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La vie de palace de Ben Ali à Djeddah

19012011

La «guest house» royale dans laquelle Ben Ali séjourne est situé dans les beaux quartiers de Djeddah.
La «guest house» royale dans laquelle Ben Ali séjourne est situé dans les beaux quartiers de Djeddah.

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**révolution populaire ou révolution de palais ?

On ne peut que se réjouir du départ précipité du dictateur Ben Ali, lequel marque la fin d’un règne de vingt-trois ans où la Tunisie était dirigée, en toute impunité, comme un patrimoine privé, par le clan au pouvoir. Non préparés, non concertés, imprévisibles, ces événements semblent mériter, à juste titre, le nom de révolution. Une nouvelle donnée, trop longtemps exclue, vient d’intégrer à grand fracas la vie politique tunisienne : le peuple.

Toutefois, il n’est pas sûr qu’à elle seule, la rue ait suffi à chasser le dictateur Ben Ali. Même si le détail de sa fuite n’est pas connu avec exactitude, ce départ n’est, selon toute probabilité, pas seulement le produit de l’action populaire. Depuis les indépendances, ce serait la première fois qu’un régime arabe tomberait sous l’effet d’une révolte de la rue. L’étendue du système de répression, l’efficacité dont il a jusque-là fait preuve, autant que la rapidité de la chute du régime, rendent peu probable cette hypothèse. Comme en Iran autrefois, c’est d’abord parce que l’armée a refusé de tirer sur la foule que le régime s’est effondré. C’est parce que le haut commandement a pris son autonomie par rapport à un pouvoir largement discrédité et abusif que le tyran n’est plus. Toutefois, il n’est pas simple de passer d’un pouvoir personnel autocratique à l’équilibre des contre-pouvoirs qui caractérise une démocratie.

Les événements des derniers jours sont une chance inespérée pour que la démocratie progresse dans le monde arabe. Devant ce défi, la balle est indéniablement dans le camp des militaires.

Il semble à peu près sûr aujourd’hui que la Tunisie s’engage à toute vitesse sur la voie d’une transition démocratique. Retour des opposants, libération des prisonniers politiques, fin de la censure, liberté de la presse, commission Vérité et Réconciliation, élections présidentielles et législatives libres, tout cela fait a priori l’unanimité.

On doit laisser  le crédit à l’armée, lors de cette crise, d’avoir agi au nom de l’intérêt supérieur de la Nation. Cet intérêt, les militaires doivent le garder en tête. Comme beaucoup de Maghrébins, les Tunisiens vivaient leur vie politique par procuration en regardant la vie politique française. La population tunisienne, formée et éduquée, évidemment mature, a maintenant la possibilité de voir sa propre scène démocratique se développer, à l’instar des vieux pays démocratiques. Il est à noter que, dans ces derniers, l’armée ne joue pas de rôle direct dans la vie politique. Elle s’efface devant les civils.

Naturellement, une démocratie apaisée implique un état minimal de concorde civile. Or on entend que des troubles se poursuivent. Que des tirs ont eu lieu. Simples manifestations sporadiques de résistance de la part d’affidés de l’ancien régime ou… autre chose ? Quant aux problèmes économiques et sociaux fondamentaux, ils n’ont en rien été résolus. Rien n’est hélas plus propice à l’établissement d’un régime musclé qu’un désordre continu. Celui-ci peut même parfois (on l’a vu dans le cas de l’Algérie des années 1990) être téléguidé par les gens en place pour légitimer leur action de répression.

Sans sombrer dans la paranoïa ni voir le mal partout, posons simplement un principe.

Aujourd’hui, alors qu’on tire encore en Tunisie, que les pillages continuent, que des comités de quartier s’instaurent pour protéger les biens des habitants, que la police est totalement discréditée pour ses innombrables abus de pouvoir, le pays doit impérativement se prémunir contre la montée d’un leader charismatique qui serait soutenu par l’armée ou certains milieux d’affaires liés à l’ancien régime et apparaîtrait comme un sauveur venu libérer le pays du chaos. Ce scénario, trop de pays l’ont expérimenté. Il mène droit à la stagnation voire à la régression. Gardons à l’esprit que le système de propagande est toujours prêt à servir. Les services de sécurité aussi, pour peu qu’on leur garantisse ce qui les intéresse vraiment, c’est-à-dire leurs prébendes. La technostructure de la dictature est toujours là. Or la Tunisie ne peut se permettre un nouveau césarisme. La démocratie, surtout dans l’enfance, est incompatible avec le destin d’un homme providentiel, scénarisé par des spécialistes des services de sécurité. La lutte contre le spectre de l’islamisme politique, surtout, ne doit pas servir d’alibi à l’établissement d’un nouveau régime musclé.

Les Tunisiens qui veulent s’engager en politique doivent garder cela à l’esprit. Les citoyens aussi. Le régime est tombé, mais le régime n’est pas mort. Il peut parfaitement se survivre à lui-même avec des apparences de légalité, en proposant simplement de nouvelles figures. C’est par leur engagement citoyen et par leur vigilance militante que les Tunisiens prouveront au monde que démocratie et monde arabe sont parfaitement compatibles.(Le Monde-17.01.2011.)

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 *33 membres de la famille Ben Ali arrêtés…ils sont soupçonnés de «crimes contre la Tunisie

  Selon la télévision nationale tunisienne, ces proches du président tunisien déchu Zine El Abidine Ben Ali sont soupçonnés de «crimes contre la Tunisie». Une enquête va être ouverte pour qu’ils soient traduits en justice.

La vie de palace de Ben Ali à Djeddah dans actualité coeur-Trente-trois membres de la famille du président tunisien déchu Zine El Abidine Ben Ali, soupçonnés de «crimes contre la Tunisie», ont été arrêtés ces derniers jours, a indiqué aujourd’hui une source officielle à la télévision nationale. La chaîne publique n’a pas précisé les noms de personnes interpellées ni leur degré de parenté avec l’ex-président qui a fui le pays pour l’Arabie Saoudite vendredi après un mois de révolte populaire sans précédent. Une enquête va être ouverte pour que ces proches de l’ancien président soient traduits en justice, a ajouté cette source non-identifiée.

La télévision tunisienne a diffusé des images de très nombreux bijoux, montres et cartes bancaires internationales saisis lors des arrestations dont les circonstances n’ont pas été précisées. Des stylos permettant de tirer des balles réelles ont également été saisis.

Une enquête judiciaire pour «acquisition illégale de biens», «placements financiers illicites à l’étranger» et «exportation illégale de devises» a été ouverte hier contre le président déchu Zine El Abidine Ben Ali et sa famille. Elle vise nommément l’ancien chef d’Etat, sa femme Leila Trabelsi, «les frères et gendres de Leila Trabelsi, les fils et les filles de ses frères». Le clan Ben Ali-Trabelsi est accusé d’avoir mis en coupe réglée le pays depuis 23 ans. (Le Figaro-20.01.2011.)

**l’amnistie générale au menu du premier conseil des ministres

 Le Premier ministre Mohammed Ghannouchi l’avait annoncé après la formation de son gouvernement de transition, le président par intérim, Foued Mebazaa, l’a confirmé hier lors de sa première intervention publique : il y aura très prochainement une amnistie générale. Elle devrait même être à l’ordre du jour aujourd’hui du premier conseil des ministres du nouveau gouvernement.

Mercredi, le gouvernement de transition a libéré quelque 1800 prisonniers politiques, y compris les islamistes.

 

Réclamée depuis des décennies par l’opposition et les organisations de la société civile, cette amnistie a été promise afin de «favoriser une réconciliation» nationale. Dans le discours de Foued Mebazaa, qui s’est engagé mercredi à «une rupture totale avec le passé», elle figure au premier rang des promesses avec notamment la «liberté totale d’information», «l’indépendance de la justice» et «la séparation entre l’Etat et le parti». Lors de manifestations, mercredi, des milliers de personnes ont réclamé la dissolution du Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD) de Ben Ali, symbole de corruption et de répression, et le départ du gouvernement de transition des ministres issus de l’ancien régime.

La mainmise de membres du RCD sur les postes clés du gouvernement a d’ailleurs provoqué la démission mardi des trois ministres issus de la centrale syndicale, l’Union générale des travailleurs tunisiens (UGTT), puis celle mercredi d’un chef de l’opposition, le président du Forum démocratique pour le travail et les libertés (FDTL) .

Mercredi, un autre ministre, Ahmed Nejid Chebbi, en charge du Développement rural et chef historique du Parti démocratique progressiste (PDP) a indiqué qu’il démissionnerait également si des «élections libres et justes» n’étaient pas organisées dans les prochains mois. Dans une interview à la BBC, il s’est en outre prononcé en faveur de l’introduction d’un islam modéré dans la vie politique tunisienne. Selon lui, le Premier ministre a eu des entretiens avec le principal parti islamiste, Ennahdha, qui est interdit.

Washington réclame une transition vers la démocratie

Par ailleurs, à Washington, le porte-parole de la diplomatie américaine, Philip Crowley, a affirmé que le gouvernement tunisien doit organiser la transition vers la démocratie, ajoutant que les Etats-Unis comptent aider la Tunisie à atteindre cet objectif.

L’Arabie Saoudite quant à elle, où l’ancien dictateur a trouvé refuge, lui a interdit toute activité politique liée à la situation en Tunisie qu’il a fuie le 14 janvier après 23 ans de règne sans partage. Contre toute attente, Ben Ali aurait évoqué par téléphone son éventuel retour avec le Premier ministre Ghannouchi, ce dernier lui faisant comprendre que cela n’était pas envisageable.

La justice tunisienne a, de son côté,  ouvert une enquête judiciaire contre Ben Ali et sa famille pour des transactions financières «illégales».

Enfin la Suisse, emboîtant le pas à la France, a décidé de bloquer les éventuels fonds en Suisse de l’ex-président et de sa famille, qui avaient mis la Tunisie en coupe réglée.(Le Parisien avec AFP-20.01.2011.)

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* La vie de palace de Ben Ali à Djeddah

Le président tunisien déchu a été accueilli dans la plus grande discrétion dans cette ville côtière d’Arabie saoudite, qui a déjà accueilli plusieurs dirigeants en exil. Une étape avant un probable départ pour la Libye.

coeur- dans eco-finances On le croyait en France, à Malte ou encore à Dubaï. Mais c’est à Djeddah, en Arabien saoudite, que Zine El Abidine Ben Ali a posé ses valises, dans la nuit de vendredi à samedi dernier, à l’issue d’une errance aérienne de plusieurs heures. Le Falcon du président tunisien déchu s’est posé aux alentours de 1h, heure française – 3h dans la péninsule arabique – à l’aéroport de cette ville de plus de trois millions d’habitants située sur les côtes de la mer Rouge, à l’ouest du pays. L’ex-dirigeant tunisien, accompagné de six membres de sa famille, aurait passé sa première nuit dans le palais du prince Sultan. Avant de prendre ses quartiers dans un ancien palais royal qui sert désormais de résidence officielle pour les invités du royaume.

