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Le dernier quart d’heure du Pharaon?

30012011

 *Des avions de chasse au-dessus du Caire, l’armée en renfort

Les mouvements d’opposition,  dont les Frères musulmans ont chargé l’opposant Mohamed ElBaradei de «négocier» avec le régime.

L'armée a bouclé le centre de la capitale égyptienne avec des chars d'assaut.
L’armée a bouclé le centre de la capitale égyptienne avec des chars d’assaut. 

 - Au sixième jour de la révolte anti-Moubarak, deux avions de combat sont apparus dimanche dans le ciel au-desus des manifestants, tandis que des renforts militaires ont été déployés dans la ville.

Le dernier quart d’heure du Pharaon? dans actualité coeur- L’ambiance se tend encore un peu plus au Caire ce dimanche, au sixième jour des manifestations contre le pouvoir en place. Dans l’après-midi, deux avions de chasse de l’armée de l’air ont effectué des passages à basse altitude au-dessus de la capitale égyptienne, dans une apparente démonstration de force des militaires.

Comme un avertissement à destination des protestataires qui, samedi soir encore, ont bravé le couvre-feu, les chasseurs de combat se sont montrés quelques minutes avant le début de celui-ci, à 16 heures. Ils ont survolé le centre de la ville et notamment la place Tahrir, lieu de convergence des manifestants. Alors que la police était invisible dimanche midi dans les rues du Caire en proie aux pillages, des renforts militaires ont par ailleurs été déployés. L’armée a bouclé le centre de la capitale avec des chars d’assaut et une dizaine de camions de transport militaire ont notamment été stationnés en renfort sur la place Tahrir.

Les images d’un survol mises en ligne par un internaute égyptien:

 vidéo: http://www.youtube.com/watch?v=EXTKnaeoOfo&feature=player_embedded

Plus de 100 morts depuis mardi

Centre de la contestation, la place Tahrir a de nouveau été envahie dimanche matin par plusieurs milliers de manifestants réclamant le départ du président Moubarak. Alors que les violences ont déjà fait plus de 100 morts et des milliers de blessés depuis mardi, la nomination samedi soir d’un vice-président et d’un nouveau premier ministre n’a pas calmé la colère des manifestants. «Moubarak, Omar Souleimane (le nouveau vice-président), Ahmed Chafic (le premier ministre) doivent tous partir. Ça fait 30 ans que ce régime est au pouvoir, ça suffit», a ainsi pesté un manifestant.

Les nouvelles nominations ont également été rejetées dimanche par les Frères musulmans, principale force d’opposition du pays. «Il s’agit d’une tentative pour contourner les revendications du peuple et pour avorter sa révolution», ont-ils estimé. Avec d’autres mouvements d’opposition, les Frères musulmans ont chargé l’opposant Mohamed ElBaradei de «négocier» avec le régime du président Hosni Moubarak.

L’opposant s’en est pris aux États-Unis, qui perdent selon lui leur «crédibilité» en appelant à une démocratisation en Égypte tout en continuant de soutenir Hosni Moubarak. Il répondait à la secrétaire d’État américaine, Hillary Clinton, qui a plaidé dimanche pour «une transition en bon ordre», tout en assurant qu’il n’était pas question de suspendre l’aide à l’Égypte, principal allié des États-Unis dans le monde arabe. Dans la nuit, le président Barack Obama a de nouveau exhorté le président Moubarak à tenir ses promesses en matière de réformes. Dans ce climat, les États-Unis se préparent à évacuer leurs ressortissants d’Égypte. (Le Figaro-30.01.2011.)

**la révolte égyptienne fait trembler les marchés

*L’onde de choc de la révolte égyptienne fait trembler jusqu’à Wall Street

Les Bourses arabes souffrent de la crise égyptienne.
Les Bourses arabes souffrent de la crise égyptienne. 

Les Bourses arabes ont chuté ce dimanche (30.01.2011.). Le baril de pétrole flirte avec les 100 dollars. Les soubresauts de l’Égypte ont des répercussions jusqu’à Wall Street. Explications.

coeur- dans international L’onde de choc de la révolte égyptienne fait trembler jusqu’à Wall Street. Le chaos qui semble régner au sein de la deuxième économie d’Afrique entraîne une grande incertitude. Conséquence, les investisseurs font le dos rond.

• Les Bourses arabes chutent. Dimanche, qui n’est pas un jour chômé dans les pays musulmans de la péninsule arabique, les places financières sont dans le rouge. La Bourse de Dubaï a perdu 4,32%, celle du Qatar plus de 2,95%, celle d’Abou Dhabi 3,68%, et celle du Koweït 1,76%. Riyadh, qui a clôturé samedi soir en chute de 6,43%, a récupéré une partie de ses pertes (+2,47%).

«Samedi, la chute de l’indice boursier de Riyad a effacé tous les gains enregistrés depuis la mi-octobre», observe Paul Gamble, de Jadwa Investment. «Les turbulences régionales n’affectent pas les perspectives économiques du pays ni celles des entreprises saoudiennes, mais elles ont sapé la confiance, particulièrement celle des investisseurs étrangers.» Les épargnants du Royaume ont également souffert : ils détiennent 126 millions de dollars sur le marché égyptien.

