Egypte:affrontements meurtriers dans plusieurs villes du pays
3 02 2011*Le clan Moubarak opte pour le chaos
*L’armée préfère-t-elle la dictature du régime à la démocratie?
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*Le Caire, théâtre de nouveaux affrontements meurtriers ce jeudi matin
**vidéo: affrontements… http://www.dailymotion.com/video/xguzh4_protesters-hurt-in-tahrir-square_news#from=embed
De nouveaux affrontements tôt jeudi matin sur la place Tahrir au Caire, cœur de la contestation contre le président égyptien depuis dix jours, ont fait trois morts et plusieurs blessés, au lendemain d’une journée de violences entre pro et anti Hosni Moubarak qui avait fait au moins trois morts et des centaines de blessés. « Trois personnes ont été tuées par des tirs au cours des trois dernières heures », a déclaré à l’AFP le Dr Amr Bahaa, depuis un hôpital de fortune installé dans une mosquée près de la place. « La plupart des victimes sont arrivées ces trois dernières heures, beaucoup avec des blessures par balles », a-t-il ajouté, estimant le nombre total de blessés depuis mercredi à plus d’un millier. Un précédent bilan, obtenu auprès de témoins, faisait état de deux personnes tuées tôt jeudi matin.
Sur la place Tahrir, des tirs sporadiques ont commencé à se faire entendre vers 4 heures, heure locale (3 heures, heure française) jeudi et étaient toujours audibles deux heure plus tard, a indiqué un correspondant de l’AFP sur place. Selon des témoins, deux personnes ont été tuées par des coups de feu tirés contre des manifestants hostiles au régime. Des tirs en provenance du pont d’Octobre, où sont positionnés les partisans du président Hosni Moubarak, ont par ailleurs fait de nombreux blessés, selon ces témoins. Des véhicules militaires ont été déployés jeudi parmi les manifestants, rapporte la chaîne Al-Arabiya.L’Alliance des juristes égyptiens a déclaré de son côté dans un communiqué que les manifestants anti-Moubarak sur la place étaient sous le feu de leurs adversaires et que plusieurs d’entre eux avaient été tués ou blessés.L’armée s’était déployée en masse dans la soirée aux alentours de la place, immense esplanade dans le centre du Caire, devenue depuis le 25 janvier le point de ralliement des manifestants anti-Moubarak, qui y campent par milliers chaque nuit malgré le couvre-feu.Mercredi soir, le vice-président Omar Souleiman avait appelé les manifestants à rentrer chez eux, comme l’avait fait l’armée en milieu de journée, prévenant que le dialogue proposé à l’opposition ne pouvait débuter avant l’arrêt des manifestations.De violents affrontements avaient opposé toute la journée de mercredi, partisans et adversaires du président égyptien, Hosni Moubarak, sur la place Tahrir, malgré l’appel de l’armée à la fin des manifestations. L’annonce, mardi soir, par le raïs qu’il ne briguerait pas un sixième mandat présidentiel, mais comptait rester au pouvoir jusqu’à la transition, en septembre, n’avait pas suffi à désarmer les manifestants, qui s’étaient rassemblés dès le matin dans le centre de la capitale. Dans la soirée, France 24 a annoncé que trois de ses journalistes avaient été interpellés au Caire.Un champ de bataille. La tension a franchi une nouvelle étape avec l’entrée en scène des partisans du président. Montés sur des chevaux et des chameaux, armés de fouets, de bâtons et de pierres, une cinquantaine d’entre eux ont chargé en milieu de journée les manifestants antigouvernementaux sur la place Tahrir. Selon la chaîne de télévision Al-Jazira, des soldats ont tiré en l’air pour tenter de disperser les groupes rivaux, mais l’armée a démenti cette information. Un journaliste de Reuters a vu des hommes en civil tirer en l’air.La bataille a aussi gagné les abords du Musée égyptien, qui abrite des trésors inestimables de l’Antiquité. Les soldats ont formé une chaîne pour protéger l’établissement, mais en fin d’après-midi, deux cocktails Molotov ont atterri dans la cour du musée.A la nuit tombée, des gaz lacrymogènes ont été tirés contre les manifestants anti-Moubarak près de la place, mais leur origine était incertaine.
Des centaines de blessés. Selon un bilan officiel donné par le ministre de la santé, trois personnes ont été tuées et 639 blessées mercredi place Tahrir.Sous la pression de leurs adversaires, de nombreux opposants ont fui la place Tahrir. Environ 1 500 partisans de l’opposition, moins que les jours précédents, s’étaient rassemblés dans la matinée sur la place pour exiger le départ immédiat de Hosni Moubarak, 82 ans, au pouvoir depuis près de trente ans. Plusieurs centaines de leurs amis venus du nord de la ville ont tenté de venir en renfort mais ils ont été repoussés par les pro-Moubarak, dont certains sont montés sur des véhicules de l’armée pour leur lancer des pierres.