Derrière un haut mur d’enceinte et sept portails, gardés en permanence par des soldats, Ben Ali et sa famille profitent du palais de marbre blanc, entouré de palmiers et de verdure. Ils disposent du personnel et des gardes du corps mis à disposition par le royaume. En échange de ces largesses, le président déchu, considéré comme un réfugié politique de luxe, mais pas comme un chef d’Etat en visite, doit rester discret. «L’Arabie saoudite ne l’autorisera pas à faire des déclarations politiques ou à s’adonner à une quelconque activité politique, ni à mener des contacts avec la Tunisie», a prévenu sur al-Arabiya Jamal Khashoqgi, un analyste proche des autorités saoudiennes.

«Un havre de paix pour dictateurs»

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Une retenue qu’ont dû respecter tous les chefs d’Etats en exil accueillis par l’Arabie saoudite. A l’instar de l’ancien premier ministre pakistanais Nawaz Sharif, qui s’est réfugié pendant huit ans au royaume après le coup d’Etat du général Pervez Musharraf, en 2000. Arrivé à Djeddah en 1979, l’ancien dictateur ougandais Idi Amin Dada a vécu jusqu’à sa mort, en 2003, dans une villa mise à sa disposition par les autorités, mais devait lui aussi faire profil bas. Avec ses cinq femmes et ses nombreux enfants, la présence du tyran africain était encombrante pour le royaume. Mais «par charité islamique et en remerciement pour son rôle dans la diffusion de l’islam», les autorités saoudiennes ont toléré sa présence.

Pour justifier l’accueil de Ben Ali, le cabinet royal saoudien assure officiellement avoir pris «en considération les circonstances exceptionnelles que traverse le peuple tunisien». En réalité, Ben Ali entretient de bonnes relations avec les membres de la famille royale saoudienne. Il connaît particulièrement bien le prince Nayef Ben Abdel Aziz, ministre de l’Intérieur depuis les années 1980, époque à laquelle Ben Ali occupait le même poste. L’héritier du trône participait notamment aux chasses organisées par Ben Ali.

Malgré cette proximité avec les autorités de Riyad, il paraît peu probable que Ben Ali prolonge son séjour en Arabie saoudite. D’abord parce que la population apprécie moyennement la présence de personnalités contestées sur son sol. Pour Mohammed al-Kahtani, un opposant à la famille royale interrogé par l’agence Reuters, l’exil de Ben Ali à Djeddah «donne un mauvais signal et accrédite l’idée que l’Arabie saoudite est un havre pour dictateurs».

D’autres commentateurs laissent entendre que la famille de Ben Ali ne réussira pas à s’adapter au rigorisme religieux en vigueur dans le royaume. A commencer par la femme du président déchu, Leïla Trabelsi, une ancienne coiffeuse habituée aux tailleurs de haute-couture et qui n’a jamais porté le voile. Selon RTL, la famille Ben Ali pourrait donc rapidement quitter Djeddah pour rejoindre la Libye du colonel Kadhafi, qui s’est déjà dit prêt à l’accueillir.(Le Figaro-18.01.2011.)

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**La famille Ben Ali se serait enfuie de Tunisie avec 1,5 tonne d’or 

*Leïla Trabelsi, la femme de Ben ALi, se serait rendue à la Banque de Tunisie chercher des lingots d’or

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La famille du président déchu Zine El-Abidine Ben Ali se serait enfuie de Tunisie avec 1,5 tonne d’or. C’est une supposition des services secrets français, qui essaient de comprendre comment s’est achevée la journée de vendredi 14 janvier, qui a vu le départ du président et de sa famille et la chute de son régime. Selon des informations collectées à Tunis, Leïla Trabelsi, la femme du président, se serait rendue à la Banque de Tunisie chercher des lingots d’or. Le gouverneur aurait refusé. Mme Ben Ali aurait appelé son mari, qui aurait d’abord lui aussi refusé, puis cédé. Elle a ensuite pris un vol pour Dubaï, selon les informations françaises, avant de repartir pour Djeddah. “Il semblerait que la femme de Ben Ali soit partie avec de l’or”, explique un haut responsable français. “1,5 tonnes d’or, cela fait 45 millions d’euros”, traduit une source.M. Ben Ali, lui, ne croyait pas sa chute aussi rapide. Pour preuve, selon Paris, il aurait enregistré une nouvelle allocution, qui n’a pas eu le temps d’être diffusée. Il n’aurait donc pas quitté le pays volontairement mais aurait été destitué. L’armée, et le chef d’état-major qui avait refusé de tirer sur la foule, ont, selon les services européens, joué un rôle de premier plan dans la destitution de M. Ben Ali.

INTERVENTION LIBYENNE

La manière dont il a pu quitter le pays n’est pas claire. Pour éviter une issue violente, plusieurs chancelleries européennes estiment que les services de sécurité libyens ont joué un rôle dans l’exfiltration de M. Ben Ali. Les propos de Mouammar Kadhafi – qui dit regretter l’issue de la crise tunisienne – tenus ce dimanche renforcent ce sentiment à Paris. Le mode de départ de M. Ben Ali comporte lui aussi des incertitudes. Il semble s’être retrouvé dans l’espace aérien de Malte, sans plan de vol déterminé, attestant qu’il n’avait pas, à son départ précipité de Tunisie, de destination précise. Une source italienne indique que l’avion n’aurait pas reçu l’autorisation d’atterrir sur l’île. Selon une autre hypothèse, le président déchu aurait quitté Tunis en hélicoptère pour Malte, où il aurait récupéré son avion.De leur côté, les Français ont voulu empêcher toute arrivée de M. Ben Ali en France. Selon une source ministérielle française, la Direction générale de l’avion civile a identifié un appareil ayant pour plan de vol Tunis-Paris. Les autorités françaises auraient alors exigé que cet avion atterrisse en Sardaigne. Vérification faite, il ne comportait pas de passager, en tout cas pas le président Ben Ali, qui atterrissait alors en Arabie Saoudite. Les membres de la famille de M. Ben Ali qui était arrivés en France sont repartis du Bourget samedi soir par un vol affrété par un proche du clan Ben Ali, en direction de Doha, au Qatar, indique Paris.Le Monde..**Derniers développements en Tunisie

**Lingots des Ben Ali : confidences en or de l’Elysée au Monde 

Leïla Ben Ali lors de la troisième conférence de l'Organisation des femmes arabes, à Tunis (Zoubeir Souissi/Reuters).

Il n’arrive pas tous les jours, que l’Elysée glisse à l’oreille du Monde des confidences des services secrets français. L’anecdote des lingots de Leïla Ben Ali, a donc été pieusement reprise par toute la presse française et – on l’imagine – mondiale. Relisons-la avec délices : les services secrets, donc, raconte Arnaud Leparmentier, accrédité du Monde à l’Elysée, « essaient de comprendre comment s’est achevée la journée du vendredi 14 janvier ».Selon eux, Leïla Trabelsi, la femme de l’ex-Président, se serait rendue à la Banque centrale de Tunisie chercher des lingots d’or. Le gouverneur aurait refusé. Mme Ben Ali aurait appelé son mari, qui aurait d’abord lui aussi refusé, puis cédé.« Il semblerait que la femme de Ben Ali soit partie avec de l’or », explique un responsable politique français. « 1,5 tonne d’or, cela fait 45 millions d’euros », poursuit-il. Précision d’un conseiller de l’Elysée : « L’information vient essentiellement de source tunisienne, en particulier de la Banque centrale. Cela a l’air relativement confirmé. »« Mme Ben Ali a demandé à ce que je lui achemine 1 500 lingots »La confidence élyséenne a d’abord été rapportée sur le blog de Leparmentier (où, curieusement, elle ne semble plus figurer). Elle s’est retrouvée lundi, sous sa signature, dans le journal papier (assortie d’un démenti d’un responsable de la Banque centrale de Tunisie).Souci : comme nous le signale un internaute d’Arrêt sur images, la même anecdote des lingots, exactement la même, était rapportée par le site Tunisnews, dès le… 3 janvier.

« Un coup de fil est passé par le secrétariat du Palais en provenance de Taoufik Baccar, gouverneur de la Banque centrale. M. Baccar demandait en dernier recours s’il pouvait exécuter les ordres venus le jour même de sa femme, Leila.

“Quels ordres”, dit Ben Ali qui n’est manifestement au courant de rien.

“Mme Ben Ali”, rétorqua le gouverneur, “a demandé à ce que je lui achemine 1 500 lingots d’or. Je n’ai aucun ordre”, poursuit Taoufik Baccar, “je n’ai reçu aucune signature”.

Ben Ali appelle sur le champ Leila, et en deux minutes elle le convainquit. Vive l’amour. Et Ben Ali d’appeler Taoufik Baccar pour lui dire : “Faites.” »

 

D’où l’on déduit que le décryptage conjoint, par l’Elysée et Le Monde, des rumeurs enfiévrées de période révolutionnaire, et leur lecture de la presse en ligne francophone tunisienne peuvent encore être grandement améliorés.

En Tunisie, un blogueur vient d’être nommé ministre. Si on le lui demande gentiment, je suis certain qu’il aura à cœur de faire profiter la France du savoir-faire tunisien en matière d’information en ligne, qui est reconnu dans le monde entier.(Rue89-18.01.2011.)

Photo : Leïla Ben Ali lors de la troisième conférence de l’Organisation des femmes arabes, à Tunis

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**une élite féminine française pour vendre la Tunisie de Ben Ali 

 Enquête sur un réseau d’amitié constitué d’une élite féminine française et qui promeut un « visage souriant » du système Ben Ali.
Capture d'écran de la page d'accueil du club Sangho
La fête devait être somptueuse. Les salons d’un palace parisien, le Shangri-La, avaient été réservés pour célébrer, mardi 25 janvier, les vingt ans de l’association EFT (Echanges franco-tunisiens). En guest stars : Frédéric Mitterrand, le ministre français de la Culture, et Abdelwahab Abdallah, « ministre conseiller chargé des Affaires politiques auprès du président de la République de Tunisie ».Honni par les Tunisiens, « AA » a été limogé jeudi 13 janvier par Ben Ali juste avant sa fuite. Depuis, la réception parisienne a été annulée. Et son grand ordonnateur, Hosni Djemmali, le fondateur d’EFT, s’est mis aux abonnés absents. Cet homme d’affaires franco-tunisien, patron des clubs de vacances Sangho et éditeur de l’inénarrable magazine Tunisie Plus, laisse une femme, Valérie Dell, son assistante, répondre à sa place.« Les femmes et la Méditerranée sont les deux passions d’Hosni »

Les femmes, c’est la marotte de ce septuagénaire. Depuis huit ans, il s’est escrimé à bâtir, en marge d’EFT, un réseau baptisé « Femmes de Méditerranée » – « parce que les femmes et la Méditerranée sont les deux passions d’Hosni », explique Valérie Dell.