• Les craintes sur le canal de Suez font flamber le cours du pétrole. Le baril de Brent a terminé la journée de vendredi en hausse, frôlant la barre symbolique des 100 dollars, à 99 dollars. Les marchés s’inquiètent parce que l’Égypte, qui produit peu d’or noir, occupe une position stratégique sur la route du pétrole entre la péninsule arabique et les pays occidentaux. Elle contrôle le canal de Suez et l’oléoduc Suez-Méditerranée (Sumed). Environ trois milliards de baril transitent par ces deux chemins, selon les analystes de Société générale. Ces derniers estiment peu probable une attaque paramilitaire contre ces installations. Ils estiment en revanche qu’une grève pourrait altérer la circulation des pétroliers.

«La fermeture du canal rallongerait de 10 jours le voyage des tankers en direction de l’Amérique du nord, et de 18 jours vers l’Europe», indique les spécialistes de JP Morgan. Les pays développés détiennent des réserves suffisantes pour faire face à ces contretemps. Mais les mettre à contribution entraînerait automatiquement une hausse des cours du pétrole, selon eux.

Les analystes de JP Morgan redoutent qu’à plus long terme, «les troubles se répandent à travers le Moyen-Orient et les pays producteurs d’Afrique du Nord, ce qui auraient de grandes conséquences sur les marchés boursiers et la confiance», notent les analystes de JP Morgan. Une hausse durable de 10% du prix du baril peut amputer la croissance mondiale de 0,25% sur un trimestre.

• Des chars au Caire enfoncent le plancher à Wall Street. Vendredi, l’indice vedette des valeurs américaines, le S&P 500, a vécu sa chute la plus brutale depuis le mois d’août. Des craintes concernant une hausse des taux en Europe ont tiré vers le bas le marché action en début de séance. Mais, écrivent les analystes de JP Morgan, «le plancher s’est franchement effondré lorsque sont sorties les nouvelles d’une escalade des manifestation en Égypte». Il n’en fallait pas plus aux investisseurs pour se ruer à la vente. Un mouvement «qui cherchait depuis quelques temps la bonne excuse pour se déclencher», ajoutent les spécialistes de l’établissement américain. (Le Figaro-30.01.2011.) 

**La crise égyptienne inquiète les investisseurs
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La Bourse du Caire s'est effondrée de 20% depuis un mois.
La Bourse du Caire s’est effondrée de 20% depuis un mois. 

Reflétant l’instabilité politique, l’agence de notation Fitch envisage de dégrader la note du pays. La Bourse du Caire a chuté de 20% en un mois.

coeur- dans société Les marchés détestent l’incertitude. Politique de surcroît. L’agence de notation Fitch a modifié vendredi après-midi sa perspective sur la note égyptienne BB+ de stable à négative. Cette décision «reflète l’émergence des manifestations contre le régime et l’incertitude que cela créé sur les perspectives politiques et économiques, à quelques mois des élections de septembre», a argumenté Richard Fox, responsable de la notation pour les pays d’Afrique et du Moyen-Orient.

«La persistance et l’intensification des troubles (…) conduiraient à une dégradation de la note» de l’Égypte, prévient Fitch dans un communiqué publié ce vendredi en milieu d’après-midi. Une agence de notation ne porte pas de jugement politique sur la situation d’un pays, elle se limite à évaluer le risque lié à une situation donnée.

La prime de risque bondit

Vendredi, l’inquiétude des investisseurs s’est renforcée. L’assurance sur les titres de dette égyptienne à échéance 5 ans a bondi de 65 points en fin d’après-midi, à 450 points, rapporte Markit. Le résultat «de spéculations à propos d’une éventuelle intervention télévisée du président Hosni Moubarak en fin de journée (qui s’est finalement tenue vers 23 heures 30, NDR), ainsi que des témoignages de forces de police fraternisant avec les manifestants», explique Otis Casey, directeur de Markit.

La Bourse du Caire n’était pas en reste. L’indice EGX 30 regroupant les principales valeurs cotées au Caire a perdu près de 20% depuis un mois. Durant la seule séance de jeudi, il a décroché de 10,52%. Elle était fermée vendredi, jour chômé, et le restera exceptionnellement jusqu’à lundi au moins, a annoncé samedi la chaîne de télévision officielle.

«Si Moubarak déclare, comme l’a fait Ben Ali il y a deux semaines, qu’il reste au pouvoir jusqu’en 2014, alors la situation (sur les marchés, NDR) va vraiment devenir moche», estimait en fin d’après-midi sur Twitter Ashraf Laidi, responsable stratégie devises chez le courtier CMC Markets. Le président Égyptien a seulement annoncé la démission de son gouvernement.

«Un des pays les plus risqués»

L’Égypte est le parfait épouvantail aux yeux des investisseurs. «Elle a toujours été un des pays les plus risqués de la région à cause de sa dette publique élevée (plus de 70%, NDR), de la flambée des prix et de son déficit commercial», rappelle Gavan Nolan, de Markit. Quelle que soit la manière dont la crise évolue, «il sera difficile de rétablir la confiance dans la région», ajoutent les économistes de Nomura.