Policiers en civils. Le ministère de l’intérieur égyptien a démenti les allégations de manifestants antigouvernementaux selon lesquelles des policiers en civil seraient impliqués dans des heurts entre partisans et adversaires du président Hosni Moubarak, mais l’opposant et ancien directeur général de l’Agence internationale de l’énergie atomique Mohamed ElBaradei a affirmé avoir des preuves du contraire. Al-Jazira a diffusé dans la journée des images de manifestants brandissant les papiers d’identité arrachés à des partisans du président et témoignant de leur appartenance aux forces de l’ordre.
>> Voir le télézapping du jour : http://www.dailymotion.com/video/xgv017_pro-moubarak-vs-anti-moubarak_news#from=embed&start=12
Appel au calme. Dans la soirée de mercredi, le vice-président égyptien, Omar Souleiman, est intervenu pour appeler « tous les citoyens à répondre favorablement à l’appel de nos forces armées à rentrer chez eux et à respecter (…) le couvre-feu, afin de soutenir les efforts de l’Etat en vue d’un retour au calme et à la stabilité », selon l’agence d’information officielle égyptienne MENA. « Les participants à ces manifestations ont fait parvenir leur message », a-t-il assuré. « Le dialogue avec les forces politiques (…) nécessite l’arrêt des manifestations et le retour de la rue égyptienne à la normale », a-t-il affirmé.
Le couvre-feu a été allégé et court désormais de 17 heures à 7 heures. Jusqu’à présent, il était en vigueur de 15 heures à 8 heures. Par ailleurs, les connexions à Internet ont été partiellement rétablies au Caire et dans d’autres villes comme Alexandrie.
L’opposition tient bon. Dans un discours mardi soir à la télévision, Hosni Moubarak a annoncé qu’il ne briguerait pas de nouveau mandat présidentiel et s’est engagé à préparer une transition pacifique. Mais cette annonce n’a pas apaisé la contestation. Malgré ces mesures, l’opposition continue à exiger le départ immédiat du président et a répété qu’elle ne voulait dialoguer qu’avec le vice-président, Omar Souleiman. Les Frères musulmans, principale force d’opposition, ont rejeté « toutes les mesures partielles proposées » par le président et refusé qu’il reste en poste jusqu’en septembre.
Réactions internationales. Les appels se sont multipliés à travers le monde, venant notamment des Etats-Unis, d’Europe et de Turquie, pour inciter le président égyptien à lancer sans attendre le processus de transition politique afin d’éviter de nouvelles violences et de garantir la stabilité du pays.
La Maison Blanche a condamné les violences qui ont éclaté au Caire et souligné qu’il était « évident » que le peuple égyptien avait besoin d’assister immédiatement à des progrès et des changements. « Le message que le président [Barack Obama] a clairement délivré au président Moubarak, c’est que le temps du changement est arrivé », a dit le porte-parole de la présidence américaine.
Nicolas Sarkozy, comme d’autres dirigeants européens, a exhorté Hosni Moubarak à engager « sans tarder » un processus de transition « concret » et sans violence. Le ministère des affaires étrangères égyptien a rejeté ces appels qui ne peuvent, selon lui, qu’« envenimer la situation ».
Le secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon, s’est dit « profondément préoccupé » par la violence en Egypte et a jugé inacceptables les attaques contre des manifestants pacifiques. Il a appelé toutes les parties à la retenue. (Le Monde-03.02.2011.)
**Le Caire plonge dans le chaos
En laissant les pro et les anti-Moubarak s’entre-tuer, l’armée n’a pas tenu sa promesse.
Des heurts violents ont opposé, hier, des troupes pro-Moubarak aux milliers de manifestants écumant la place Atahrir, au coeur du Caire. Selon un journaliste de l’AFP, les accrochages entre les deux parties antagonistes se sont soldés par plusieurs dizaines de blessés.
Les partisans du président, avec des armes blanches, sont, selon ce que soutient la Coalition nationale pour le Changement, dans plusieurs déclarations adressées à la presse internationale, des policiers en civil, qui sont entrés en force à la place Atahrir, faisant une dizaine de blessés. «L’armée se trouvant sur place n’était pas intervenue pour arrêter les violents heurts qui ont éclaté entre les protagonistes à la Place «Atahrir», épicentre de la contestation depuis neuf jours», assure la même source.
Les manifestants se battaient à coups de bâtons, de barres de fer et de jets de pierres autour des chars de l’armée, placés aux entrées de la place, sans que les militaires ne s’interposent, témoignent des journalistes de l’AFP se trouvant sur place.
Des analystes relèvent que le laisser-aller observé par l’Armée quant aux heurts opposant ceux qui veulent le départ de Moubarak et la poignée de «fauteurs de troubles» mobilisée à l’occasion, renseigne sur la volonté des autorités égyptiennes de créer un climat de panique, de suspicion et de peur pour créer un sentiment de culpabilité collective afin de laisser place aux vigiles de Moubarak de se présenter ensuite en «Sauveurs» et mater ou domestiquer l’opposition en la séparant du peuple.