Officiellement, il s’agit, en leur offrant deux jours tous frais payés au soleil, de faire se rencontrer des femmes françaises, tunisiennes et marocaines – selon que le club Sangho choisi pour accueillir le « séminaire » se trouve au Maroc ou en Tunisie. Le casting français, variable selon les éditions, réunit en général :

des femmes qui occupent des positions d’influence dans différents médias (Marie-Odile Amaury, la propriétaire du Parisien, de l’Equipe et du Tour de France ; Christine Goguet, cadre au Parisien ; Carole Bellemare, croqueuse de « Décideurs » au Figaro ; Myriam Multigner, désormais directrice de la communication de Public Sénat…) ;

des femmes politiques (Christine Boutin, Najat Vallaud-Belkacem…) ;

un paquet de « femmes de » (l’épouse de Jean-David Levitte, conseiller diplomatique à l’Elysée ; celle d’Eric Woerth, invitée quand son mari était encore ministre du Budget ; celle de Nicolas Charbonneau, rédacteur en chef au Parisien…) ;

et une… « belle-soeur de », celle de Nicolas Sarkozy.

La complainte de Florence Woerth

Cette assemblée hétéroclite a parfois été le théâtre d’échanges de haute volée. Une journaliste raconte :

« Une anthropologue nous parlait depuis un moment de la réforme de la Moudawana [droit de la famille, ndlr] au Maroc. Florence Woerth s’est alors plainte du fait qu’on parlait des femmes maghrébines depuis des heures et qu’il serait bon de s’intéresser au sort des femmes du CAC 40 confrontées à de douloureux problèmes de parité. »

Sollicitée via son avocat, Florence Woerth n’était pas joignable ces derniers jours pour confirmer l’épisode.

Si certaines « femmes Sangho » ont enchaîné les sessions sans se poser de questions, d’autres se demandent toujours où ce « cher Hosni » veut en venir. Florence Noiville, du Monde des livres – par ailleurs épouse de Martin Hirsch – a accepté une fois, début 2010, l’invitation de Djemmali. Motif invoqué : la présentation de son ouvrage « J’ai fait HEC et je m’en excuse ». Réinvitée plusieurs fois depuis, elle a « toujours dit non » : « Je me suis dit, compte tenu des autres participantes, que cette personne [Hosni Djemmali, ndlr] était intéressée par le fait de constituer un groupe d’influence. »

L’attaché de presse du régime de Ben Ali en France

Mais au profit de qui ? Des participantes ont identifié « une part évidente de lobbying » en faveur du groupe Sangho et de la Tunisie.

Gérante de portefeuille, Christine Mulot-Sarkozy (la fameuse belle-sœur) croit pouvoir se rassurer en soulignant qu’elle n’a « jamais entendu Hosni parler politique » au bord de la piscine. « Il ne s’occupe pas de politique », jure en écho le magistrat Georges Fenech, ancien député UMP et actuel président d’EFT. « Oui », concède-t-il, « Hosni construit un réseau, mais un réseau d’amitié. »

Un officiel tunisien déchu juge ces propos bien naïfs : « Hosni Djemmali est un homme intelligent. Il est plus subtil que ça. » Il assure qu’au palais présidentiel de Carthage, Djemmali était considéré comme l’attaché de presse du régime de Ben Ali en France.

Selon la journaliste Catherine Graciet, coauteure de « La Régente de Carthage » : « Djemmali, homme affable, devait promouvoir un visage souriant de la Tunisie. Il faisait partie d’un plan de communication global destiné à vendre le système Ben Ali. »En phase avec la conviction du publicitaire Jacques Séguéla, pour qui « les pays sont des marques ».Reste que, selon une essayiste invitée par l’hôtelier :« Sangho, c’est sympa, mais c’est quand même pas le Hilton. Si c’est avec ça que les élites françaises se laissent acheter, c’est un peu pathétique. » (Rue89-19.01.2011.) 

***Tunisie : la « volte-face » française

De l’Algérie aux Etats-Unis, la position de la France face au soulèvement tunisien fait couler beaucoup d’encre. Aux yeux des observateurs internationaux, l’« embarras » de Paris est à la mesure de son « silence », voire de sa « complaisance » envers la dictature de Zine El-Abidine Ben Ali. Tous évoquent un « faux pas diplomatique ».

Le jugement d’El Watan est sans appel : « Cette complaisance teintée de paternalisme, voire de condescendance, n’a pas servi la Tunisie et les Tunisiens. Ni l’image de la France, patrie des libertés et des droits de l’homme. » A l’instar du reste de la presse internationale, le quotidien algérien se demande « comment la France a-t-elle pu s’enfermer dans un soutien sans faille au régime de Ben Ali, alors qu’elle appelle à la démocratie en Côte d’Ivoire ? Se montrer sourde et aveugle à la révolte populaire ? »

Tous observent désormais avec grand intérêt la « volte-face de Paris » depuis le 14 janvier, à l’instar du Guardian, qui note que « les dirigeants français se sont démenés pour sauver la face et se montrer inflexibles ». La presse internationale avait ainsi les yeux rivés sur la ministre des affaires étrangères française, Michèle Alliot-Marie, qui s’est expliquée, mardi 18 janvier, devant la commission parlementaire sur sa proposition au dictateur tunisien de prêter assistance à ses forces de sécurité face au soulèvement tunisien. Comme en conclut El Watan, « il est temps de se rattraper ».

LE « SAVOIR-FAIRE » DES POLICIERS FRANÇAIS

La proposition de Michèle Alliot-Marie de prêter main forte au régime tunisien face aux manifestants avait suscité l’ire du chroniqueur Mustapha Hammouche dans Liberté, qui y voyait un « affront aux souffrances, aux sacrifices et sévices que subissent en général les Maghrébins qui luttent pour leurs droits ». « Outre que la proposition pose un problème de considération de la souveraineté des Etats qu’elle veut défendre contre sa population, Alliot-Marie n’a apparemment pas peur de réveiller des souvenirs des peuples, historiquement victimes du ‘savoir-faire’ policier de la France. Ces souvenirs sont faits, en ce qui concerne l’Algérie, du 11 décembre 1960 à Alger, au quartier Belcourt, et du 17 octobre 1961 à Paris, par exemple », notait ainsi le chroniqueur.

Moins passionné, Charles Cogan, ancien chef de la division Proche-Orient–Asie du Sud dans le conseil d’administration de la CIA, rappelle dans le Huffington Post que « la France s’est longtemps acoquinée avec Ben Ali par le passé ». Si Mme Alliot-Marie a mis « les pieds post-coloniaux dans le plat », il note toutefois qu’ »en ce qui concerne la protection de la vie de ses citoyens, la France, pays qui tolère les manifestations comme part de son esprit révolutionnaire, semble avoir trouvé la façon de gérer ces deux opposés ».

Pour le Financial Times, « Mme Alliot-Marie était dans la droite ligne d’une longue tradition de soutien français au régime de Ben Ali », rappelant notamment l’hommage de l’ancien président Jacques Chirac au « miracle économique » tunisien et à sa défense des droits, ainsi que celui de Nicolas Sarkozy. « Les ratés de la diplomatie française » remontent bien avant le président Chirac, note Le Temps (article en accès abonnés), qui cite l’expert français en géopolitique François Heisbourg sur les nombreux « trains de la liberté » que la France a ratés dans l’histoire : « la chute du mur de Berlin, comme de celle de l’Union soviétique ».

Nicolas Sarkozy et Zine El Abidine Ben Ali, le 28 avril 2008 lors d'une cérémonie à Tunis.

Nicolas Sarkozy et Zine El Abidine Ben Ali, le 28 avril 2008 lors d’une cérémonie à Tunis.

 

DEUX POIDS, DEUX MESURES

La ligne de défense de la ministre, basée sur la politique de non-ingérence de la France dans les affaires de politique intérieure d’Etats souverains, est d’emblée questionnée par le Guardian, qui rappelle que son prédécesseur Bernard Kouchner a été l’architecte de la politique d’ingérence humanitaire. Le Temps va plus loin et se demande :« Entre le silence en Tunisie et l’appel à Laurent Gbagbo à quitter le pouvoir en Côte d’Ivoire, la politique étrangère française est-elle basée sur ‘deux poids deux mesures ?’ »

Une question que se posait déjà Time le 12 janvier. « Etant donné leur habitude à répondre rapidement aux injustices des régimes oppresseurs, la discrétion des représentants français en réaction à l’escalade de la violence en Tunisie frappe certains observateurs comme étant en effet curieuse », note l’hebdomadaire américain. « Cela contraste avec les dénonciations répétées et acerbes de Paris d’autres régimes ayant des comportements importuns ailleurs dans le monde », citant notamment les réactions françaises sur l’Iran, la Birmanie ou la Corée du Nord.

LES RAISONS D’UN SILENCE

Derrière le silence de la France face aux événements en Tunisie, Time estimait qu’ »en plus du cynisme politique, une profonde histoire commune franco-tunisienne est en jeu ». Le quotidien américain cite ainsi les racines tunisiennes de nombreuses familles françaises depuis l’ère coloniale jusqu’à nos jours. « En tant qu’ancienne puissance coloniale, la France a des relations compliquées avec la Tunisie », renchérit le New York Times. Le Guardian note ainsi que « de par son histoire coloniale, Paris a eu tendance à adopter un point de vue de propriétaire vis-à-vis de la politique au Maghreb et en Afrique de l’Ouest, mais en même temps sous Sarkozy, elle a commencé à se retirer d’un long enchevêtrement dans la région ».

Les observateurs internationaux pointent ainsi les intérêts stratégiques de la France en Tunisie. « La mainmise du pouvoir pendant vingt-trois ans du président tunisien a fait de lui un partenaire stable dans une région cruciale pour les intérêts français », note Time, qui indique par ailleurs que « la politique draconienne de Ben Ali l’a aidé à empêcher les extrémistes islamistes à opérer en Tunisie comme ils l’ont fait avec plus de succès en Algérie, au Maroc et dans la région du Sahel ». Ainsi, le Guardian note que « les analystes disent que Sarkozy préfère une ‘dictature bénigne’ en Afrique du Nord à l’alternative potentielle de régimes islamiques hostiles et déstabilisateurs, l’Algérie représentant un scénario cauchemar pour Paris ».

Le président américain, Barack Obama, le 30 novembre 2010.

Le président américain, Barack Obama, le 30 novembre 2010.

 

LE SUCCÈS DIPLOMATIQUE AMÉRICAIN

Si la presse internationale ne trouve aucune excuse à la position adoptée par la France, c’est notamment parce que les Etats-Unis, toujours « amicaux » avec la Tunisie, ont su adopter une position plus critique. Ainsi le New York Times indique que « par contraste, aidé par la divulgation de câbles diplomatiques par WikiLeaks, les Tunisiens considèrent que les Etats-Unis ont fait des déclarations plus critiques sur la corruption et l’avidité en Tunisie. Washington a également critiqué la répression contre les manifestants, et le président Barack Obama a marqué des points auprès des manifestants vendredi en saluant leur ‘courage et dignité’ et en appelant à des élections équitables ».

Une différence de ton qui s’est encore fait remarquer après la fuite du président Ben Ali vendredi. « La France, embarrassée par une complaisance sans faille face à la révolution pacifique qui est en train de se produire en Tunisie, s’est montrée, depuis le début, d’une extrême réserve, l’Elysée se contentant, vendredi soir, d’en ‘prendre acte’, une réaction tranchant avec celle du président américain, Barack Obama », notait ainsi le quotidien algérien El Watan. (Le Monde-19.01.2011.)