«L’exemple tunisien crée un précédent pour l’ensemble de l’Afrique du Nord, et, de spécifiquement sociales, les contestations peuvent prendre un tour plus politique et impliquer certains changements dans le fonctionnement politique du pays», analyse BNP Paribas. Après la Tunisie, l’Égypte. Et ensuite, à qui le tour? Au vu de la hausse des taux sur les dettes des pays comme Israël, le Liban, la Jordanie ou les monarchies du Golfe, les investisseurs se posent déjà la question. (Le Figaro-29.01.2011.)

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* La nomination du chef du Renseignement, le général Omar Souleimane arrange aussi bien les Américains, les Israéliens que l’armée égyptienne.

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L’Egypte s’achemine-t-elle vers un scénario à la tunisienne? A suivre l’évolution des événements, tout laisse croire que le régime de Hosni Moubarak vit son dernier quart d’heure. Le Raïs a tenu hier, une réunion jugée «importante» à la Présidence. Comme première décision, il a procédé à la nomination, pour la première fois depuis son arrivée au pouvoir en 1981, d’un vice-président. Il s’agit du chef du Renseignement égyptien Omar Souleimane. Une décision prise conformément à l’article 139 de la Constitution égyptienne qui donne droit au président de la République de nommer un ou plusieurs vice-présidents. Juste après sa nomination à ce poste, le patron du Renseignement a prêté serment au siège de la Présidence. A la tête de ce département sensible de l’armée, le général Souleimane, né en 1934, joue un rôle politique important depuis plusieurs années et est responsable de dossiers délicats de politique étrangère, notamment celui du conflit israélo-palestinien. Il s’agit d’une personnalité qui fait le consensus aussi bien dans les pays arabes qu’en Occident. Les monarchies et les gouvernements arabes ont soutenu cette démarche. C’est le cas de Washington et de Tel-Aviv. Vu son expérience dans la gestion du conflit israélo-palestinien, le chef du Renseignement égyptien est pressenti pour apporter un plus à la crise que traverse son pays et, notamment à l’éternel conflit qui mine le Moyen-Orient. Avec la nomination d’un général au deuxième poste de la République, le régime égyptien reste fidèle à l’installation des militaires au haut sommet de l’Etat. A présent, tous les dirigeants de ce pays sont issus de l’armée. Pour simple rappel, Mohammed Naguib, qui a pris le pouvoir de 1953 à 1954, avait le grade de général principal, Gamel Abd El Nasser était colonel, Anouar El Sadate était maréchal de camp et Hosni Mobarak a le grade de maréchal en chef. Ce qui confirme l’appartenance du pouvoir égyptien à l’armée et l’arrivée d’un autre général au gouvernement. M.Moubarak a choisi le ministre de l’Aviation, le général Ahmad Chafic, pour occuper le poste de Premier ministre. Contrairement aux capitales étrangères qui ont applaudi la nomination de Omar Souleimane au poste de vice-président, la rue égyptienne s’est soulevée contre cette démarche. Les manifestants ont bravé le couvre-feu pour dire «non» à la nomination d’un autre militaire à ce poste. L’issue de la crise réside, selon les manifestants, dans le départ de Moubarak et son clan et non dans l’arrivée aux commandes d’un autre dirigeant issu du même régime. «Ni Moubarak, ni Souleimane, on en a assez des Américains!», scandaient les manifestants. Pour ces derniers, cette nomination «n’est pas le bon choix». «Souleimane est l’homme de Moubarak et cela ne reflète pas un signe de changement», ajoutent-ils.
Les observateurs analysent que Moubarak a opté pour le chef du Renseignement pour lui succéder en cas de vacance du pouvoir et barrer la route à l’opposant Mohamed El Baradei. Ce dernier n’a pas mis du temps pour réagir. Il a promis la poursuite de la contestation jusqu’au départ du président et son clan mis en place dans la journée d’hier. Il a appelé à mener des élections honnêtes sans le parti au pouvoir. A peine de retour dans son pays, le prix Nobel de la paix en 2005, s’est dit prêt à mener la transition. Selon les mêmes observateurs, l’arrivée de M.Souleimane n’est qu’une façon de barrer la route à M.El Baradei. Dans un autre registre, tous les regards des dirigeants et gouvernements de la planète sont braqués sur les événements en Egypte. Washington, Paris, Bruxelles, Berlin, Tokyo, Stockholm, l’Union européenne, l’ONU ont toutes apporté leur soutien au peuple égyptien en appelant le président Moubarak à être à la hauteur des aspirations du peuple et cesser avec la violence envers les manifestants. Cela témoigne du rôle important qu’occupe ce pays dans les enjeux politiques au Moyen-Orient. (L’Expression-30.01.2011.)