Le ministre égyptien de la Défense qui avait promis, lundi dernier dans un discours télévisé, que l’Armée égyptienne est tenue par devoir d’assurer la sécurité des biens et citoyens, n’a pas tenu sa promesse en laissant les Egyptiens s’entre-tuer. Bien au contraire, l’Armée égyptienne ayant jugé légitimes les revendications de la rue a changé de ton et d’attitude à l’égard des manifestants, en leur demandant de rentrer chez eux, et ce, conformément aux mesures décrétées dans le cadre du couvre-feu. «Rentrez chez vous pour que la sécurité et la stabilité soient rétablies. Votre message est arrivé, vos revendications ont été entendues», a déclaré un porte-parole de l’armée à la télévision publique, dans la mi-journée d’hier.
Toutefois, il faut dire que des milliers de manifestants anti-gouvernementaux ayant passé, à nouveau, la nuit à la place Atahrir assurent d’y rester encore, et ce, jusqu’au départ de Hosni Moubarak. «Allez, Hosni dehors!», scandaient les protestataires, arborant deux grandes banderoles dont l’une en anglais disant «Le peuple veut la chute du régime» et l’autre en arabe, adressée à Hosni Moubarak: «Dégage!». C’est dire que la détermination et la mobilisation du peuple égyptien de faire tomber le régime du Raïs ne connaissent point de répit. En dépit des pseuso-concessions du président Moubarak, le mouvement de contestation ne décolère pas.
Le maintien de la manifestation massive, prévue pour vendredi et au cours de laquelle la Coalition nationale pour le changement veut réunir plus d’un million de personnes, est une preuve renseignant amplement sur la volonté, désormais incontestable et inébranlable du peuple à en finir avec le régime Moubarak. «Nous descendons dans les rues aujourd’hui, nous descendrons demain, mais vendredi sera la journée de la mobilisation la plus massive», a affirmé une militante du mouvement du 6 avril, Racha Badaoui.
El Baradei, la figure la plus en vue de l’opposition, a exhorté, une fois de plus, hier, le président Moubarak à partir «au plus tard vendredi».
Accusant Hosni Moubarak d’être responsable des maux du pays -pauvreté, chômage, violation des libertés, corruption et verrouillage politique, l’opposition égyptiennes, toutes tendances confondues, et à sa tête le prix Nobel de la paix, l’ex-directeur général de l’Agence internationale de l’énergie atomique (Aiea), réclame avant tout, le départ de Hosni Moubarak et refuse d’entamer le moindre dialogue avec les autorités égyptiennes avant la chute du régime, en place depuis 30 ans. (L’Expression-03.02.2011.)
** 5 manifestants tués place Tahrir au Caire ce matin dans de nouveaux affrontements
Cinq personnes ont été tuées jeudi matin par des tirs visant des manifestants hostiles au président Hosni Moubarak sur la place Tahrir, dans le centre du Caire, a-t-on appris auprès d’un médecin sur place, portant à sept le nombre de morts au cours de ces dernières 24 heures.
Ce bilan s’ajoute à au moins 300 morts tombés pendant la première semaine de manifestations lancées le 25 janvier pour réclamer le départ du président égyptien Hosni Moubarak, selon un bilan non confirmé de l’ONU.
« On a eu quatre morts ici dont un atteint par balle en plein front », a déclaré jeudi matin à l’AFP le docteur Mohamed Ismaïl, depuis un hôpital de campagne monté sur une place adjacente à la place Tahrir.
Le dernier bilan faisait état de trois tués « au cours des trois dernières heures », selon le Dr. Amr Bahaa, qui se trouvait dans un hôpital de fortune installé dans une mosquée près de la place.
« La plupart des victimes sont arrivées ces trois dernières heures, beaucoup avec des blessures par balles », avait-il ajouté, estimant le nombre total de blessés depuis mercredi à plus d’un millier.
Selon des témoins, des tirs en provenance du pont d’Octobre, où sont positionnés les partisans du président Hosni Moubarak, ont fait de nombreux blessés.
Les tirs, sporadiques, ont commencé à se faire entendre vers 04H00 (02H00 GMT) et étaient toujours entendus une heure plus tard, a indiqué d’autre part un correspondant de l’AFP sur place.
Ce bilan s’ajoute aux trois personnes tuées mercredi place Tahrir, coeur de la contestation contre le président égyptien depuis neuf jours, qui s’était transformée en champ de bataille entre pro et anti Hosni Moubarak.
Selon le ministère de la Santé, cité par la télévision d’Etat, trois personnes, dont un appelé de l’armée, ont été tuées et plus 639 ont été blessées, la plupart par des jets de pierre, dans les affrontements de mercredi.
Les heurts ont été d’une extrême violence, à coups de pierres, de bâtons, de barres de fer et parfois de couteaux.
Selon un bilan non confirmé de l’ONU, les heurts de la première semaine de contestation ont fait au moins 300 morts et plusieurs milliers de blessés.
Washington a immédiatement réagi à ces nouveaux affrontements et le Département d’Etat a pressé les Américains qui souhaitent quitter l’Egypte de se rendre « immédiatement » à l’aéroport du Caire, prévenant que les « vols américains supplémentaires après jeudi sont improbables ».
La secrétaire d’Etat américaine Hillary Clinton, dans un appel téléphonique au vice-président égyptien Omar Souleiman, a condamné les « choquants » affrontements sanglants de la veille au Caire.