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Le gouvernement de transition implose

 Les Tunisiens rejettent les hommes de Ben Ali

La présence de huit ministres de l’ère Ben Ali au sein du gouvernement Ghannouchi n’a pas été appréciée par les Tunisiens, qui sont de nouveau sortis dans la rue hier pour manifester leur rejet de ce cabinet de transition, avec le soutien de la Centrale syndicale, qui en précipite la chute avec le retrait de ses trois ministres.

Sous les cris “le nouveau gouvernement ne représente pas le peuple et doit tomber. Non au RCD”, les Tunisiens ont fait part hier de leur rejet de la nouvelle équipe gouvernementale de Mohamed Ghannouchi, qui leur rappelle trop l’ère Ben Ali, selon les manifestants. Ils sont soutenus dans leur revendication par la Centrale syndicale, UGTT, qui a joué un grand rôle dans les manifestations ayant précipité la chute du président Zine El Abidine Ben Ali.
Selon son porte-parole, Ifa Nasr, la direction de l’Union générale des travailleurs tunisiens (UGTT) qui, hier, tenait une réunion extraordinaire près de Tunis, a pris la décision “de ne pas reconnaître le nouveau gouvernement”. Elle a appelé ses trois représentants au gouvernement à s’en retirer, a ajouté ce porte-parole, soulignant que ceux qui s’y refuseraient ne représenteraient qu’eux-mêmes.
Répondant à cet appel, les trois ministres lui appartenant ont démissionné du gouvernement de transition formé la veille, à la demande de leur organisation, a annoncé à l’AFP l’un d’eux, Houssine Dimassi. “Nous nous retirons du gouvernement à l’appel de notre syndicat”, a déclaré M. Dimassi qui avait été nommé la veille ministre de la Formation et de l’emploi. Dans les rues de Tunis, la police a violemment dispersé un millier de manifestants, parmi lesquels des islamistes, hostiles à la présence de membres de l’équipe du président déchu, Ben Ali, dans le gouvernement de transition formé lundi. La police a appelé les manifestants à se disperser, conformément à l’état d’urgence en vigueur qui interdit les rassemblements de plus de trois personnes, avant de tirer des gaz lacrymogènes.
Rompant avec la retenue lors d’une manifestation similaire organisée lundi, les forces de l’ordre ont aussi fait usage de leurs matraques pour disperser la foule.
Les manifestants, une centaine au départ, se sont d’abord dispersés dans les rues latérales de l’avenue Bourguiba pour échapper aux gaz lacrymogènes, avant d’y revenir plus nombreux, provoquant une nouvelle intervention très musclée de la police.   “RCD assassin”, et “On peut vivre seulement avec du pain et de l’eau, mais pas avec le RCD”, ont scandé les manifestants, dénonçant le parti du président déchu Zine El Abidine Ben Ali. “Nous refusons ce gouvernement criminel qui veut voler la révolte de notre peuple. Nous voulons un gouvernement qui représente vraiment le peuple. Nous dénonçons les partis de l’opposition fantoche qui sont maintenant au gouvernement”, a déclaré un manifestant. Les manifestations se sont ensuite étendues à plusieurs autres villes du pays. Environ 5 000 personnes ont manifesté à Sfax, la métropole économique du pays, où l’imposant siège local du RCD, le parti du président Ben Ali, avait été incendié par des manifestants, il y a quelques jours. Une autre manifestation a rassemblé “des milliers de manifestants” à Sidi Bouzid d’où est partie à la mi-décembre la révolte populaire contre le régime autoritaire du président Ben Ali.
Une marche de protestation ayant rassemblé un millier de personnes s’est produite à Regueb, à 37 km de Sidi Bouzid, selon un autre correspondant. Un rassemblement de 500 personnes, regroupant notamment des avocats et des syndicalistes, s’est tenu à Kasserine, autre bastion de la “Révolution du jasmin”. Défendant la composante de son cabinet, le Premier ministre Mohammed Ghannouchi dira sur la radio Europe1 que les ministres qui avaient servi sous le régime Ben Ali et qui ont été maintenus dans le gouvernement tunisien ont “les mains propres” et ont toujours agi pour “préserver l’intérêt national”.
Il justifiera ses choix en affirmant : “ils ont gardé leur portefeuille parce que nous avons besoin d’eux dans cette phase de construction démocratique, avec la préparation d’élections dans les six mois”, a affirmé le chef du gouvernement, soulignant le “grand enjeu de la sécurité” dans cette période de transition.
À signaler que le mouvement islamiste tunisien Ennahda a indiqué hier par la voix d’un de ses porte-parole à Paris qu’il “n’aura pas de candidat à la présidentielle” prévue dans six mois en Tunisie mais veut participer aux législatives, estimant qu’“il n’y aura pas de transition démocratique sans Ennahda”. “Rached Ghannouchi ne sera pas candidat, Ennahda n’aura pas de candidat à la présidentielle”, a affirmé à l’AFP Houcine Jaziri. Notons enfin que le Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD) tunisien a été exclu hier de l’Internationale socialiste. (Liberté-19.01.2011.)        

 Le nouveau gouvernement <br />tunisien se décompose<br /> » class= »photo » /></a></p>
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<p class=Le nécessaire compromis

Maintenant que l’ouverture est consacrée, et que le mur de la peur est définitivement tombé, il serait utopique de croire que la démocratie viendra rapidement. C’est une longue marche que vient de commencer le peuple tunisien vers plus d’acquis démocratiques.

La transition en Tunisie s’annonce difficile et délicate, et c’est le moins que l’on puisse dire. Le gouvernement d’union nationale, annoncé la veille par le Premier ministre Ghannouchi, n’aura pas tenu longtemps alors que l’opinion tunisienne continue d’occuper la rue et demande le départ de tous les symboles du régime Ben Ali.
Si le peuple tunisien a réussi à faire tomber un régime, que d’aucuns pensaient être à l’abri des changements aussi brutaux que ceux qu’il vient de subir, il n’en demeure pas moins que l’équipe chargée de gérer la transition jusqu’à la tenue des présidentielles anticipées est appelée à faire preuve de beaucoup plus de sérénité afin d’expliquer les choix politiques à une population visiblement décidée à en découdre avec le personnel politique placé par l’ancien président.
Ce qui en théorie apparaît simpliste ne l’est pas forcément sur le terrain. Entre les pyromanes qui veulent semer le désordre pour éviter que la Révolution du Jasmin puisse prendre forme, le tâtonnement de l’équipe “provisoire” au pouvoir, et les populations qui veulent   “tout et tout de suite”, il est clair que tous les ingrédients du pourrissement sont là.
Mais maintenant que l’ouverture est consacrée, et que le mur de la peur est définitivement tombé, il serait utopique de croire que la démocratie viendra rapidement. C’est une longue marche que vient de commencer le peuple tunisien vers plus d’acquis démocratiques après avoir subi la chape de plomb depuis plus de 40 ans. C’est la raison pour laquelle des compromis s’imposent en pareille situation de crise majeure afin de surmonter les difficultés du moment et permettre à la Tunisie de rebondir avec du sang neuf, énergies issues de l’opposition démocratique et de la société civile tout en sauvegardant les forces saines du Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD) qui dispose encore de ses hommes au sein des institutions et des structures de l’État. Le militantisme est primordial dans un changement mais il ne suffit pas dans la gestion des affaires de l’État. C’est le diktat de la realpolitik.(Liberté-19.01.2011.)

**Ghannouchi :
«Donnez-nous une chance»
 

Après la contestation sociale, les Tunisiens se consacrent à la chose politique. Ils sont, selon toute vraisemblance, déterminés à réussir un changement radical au sein du pouvoir. Pour preuve, les Tunisiens, jadis désaffectés pour la chose politique, suivent de très près l’évolution de la situation du pays. Au lendemain de la formation du gouvernement, des citoyens sont, de nouveau sortis dans la rue pour protester contre l’équipe désignée. Les manifestants dénoncent le maintien des quelques ministres du gouvernement de l’ancien président, Zine El Abidine Ben Ali.
Les têtes revendiquées par les citoyens sont celles des ministres de la Défense, de l’Intérieur et des Affaires étrangères. Les manifestants qui souhaitent une rupture totale avec le régime du président déchu, estiment qu’il est inadmissible que des membres de l’équipe du président déchu, soient reconduits dans le nouveau gouvernement.
Allant plus loin, les contestataires demandent carrément la dissolution du Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD), parti de l’ancien président Ben Ali. Une chose est certaine, les Tunisiens ne souhaitent pas voir les sacrifices consentis pour rompre avec le système Ben Ali partir en fumée. Le parti Ettajdid (ex-communiste) a aussi menacé de quitter le gouvernement à moins que tous les ministres qui étaient membres de l’ancien parti au pouvoir ne démissionnent.
Face à l’effervescence de la rue, le Premier ministre Mohamed Ghannouchi était obligé d’expliquer au peuple tunisien les raisons d’un tel choix. A propos du maintien dans la nouvelle équipe des ministres de Ben Ali, il estime que ces derniers ont «les mains propres». «Ces ministres ont gardé leur portefeuille parce que nous avons besoin d’eux dans cette phase de construction démocratique, avec la préparation d’élections dans les six mois», a-t-il affirmé à la radio française Europe1. et d’ajouter encore: «Tous ont les mains propres, doublés d’une grande compétence. Ils ont du mérite. Grâce à leur dévouement, ils ont réussi à réduire la capacité de nuisance de certains. Ils ont manoeuvré, tergiversé, gagné du temps pour préserver l’intérêt national». Outre ces précisions, le Premier ministre sollicite la rue tunisienne à laquelle il demande d’accorder une chance à ce gouvernement. «Donnez-nous une chance!», a-t-il lancé. Entre la dénonciation de l’opposition et les justifications des dirigeants, le gouvernement de l’Union nationale a entrepris ses premières actions. Le ministre des Affaires étrangères, Kamel Morjane, est arrivé hier en Egypte pour informer ses homologues de la situation dans son pays. Il s’agit du premier voyage officiel d’un membre du cabinet tunisien depuis la chute du gouvernement de l’ancien président M.Ben Ali. Pour sa première sortie médiatique, M.Morjane a indiqué à la presse que «le peuple tunisien a dit son mot et est sorti vainqueur de ce soulèvement populaire». Et d’ajouter: «Nous voudrions confirmer qu’il s’agit d’un gouvernement de transition: son but est clair et son mandat limité par la loi (…) Son but est de mettre en place une élection présidentielle libre (…) à laquelle participeront des observateurs étrangers». S’agissant des réformes, il a assuré qu’elles porteraient notamment sur les questions économiques et sociales. «Il y aura des réformes politiques mais aussi (des réformes) sur (…) le plan social», a dit M.Morjane, déjà membre du gouvernement en place sous le président Ben Ali. (L’Expression-19.01.2011.) 

* Israël :  » désolé du départ de notre ami Ben Ali »

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Le vice-Premier ministre israélien a affirmé que ce qui s’est passé en Tunisie aura des conséquences fâcheuses sur Israël (..), ajoutant dans son entretien, accordé à la Radio israélienne, que le danger est que le même scenario tunisien pourrait être réédité dans d’autres pays arabes, limitrophes avec Israël, ce qui pourrait nuire à ses intérêts de manière directe.