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*Al-Jazira interdite

*les Egyptiens se préparent pour un 6ème jour de révolte

 imageL’Egypte se préparait dimanche matin à une nouvelle journée de révolte qui a fait une centaine de morts en cinq jours, malgré des changements annoncés la veille à la tête du gouvernement. La chaîne satellitaire Al-Jazira, très critiquée par les autorités pour sa couverture des manifestations, a été interdite en Egypte, a annoncé l’agence officielle égyptienne Mena Plusieurs dizaines de personnes convergeaient tôt dimanche vers la place emblématique de Tahrir (libération en arabe) qui a connu depuis mardi des rassemblements de dizaines de milliers de personnes demandant le départ du président Hosni Moubarak, selon un photographe de l’AFP.   Quelque 200 personnes étaient sur place aux premières heures après y avoir passé la nuit.   La presse gouvernementale a changé de ton dimanche parlant de « changement » et s’acharnant notamment sur des figures du milieu des affaires proches du président Moubarak et de son fils Gamal, piliers du régime et hauts responsables de Parti national démocrate (PND) au pouvoir.   La révolte, qui en de nombreux endroits a tourné à l’émeute et dégénéré en de violents affrontements entre police et manifestants, a fait 111 morts et plus de 2.000 blessés, en majorité des civils, selon un bilan de l’AFP basé sur des chiffres de sources au sein des services de sécurité et des sources médicales    Les manifestations ont paralysé partiellement le pays, de nombreux distributeurs de billets étaient vides, les banques et la Bourse étant toujours fermées après leur congé hebdomadaire, et deux séances clôturant sur une forte baisse mercredi et jeudi.   En outre, les examens dans les universités et les écoles ont été reportés jusqu’à nouvel ordre.   Après de nombreux pillages au Caire, soumis tout comme les grandes villes d’Alexandrie et de Suez au couvre-feu à partir de 16H00 (14H00 GMT), l’armée semblait plus présente et plus ferme dans la rue. Des comités de citoyens organisés dans les quartiers remettaient les pillards aux forces armées.   Des milliers de prisonniers se sont également évadés de plusieurs centres carcéraux à travers le pays, parmi eux des détenus de droit commun, des détenus politiques et des islamistes emprisonnés depuis plusieurs années.   Au plan politique, on attendait l’annonce d’un nouveau gouvernement au lendemain de la nomination par M. Moubarak d’un nouveau Premier ministre, Ahmad Chafic, une personnalité respectée dans les milieux politique y compris au sein de l’opposition, et d’un vice-président, pour la première fois depuis son arrivée au pouvoir il y a 30 ans, Omar Souleimane, un proche du président.   Parmi les nominations les plus attendues, figure notamment celle pour le portefeuille de l’Intérieur, la police sous le ministre sortant Habib el-Adly -en poste depuis 1998-, étant accusé de tortures et d’abus.   Samedi soir, et malgré le couvre-feu, des milliers de personnes étaient massées dans les rues du Caire et dans d’autres villes après une journée marquée par des heurts meurtriers entre manifestants et forces de sécurité qui ont fait usage de gaz lacrymogènes et de balles caoutchoutées.   L’armée appelée en renfort a, de son côté, demandé à la population de se protéger des pillages. Des comités de quartier, dont lesmembres sont armés de gourdins et de barres de fer, se sont constitués.   L’opposant le plus en vue, l’ex-chef de l’Agence internationale de l’énergie atomique et prix Nobel de la paix Mohamed ElBaradei, jugeant insuffisantes les nouvelles nominations, a de nouveau appelé M. Moubarak à partir « sans délai pour le bien de l’Egypte ».   Le président américain Barack Obama a une nouvelle fois exhorté le régime de M. Moubarak, qui est le principal allié des Etats-Unis dans le monde arabe, à mettre en oeuvre des réformes et à faire preuve de retenue.   Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a affirmé dimanche qu’Israël voulait préserver la paix avec l’Egypte et la stabilité régionale.   Le secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon a appelé à la « retenue, à la non violence et au respect des droits ». (AFP-30.01.2011.)

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              *LA chute!
 