L’Alliance des juristes égyptiens a déclaré de son côté dans un communiqué que les manifestants anti-Moubarak sur la place étaient sous le feu de leurs adversaires et que plusieurs d’entre eux avaient été tués ou blessés.
L’armée s’était déployée en masse dans la soirée aux alentours de la place, immense esplanade dans le centre du Caire, devenue depuis le 25 janvier le point de ralliement des manifestants anti-Moubarak, qui y campent par milliers chaque nuit malgré le couvre-feu.
Mercredi soir, le vice-président Omar Souleimane avait appelé les manifestants à rentrer chez eux, comme l’avait fait l’armée en milieu de journée, prévenant que le dialogue proposé à l’opposition ne pouvait débuter avant l’arrêt des manifestations.
Dans une interview à CBS News, le chef de file de l’opposition égyptienne, Mohamed ElBaradei a rejeté une fois de plus l’offre de dialogue de M. Souleimane, insistant sur le fait qu’Hosni Moubarak doit d’abord quitter le pouvoir.
Le mouvement de contestation a appelé à une nouvelle manifestation massive vendredi, baptisée « vendredi du départ », dans laquelle elle entend réunir comme mardi plus d’un million de personnes, malgré la promesse de M. Moubarak de s’effacer à la fin de son mandat en septembre.
Les Frères musulmans, principale force d’opposition, ont rejeté « toutes les mesures partielles proposées » par le président et refusé qu’il reste en poste jusqu’en septembre.
Selon le ministère de la Santé, cité par la télévision d’Etat, trois personnes, dont un appelé de l’armée, ont été tuées et plus de 639 blessées, la plupart par des jets de pierres, dans les affrontements de mercredi.
Mercredi matin, des milliers de partisans du chef de l’Etat étaient arrivés aux abords de la place. Après des heures de tensions, des heurts d’une extrême violence ont éclaté, à coups de pierres, de bâtons, de barres de fer et parfois de couteaux et de coktails molotov.
Par endroits, les partisans du président ont chargé, montés sur des chevaux ou des dromadaires. Ils ont aussi jeté des pierres depuis des toits et des balcons d’immeubles surplombant la place.
A l’exception de tirs de semonce en début d’après-midi, les militaires ne se sont pas interposés, tentant plutôt de s’abriter.
« Ce qu’on voit devant nous n’est jamais arrivé auparavant. Des accrochages entre Egyptiens, c’est la guerre civile », a déploré Mohamed Sayed Mostafa, 26 ans.
Le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, a jugé « inacceptables les attaques contre des manifestants pacifiques » et appelé à une « transition dans l’ordre et le calme ».
Hillary Clinton a demandé une enquête sur les violences. Et son porte-parole, Philip Crowley, a déclaré que les Etats-Unis « espéraient » que l’Egypte garderait à l’avenir « un rôle constructif » dans le processus de paix au Proche-Orient.
Mohamed ElBaradei a cherché sur CBS News à apaiser les craintes occidentales selon lesquelles l’Egypte risquerait de se retourner contre les Etats-Unis et de s’opposer à Israël.
Le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, a mis mercredi en garde contre le risque que la révolte populaire en Egypte ne débouche sur une période « d’instabilité et d’incertitude pendant de nombreuses années » dans la région.
Le secrétaire américain à la Défense Robert Gates s’est à nouveau entretenu mercredi par téléphone avec le ministre de la Défense égyptien, Mohamed Hussein Tantaoui, de la situation en Egypte, a annoncé son porte-parole, Geoff Morrell.
Selon un bilan non confirmé de l’ONU, les heurts de la première semaine de contestation auraient fait au moins 300 morts et des milliers de blessés.(AFP-03.02.2011.)
**La transition démocratique, une lourde tâche pour l’opposition
En Egypte, la rue a pris de court les mouvements politiques : il a fallu six jours à une opposition laminée par trente ans de répression pour s’organiser. Dimanche 30 janvier, Mohamed ElBaradei prenait la tête de la Coalition nationale pour le changement, un rassemblement hétéroclite qui tente de donner un visage politique à la révolte populaire. Avec un objectif : la transition démocratique.Un ancien haut fonctionnaire international, une puissante confrérie islamiste, un mouvement d’internautes rebelles… L’alliance est plus que large et reflète le morcellement de l’opposition. A sa tête : Mohamed ElBaradei, ancien directeur de l’Agence internationale de l’énergie atomique, qui bénéficie d’une importante couverture médiatique à l’étranger, mais est encore peu connu dans son pays.DES SCÉNARIOS POUR L’APRÈS-MOUBARAK
Certains Etats ont déjà établi le contact avec celui qui a été officiellement désigné pour « négocier » avec le régime du président Hosni Moubarak. L’ambassadrice américaine au Caire, Margaret Scobey, s’est entretenue au téléphone avec lui en début de semaine ; l’ambassadeur du Royaume-Uni serait également en contact.Selon une source politique égyptienne, le nouveau leader de la contestation aurait présenté des scénarios pour « l’après-Moubarak » aux diplomates occidentaux, proposant notamment de confier au vice-président Omar Souleiman, nommé samedi par Hosni Moubarak, la charge d’assurer une présidence intérimaire. Cette période de transition permettrait de dissoudre les deux Chambres du Parlement et de réviser la Constitution en vue d’élections législatives et présidentielle.