 

**Le général Seriati a planifié de prendre la place de Ben Ali avec l’aide des services secrets tunisiens

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 Une source sécuritaire responsable en Tunisie a révélé, mardi, que Ben Ali a fui le pays en hâte en compagnie de deux de ses six enfants, probablement, le fils cadet Mohamed Zine El- Abidine, 6 ans et sa fille Halima, 18 ans, ainsi que sa femme Leila, sa belle-sœur et six de ses compagnons.

 « Le président déchu n’a emmené  que ses objets personnels, voire , est même monté dans l’avion avec seulement les habits qu’il portait sur lui sans en prendre d’autres.».Cette source identifie pour la première fois les membres de sa famille qui étaient avec lui dans l’avion. Pour rappel, ce dernier n’a pas trouvé ni de pays pour l’accueillir, ni  d’aéroport où il pouvait atterrir, sauf celui de Djedda en Arabie Saoudite. D’ailleurs, le roi Abdallah a salué l’arrivée de Ben Ali et de sa famille, avant qu’il ne lui demande de garder son calme et de se retirer de la vie publique pour qu’il puisse bénéficier du titre de réfugié politique au sein de son  Royaume. Dans ce contexte, ces informations sont considérées importantes et crédibles, d’une part, parce qu’elles émanent d’une source sécuritaire tunisienne responsable. D’autre part, parce que le site de la chaîne de télévision El-Arabia a  également rapporté, mardi, ces renseignements  et assure qu’ils sont crédibles. Il est même possible de s’assurer de la crédibilité de ces derniers auprès des sources saoudiennes qui ont accueilli  le président déchu. Ces renseignements ont été rapportés de même qu’avec l’affirmation de Ben Ali d’avoir été trahi par l’un de ses hommes de confiance, à savoir le général Ali Seriati. Rappelons que ce dernier était le responsable de la sécurité, chargé de gérer le staff des gardes du corps du président Ben Ali  et de La première Dame du pays ,sa femme   depuis 8 ans.  Seriati a,  par ailleurs, fait circuler une fausse nouvelle indiquant que bon nombre de manifestants avaient pris la destination du Palais de Carthage, le vendredi soir, et que l’armée ne serait pas intervenue sur ordre du général Rachid Ammar. D’ailleurs, ce dernier a catégoriquement refusé d’ouvrir le feu sur les manifestants en contrecoup du président, pour avoir neutralisé l’armée. Cela a induit la crainte de Ben Ali pendant qu’il prononçait son dernier discours destiné au peuple tunisien. Le discours a mis l’accent sur la nécessité de prendre des décisions et des nouvelles  concessions,  notamment celle d’organiser prématurément  des élections présidentielles, d’ici 2014.Soulignant enfin que, la fausse information  rapporté par Ali Seriati a précipité le départ de Ben Ali avec seulement les habits qu’il portait..(Echorouk-18.01.2011.) 

** De puissants hommes d’affaires tunisiens, proches de Ben Ali, ont trouvé refuge en Algérie

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Les membres du Forum des chefs d’entreprises algériens ont reçu deux des plus grands hommes d’affaires tunisiens proches de la famille de l’ex-président déchu, Ben Ali. En effet, ces deux hommes d’affaires tunisiens avaient quitté , jeudi et vendredi derniers, la Tunisie pour rejoindre Annaba, puis Alger et ce, à bord d’un jet privé.L’homme d’affaires Merouane El-Mabrouk, époux de Sirine Ben Ali, fille du président déchu, a réussi à venir à Alger, en compagnie du président du groupe Hachicha, grâce aux bonnes relations qu’il entretient avec les hommes d’affaires algériens du Forum des chefs d’entreprises.      El-Mabrouk, qui se trouve dans l’un des hôtels d’Alger,  a investi dans les banques et entreprises de communications. En effet, il a réussi à obtenir, dans des conditions ambiguës , la quatrième licence de téléphonie mobile en Tunisie, en plus d’une série de grands commerces, à l’image de « Super Market Giant », qui a été brulé par les manifestants, le samedi dernier. Sa famille est considérée comme étant l’une des plus proches de la famille Ben Ali. Fethi Hachicha  a annoncé depuis quelques semaines, avant la chute de Ben Ali, que les hommes d’affaires tunisiens sont en contact permanent avec les hommes d’affaires du monde entier. Avant d’ajouter qu’ils étaient sidérés par les changements qu’ils constatèrent,  d’année en année, sur la politique générale opérée par le président Ben Ali, et à force, il est devenu un exemple qui fait parler de lui tous les hommes politiques du monde..(Echorouk-18.01.2011.)

**La famille Trabelsi a introduit en Algérie des véhicules de luxe avec de faux documents  L’activité commerciale est florissante sur la frontière algéro-tunisienne. La famille Trabelsi, notamment le gendre de l’ex-président tunisien et son neveu activent dans diverses formes de commerce. L’ouverture économique de l’Algérie a aiguisé l’appétit des Trabelsi, notamment à partir de 2002. Ces hommes prêts à tout pour de l’argent, activent en force dans le trafic de voitures de luxe, l’électroménager ainsi que le trafic d’animaux rares et les pièces d’art inestimables.Le port de Halq El-Oued en Tunisie était le lieu qui recevait des centaines de véhicules volés en Europe, notamment de France, d’Italie et d’Allemagne. Ces véhicules sont, en général, des grandes marques de luxe telles que Porsche, Mercedes et des véhicules 4×4. Ces véhicules sont introduits en Tunisie avec de faux documents sous la houlette des deux frères de Leila Ben Ali, à savoir Tarek et, leur père et leur oncle Imad Trabelsi. Pour rappel, ce dernier a été tué juste après la chute du régime de Ben Ali. Ces véhicules sont par la suite acheminés vers la Libye et la frontière Est de la Tunisie pour les introduire clandestinement sur le sol algérien. Soulignant dans ce contexte, qu’il a y actuellement pas moins de 235 voitures immobilisées au niveau de la fourrière à Bouchebka et qui ont été saisies par les Douanes algériennes. Ces véhicules  sont introduits en Algérie avec de faux documents et relèvent du business de la famille Trabelsi. Quoique les frères et neveux de l’ex-première Dame de Tunisie se sont reconvertis dans le commerce de l’électroménager, toutefois, ils ont tenté il y a deux ans d’inonder le marché algérien avec des cigarettes de marque Marlboro périmées qu’ils ont ramenées de Chine. Les services de douanes du port d’Alger ont saisi les containers dans lesquels était stockée cette marchandise. Les inculpés, tous des Algériens, ont été poursuivis en justice, alors que les commanditaires, à savoir les frères Trabelsi, s’en sont sortis. Après la mort de Tarek Trabelsi, le baron des véhicules et de l’électroménager, son frère Moez et son oncle Imad ont monté des « grandes opérations » telles que le trafic et la falsification des billets de banque. Pour rappel, cette famille a impliqué un Algérien résidant à Paris, dans l’affaire de vol de yachts appartenant à un homme d’affaires autrichien. Ces bateaux  de luxe ont été volés du port de Nice (France) et ont été acheminés vers le port de Halq El-Oued en Tunisie. Interpol a pu saisir un de ces yachts à Sidi Boussaid. Les personnes impliquées ont été poursuivies en justice. Cette dernière a innocenté les Trabelsi qui sont les véritables coupables et accusé cet Algérien résidant en France. Ce dernier est emprisonné actuellement en France. Soulignant, par ailleurs, que la famille Trabelsi a pu transformer le marché de Mouncef Bey à Tunis en une propriété privée, utilisée pour commercialiser des animaux rares tels que poissons, chiens, reconnus comme étant dangereux (Pitbull et Rodveiller). Ces espèces de chiens qui se trouvent en Algérie ont été introduites de la Tunisie. Cette famille qualifiée par les Tunisiens de « famille royale », à l’opposé de la famille Ben Ali qui active dans le secret, a envahi le monde de la musique et de l’art. En effet, elle a pu attirer en Tunisie de grands artistes tels que Michael Jackson et Maria Carey..(Echorouk-18.01.2011.)

**L’armée tunisienne a arrêté deux véhicules bourrés d’armes près des frontières algériennes 

Des sources sécuritaires bien informées ont révélé à Echorouk que les forces armées tunisiennes de la wilaya de Touzer, zone frontalière avec la wilaya d’El-Oued, ont réussi dans la nuit du lundi au mardi, à arrêter 6 membres de l’ex-garde présidentielle. Ces éléments étaient à bord de deux véhicules de type Toyota 4 x 4, remplis d’armes de différents calibres.Selon les mêmes sources, un certain nombre de citoyens avaient contacté les forces armées, les informant de la présence de deux véhicules aux mouvements suspects. Ces deux véhicules roulaient à destination de la région de Reggim Maâtouk, sise dans le Sud de Hezoua. Et c’est ainsi qu’une patrouille de l’armée tunisienne s’est déplacée à leur recherche. Un accrochage s’en est suivi entre les deux parties, et qui s’est soldé par la reddition des 6 occupants des deux véhicules. Après identification des personnes suspectes, on a découvert qu’ils étaient des éléments de la Garde présidentielle de l’ex-président Ben Ali. Ces éléments étaient vêtus en civil. Les deux véhicules ont été saisis, dans lesquels se trouvait une grande quantité d’armes tels que fusils,  pistolets, lance-roquettes de type « RPG7 », en plus d’une somme d’argent en dinars et en euros.On ne sait toujours pas pourquoi ces officiers avaient voulu prendre la fuite avec de telles quantités d’armes et d’argent à destination de la zone frontalière avec l’Algérie. En fait, c’est la deuxième fois, en mois de 24 heures, que des armes ont été saisies dans la zone frontalière entre l’Algérie et la Tunisie, du côté de la wilaya d’El-Oued..(Echorouk-18.01.2011.)

 

**Un plan de 800 voitures piégées dévoilé par Slim Chiboub, le gendre de Ben Ali 

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Slim Chiboub, l’un des gendres du président déchu, a révélé à la police que les pro Ben Ali ont piégé pas moins de 800 voitures pour commettre une série d’attentat à l’explosif à travers tout le pays, principalement à Tunis pour jeter le pays dans le chaos.Le site de la revue Le point a rapporté que Slim Chiboub qui etait à la tête du Comité Olympique Tunisien (COT) a révélé ces informations devant la police après son arrestation le samedi dernier alors qu’il tentait de quitter la Tunisie à destination de la Libye. Il leur a assuré que pas moins de 800 voitures bourrées d’explosifs ont été disséminées à travers tout le pays, principalement à Tunis. Selon lui les pro Ben Ali voulait commettre des attentats à l’explosif pour se venger et déstabiliser davantage le pays. Chiboub a accusé les dirigeants de la police tunisienne. Cette information est prise très au sérieux par l’armée, qui passe actuellement la capitale au peigne fin. Une opération délicate d’autant que l’armée redoute une situation extrême. Slim Chiboub, époux de la deuxième fille de Ben Ali, issue de son premier mariage, a longtemps fait figure de favori avant la montée en puissance du clan Trabelsi. Leïla Trabelsi, l’épouse de l’ex-président tunisien Ben Ali, lui préférait Sakher el-Materi, marié à une fille du couple Ben Ali-Trabelsi. La mésentente publique entre « la régente » et Slim Chiboub a sans doute valu à ce dernier d’être libéré samedi, il aurait été exfiltré à destination d’un pays du Golfe. Ben Ali a quitté la Tunisie vendredi après vingt-trois années passées au pouvoir.(Echorouk-17.01.2011.)