La précipitation des événements dans le Monde arabe marquée depuis cinq jours par le vacillement sur ses bases du géant arabe, l’Egypte, annonce la fin d’une ère. La chute de dynasties familiales, du règne de la corruption et du népotisme, comme l’accaparement du pouvoir par des clans, reste l’objectif de ces manifestations. Hier, la Tunisie a ouvert la voie, aujourd’hui c’est l’Egypte qui reprend le flambeau. A qui le tour demain? Il ne faut pas s’y tromper, une aube nouvelle est en train de se lever sur un Monde arabe mis en coupe réglée par des prédateurs qui ont dépecé leurs pays, appauvri leurs peuples, poussé au suicide une jeunesse marginalisée et désoccupée. C’est que dans ce triste tableau aucun pays arabe ne sauve la mise d’un Monde arabe sclérosé, coupé des réalités du monde réel. Comment pouvait-il en être autrement lorsqu’un roi vieillissant, perclus de maladies, apporte sa «solidarité» à un Hosni Moubarak à la dérive, condamnant les «émeutiers» égyptiens et «dénonçant» les «atteintes à la sécurité et la stabilité» de l’Egypte? Certes, le contraire aurait été inconcevable. Pour dire que l’actualité arabe n’est pas comprise par les dirigeants arabes. Après la Tunisie et l’Egypte, cela bouillonne au Yémen, en Jordanie, on se prépare en Algérie, pays dont les peuples sont aujourd’hui les plus décidés à reprendre la parole, à se débarrasser de caciques – qui ont fossilisé leur vie sociale, politique et économique -, qui ont accaparé tous les biens, accentuant la paupérisation des Arabes par leurs prédations. Nonobstant cette nouvelle donne, le Raïs égyptien ne semble avoir tiré aucune leçon de l’échec de Ben Ali à Tunis, en jetant du lest par le limogeage du gouvernement, alors que le peuple l’a limogé lui-même en lui signifiant sa fin de mission. De fait, la réaction de Moubarak a été la réponse typique d’hommes qui estiment être le «pouvoir» et n’avoir point de compte à rendre à ceux-là mêmes, ces «populaces», qui, pourtant, les ont fait «roi» et les installant sur des trônes. Les réactions des pouvoirs établis nous remettent en mémoire ce mot resté «fameux» d’un ministre algérien qui, dans les années 90, traita, méprisant, le peuple de «ghachi» (la foule). Aussi, à l’instar d’autres dictateurs du Monde arabe, Moubarak pouvait-il comprendre que le peuple lui demandait de «dégager» «de déguerpir» enfin de «f…le camp»? Pouvait-il comprendre cela? Son discours de la nuit de vendredi montre clairement que c’était non. D’ailleurs, hier donc, après le discours qui se voulait apaisant du Raïs, le peuple persistait dans sa demande: «Moubarak, bara!» Contraint et forcé, Moubarak annonce des «réformes» que l’on se demande s’il est le plus qualifié pour les mener. Quelqu’un qui dirigea son pays d’une main de fer depuis trente années, ne laissant aucune échappatoire aux Egyptiens, peut-il du jour au lendemain devenir «l’homme de la situation»? A ce genre de personnes, les Tunisiens avaient déjà répondu en chassant Ben Ali du pays. C’est vraisemblablement le sort qui semble attendre Moubarak et tous les potentats arabes qui n’auront pas compris que le temps n’est plus à la compromission. Déconnectés, en déphasage avec leur temps, les dirigeants arabes, le moindre d’entre eux a onze ans de pouvoir, n’ont pas compris qu’ils sont aujourd’hui dans une époque où le verrouillage médiatique ne suffit plus et n’est plus opérant, que les interdits dont ils accablent leurs peuples, n‘ont plus de prise dans un monde devenu un village par la grâce des réseaux Internet et de socialisation qui portent loin la parole et bravent censures et tabous. En ce troisième millénaire, le monde a changé, sauf l’anachronique Monde arabe qui a un dénominateur commun: des systèmes fermés, que ce soit au plan politique ou en termes économiques. Pourquoi chercher plus loin l’explication de l’explosion de la rue arabe, quand les régimes arabes, par leurs oukases, ont fermenté la révolte qui frappe à leurs portes? (L’Expression-30.01.2011.)

*********************   «opinion» et «rue».

 

Dites-le avec des fleurs

Tout est affaire de sémantique et de culture. Cependant, derrière la dénomination de chaque être, chaque chose ou chaque événement, il y a un but soit didactique, esthétique ou politique. Quand il s’agit d’événements politiques, de conflits ou de guerres, les spécialistes ont tendance soit à enjoliver les choses pour leur donner un nom poétique qui les rende plus attractives, plus sympathiques pour le lecteur et par ce biais, le pousser à en épouser la cause. Il s‘agit tout d’abord, par un artifice du langage, de porter aux nues une partie et de rabaisser l’autre. Ce traitement asymétrique fait partie de la lutte idéologique sournoise que mènent les lobbies dans leur mode de communication. Mon ami me faisait remarquer justement, l’autre jour, que la presse occidentale avait une manie de déformer les faits avec une virtuosité sans pareille: quand on parle dans les sondages de l’avis dominant des populations européennes, la presse utilise le vocable «opinion» et quand il s’agit de l’attitude des peuples du sud de la Méditerranée, elle utilise le mot «rue». Il est si joli le mot «opinion»: il fait référence à des gens qui raisonnent, qui ont une manière de penser, qui possèdent des paramètres pour «juger», qui ont une certaine culture. L’«opinion» émane d’un salon où l’on cause, d’un bureau, d’un cercle…Cela sent le propre, le net, la clarté. Par contre, le mot «rue» évoque inévitablement la piétaille, le désordre, la cohue, la réaction épidermique de ces gens qui, non seulement, ne réfléchissent qu’avec leur ventre ou leurs tripes mais en général, ils n’ont que la rue pour s’exprimer puisque les médias importants leur ont été confisqués depuis longtemps. Et puis, la rue des villes des pays du Sud est souvent sale, mal entretenue. «Opinion» est rattachée au mode démocratique, à la modération et la «rue» au fanatisme, à l’extrémisme. On trouve cette différence dans le marché et dans le souk: ordre et désordre. Quand j’avais juste appris à lire, à connaître les mois, les jours du calendrier, je prenais un malin plaisir à taquiner ma mère en lui demandant à quelle date j’étais né: elle me répondait invariablement: «Gou sefouri!». C’était une jolie formule pour marquer une période qui s’étend sur plus d’un mois et qui correspond au moment de la récolte des fèves et des petits pois. Traduit en français, cela prend une tournure prosaïque, mais en kabyle il possède un sens poétique unique surtout quand il sort de la bouche d’une mère: cela renvoie immédiatement à la vision de ces champs couverts de rosée où les plans de fèves arborent leurs gousses ou leurs fleurs qui ont l’apparence de la piéride du chou. Et puis, inévitablement vient à la bouche ce goût du «maqfoul» fait avec les légumes évoqués, additionnés de poireaux sauvages…Un délice!
Pour ce qui est de la dénomination des événements politiques ou des guerres, la presse occidentale a tendance à «laver» ce qui est sale, à envelopper dans des formules aseptisées ce qui est horrible: une bombe américaine, bombe savante s’il en est, s’abat sur une cible civile, cible qui n’est pas censée être intelligente. Là où les organisations humanitaires parlent de crime de guerre, ou de bavure (qui est elle-même un euphémisme), les médias occidentaux parlent de dommages collatéraux. Cela élimine le sang, les morts, les souffrances et les cris…
Dans l’histoire, c’est aussi flagrant: la guerre civile qui ensanglanta l’Angleterre au XVe siècle, durant plus de trente ans, fut appelée «La guerre des Deux-Roses». C’est si joli: on oublie les prétextes scabreux et les intérêts sordides pour lesquels elle fut menée et où les gens s’étripèrent à volonté…
La révolution miliaire qui mit fin à quarante ans de dictature salazariste fut appelée «la Révolution des oeillets» parce qu’un oeillet fait moins de bruit qu’un oeillet. Et puis, il y a plusieurs couleurs d’oeillets…La révolution tunisienne est appelée «Révolution de jasmin», parce que selon certains, ce fut le terme utilisé par Ben Ali quand il déposa Bourguiba, atteint de sénilité. Pour moi, ce jasmin a surtout l’odeur de chair brûlée. L’Expression-30.01.2011.)