La dissolution du Parlement actuel est un point important des revendications : le dernier scrutin, en décembre, avait été entaché de fraudes massives et son second tour boycotté par l’opposition. Il avait conduit à une domination sans partage du Parti national-démocrate, qui obtenait alors plus de 80 % des sièges.
LES FRÈRES MUSULMANS, PUISSANTS MAIS DANS L’OMBRE
Toujours selon cette source, dans un autre scénario, M. ElBaradei proposerait de constituer un conseil présidentiel comprenant trois personnalités, un militaire et deux civils, pour gérer la transition une fois M. Moubarak parti.
Cette alternative est celle défendue par l’une des composantes-clés de sa coalition : les Frères musulmans, ce puissant mouvement banni de la scène politique par M. Moubarak mais très ancré dans le pays. Avant d’être interdit par le pouvoir, ils avaient obtenu 88 députés en 2005, soit un cinquième de l’Assemblée. Mais, conscients des réticences occidentales face à leur caractère islamiste, les Frères musulmans ont choisi de tenir pour l’instant un rôle secondaire dans la contestation.
Mohamed El-Beltagi, ancien député des Frères musulmans a estimé qu’un « conseil » devrait assurer l’intérim du pouvoir pendant trois mois, le temps d’organiser des élections législatives dont sortirait un gouvernement chargé de conduire le pays pendant une durée de deux ans. Ce gouvernement aurait pour mission de faire adopter des réformes constitutionnelles, en préalable à la tenue de nouvelles élections législatives.
DES COMPOSANTES AU POIDS INCERTAIN
L’influence politique des autres membres de la coalition est difficile à évaluer : le Mouvement du 6-Avril, par exemple, est le fer de lance du mouvement de contestation, mais il est peu organisé sur le plan politique. Le groupe, dirigé par Ahmad Maher, réclame des réformes politiques, économiques et sociales, est né en 2008 d’une révolte ouvrière dans le delta du Nil. Très actif sur Internet, c’est lui qui a lancé les appels aux premières manifestations.
Reste une vingtaine de partis laïques de l’opposition légale, très affaiblis. Le plus connu est le Nouveau Wafd, créé en 1978 en s’inspirant du Wafd, le parti nationaliste historique du pays. On trouve aussi le parti Al-Ghad créé par l’opposant Ayman Nour, qui s’était présenté contre le président Hosni Moubarak à la présidentielle de 2005.
Une chose est sûre : la coalition a prévenu le gouvernement égyptien qu’elle n’engagerait pas de dialogue sur une transition politique avant le départ du président. Mardi soir, au terme d’une journée de mobilisation géante dans tout le pays, le raïs déclarait vouloir rester au pouvoir jusqu’en septembre pour préparer « un transfert pacifique des pouvoirs ». Insatisfaite, l’opposition a appelé mercredi à la poursuite des manifestations dans le centre du Caire, et maintenu son grand rassemblement de vendredi pour exiger le départ du président. (Le Monde-02.02.2011.)
**La presse internationale prise dans la tourmente
De nombreux journalistes étrangers couvrant les affrontements entre partisans et adversaires du président Hosni Moubarak ont fait l’objet de violences, mercredi 2 février au Caire, ont indiqué leurs rédactions et l’association Reporters sans frontières (RSF).
Un journaliste de l’AFP a indiqué avoir dû solliciter la protection de deux soldats pour quitter la place Tahrir sans encombre, en raison de l’agressivité de militants pro-régime aux abords du site. Le porte-parole de la diplomatie américaine, Philip Crowley, s’est inquiété des « arrestations » et des « attaques » contre les médias couvrant la crise égyptienne.RSF a « condamné sans appel » les violences commises par les partisans du président Moubarak, auxquels se seraient mêlés des policiers en civil, à l’encontre de plusieurs journalistes de la BBC, d’Al-Jazira, de CNN, d’Al-Arabiya et d’ABC News. Plusieurs d’entre eux « ont été directement pris à partie par des partisans du chef de l’Etat et par des policiers infiltrés ». « Ils ont été frappés et leur matériel [a été] volé », a déclaré Jean-François Julliard, secrétaire général de RSF.L’association indique qu’il est encore difficile de faire un comptage précis des exactions dont la presse a été victime, « en raison de la confusion qui a régné au cours de cette journée de mobilisation ».« TABASSÉ »
A Bruxelles, le quotidien Le Soir a indiqué que son journaliste Serge Dumont, de nationalité belge, avait été « molesté », « tabassé » puis « emmené par des personnes non identifiées en civil » alors qu’il couvrait une manifestation pro-Moubarak au Caire. Serge Dumont travaille également pour les journaux suisse Le Temps et français La Voix du Nord. Les trois quotidiens ont exprimé « leur plus vive préoccupation ».