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Le clan Ben Ali, une mafia à la tête de l'Etat 

*cliquer ici:

Le clan Ben Ali, une mafia à la tête de l’Etat

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*Opposition tunisienne : les forces en présence

Ahmed Ibrahim (à gauche) et Mustapha Ben Jaâfar, deux membres de l'opposition légale, tolérée sous Ben Ali.
Ahmed Ibrahim (à gauche) et Mustapha Ben Jaâfar, deux membres de l’opposition légale, tolérée sous Ben Ali. 

- Après la fuite de Ben Ali, le chef du nouveau gouvernement d’union nationale a annoncé la légalisation de tous les partis. Opposition légale, partis interdits, lefigaro.fr fait le point sur les opposants à l’ancien parti quasi unique.

coeur- dans sociétéL’opposition légale (tolérée sous Ben Ali) :

Nejib Chebbi.
Nejib Chebbi.

Parti démocratique progressiste – Le PDP est le plus grand parti de ce qui constituait l’opposition légale. Son fondateur, l’avocat Nejib Chebbi, a été nommé ministre du Développement régional du gouvernement d’union nationale annoncé le 17 janvier. Parmi ceux demeurés en Tunisie, il était le plus connu des opposants au régime de Ben Ali. Après avoir dirigé le PDP depuis les années 1980 jusqu’à 2006, il n’a pu se présenter à l’élection présidentielle de 2009, car n’étant plus le chef d’un parti. Najib Chebbi était fréquemment la cible des forces de sécurité tunisiennes et des médias pro-gouvernementaux. Aujourd’hui dirigé par une femme, Maya Jribi, le parti a été attaqué pour son manque de fermeté car il ne réclamait pas le départ de Ben Ali.

Ettajdid (Renouveau en arabe) – Développant une ligne politique de centre gauche, le parti anciennement communiste, a vu ses membres régulièrement harcelés par les autorités sous l’ère Ben Ali. Son secrétaire général, Ahmed Ibrahim, est le nouveau ministre de l’Enseignement supérieur du gouvernement d’union nationale mais menace déjà de démissionner. Il a été candidat à la présidentielle de 2009.

Forum démocratique pour le travail et les libertés – Le FDTL, parti de gauche, rassemble notamment des intellectuels, des membres de la classe moyenne et des activistes des droits de l’homme. Il milite pour la démocratie depuis sa création en 1994, réclamant des élections libres, la libération des prisonniers politiques, une séparation entre le parti au pouvoir et le gouvernement ainsi que la liberté pour le peuple tunisien. Légalisé en 2002, le FDTL est dirigé par Mustapha Ben Jaâfar, nommé ministre de la Santé du gouvernement d’union nationale avant de démissionner. Il s’agit d’un vieil opposant et d’une personnalité respectée de la vie politique, plusieurs fois candidat à la présidentielle. On ne sait pas en revanche de quelle popularité il dispose dans l’opinion publique tunisienne.

Parmi les autres partis autorisés, on compte notamment le Mouvement des démocrates socialistes (MDS) d’Ismaïl Boulahya, le Parti de l’unité populaire (PUP) de Mohamed Bouchiha, le Parti social libéral (PSL) et le Parti des verts pour le progrès. Leurs critiques du régime déchu ont été plus que discrètes. L’Union démocratique unioniste (UDU) est le seul parti de l’opposition de façade qui a pris ses distances pendant la crise du régime.

Union générale des travailleurs tunisiens L’UGTT est une puissante centrale syndicale, la seule du pays, qui a joué un grand rôle dans la révolution du Jasmin. Elle a soutenu le mouvement et appelé à des «réformes politiques fondées sur la promotion de la démocratie et la consolidation des libertés». Mais pendant le règne de Ben Ali, la direction de l’UGTT a souvent affiché une attitude relativement conciliante à l’égard du pouvoir. Trois personnalités de ce syndicat ont brièvement intégré le gouvernement d’union nationale avant de le quitter le lendemain sur demande de l’organisation.

L’opposition interdite sous Ben Ali :

Rached Ghannouchi (photo prise en 2000).
Rached Ghannouchi (photo prise en 2000).

Ennahda (Renaissance en arabe) – Interdit jusqu’à la récente annonce de la légalisation des partis politiques, le mouvement des islamistes tunisiens est dirigé depuis son exil londonien par Rached Ghannouchi, un homonyme du premier ministre n’ayant aucun lien de parenté avec celui-ci. Ghannouchi a quitté la Tunisie il y a 23 ans mais se dit désormais prêt à revenir au pays. Son parti a été interdit au début des années 1990, accusé de menacer le régime. 25.000 de ses militants ont alors été incarcérés, d’autres quittant le pays. Aucun des membres d’Ennahda ne figure dans le gouvernement d’union nationale annoncé le 17 janvier. Le mouvement ne compte pas présenter de candidat à la présidentielle mais entend participer aux législatives. Au contraire de certains de ses voisins arabes, l’influence des islamistes en Tunisie est jugée moindre. Ghannouchi estime l’Islam compatible avec un régime démocratique multipartite et prône le dialogue avec l’Occident.

Moncef Marzouki.
Moncef Marzouki.

Congrès pour la République – Le CPR est dirigé par l’opposant historique Moncef Marzouki. Ancien président de la Ligue tunisienne des droits de l’homme et co-fondateur du Conseil des libertés en Tunisie (CNLT, non reconnu), Marzouki est condamné en 2000 à un an de prison. En 2001, il créé le Congrès pour la République puis quitte son pays pour la France où il vit dès lors en exil. Son parti est interdit en 2002. Marzouki a par le passé eu des liens avec les islamistes mais le CPR se définit comme une organisation laïque, militant pour les droits de l’homme, l’indépendance de la justice et l’organisation d’élections libres. Moncef Marzouki s’est déclaré candidat à la future présidentielle.

Parti communiste des ouvriers de Tunisie – Le PCOT est une petite formation d’extrême gauche dont les activités sont interdites dans le pays, où elle comptait autrefois des nombreux partisans à l’université. Le parti défend un régime parlementaire. Il est dirigé par Hamma Hammami qui, recherché par la police, vivait dans la clandestinité jusqu’à récemment. Il a d’ailleurs été incarcéré plusieurs heures durant la révolution du Jasmin. Le PCOT a annoncé qu’il ne présenterait pas de candidat à la présidentielle. (Le Figaro-18.01.2011.)

Les autres opposants :

Yadh Ben Achour, chargé de la réforme politique au sein du gouvernement d’union nationale, est un intellectuel ayant toujours gardé sa liberté d’esprit.

Slim Amamou, emprisonné pendant la «révolution du Jasmin», est un cyberdissident très actif. Il entre au gouvernement d’union nationale comme secrétaire d’Etat à la Jeunesse et aux Sports.

Mokhtar Trifi, chef de la Ligue tunisienne des droits de l’homme (LTDH), n’était pas reconnu par le pouvoir de Ben Ali.

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**des pistes pour remettre sur pied la Tunisie

File d'attente devant une boulangerie, le 16 janvier à Tunis.
File d’attente devant une boulangerie, le 16 janvier 2011 à Tunis. 

Des milliers de jeunes diplômés sans travail, une industrie textile à bout de souffle, des systèmes mafieux… La Tunisie doit sortir de ce cercle vicieux, recommandent les observateurs.

coeur-Une masse de chômeurs diplômés (20% des sans emplois). Un client principal, l’Europe (77% des exportations), qui va mal. De nouveaux concurrents asiatiques qui cassent les prix. Voilà dans quel état se trouve la Tunisie après 24 ans de règne de Ben Ali. Quel programme économique les futurs dirigeants du pays devraient-ils mettre en place pour relever le pays et lutter contre le chômage? Quelques pistes ont été tracées par les institutions internationales et les économistes.

• Aider les plus pauvres. «Étant donné les maigres résultats des politiques de l’emploi, il est temps pour la Tunisie de tous les revoir», critiquait en 2010 la Commission économique pour l’Afrique des Nations unies. Le taux de chômage atteint, selon des chiffres non officiels, plus de 20%. Il est particulièrement élevé parmi les jeunes diplômés. «Les ressources de l’État étant limitées, il faut mettre en place des mesures spécifiques destinées aux plus défavorisés», recommande Mohamed Ali Marouani, économiste à l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne. «Certaines régions sont délaissées, il faut y lancer des projets de développement massifs.» Autant de mesures qui auraient des effets immédiats sur l’emploi.

• Penser à autre chose qu’au textile et au tourisme. «La Tunisie est enfermée dans sa spécialisation dans le textile: il lui faut en sortir», conseille Agnès Chevalier, économiste au CEPII. Ce secteur représente près de la moitié des exportations. Pour combien de temps? La Tunisie subit une très forte concurrence des pays asiatiques, qui pratiquent des prix imbattables. Surtout, le textile n’est pas le secteur rêvé pour des diplômés d’université. De même, l’industrie mécanique, notamment les pièces détachées dans l’automobile, n’est pas un secteur très porteur, étant donné la chute prévisible des ventes de voiture en Europe, principal partenaire commercial de la Tunisie.

Le pays ne devrait pas non plus se contenter du tourisme. Le tourisme représente 5% des activités des services, lesquels comptent pour la moitié du produit intérieurs brut tunisien. «Beaucoup ont investi dans ce secteur, mais les profits sont limités: les propriétaires des hôtels se voient forcés de casser les prix sous la pression des grands tour opérateurs européens», avertit Jean-Raphaël Champonnière, économiste au CEPII. «Certains d’entre eux négocient à un euro seulement la réservation de chambre supplémentaire.»

• Développer les services et le high-tech. La solution? Il n’y en a pas à court terme, il ne s’agit là que de long terme. «Il faut investir massivement dans la recherche et développement, promouvoir les services à forte valeur ajouté», défend Mohamed Ali Marouani. Reste à trouver les secteurs de niche où la Tunisie a une carte à jouer. Certains mentionnent la chirurgie esthétique et les soins dentaires destinés aux étrangers qui veulent se soigner pas cher.

• S’affranchir de l’Europe. «Ces prochaines années, l’Union européenne pourrait importer moitié moins qu’avant la crise», prévient le Fonds monétaire international dans son rapport 2010 sur la Tunisie. Les échanges commerciaux dépendent, selon les secteurs, entre 66% et 90% de l’Union européenne, selon le Fonds monétaire international (FMI). La Tunisie pourrait développer pour cela les échanges avec les autres pays du Maghreb, très peu prisés pour l’instant. L’exemple a fonctionné dans le tourisme durant la crise de 2009 : la venue des Algériens et des Libyens, note le FMI, a compensé l’absence des Européens. (Le Figaro-18.01.2011.) 