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*Tunisie, le jour d’après …Elle se réveille difficilement de la révolte

Après une nuit agitée, qui a été marquée par le démantèlement du dernier bastion de la résistance, place de La Casbah, en face des bureaux du Premier ministre, et les affrontements qui s’en sont suivis, Tunis se réveille, ce samedi ensoleillé, sur l’après-vent.

Le jour d’après s’annonce difficile. Dès les premières heures de la journée, l’avenue Habib-Bourguiba est prise d’assaut par un millier de policiers, toutes tenues confondues. Aux aguets, les policiers “scannent” tous les passants. Les commerces et autres cafés sont tous ouverts.
À l’entrée de La Casbah, un impressionnant dispositif policier est déployé. Même si les boutiques de M’dinet Laârbi ont repris leurs activités, au bout des ruelles, le passage vers le bâtiment du Premier ministère est bouclé par la police. La place est assiégée de fils barbelés. “Circulez, il n’y a rien à voir”, entend-on. Des travailleurs communaux s’affairent à enlever les immondices et les traces des débris de verre qui jonchent le sol. Devant le siège de l’UGTT (la centrale syndicale tunisienne), une centaine de militants continuent à scander leur refus de la reconduction de certaines figures de l’ancien système au sein du gouvernement de transition. De petits groupes de manifestants arpentent l’avenue Bourguiba, étroitement encadrés par les forces anti-émeutes. Beaucoup d’intellectuels affirment que le temps est venu pour passer à autre chose et que la contestation de la rue n’a plus lieu d’être. “La révolution était spontanée, mais la gestion de l’après-Ben Ali ne peut pas être spontanée. Ce ne sont pas les comités populaires qui vont gérer la transition. Ce ne sont pas les émeutiers de Sidi Bouzid ou de Kasrine qui vont siéger au gouvernement. Il y a un minimum de sérieux”, nous lance Mohcene, un intellectuel de gauche.
Les islamistes, timidement mais sûrement, commencent à sortir de leur tanière. Ils affichent ostensiblement leurs signes distinctifs (hidjab, niqab, barbes et qamis) et narguent les foules agglutinées au centre-ville. Ils protestent contre le rattachement du ministère du culte au ministère de l’Intérieur.
À la veille du retour du leader d’Ennahada, Rached Ghannouchi, les islamistes tunisiens se sentent pousser des ailes, même si, sur le plan politico-médiatique, ils préfèrent rester effacés, voire ne pas trop s’exposer.
Ce qui n’est pas le cas pour les autres formations, notamment celles (et elles sont nombreuses) de l’extrême gauche, qui trouvent en cette révolte une occasion — unique ou ultime ? — de se faire entendre.
La Tunisie est en train de changer. Ses citoyens aussi. “Tout le monde se présente en héros et tout le monde se détache de l’ancien régime, même ceux qui applaudissaient et ceux qui faisaient dans la délation”, nous lance Mahmoud, un jeune avocat tunisois, qui semble craindre le jour d’après. “Regardez le numéro un de l’UGTT, c’est le même qui avait servi le régime de Ben Ali et c’est lui qui négocie actuellement avec le gouvernement provisoire et se présente comme la première force du pays qui parle au nom du peuple. Ce n’est pas rassurant tout cela.”
Les irréductibles ont continué à défiler durant toute la journée d’hier. Ils ne veulent pas abdiquer, faire comme si de rien n’était. Ils craignent surtout que cette révolte, qui a provoqué la chute du dictateur et qui a été saluée par la communauté internationale, soit détournée ou accaparée par les anciens du régime de Ben Ali. Ceux qui sont venus, de la Tunisie profonde, dans “la caravane de la liberté” ne veulent pas baisser les bras, sans garanties. Ils savent que la mobilisation faiblira, une fois les foules dispersées.
Autres temps, autres mœurs, la télévision publique diffuse des clips de groupes de rap, et ils sont nombreux, qui chantent la chute du dictateur. Incroyable ! Mais le sentiment général penche vers la fin de la récréation.  Les choses sérieuses devraient commencer à partir de lundi. La Tunisie a tourné la page de Ben Ali, mais elle ne l’a pas encore déchirée. Les craintes de voir les rescapés de l’ancien régime revenir par la fenêtre ne se sont pas toutes dissipées.(Liberté-30.01.2011.)