L’armée égyptienne est intervenue place Tahrir pour exfiltrer de la foule en colère un caméraman de la télévision publique Radio-Canada, sans quoi toute l’équipe « aurait été battue à mort », a raconté l’un des journalistes présents.
La foule s’en est violemment prise à deux journalistes suédois du quotidien Aftonbladet au cours d’un reportage dans un quartier pauvre du Caire, lesquels ont été arrêtés puis relâchés quelques heures plus tard par un militaire venu sur place, a rapporté leur journal. Une équipe de la chaîne française France 2 a elle aussi été « prise à partie mercredi soir à un barrage » alors qu’elle revenait d’un reportage à Suez, a indiqué à Paris Thierry Thuillier, directeur général des rédactions de France-Télévisions.
Par ailleurs, trois journalistes de France 24 ont été interpellés en fin de journée au Caire et sont détenus par « les renseignements militaires », selon les indications fournies à l’AFP par une porte-parole de la chaîne à Paris. Celle-ci ignorait les motifs de ces interpellations.
Trois journalistes israéliens ont aussi été interpellés alors qu’ils couvraient le soulèvement populaire contre le régime du président Moubarak, avant d’être relâchés en attendant de prendre l’avion pour Israël, a indiqué mercredi le ministère des affaires étrangères israélien. Selon les médias israéliens, deux des journalistes sont membres de la deuxième chaîne de télévision (privée). Le troisième est un envoyé d’un site Internet arabe israélien. Ils ont été détenus pour n’avoir pas respecté le couvre-feu. (Le Monde-03.02.2011.)
**ElBaradei a peur que « cela tourne au bain de sang »
Des heurts ont éclaté, depuis mercredi 2 février après-midi, entre partisans du président Hosni Moubarak et manifestants qui réclament son départ, sur la place Tahrir au Caire. Plusieurs dizaines de milliers de personnes favorables au chef de l’Etat ont marché sur la place où des milliers de manifestants anti-Moubarak avaient passé une nouvelle nuit pour réclamer son départ.Selon des manifestants, qui ont réussi à s’emparer de leurs papiers d’identité, des policiers mènent les supporteurs du président Moubarak sur la place Tahrir. La chaîne Al-Jazira a montré des groupes de manifestants lançant des projectiles, sans intervention visible de l’armée. Des partisans du président, à dos de dromadaire ou de cheval, ont fait irruption sur la place, chargeant des manifestants. Certains ont été désarçonnés et maîtrisés. Au moins six personnes ont été jetées à bas de leur monture, frappées à coups de bâtons et traînées au sol, le visage en sang.Selon Reuters, les manifestants auraient demandé à l’armée d’intervenir, en vain. Les militaires ont menacé les pro-Moubarak de riposter fermement s’ils s’en prenaient aux partisans du changement. Les correspondants de la chaîne indiquent qu’il y aurait au moins une dizaine de blessés parmi les manifestants hostiles au gouvernement. Des échauffourées auraient aussi eu lieu dans les rues donnant sur la place. Sur Twitter, des messages demandent de faire évacuer les femmes et les enfants de la place.Le ministère de l’intérieur égyptien a démenti les allégations des manifestants anti-Moubarak selon lesquelles des policiers en civil seraient impliqués dans les violences.
« TACTIQUE DE LA PEUR »
L’ancien directeur général de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) Mohamed ElBaradei a accusé le gouvernement de recourir à « la tactique de la peur » en réaction aux violences qui ont éclaté place Tahrir. « Je suis extrêmement préoccupé. Je veux dire qu’il s’agit d’une nouveau symptôme, d’un nouveau signe montrant qu’un régime criminel a recours à des actes criminels », a-t-il dit à la radio de la BBC à propos de ces affrontements. « J’ai peur que cela tourne au bain de sang », a-t-il ajouté, en qualifiant de « bande de voyous » les manifestants pro-Moubarak.
Dans la matinée, environ 1 500 personnes se trouvaient sur l’immense place Tahrir, devenue le point de ralliement du mouvement de contestation depuis le 25 janvier. « Le peuple exige la chute du régime », lisait-on sur une banderole de 20 mètres de long. Dans le même temps, des milliers de partisans du président égyptien se sont rassemblés dans le centre du Caire pour clamer leur allégeance à Hosni Moubarak. « Oui à Moubarak, pour protéger la stabilité », peut-on lire sur une des banderoles déployées par le groupe aux abords de l’immeuble de la télévision nationale, à un kilomètre environ de la place Tahrir. Sur d’autres banderoles, on peut lire « Oui au président de la paix et de la stabilité » ou « Ceux qui aiment l’Egypte ne la font pas couler ».
A Alexandrie, selon des témoins, un groupe de partisans de M. Moubarak, armés de couteaux et de bâtons, ont attaqué des manifestants en chantant « On t’aime Hosni ». Mais l’armée est intervenue et a dispersé les agresseurs.
Le mouvement de contestation a pour sa part maintenu son appel à des manifestations massives vendredi malgré l’annonce du président la veille qu’il ne se représenterait pas à la présidentielle en septembre et un appel de l’armée aux manifestants de rentrer chez eux.(Le Monde avec AFP et Reuters-02.02.2011.)