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*Beaucoup de Tunisiens rentrent au pays

Les uns se pressent pour ne pas rater leur avion, les autres sont soulagés d’être arrivés. Mardi, le vol quotidien Marseille/Tunis de la Tunisair était plus rempli que ces derniers jours. Au comptoir de la compagnie, Rached, qui travaille depuis huit ans dans les environs de Marseille, est venu presque sur un coup de tête. «Je n’avais pas prévu d’aller à Tunis, mais ça m’embêtait trop de ne pas être là-bas», explique-t-il. À son arrivée, il fera le tour de sa famille et des connaissances. Il ira visiter son cousin «qui a reçu une balle dans une jambe au cours d’une manifestation. La police lui a tiré dessus».La Tunisie sans Ben Ali, il en fait un constat simple. «Avant, tu parlais mal de Ben Ali ou t’allais faire la prière, la police t’arrêtait. T’allais danser ou boire un coup, on te jetait en prison. Aujourd’hui on veut la liberté, être tous ensemble.»Dans la file d’embarquement du vol Tunisair, Dalila s’impatiente. «Je suis ici depuis un mois. Je suis venu voir mes enfants, mais j’avais hâte de rentrer, je me sens loin», explique cette femme élégante, retraitée d’une grande banque tunisienne.Comme beaucoup, elle ne s’attendait pas au départ de Ben Ali. Désormais, elle espère que «la révolte du peuple se transformera en quelque chose de bien». «Il y a en Tunisie une intelligentsia très importante qui n’a pas pu jouer son rôle à cause de la dictature», explique-t-elle, confiante.À l’opposé du terminal 1 de l’aéroport de Marignane, des familles de Français arrivent en provenance de Tunis, avec bagage et enfants. «On n’avait pas prévu de rentrer, indique un père de famille, résidant à Carthage. Mais avec les milices, les hélicoptères, les barrages… Et on a tiré sur la maison, alors mes filles ont eu peur». Beaucoup d’entre eux comptent attendre «que la situation se calme.» (20Minutes-19.01.2011.)******************Les pouvoirs en place au Maghreb ne sont plus invinciblesEntretien:  Amel Boubekeur. Chercheur à l’Ecole normale supérieure et à l’Ecole des études en sciences sociales de Paris.***Par quoi expliquez-vous les manifestations qui prennent place au Maghreb ? Etes-vous d’accord avec une partie de l’opinion qui lie ces manifestations avec la cherté de la vie ? Pourquoi ? Les manifestations et plus précisément les émeutes sont devenues, ces dix dernières années, un élément structurant du futur politique du Maghreb. Il y a chez les dirigeants maghrébins comme chez les médias internationaux une tendance à délégitimer le caractère politique des révoltes du Sud. Les émeutiers ne peuvent être motivés que par la faim ou manipulés par des islamistes. Le succès historique des manifestants tunisiens, vendredi, nous montre que ces soulèvements sont d’abord, dans les trois pays, le signe clair d’un rejet d’une gouvernance corrompue à qui l’on doit cette cherté de la vie. Ces manifestations expriment la volonté du peuple d’en découdre directement avec des Etats qui les ignorent. Lorsque des responsables politiques ne se sentent pas obligés de rendre des comptes à leurs citoyens et ne veulent pas reconnaître leurs responsabilités, il n’est pas étonnant que ces mêmes citoyens finissent par leur demander de partir et de rendre un pouvoir qu’ils usurpent.*Selon vous, une telle explosion était-elle prévisible ? Pourquoi ?

Oui bien sûr, les inégalités s’accroissent et aucune porte de sortie n’est prévue par les pouvoirs en place pour permettre aux peuples d’exprimer leur colère pacifiquement. Mais il y a eu quelque chose de plus décisif. Lorsque j’enquête sur le terrain au Maroc, en Algérie ou en Tunisie, je vois que les gens n’ont plus peur d’affronter l’Etat dont l’usage de la violence est totalement désacralisé tant il est récurrent. Les gens ont de moins en moins peur de parler et de descendre dans la rue. D’ailleurs, la mise en place du couvre-feu et de l’état d’urgence en Tunisie ont pour but premier de ramener la peur. Le pouvoir tunisien ne veut surtout pas d’autres manifestations et le message est clair : on vous a débarrassé de Ben Ali, maintenant rentrez chez vous.
En Algérie, le deal imposé aux citoyens à la fin des années 1990, qui consiste à accepter l’état d’urgence contre le maintien de la sécurité et la lutte contre le terrorisme, ne tient plus. Les Algériens ont le sentiment que tous ces barrages policiers sur les routes servent plus à les maintenir sous pression qu’à lutter efficacement contre la délinquance. En laissant faire casseurs et pilleurs à chaque soulèvement populaire, les autorités algériennes et tunisiennes encouragent les gens à se passer de l’Etat pour assurer leur propre sécurité. Dans les deux pays, ce sont d’ailleurs les citoyens eux-mêmes qui, désormais, s’organisent pour protéger leurs biens lors de ce genre d’évènements.

- En Algérie, certains médias n’hésitent pas, aussi, à comparer ce qui s’est produit dans le pays la semaine dernière aux événements d’Octobre 1988. Etes-vous d’accord avec un tel rapprochement ?

Janvier 2011 et Octobre 1988 ont en commun d’avoir été menées par des gamins complètements dépolitisés, qui en avaient simplement assez d’un pouvoir inique et qui ont pris la rue pour le crier. La ressemblance s’arrête là. En 1988, la situation sociale et économique était moins disparate qu’elle ne l’est aujourd’hui.  Les gens n’avaient pas grand-chose à perdre en descendant dans la rue. Aujourd’hui, une grande partie de la population reste exclue, mais un plus grand nombre d’Algériens sont dans un rapport clientéliste avec l’Etat.  Beaucoup ont bénéficié de terrains, construit des villas,  acheté de belles voitures, obtenu des crédits bancaires et ne veulent pas mettre ces acquis en danger. Ce n’est pas un hasard si, à chaque fois, la révolte part de quartiers populaires marginalisés.

- Que faut-il en déduire ?

La différence avec Octobre 1988 tient aussi au fait que l’effet révolutionnaire des émeutes a perdu de son importance.  L’espoir de 1988 a été déçu par la mise en place d’une démocratie de façade. Les émeutes en 2011 ont un côté répétitif et lassant. La manière dont l’Etat les gère, soit en redistribuant des logements sociaux soit en les ignorant (notamment à travers le silence du Président), contribue aussi à en faire un phénomène banal. Tout est fait pour que les émeutes ne s’inscrivent pas dans l’histoire politique du pays et ne soient considérées que comme de banals forfaits de délinquants.

- S’ils ne vont pas jusqu’à dire qu’elles ont été orchestrées, certains analystes pensent tout de même que ces émeutes ont été manipulées par certains centres d’intérêt, comme la maffia de l’informel. Que pensez-vous de ce point de vue ?

Qu’est-ce qui intéresse vraiment les Algériens ? La maffia de l’informel est une réalité dans leur vie de tous les jours. Ils se moquent de savoir «qui manipule qui». Ce dont ils ont besoin, c’est d’outils concrets qui leur permettent de combattre la corruption généralisée car ils en sont les premières victimes.  Ils ont besoin qu’on leur explique, en termes simples, pourquoi l’économie algérienne est irrationnelle et ce qui peut être fait pour y remédier. Les thèses des luttes de clans ou de la manipulation ne sont qu’une manière de rendre le peuple invisible et de refuser qu’il puisse avoir un impact sur les décisions prises par le gouvernement.

- Pour la première fois depuis bien longtemps, les islamistes n’ont pas pu faire entendre leur voix durant ces émeutes, comme ce fut le cas durant toute la décennie 1990. Sont-ils devenus minoritaires dans la société ? Qu’est-ce que cela peut vouloir dire, d’après vous ?

Les islamistes se sont toujours servis des émeutes pour que l’Etat les reconnaisse comme des adversaires dangereux. Ils n’ont pas un réel intérêt pour les problèmes de la population.  Cette façon de se focaliser sur Ali Benhadj doit plus être lue comme résultant de la relation particulière que ce dernier entretient avec le pouvoir. Les jeunes, de leur côté, sont juste complètement indifférents.
Au lieu de s’inquiéter de l’impact de thèses islamistes complètement dépassées, on devrait plutôt se poser la question de l’apathie politique chez les jeunes salafistes qui considèrent toujours la démocratie comme kufr mais respectent les gouvernants parce que l’Arabie Saoudite leur demande de le faire. Un point positif a été que l’Europe et les USA ont été obligés de reconnaître la caducité de la thèse du risque islamiste dans les soulèvements populaires, en Algérie comme en Tunisie. Cela représente un argument en moins dans leur manière de justifier leur soutien aux dictatures de la région.

- Finalement, à qui profitent ces émeutes ?

D’abord à la société civile qui peut trouver là l’occasion d’un vrai sursaut. Ce n’est pas assez de dire que les canaux institutionnels, tels que les partis, les syndicats et les associations, ont été détruits par l’Etat et que l’on a, par conséquent, pieds et poings liés. Il faut aussi voir ce qui se créé.
A chaque crise émergent des comités de quartiers, des collectifs de jeunes, des reportages photo ou vidéo pour dénoncer les dérives du système et bien d’autres micro-mobilisations politiques qu’il faut accompagner. Les émeutes profitent ensuite très clairement au Maghreb. Il y a un sentiment de solidarité  et d’espoir qui fait peur aux gouvernants. Pendant que les chaînes du monde entier diffusaient la chute de Ben Ali, la télévision nationale programmait un documentaire sur les jardins… Il est vrai que ce les Algériens craignent que les Tunisiens ne soient pris dans la même logique autoritaire que celle qui a suivi Octobre 1988. Néanmoins, ce qui vient de se produire en Tunisie envoie un message très clair : oui, les pouvoirs en place ne sont pas invincibles ; oui, le peuple peut changer les choses lorsqu’il s’unit sur un minimum de demandes communes.

- Comment, selon vous, la situation va-t-elle évoluer en Tunisie ? La fuite de Ben Ali marquera-t-elle la fin du «système Ben Ali» ?

Je l’ai dit plus haut, la situation prend un tour sécuritaire. Le système Ben Ali va bien au-delà de sa personne. Je pense que le RCD, en tant que structure politique, ne lui survivra pas, mais la prégnance de la police et des gens du ministère de l’Intérieur se vérifie chaque heure un peu plus depuis sa chute. Ce n’est pas tant le changement au pouvoir des personnes qui fera la différence avec le maintien de gens comme Fouad Mbaza (le président de la Chambre des députés) et Abdallah Kallel (président de la Chambre des conseillers et ancien ministre de l’Intérieur), responsable de nombreux cas de torture. Cette option n’a pas été proposée aux Tunisiens. Le rôle de l’Europe et des USA va être ici déterminant. En refusant d’accueillir Ben Ali, Paris peut envoyer un message fort aux autres dirigeants de la région. Les USA, de leur côté, devraient encourager l’Arabie Saoudite à livrer Ben Ali à la justice internationale et ne pas cautionner l’impunité.  Même si on essaie de les en dissuader en les persuadant que ce qui compte, c’est l’avenir démocratique du pays, les Tunisiens ne veulent pas en rester là et comptent beaucoup sur le retour des richesses volées.

