arabes et l’Asie est réduite à un échange de délégations officielles. Un délégué chinois parle au nom de 1,3 milliards d’habitants de la Chine, alors que les pays arabes envoient des délégations qui ne se connaissent même pas. Elles ne cherchent même pas à se connaître ou à parler d’une seule voix. Les Arabes ont-ils une position commune sur n’importe quel sujet ? L’erreur est dans cette mentalité arabe dominée par l’esprit du chef de tribu et du zaïm. Comment peut-on convaincre les autres pays que chez nous, les présidents sont élus à vie ? Qu’on détourne les biens de l’Etat sans que personne ne soit jugé ? Le nombre d’intellectuels et diplômés en chômage dans le monde arabe avoisine les 25%.Le taux d’analphabétisation augmente dans le monde arabe au lieu de baisser. Les jeunes et les femmes sont marginalisés. L’avancée du désert continue dans la plupart des pays arabes. Alors comment convaincre un intellectuel asiatique ou européen de dialoguer avec nous ? Culturellement, comment pouvons-nous lui parler ? Ibn Khaldoun appartient à l’ensemble de l’humanité et pas uniquement aux Arabes. L’Occident a tiré profit des travaux d’Ibn Sina et de Khawarizmi et pas les Arabes. Nous avons échoué à bâtir un projet à partir des idées de ces génies. Selon le rapport 2010 de l’Arab Thought Foundation (Mouassassatt Al Fikr al arabi), rendu public dernièrement à Beyrouth, Israël a attiré 9700 chercheurs, 30 000 pour la Chine. Et le monde arabe ? 750 chercheurs ont été «exportés» ! Nous avons des jeunes d’un bon niveau, brillants, qui se forment aux Etats-Unis ou en Europe. Auront-ils des postes d’emploi à leur retour dans leurs pays ?
-L’absence des libertés et de débats ouverts peut-elle expliquer cette situation dans le monde arabe ?
Il y a de tout. Il y a absence de projets politiques et démocratiques également. Inexistence d’un projet de renaissance. Aucun projet anti-chômage, contre la désertification, contre l’analphabétisme, etc. Il n’y aucune coopération concrète entre les pays arabes. Il y a une crise. Engels disait que «l’Histoire avance de son côté le plus sombre». J’ai toujours dit que les révoltes étaient prévues dans chaque pays arabe. Existe-t-il quelque chose de plus sombre que ce que nous vivons ? L’acte du citoyen tunisien qui s’est immolé a changé le visage de la Tunisie. Le citoyen arabe ne supporte plus ce qu’il vit. La crise économique et sociale est très profonde. La théorie de «la stabilité» n’a plus de sens. «Une stabilité» accompagnée de répression, de chômage, de non-respect de la démocratie, de violation des droits de l’homme… Quelles sont la signification et la valeur d’une telle «stabilité» ? Je pense que le citoyen arabe commence à briser la muraille de la peur. Plus il avance dans ce mouvement, plus les possibilités de changement seront grandes. Les Tunisiens ont montré l’exemple. Et leurs slogans étaient clairs : c’est la fin des régimes oppresseurs, ça suffit, khalass ! Nous sommes devant une nouvelle situation. Cette nouvelle étape sera une réussite à mon sens…
-Pensez-vous que l’Occident accepte des changements dans le monde arabe ?
L’Occident a tiré profit de notre sous-développement, de notre allégeance, de notre pétrole et de notre soumission. L’Occident a appuyé tous les dictateurs dans les pays arabes. L’Occident, comme Israël, est derrière beaucoup de crises dans le monde arabe et dans le projet de son éclatement. Un président arabe a accepté fièrement de se séparer d’une partie de son pays comme s’il avait accompli un acte héroïque ! Nous avons atteint un niveau incroyable de surréalisme (…) Si les pays arabes étaient unifiés, les nations asiatiques préféraient avoir des relations avec le monde arabe, pas avec Israël. La preuve ? Les pays asiatiques ont été les derniers à reconnaître l’Etat d’Israël. L’Egypte l’a fait avant la Chine. Les régimes arabes sont aujourd’hui plus protégés par l’Occident que par leur peuple. L’Occident a amassé des fortunes et des richesses grâce à ces régimes et a consommé une grande partie du brut arabe. Les pays arabes achètent de l’armement de l’Occident sans l’utiliser ! L’argent des Arabes est déposé dans des banques étrangères. Est-il logique qu’après 50 ans de production pétrolière, les pays arabes soient incapables d’avoir une industrie automobile, une usine de tracteurs agricoles ou d’appareils photo ? Qu’avons-nous fait de tout l’argent du pétrole ?
-Justement…
Les Arabes n’ont jamais tenté de construire, par un exemple, des barrages, des hôpitaux ou des autoroutes en utilisant la technologie chinoise. Par contre, ils n’ont pas cessé de critiquer la mauvaise qualité des produits chinois ! Ont-ils un jour tenté d’utiliser la technologie japonaise dans la revalorisation des terres agricoles ou des projets hydrauliques ? Les Japonais sont prêts à transférer leur technologie car de toute façon, ils ont toujours une longueur d’avance. Ils ont déjà exporté leur technologie vers la Chine. Ils n’avaient eu aucune crainte. Avoir cette technologie ne sera que bénéfique pour les pays arabes pour s’engager dans les processus de modernisation. Il faut profiter du développement des pays asiatiques, de leurs moyens importants et des avantages comparatifs des coûts des projets. Une usine importée de l’Occident est trois fois plus chère que celle commandée en Asie. Tout le monde sait que le Japon est plus développé que les pays occidentaux. La Chine avance à grands pas dans l’amélioration de sa technologie. Avec ses 1,3 milliard d’habitants, la Chine est plus peuplée que l’Europe et les Etats-Unis. Il y a donc beaucoup d’avantages. (El Watan-04.02.2011.)
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*Yémen : 3 blessés après des tirs de la police sur des manifestants
Trois personnes ont été blessées, dont l’une grièvement, jeudi soir dans le sud-est du Yémen lorsque la police a tiré à balles réelles et aux gaz lacrymogènes pour disperser une manifestation de militants séparatistes, selon des témoins.
Les forces de sécurité sont intervenues à Moukallah, chef-lieu du Hadramout, «tirant à balles réelles» et faisant usage de «gaz lacrymogènes» contre les manifestants qui répondaient à un appel des séparatistes du Mouvement sudiste pour protester contre la politique du gouvernement.
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Les trois blessés ont été admis à l’hôpital Avicenne à Moukallah.
Dans un communiqué diffusé jeudi matin par une radio locale, les services de sécurité du Hadramout avaient appelé la population à ne pas participer à la manifestation «non autorisée» et «organisée par un groupe de hors-la-loi», expression utilisée par les autorités pour désigner le Mouvement sudiste.
Jeudi, des milliers de personnes avaient manifesté dans différentes villes du sud du Yémen, certaines à l’appel du Mouvement sudiste pour réclamer l’indépendance du Sud, et d’autres à l’appel de l’opposition parlementaire, pour réclamer le départ du président Ali Abdallah Saleh. Etat indépendant jusqu’à 1990, le sud du Yémen est le théâtre d’une contestation de sudistes qui réclament l’autonomie voire l’indépendance. (Le Parisien-04.02.2011.)
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Catégories : actualité, société
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