* Suivez l’évolution des événements en direct sur le site de la BBC.
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** «Moubarak a commis un crime contre des manifestants pacifiques»
La place Tahrir (Libération) du Caire a connu, hier, une journée sanglante. Pour l’opposant George Ishak, du mouvement Kifaya, le régime de Moubarak a «orchestré une violente agression contre des manifestants pacifiques, en actionnant des hordes de mercenaires et des éléments de la police politique», dans une tentative désespérée pour mater la révolte. George Ishak, d’obédience chrétienne, a qualifié Moubarak de «criminel».
- Que s’est-il passé dans la journée d’hier à la place Tahrir ?
Des mercenaires et des hordes de voyous, à la solde de Moubarak, se sont attaqués aux manifestants qui étaient rassemblés pacifiquement à la place Tahrir. Moubarak a commis un autre crime contre un peuple. Nous avons des preuves que les bandes d’agresseurs sont des éléments du ministère de l’Intérieur et des officiers de la police. Le même scénario est exécuté également à Alexandrie et à Al Ismaïlya. Nombreux parmi ceux qui ont été arrêtés sont des éléments des services de police.
Des réunions secrètes se sont tenues entre des responsables du parti de Moubarak avec des officiers de la police politique pour organiser une agression violente contre des hommes et des femmes rassemblés pacifiquement à la place centrale du Caire. Cette lâche attaque contre des manifestants pacifiques est venue suite au discours de Moubarak qui s’entête à rester au pouvoir, quitte à massacrer tout le peuple égyptien. Moubarak fait tout pour transformer un mouvement pacifique et démocratique en un bain de sang.
Le monde entier a découvert un peuple qui se bat pacifiquement et de manière civilisée contre la tyrannie, une image que le tyran n’a pas pu supporter. Il veut que la rue sombre dans le chaos. Il veut mettre le pays à feu et à sang. Il donne encore une fois la preuve que c’est un homme qui se dresse contre le peuple et contre les intérêts du pays pour demeurer au pouvoir. Il se dévoile sous sa vraie nature. C’est un criminel.
- Pourquoi l’armée a laissé faire, alors qu’elle avait déclaré qu’elle est dans la rue pour protéger les manifestants ?
Elle en porte l’entière responsabilité du massacre commis contre des manifestants pacifiques. On a vu cette armée qui, dès son entrée en scène, a rassuré le peuple en affirmant que ses revendications sont légitimes. Elle vient de commettre une grave erreur en restant spectatrice devant un massacre. C’est une non-assistance à peuple en danger. Cette armée, qui a été accueillie à bras ouverts pas les manifestants, a trahi son peuple en laissant des hordes de criminels s’attaquer à des Egyptiens qui ont montré au monde entier qu’ils sont dignes de la démocratie et de la liberté. Ce n’est pas normal que les attaques contre les manifestants aient duré des heures et cette armée n’a eu ni le courage ni l’honneur d’agir pour sauver des citoyens en danger de mort. L’autorité de l’armée est sérieusement entamée. Elle est plus que jamais sommée de bouger pour déposer le Président, si elle veut sauver la face.
- Quel serait l’impact des événements d’hier sur la suite de la contestation ?
Si Moubarak et sa bande de criminels pensent que la révolution de la dignité est matée, ils se trompent lourdement. Bien au contraire, les masses seront plus que jamais galvanisées et leur détermination sera renforcée. Les rangs des manifestants seront élargis et la mobilisation restera intacte jusqu’à la chute du despote. Il y aura des millions et des millions dans les rues du pays demain.
Nous avons donné un autre rendez-vous, la journée de demain, pour une autre manifestation gigantesque. C’est tout un peuple qui s’est soulevé contre la dictature. Pas question de revenir en arrière. Rien ne pourra arrêter la marche du peuple pour son autodétermination.
- Quelle est votre appréciation sur les attitudes des capitales occidentales par rapport à ce qui se passe en Egypte depuis plus d’une semaine maintenant ?
Franchement, on s’en fout de ce que penserait ou dirait tel ou tel président étranger. Le peuple égyptien est en train de faire sa révolution contre un régime despotique qui a tout le temps bénéficié d’un soutien très actif de l’Occident. On ne veut rien d’eux. Les puissants du moment agissent contre des régimes mêmes démocratiques qui n’arrangent pas leurs intérêts et se montrent très complaisants avec les dictatures les plus cruelles car elles sont garantes de leurs mesquins intérêts. Donc, nous sommes à l’écoute des peuples libres épris de justice et de liberté et non pas des classes dirigeantes, occidentales ou orientales, qui plombent leurs oreilles de démocratie et pactisent avec le diable.
- Des responsables occidentaux et autres analystes disent leur crainte de voir les Frères musulmans prendre les devants de la scène en Egypte, qu’en dites-vous ?