**retour de Rached Ghannouchi en Tubisie après un exil de 20 ans

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 Après plus de 20 ans d’absence, des milliers de Tunisiens sont venus l’accueillir.

coeur- L’opposant islamiste tunisien Rached Ghannouchi est arrivé ce dimanche à Tunis après plus de 20 ans d’exil sous le régime du président Ben Ali, accueilli par des centaines de partisans surexcités mais aussi des défenseurs de la laïcité. L’avion qui arrivait de Londres s’est posé vers 12h30 à l’aéroport de Tunis où les forces de l’ordre se faisaient très discrètes.Rached Ghanouchi est apparu peu après à la foule et lancé un vibrant «Allahu Akbar» (Dieu est le plus grand) les bras tendus vers le ciel. Autour de lui, un cordon de sécurité de membres de son parti en casquettes blanches tentait de le protéger de la bousculade en criant «ne le touchez pas!». Dans la cohue les militants du mouvement Ennahda (Renaissance) entonnaient un chant très symbolique en islam, celui qui évoque le départ du prophète Mahomet de la Mecque vers Médine.

Dans le hall du terminal bondé, des centaines de partisans d’Ennahda avaient attendu plusieurs heures, agglutinés devant la porte de sortie du vol British Airways. A pleins poumons, la foule alternait l’hymne national et de vibrants «Allahu Akbar». Quelques corans et rameaux d’olivier émergaient de la masse compacte, mais surtout des appareils photos et des téléphones portables.

Le dirigeant islamiste a déclaré dimanche à l’AFP qu’il ne serait pas candidat à la prochaine présidentielle, quelques heures après être rentré en Tunisie après plus de 20 ans d’exil. «Je ne vais pas me présenter à la présidentielle, et il n’y aura aucun (candidat) membre d’Ennahda», a-t-il déclaré. «Après 20 ans d’absence, mon parti n’est pas prêt à jouer un rôle sur la scène politique, la priorité est de reconstruire Ennahda», a-t-il expliqué. (le Figaro-30.01.2011.)

**Après 20 ans d’exil, l’opposant islamiste tunisien Rached Ghannouchi fait son retour ce dimanche dans la Tunisie de l’après Ben Ali, le président déchu qui avait impitoyablement opprimé les islamistes au début des années 90.Le fondateur du parti islamiste tunisien Ennahda avait quitté Londres dans la matinée en compagnie notamment d’une de ses filles, s’est déclaré juste avant son départ «très heureux». «Je rentre à la maison aujourd’hui, mais je retourne aussi dans le monde arabe», a déclaré le quasi septuagénaire.
Dans le hall du terminal plein comme un oeuf jusque sur la coursive du premier étage, des centaines de partisans du mouvement Ennahda l’attendaient, agglutinés devant la porte de sortie du vol British Airways.
Le parti d’Ennahda avait été réprimé après les élections de 1989, où la liste qu’il soutenait avait recueilli au moins 17 % des suffrages. Rached Ghannouchi avait alors quitté la Tunisie. En 1992, il avait été condamné par contumace à la prison à perpétuité avec d’autres responsables religieux, pour un complot contre ben Ali. C’est grâce aux autorités de transition, qui ont décrété une amnistie générale le 20 janvier dernier, que la bête noire du régime Ben Ali a finalement pu revenir.(source: Le Parisien-30.01.2011.) 

***La Tunisie veut séduire les investisseurs à Davos

«la démocratie est bonne pour l’investissement»


Mustapha Kamel Nabli, nouveau gouverneur de la Banque centrale de Tunisie.
Mustapha Kamel Nabli, nouveau gouverneur de la Banque centrale de Tunisie.  

Le nouveau gouverneur de la Banque de Tunisie a assuré que la situation économique est «sous contrôle». Il a répété que Leila Trabelsi, la femme de Ben Ali, n’a pas volé d’or avant sa fuite.

coeur-Le nouveau gouverneur de la Banque de Tunisie a lancé, à Davos, un appel à la confiance aux investisseurs internationaux. Reprenant à son compte un des slogans des manifestants qui ont conduit au changement de régime politique, «la démocratie est bonne pour l’investissement» Mustapha Kamel Nabli a souligné que «le système des paiements fonctionne, tout comme les banques et les paiements extérieurs et qu’il n’y a pas de pression sur le taux de change».

Il a certes reconnu que certains secteurs, comme le tourisme a-t-il précisé, sont actuellement «désorganisés» du fait des changements politiques. Néanmoins il considère que la situation économique est «sous contrôle. Nous n’avons besoin d’aucune aide extérieure. Nos réserves de changes sont fortes». Adoptant délibérément un langage technique, cet ancien universitaire, qui est passé par la Banque mondiale, a expliqué que «les fondamentaux (économiques du pays) sont bons, la main d’œuvre est éduquée».