- A votre avis, pourquoi les manifestations en Algérie n’ont pas eu autant de souffle que celles qui ont eu lieu en Tunisie ? Y a-t-il vraiment lieu de faire un rapprochement entre les deux cas ?

On a parlé du rôle différent de l’armée tunisienne et de son refus, lors des émeutes, d’ouvrir le feu sur les civils. En Algérie, son rôle est plus ambigu. Avec l’importance de Ben Ali et de sa famille dans la gestion des affaires économiques et politiques du pays, le pouvoir, en Tunisie, était bien plus lisible et moins diffus qu’il ne l’est en Algérie. Les manifestants hèlent l’Etat «ed-doula». Les ministres éclaboussés par des affaires de corruption sont renvoyés, remplacés puis oubliés. Il faudrait que les contestations, en Algérie, soient beaucoup plus précises dans leurs cibles et qu’enfin les gens au pouvoir prennent leurs responsabilités dans l’échec du pays. (El Watan-16.01.2011.)

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Bio express :

**Amel Boubekeur est chercheur à l’Ecole normale supérieure et à l’Ecole des études en sciences sociales à Paris. Spécialiste du Maghreb et des questions d’Islam en Europe, elle a également été chercheur au Carnegie Middle East Center à Beyrouth et au Center for European Studies à Bruxelles.

Actuellement, Amel Boubekeur prépare, en collaboration avec Olivier Roy, un livre qui a pour titre Whatever happened to the islamists ?, qui sera publié par Hurst/Columbia.
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**Le syndrome tunisien…. (Edito)

Les événements de Tunisie et l’extension des foyers de contestation dans plusieurs pays arabes seront au centre du sommet économique et social des chefs d’Etat de la Ligue arabe qui s’ouvre aujourd’hui dans la station balnéaire de Charm El Cheikh en Egypte. Faudra-t-il attendre quelque chose de ce nouveau rendez-vous des dirigeants arabes au plan de la coopération interarabe, qui reste marginale et en total déphasage par rapport aux discours et aux engagements pris solennellement à l’occasion des précédentes assises, dont la dernière rencontre s’est tenue au Koweït il y a deux ans ? Bien qu’il s’agisse d’une rencontre à caractère économique et social, il sera difficile, au regard de l’actualité tragique que traversent certains pays arabes, de faire l’impasse sur la dimension politique du vent de contestation qui balaie le monde arabe. Remarque pertinente du ministre des Affaires étrangères du Koweït,  Mohammad
Al Sabah, qui rappelle fort opportunément que «face aux insurrections, les citoyens arabes se demandent si les régimes arabes actuels peuvent répondre à ces défis de manière dynamique». «Les régimes peuvent-ils répondre aux souffrances du citoyen arabe ?», s’est-il interrogé lors des travaux préparatoires des chefs de la diplomatie arabe.

Le spectre des changements politiques intervenus en Tunisie à la suite du renversement, dans les conditions que l’on sait, du régime de Zine El Abidine Ben Ali, planera sans doute sur les travaux de ce sommet. A la suite des convulsions sociales enregistrées en Tunisie et en Algérie avant de se propager comme une traînée de poudre dans plusieurs pays arabes, les dirigeants arabes, pour prévenir ou endiguer des mouvements sociaux, se sont empressés de baisser les prix des produits de consommation de base, comme l’avait fait l’Algérie. Une recette qui semble avoir porté ses fruits. Mais jusqu’à quand ? Le malaise social est toujours là. Les causes structurelles qui l’ont généré et entretenu sont loin d’avoir disparu avec l’action de régulation des prix décidée par les pouvoirs publics, qui ne s’inscrit pas dans le cadre d’une politique réfléchie mais d’une démarche politique, dictée par la conjoncture sociale explosive. Il est symptomatique de relever, aujourd’hui, que les revendications des peuples arabes ont fondamentalement changé. Y compris dans les pays présentés comme les plus pauvres du monde arabe, à l’instar du Soudan où des manifestations ont également éclaté, demandant le départ du «régime totalitaire de Khartoum». La même soif de changement démocratique est également exprimée par les Yéménites et dans d’autres capitales arabes qui se sont mises à l’heure tunisienne. Ce qui s’est passé en Tunisie est la preuve par la rue que même les régimes les plus autoritaires qui se sont maintenus au pouvoir par la force et la répression n’y pourront rien contre le souffle du changement et de la liberté des peuples. Les dirigeants arabes ont-ils l’intelligence et la volonté sincère d’entamer des réformes pour se mettre au diapason des aspirations populaires et de l’histoire ? Après la chute du mur de Berlin, le vent de la démocratie a soufflé partout, dans les ex-Républiques de l’Est, en Afrique, en Asie… Les dirigeants arabes, quant à eux, continuent à faire de la résistance. L’épisode tunisien gagnerait à être sérieusement médité. (El Watan-19.01.2011.)

**La formidable révolution démocratique du peuple tunisien a balayé la sanguinaire dictature de Ben Ali.

Ben Ali et son clan sont chassés du pouvoir. La formidable révolution démocratique du peuple tunisien a balayé la sanguinaire dictature de Ben Ali. Les Tunisiens se sont libérés de la peur, ont affronté à mains nues  les forces de la répression…
Ce que vit la Tunisie, en ce début d’année 2011, restera, dans  l’histoire contemporaine de la Tunisie et du monde arabe, comme un fait majeur. C’est un bouleversement sans précédent. Le rapport entre les pouvoirs et les sociétés ne sera plus identique. L’autoritarisme n’est plus une fatalité pour nos  peuples. La révolte pacifique est possible — elle est le passage obligé pour changer l’ordre des choses. Les Tunisiens ne voulaient pas se laisser, encore une fois, embobiner par les promesses de Ben Ali sur des réformes, pourtant réclamées de longue date.  

Ben Ali, c’est l’histoire d’un pouvoir sans partage en Tunisie depuis 23 ans. Mais c’est aussi une histoire qu’on peut vérifier dans presque l’ensemble des pays arabes. Les Tunisiens viennent d’administrer une leçon à tous ceux qui considèrent que nous ne sommes pas prêts pour la démocratie et que le maintien du statu quo est une nécessité absolue pour empêcher les islamistes d’accéder au pouvoir. Une vision simpliste, accommodante… Pour les autorités algériennes, c’est un camouflet d’une exceptionnelle intensité. Le système politique tunisien, tenu d’une poigne de fer, une répression aveugle, un mépris des droits de l’homme, un cynisme inégalé, était pourtant le modèle…

Que va-t-on faire à présent en Algérie, alors que Ben Ali est chassé du pouvoir par la rue ? Accentuer la répression en interdisant l’expression politique pacifique — comme on vient de le faire pour la marche du RCD — ou alors changer de cap définitivement en écoutant la voix de la raison, en engageant le pays sur la voie de la démocratisation et de la réforme politique ?  Les Algériens se révoltent, à intervalles réguliers, de manière bruyante et parfois violente. Ce sera toujours ainsi si les dirigeants ne prennent pas la mesure de ce qui, en profondeur, agite notre société. La révolte populaire des Tunisiens est à présent le nouveau phare du monde arabe. (El Watan-15.01.2011.)

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**La chute de Ben Ali et de sa femme Leïla Trabelsi pourrait donner un grand bol d’air à l’économie tunisienne.

Une employée décompte des billets de banque tunisiens à la Banque centrale.
Une employée décompte des billets de banque tunisiens à la Banque centrale.

La chute de Ben Ali et de sa femme Leïla Trabelsi pourrait donner un grand bol d’air à l’économie tunisienne. Corruption et spoliation étaient monnaie courante.

coeur-Les clans de l’ex-président Ben Ali et de sa femme Leïla Trabelsi ont tenu d’une main de fer jusqu’au bout l’économie de la Tunisie. Leur fuite devrait donner une plus grande liberté aux chefs d’entreprise qui craignaient comme la peste «la Famille», comme ils surnommaient le pouvoir, en référence aux films évoquant la mafia.

«La famille élargie du président est fréquemment présentée comme le carrefour de la corruption en Tunisie», écrit un diplomate américain dans un mémo publié par WikiLeaks et Le Monde. «Expropriation», «extorsions de pots-de-vin», le fonctionnaire énumère les cas d’abus de pouvoir flagrants dans une note datée de juin 2008 et intitulée «ce qui est à vous est à moi».

La voracité des Trabelsi

 

«Ces personnes étaient présentes dans beaucoup de secteurs, ils ponctionnaient les profits des entreprises et ont réduit par conséquent la capacité de ces dernières à investir», note Jean-Raphaël Chaponnière, économiste à l’Agence française pour le développement (AFD). Moins d’investissement, c’est moins de croissance et moins d’emploi.

Pour échapper à la voracité des Ben Ali et des Trabelsi, les entrepreneurs avaient adopté un leitmotiv, «rester petit», rapporte Béatrice Hibou, économiste au CERI-Sciences Po. «Les chefs d’entreprises disaient avoir peur d’investir et de grandir. Si c’est vrai, alors le départ des clans devrait entraîner une reprise de l’investissement», ajoute la chercheur, qui avance aussi d’autres explications à ce phénomène, comme le maintien du contrôle des sociétés par la famille de l’homme d’affaires. Et la volonté de ne pas ouvrir les comptes.

Impôts arbitraires

 

Après 24 ans de règne de Ben Ali, la Tunisie se caractérise «par le nombre extrêmement faible de grandes (0,4 % du total des entreprises) et même de moyennes entreprises (0,3 % ou 1,7 %)», relève Béatrice Hibou. Même «le plus grand des groupes tunisiens, Poulina, est en réalité un conglomérat de 71 filiales pour 6 000 salariés seulement.»

Le pouvoir ne se contentait pas de spolier. Il utilisait aussi le fisc pour remercier ou punir. «Les impôts étaient prélevés de façon très arbitraire: si vous n’étiez pas en odeur de sainteté à Carthage, vous essuyiez un redressement fiscal ; si vous étiez un ami, vous ne payiez pas d’impôts», relève ainsi Mohamed Ali Marouani, économiste à l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne.

Les sociétés étrangères n’échappaient pas à la règle: «tout le monde est passé à la caisse!», dénonce un ancien ministre du prédécesseur de Ben Ali, Habib Bourguiba, et «exilé volontaire» à Paris. «Le pouvoir se servait sans retenue, c’est même ce qui a tué le régime», ajoute Catherine Graciet, auteur d’une enquête sur la femme de Ben Ali, Leïla (La Régente de Carthage).

«Des temps incertains»

 

Pas sûr toutefois que la disparition de cette quasi-mafia permette un rebond spectaculaire des investissements. «Avec l’évènement mouvementé de la démocratie, nous entrons dans des temps incertains peu propices aux investissements», prévient Jean-Raphaël Chaponnière, économiste à l’Agence française pour le développement (AFD). L’agence de notation Moody’s a d’ailleurs dégradé la note du pays ce mercredi. La corruption, d’après de nombreux observateurs, devrait survivre à la dictature, bien qu’à une moindre échelle. (le Figaro-19.01.2011.) ***

 

 

 

 

 

 







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