Il s’agit là d’un argument désespérant de ceux qui, en réalité, craignent de voir leur ami despote quitter le pouvoir. Curieusement, tout le monde se focalise sur les Frères musulmans, leur rôle et leur force dans cette révolution de la dignité, alors que pendant plus d’une semaine, ce sont des femmes et des hommes qui se battent pour la démocratie et la liberté dans un pays longtemps soumis à la terreur d’un tyran. Pourquoi ces analystes ne s’intéressent pas aux gigantesques carrés de manifestants formés par des jeunes, filles et garçons, chrétiens et musulmans, rêvant tous ensemble d’un pays libre et démocratique. La réalité égyptienne est tout autre que celle que nous renvoient des observateurs et autres conseillers éclairés des classes dirigeantes. (El Watan-03.02.2011.)
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*Roman et révolte populaire dans le monde arabe
Les déceptions de «l’Etat nation» et celles de la «légitimité-révolutionnaire», la corruption massive, les éruptions de fanatisme religieux, le terrorisme aveugle et la dictature, bref, la carte politique du «monde arabe» de ces cinquante dernières années, telles que l’ont dessinée les romanciers autochtones, suffit à expliquer le ras-le-bol des populations dans presque tous les Etats dits «arabes ».La littérature romanesque écrite en arabe, français, anglais, italien et autres langues en dit long sur le désarroi et la révolte des «peuples arabes». Le combat pour la démocratie, les libertés collectives et individuelles, la dénonciation de la corruption, des mandats de «président à vie», des «Républiques royales» ou «tawrith», des «machines sécuritaires» broyant tout sur leur passage, tels sont les sujets de 70% des romans écrits, ces dernières années, par les romanciers égyptiens, algériens, syriens, tunisiens, marocains, irakiens, soudanais ou yéménites.Tewfik El Hakim a été (certainement ?) le précurseur de ces romanciers «révoltés». Son Journal d’un substitut de campagne (1946)(1) dénonce la corruption de la justice et la mainmise de l’Etat sur les rouages d’une pseudo-justice, clémente pour les «gros bonnets» et «broyante» pour les pauvres. Dans son sillage, Naguib Mahfouz publie, en 1954, Les enfants de notre quartier, tout de suite interdit de diffusion (il l’est toujours) en Egypte. Ad’ham, le héros du roman, veut «tout» : le pouvoir, la légitimité religieuse et… les têtes des disciples (entendre citoyens !). Ecrivain prolifique, Mahfouz publiera d’autres romans politiques très critiques à l’égard du pouvoir. Citons pour l’exemple : Le voleur et les chiens, Bavardages sur le Nil ou Miramar. Plus jeune que Mahfouz, Djamel El Ghaïtani va tourmenter le pouvoir égyptien en 1972 avec son Zeïni Barakat. «El Bassas» (L’agent secret) n’a rien à envier à Big Brother de George Orwel. Il surveille tout le monde ! Sonallah Ibrahim(2) est l’écrivain de la révolte. D’autres écrivains arabes ont publié des romans d’une grande valeur politique : Abderahmane Mounif (Villes de sel- Terre des maudits- A l’Est de la Méditerranée, etc.) Khaïriri Edahabi (Les malheurs de Yacine. Hassiba, etc.), Nabil Souleïman (Neige d’été – Défaites successives, etc.), Tewfik Y. Aouad (Les Moulins de Beyrouth), Maguid Tobia (La boue) et la liste est très longue.
Du point de vue «quantitatif », les romanciers algériens sont les «plus virulents». La guerre d’Algérie, seule «guerre révolutionnaire» de dimension internationale dans le monde arabe moderne, l’édition à Paris et «l’absence relative» de censure pour les œuvres artistiques ont beaucoup aidé à la prolifération en Algérie de romans politiques «plus francs», plus virulents et parfois à «la limite du pamphlet politique». Encouragés par un Kateb Yacine éternel opposant et un Mouloud Mammeri «viscéralement» anti-pouvoir, les Boudjedra (1969 : La répudiation, 1979, Les mille et une années de nostalgie, etc.), Bagtache : (Azouz El Cabrane, Khouya Dahmane, etc.), Rachid Mimouni (Le fleuve détourné, L’honneur de la tribu, etc.), Tahar Djaout (L’invention du désert, Les Vigiles, etc.), Djilali Khellas (Une odeur de chien, Des Colombes dans le crépuscule, etc.), Waciny Laredj (L’homme qui défia la mer, Fleurs d’amande, etc.), Habib Sayah (Le temps de Néron, Cette Nostalgie, etc.), H’mida Ayachi (Le labyrinthe), Mohamed Sari (El Ghaïth, La carte de visite, etc.), Amin Zaoui (Le huitième ciel, Hennissement de corps, etc.), Mustapha Benfodil (Archéologie de l’amour), Amari Chawki et autres Saïd Boutadjine ont dénoncé «tous les dérapages» des pouvoirs successifs en Algérie de 1962 à nos jours. J’ai cité peut-être les romanciers consacrés, mais la postérité est, déjà, garantie dans les «pays arabes». Ces «révolutions» qui secouent «les trônes archaïques» ne manqueront pas d’inspirer nos jeunes romanciers. (El Watan-02.02.2011.)
Note :
1) T. El Hakim, A. Mounif et D. Ghaïtani sont traduits en français.
2) Sonallah Ibrahim a passé 5 ans dans les geôles de Nasser.
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