Interrogé sur les réserves en or du pays, il a précisé qu’un inventaire physique a été opéré par une équipe de deux contrôleurs internes et de deux auditeurs externes à la Banque. Il est apparu que les réserves en or détenues dans les coffres de l’institution à Tunis s élevaient à 5,7 tonnes, à quoi s’ajoute 1,4 qui a été déposée à la Banque d’Angleterre. Au total les réserves effectives sont conformes aux chiffres du FMI (près 6,8 tonnes). Contrairement aux rumeurs selon lesquelles l’épouse de l’ancien président Ben Ali aurait emporté 1,5 tonne appartenant à la Banque centrale, les réserves de cette dernière sont intactes.

 

Mustapha Kamel Nabli s’est présenté comme un universitaire, qui après avoir rejoint le gouvernement Ben Ali en 1990, s’en est séparé en 1995 pour émigrer. Il est accompagné à Davos de deux nouveaux ministres qui viennent tout juste d’être nommés. D’une part, Yassine Brahim qui a en charge le ministère des Infrastructures et des Transports et d’autre part Sami Zaoui. Ce dernier était jusqu’à ces jours derniers un cadre de la firme d’audit Ernst&Young à Paris, où il était établi depuis 23 ans. Il est désormais à la tête du ministère des Technologies informatiques et de l’information.(Le Figaro-29.01.2011.)

****La fuite de Ben Ali et le retour des hommes d’affaires

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Une employée décompte des billets de banque tunisiens à la Banque centrale.
Une employée décompte des billets de banque tunisiens à la Banque centrale. 

La chute de Ben Ali et de sa femme Leïla Trabelsi pourrait donner un grand bol d’air à l’économie tunisienne. Corruption et spoliation étaient monnaie courante.

coeur-Les clans de l’ex-président Ben Ali et de sa femme Leïla Trabelsi ont tenu d’une main de fer jusqu’au bout l’économie de la Tunisie. Leur fuite devrait donner une plus grande liberté aux chefs d’entreprise qui craignaient comme la peste «la Famille», comme ils surnommaient le pouvoir, en référence aux films évoquant la mafia.

«La famille élargie du président est fréquemment présentée comme le carrefour de la corruption en Tunisie», écrit un diplomate américain dans un mémo publié par WikiLeaks et Le Monde. «Expropriation», «extorsions de pots-de-vin», le fonctionnaire énumère les cas d’abus de pouvoir flagrants dans une note datée de juin 2008 et intitulée «ce qui est à vous est à moi».

La voracité des Trabelsi

 

«Ces personnes étaient présentes dans beaucoup de secteurs, ils ponctionnaient les profits des entreprises et ont réduit par conséquent la capacité de ces dernières à investir», note Jean-Raphaël Chaponnière, économiste à l’Agence française pour le développement (AFD). Moins d’investissement, c’est moins de croissance et moins d’emploi.

Pour échapper à la voracité des Ben Ali et des Trabelsi, les entrepreneurs avaient adopté un leitmotiv, «rester petit», rapporte Béatrice Hibou, économiste au CERI-Sciences Po. «Les chefs d’entreprises disaient avoir peur d’investir et de grandir. Si c’est vrai, alors le départ des clans devrait entraîner une reprise de l’investissement», ajoute la chercheur, qui avance aussi d’autres explications à ce phénomène, comme le maintien du contrôle des sociétés par la famille de l’homme d’affaires. Et la volonté de ne pas ouvrir les comptes.

 

Après 24 ans de règne de Ben Ali, la Tunisie se caractérise «par le nombre extrêmement faible de grandes (0,4 % du total des entreprises) et même de moyennes entreprises (0,3 % ou 1,7 %)», relève Béatrice Hibou. Même «le plus grand des groupes tunisiens, Poulina, est en réalité un conglomérat de 71 filiales pour 6 000 salariés seulement.»

Le pouvoir ne se contentait pas de spolier. Il utilisait aussi le fisc pour remercier ou punir. «Les impôts étaient prélevés de façon très arbitraire: si vous n’étiez pas en odeur de sainteté à Carthage, vous essuyiez un redressement fiscal ; si vous étiez un ami, vous ne payiez pas d’impôts», relève ainsi Mohamed Ali Marouani, économiste à l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne.

Les sociétés étrangères n’échappaient pas à la règle: «tout le monde est passé à la caisse!», dénonce un ancien ministre du prédécesseur de Ben Ali, Habib Bourguiba, et «exilé volontaire» à Paris. «Le pouvoir se servait sans retenue, c’est même ce qui a tué le régime», ajoute Catherine Graciet, auteur d’une enquête sur la femme de Ben Ali, Leïla (La Régente de Carthage).

 

Pas sûr toutefois que la disparition de cette quasi-mafia permette un rebond spectaculaire des investissements. «Avec l’évènement mouvementé de la démocratie, nous entrons dans des temps incertains peu propices aux investissements», prévient Jean-Raphaël Chaponnière, économiste à l’Agence française pour le développement (AFD). L’agence de notation Moody’s a d’ailleurs dégradé la note du pays ce mercredi. La corruption, d’après de nombreux observateurs, devrait survivre à la dictature, bien qu’à une moindre échelle. (le Figaro-19.01.2011.)****

 

 

 


 

 

 







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